Samedi 4 juillet 2015, 16h30. À Bonn, les délégués de l’Unesco, après avoir entendu l’avis d’un expert et après en avoir débattu, tranchent en faveur de l’inscription des Climats du vignoble de Bourgogne au patrimoine mondial. Au même moment, à Dijon, Alain Millot, le maire de Dijon, entouré de quelques élus et de journalistes dans les cuisines médiévales du palais des ducs de Bourgogne où les débats sont retransmis en direct, arbore un large sourire. Cette victoire est le fruit d’un travail collectif, porté par l’association pour l’inscription des Climats du vignoble de Bourgogne au patrimoine mondial de l’Unesco, présidée par Aubert de Villaine, propriétaire du prestigieux domaine de la Romanée Conti, situé à 20 kilomètres de Dijon. Mais l’initiative de ce projet couronné de succès après dix ans de travail est à porter au crédit d’un élu, François Rebsamen. Après un entretien avec son homologue de Mayence, en Allemagne, où le vignoble de la vallée du Rhin figure déjà sur la liste de l’Unesco, le maire de Dijon est convaincu que la Bourgogne a toutes ses chances. Il persuade sans mal son homologue beaunois Alain Suguenot. L’inscription à l’Unesco, par l’ampleur des enjeux qu’elle porte et la défense et la valorisation du patrimoine culturel, au sens large du terme, dépassent largement les clivages politiques.
Le portage politique du projet des Climats illustre l’importance du rôle que jouent les élus des territoires concernés en matière de valorisation du patrimoine viticole. Même en Bourgogne, dont la réputation des vins n’est plus à faire mais qui subit la concurrence des autres régions viticoles de France, d’Europe et du monde. La destination « Bourgogne » méritait par exemple d’être valorisée aux yeux de voyageurs qui, désormais, comparent aisément les offres touristiques. C’est pourquoi la ville de Dijon, après l’avoir initié, a soutenu jusqu’à son terme le projet d’inscription des Climats, qui lui a par ailleurs offert l’opportunité de se repositionner à sa juste place, celle d’une « ville viticole » qui a joué un rôle déterminant dans l’histoire de la construction du vignoble de Bourgogne. C’est pourquoi elle travaille aujourd’hui, en partenariat avec les autres collectivités et les professionnels de la Côte viticole, sur le jalonnement et la signalétique de la route des grands crus, dont le point de départ est situé au cœur de Dijon.
Mais le soutien au patrimoine viticole se traduit par bien d’autres actions, dans le cadre d’une politique volontariste visant à doper le rayonnement et l’attractivité de Dijon. Le Grand Dijon a ainsi, en novembre 2013, acquis un domaine viticole de huit hectares, situé sur le plateau de la Cras. Cette opération originale, montée en partenariat avec la chambre d’agriculture, a permis d’installer sur le site un jeune viticulteur formé dans un domaine de la Côte de Nuits, Marc Soyard, qui ne manque pas d’ambition pour les « coteaux de Dijon ». La ville, pour sa part, a confié au Jardin des sciences, qui fédère le muséum d’histoire naturelle, le jardin botanique et le planétarium, structure municipale dédiée à la vulgarisation de la culture scientifique et de promotion de la biodiversité, le soin de mettre en œuvre le projet de création d’un conservatoire du pinot noir, parmi d’autres initiatives à conduire sur le site (truffière, ruches, verger, forêt des enfants…). Les vignes de la Cras, au cœur d’un domaine naturel et agricole de 160 hectares, s’inscrivent dans la stratégie de la communauté urbaine visant à protéger l’agriculture péri-urbaine, condition indispensable au développement des circuits courts, à favoriser le rapprochement entre les urbains et leur environnement et à positionner Dijon comme une référence écologique en France. Là encore, si l’opportunité s’est présentée, ce sont bien les élus, et au premier chef le maire et président, qui ont voté l’acquisition foncière et ont porté, ensuite, un projet politique fort.
Le domaine de la Cras, où le Grand Dijon a organisé dès septembre 2014 la première édition de « vendanges citoyennes » permettant aux habitants de s’impliquer dans un temps fort de la vie de l’exploitation, n’est qu’un des vignobles implantés sur le territoire de la communauté urbaine. Dans sa communication, le Grand Dijon ne manque jamais de rappeler qu’il est produit du vin sur la colline des Marcs d’Or, à Chenôve, à Marsannay-la-Côte, mais aussi à Talant ou à Daix. Et que le patrimoine de Dijon mais aussi de Chenôve par exemple, avec le pressoir des ducs, rappelle le poids du vin dans l’histoire de la cité. C’est le sens du projet confié par le maire à l’office de tourisme de Dijon, qui va proposer aux visiteurs, dès la fin 2015, une visite guidée de la ville sur le thème du vin, faisant étape dans tous les lieux symbolisant la ville viticole : la fontaine du Bareuzai, le cellier de Clairvaux, témoin du rôle majeur des moines cisterciens, les cuisines ducales et l’échansonnerie du palais des ducs, souverains qui prirent la décision d’imposer le pinot noir comme unique cépage en Bourgogne dès le XVe siècle, ou encore l’hôtel de Vogüé, qui incarne le rôle économique joué par les grands notables de l’époque des États de Bourgogne… Cette lecture du patrimoine architectural dijonnais à travers le filtre de l’histoire viticole explique que le secteur sauvegardé de 96 hectares soit inscrit dans le périmètre des Climats du vignoble de Bourgogne.
Ce cœur de ville, les élus dijonnais le défendent sans relâche par des actions fortes : piétonisation, implantation d’œuvres d’art contemporain, transformation d’anciens bâtiments publics en espaces commerciaux, soutien aux initiatives commerçantes, transformation du musée des Beaux-Arts… et accompagnement des professionnels de l’hôtellerie et de la restauration, qui misent aujourd’hui sur le centre-ville en créant ou en rénovant leurs établissements. L’autorisation d’ouvrir des terrasses plus tard le soir, accordée par François Rebsamen dès son élection en 2001, est, de ce point de vue, symptomatique et certainement pas anecdotique : l’animation du cœur de ville est une priorité, qui débouche sur une vitalité commerciale sans précédent, se traduisant par exemple par la multiplication des bars à vins, des cavistes et des bonnes tables accordant une place de choix aux vins de Bourgogne sur leurs cartes. Le projet de la Cité internationale de la gastronomie et du vin sera la prochaine étape de cette ambitieuse politique de redynamisation du centre-ville : cet ensemble à vocation économique, touristique et culturelle mettra l’accent sur le vin, par volonté de la ville, identifiée par l’État, au sein du réseau des cités de la gastronomie, comme la « ville spécialiste du vin », grâce à la création d’une grande vinothèque et d’un espace d’interprétation des Climats sous les voûtes d’une chapelle du XVIIIe siècle.
Les élus de la ville de Dijon et du Grand Dijon, convaincus de l’importance de la vigne et du vin dans l’histoire et l’économie de l’agglomération, travaillent en partenariat avec de nombreux acteurs locaux sur la question de la valorisation du patrimoine viticole. La ville n’a ainsi jamais relâché son soutien à la chaire Unesco « Cultures et traditions de la vigne et du vin » de l’université de Bourgogne, la seule au monde spécialisée sur ce sujet. Elle soutient également, sur le plan logistique ou financier, l’organisation d’événements tels que la Saint-Vincent tournante des Climats, qui a connu un succès considérable en janvier 2012, le colloque Vino Bravo, organisé par un magazine national à la salle des États de l’hôtel de ville en décembre 2014, ou le salon Vinidivio, dans le cadre de la foire internationale et gastronomique, chaque année depuis 2013. Autant de manifestations qui contribuent à conforter un positionnement et une image reposant sur une réalité historique et économique indéniable : Dijon ville viticole et capitale du goût.