Le vinho verde

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Introduction

La Région délimitée des vinhos verdes (rdvv) est l’une des plus grandes régions viticoles européennes. Elle a été définie en 1908, et ses contours n’ont quasiment pas connu de modification depuis cette date. Quand on se réfère à des périodes antérieures à la création de la rdvv, on emploie généralement Entre-Douro-et-Minho pour désigner la région de production du vinho verde, le Douro étant le grand fleuve ibérique qui se jette dans l’Atlantique en aval de Porto et le Minho celui qui marque la frontière au nord entre l’Espagne et le Portugal1. La production actuelle est de plus de 900 000 hl en 2017 et est composée majoritairement de vins blancs. Cette prédominance du vin blanc n’a, cependant, qu’une quarantaine d’années : jusqu’aux années 1980, le rouge dominait. Le vinho verde (blanc) est devenu un grand produit d’exportation, présent sur des marchés de plus en plus nombreux : la part exportée est désormais supérieure à la part vendue sur le marché national.

Les questions que pose ce vignoble sont nombreuses et certaines sont inédites dans l’histoire générale de la vigne et du vin. Tout d’abord, s’agit-il d’un vignoble ou qu’est-ce qui fait un vignoble, au-delà de la définition minimale d’étendue plantée de vigne ? La question de l’identité vitivinicole de la région n’est pas en cause. On a affaire à une région démarquée, dont la définition réglementaire remonte au début du 20e siècle, qui possède des traits propres connus depuis des siècles –caractéristiques physiques, lot de cépages autochtones, goût –, très différents des autres vignobles portugais. Mais ce vignoble est resté jusqu’à il y a peu pour l’essentiel un « vignoble paysan »2, où « il n’y a pas de vignes mais [où] tous les agriculteurs sont vignerons »3, où la vigne pousse autour des champs et sur les chemins, sans surface affectée, sans viticulteurs et avec peu de connaissance et de technicité.

La survivance de ce vignoble septentrional de la péninsule ibérique a étonné les géographes4. Désormais, c’est le succès contemporain du vinho verde qui surprend : comment une production viticole de type ancien n’a pas été ruinée par la spécialisation des territoires ruraux et par le développement dans d’autres régions du Portugal d’une viticulture méditerranéenne bénéficiant de meilleures conditions naturelles. Elle semble même ne pas avoir été affectée par la mondialisation et un de ses effets, la standardisation des goûts et des vins, mais au contraire, stimulée, jusqu’à connaître un développement notable à l’exportation. Pour autant, le vignoble a connu dans sa longue histoire nombre de changements et a depuis une cinquantaine d’années considérablement modifié ses méthodes de production.

Son histoire s’entrelace avec celle du Portugal, à commencer par la Reconquête chrétienne. Si l’on ne s’en tient qu’à l’histoire récente, les guerres coloniales puis la perte des colonies, l’émigration de dizaines de milliers de ruraux portugais du nord, l’adhésion du Portugal à la cee sont autant de jalons importants qui ont exercé une influence sur ce qu’est aujourd’hui le vinho verde. Les transformations sociales et culturelles que le Portugal a connues après le 25 avril 1974, son entrée dans la modernité consumériste et la démocratie ont fortement affecté le rapport que les Portugais, à commencer par ceux de la région des vinhos verdes, ont avec leur vin. D’une façon générale, dans la rdvv, la construction de l’histoire du vinho verde et du sens qu’elle revêt concerne tous les acteurs du vin, y compris les consommateurs, ce qui constitue un terrain favorable pour son développement mais aussi un environnement très idéologisé.

Doit-on parler de vinho verde ou de vinhos verdes ? La première confrontation est celle de la couleur : le blanc, qui domine la production depuis les années 1990, et le rouge, majoritaire jusqu’à cette date, ont des situations contemporaines et des destins bien différents. Si le regard est diachronique, il est difficile de concilier l’image des maduros de Monção, exportés vers l’Angleterre et l’Europe du nord dès le Moyen-Âge et celle du « verjus » dont parle Henri Enjalbert en 19505. L’opposition entre vins populaires et vins seigneuriaux, si souvent mentionnée, devra être mieux étayée si l’on veut dissiper ce mystère.

Enfin, dans un marché mondialisé, la question des influences et des modèles est posée. La France est inévitablement le pays auquel les historiens du vinho verde et les producteurs font le plus souvent référence. Le modèle français questionne l’inexistence de terroirs reconnus dans une région viticole très vaste où il n’existe qu’une appellation générique, les neuf sous-régions n’ayant pas développé d’appellations particulières. Les discordes actuelles autour du cépage alvarinho, appelé à être prochainement produit et affiché dans toute la région, et non plus seulement dans la sous-région Monção-Melgaço, posent crument la question de la différentiation des vinhos verdes.

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Les enjeux de l’histoire

Il s’agit, dans cet article, non seulement d’écrire l’histoire du vinho verde mais aussi de réfléchir aux sens que lui donnent tant ceux qui produisent aujourd’hui ce vin que ceux qui l’étudient. Il y a sans doute peu d’endroits au monde où la construction de l’histoire d’un vignoble revêt autant d’importance aux yeux des acteurs contemporains du vin. Ce n’est pas une histoire consensuelle ou sereine et les tentatives visant à la mettre au service d’intérêts, par ailleurs légitimes, sont nombreuses. Il existe une vision « moderniste » de l’histoire du vinho verde qui oppose le développement récent du vignoble à la médiocrité de son passé. Certains viticulteurs veulent, au contraire, établir que les démarches actuelles ne sont qu’un retour à une qualité qui a déjà existé. L’évolution des pratiques viticoles et vinicoles viserait la restauration d’une grandeur tombée dans l’oubli. Au centre de cette confrontation, des intérêts économiques collectifs qui mobilisent autour de la production du vinho verde, de l’évolution du vignoble et du développement de son exportation, les collectivités territoriales, les caves coopératives, les producteurs organisés ou non, et la Commission de viticulture de la Région des vinhos verdes (cvrvv). Tous ont à cœur d’assurer la promotion de ce vin et sa réputation dans un marché désormais mondialisé. L’ancienneté du vignoble devient ainsi un passage nécessaire pour affirmer sa légitimité. La référence à son origine romaine – probable, mais encore mal étayée –, au rôle des ordres monastiques et, tout particulièrement, à celui des cisterciens venus de Bourgogne, la démonstration de la qualité des vins produits entre le Moyen-Âge et le 19siècle, les prouesses – en degré d’alcool ou en capacité à vieillir – de certains vins relèvent de ces enjeux.

Il existe aussi un sujet indistinct qui a à voir avec une identité culturelle profonde. Tout se passe dans un cadre historique défini : la région des vinhos verdes est le berceau du Portugal, né, dans cette province septentrionale du refus de l’Espagne toute proche. Il n’est fait, ainsi, que très rarement référence à la Galice voisine qui présente pourtant, à quelques dizaines de kilomètres, des vins très ressemblants, fruits de conditions physiques et humaines et d’une histoire comparables6. La région a aussi, au sein du Portugal, une identité propre, manifeste dans les paysages, façonnés par la viticulture, dans les musiques, dans les « mœurs » et des façons de parler reconnaissables par tous. Jean-Robert Pitte écrit, à propos des personnalités différentes du bordeaux et du bourgogne : « Ils vont ressembler non seulement à leur environnement physique, mais à leurs producteurs et surtout à leurs clients et aux négociants qui les approvisionnent. »7 Alors, le vinho verde ressemble-t-il au Minho ? Et qui, de la province ou du vin, a le plus façonné l’autre à sa ressemblance ?

Commençons par le nom. Le sens même de « verts », attesté depuis le 16e siècle8 fait débat. Aux vinhos verdes s’opposent les vinhos maduros (vins mûrs), expression vague, proprement portugaise, qui ne s’emploie plus guère qu’en référence aux vinhos verdes ou dans la région où ces derniers sont produits9. Elle réunit dans un même ensemble des vins très différents dont les caractéristiques communes sont d’être produites en dehors de la Région délimitée des vinhos verdes, et d’avoir une teneur alcoolique supérieure à ces derniers. Par extension, les vins français, par exemple, sont aussi présentés comme des vinhos maduros. Maduros ne se comprend et n’existe donc que dans l’opposition à verdes. Et verdes dit l’idiosyncrasie régionale dans l’ensemble portugais et ibérique, et à plus forte raison européen, voire mondial.

Verdes renvoie-t-il au paysage verdoyant du nord-ouest, comme le voudrait une vision anodine, volontairement apaisante, des oppositions entre le nord et le reste du pays ? Si certains viticulteurs revendiquent ce nom, d’autres, au contraire, le perçoivent comme péjoratif, évocateur de raisin peu mûr et de vin acide. Plusieurs questions se posent : la région a-t-elle également produit dans le passé, à côté des vinhos verdes des vinhos maduros ? Et où commencent les verdes, où s’arrêtent les maduros ?10 Plus qu’une opposition radicale, il y aurait une gradation entre ces deux types de vin, comme certains œnologues l’ont défendu dès la fin du 19e siècle et comme la référence ancienne aux maduros de Monção l’atteste. Et du fait de l’évolution des techniques culturales et de vinification, mais aussi du réchauffement climatique, l’opposition verdes/maduros a-t-elle toujours du sens ?

Si l’intérêt pour l’histoire du vin est partagé par nombre de personnes, la mission spécifique des historiens apparaît, quant à elle, délicate. Le grand spécialiste de l’histoire du vinho verde qu’est António Barros Cardoso rappelle utilement : « L’histoire ne peut pas dépendre du fait que le moment se prête ou non au traitement de tel ou tel sujet. L’histoire ne doit être l’otage que du seul passé. Elle doit conserver sa distance vis à vis des intérêts commerciaux, économiques, régionaux du moment. »11 Or, pour l’historien du vinho verde, les difficultés sont nombreuses. Étudiant dans les années 1970 le Portugal méditerranéen12, Albert Silbert signalait d’emblée les lacunes des sources. Plusieurs auteurs relèvent l’insuffisance des sources archéologiques nécessaires pour fonder de façon irréfutable l’origine romaine du vignoble. De même, la composition de l’encépagement régional ancien est mal connue13. On en est réduit aux conjectures sur des questions aussi fondamentales que la couleur dominante du vin ou le mode de conduite de la vigne pendant le Moyen-Âge et l’époque moderne. Quarante ans après Albert Silbert, c’est moins l’inexistence des documents que regrette António Barros Cardoso que le manque de moyens – surtout humains – des services d’archives pour les traiter.

Aux origines

L’histoire commence par la géographie

François Guichard définit de façon synthétique les conditions naturelles qui ont fait le vinho verde : il est « produit par les vignes hautes des terres granitiques humides du Nord-Ouest »14. On ajoutera au mode de conduite, aux sols et au climat les caractéristiques spécifiques de cépages autochtones. L’Entre-Douro-et-Minho a des conditions climatiques marquées : des pluies abondantes, des brouillards fréquents et une courte sécheresse estivale, dont la durée augmente entre le littoral et l’intérieur. Pour cette vigne septentrionale plantée fréquemment dans des sols humides, le tuteur est indispensable pour assurer la maturation du raisin. Ce seront l’échalas, le palissage, la treille de hauteurs diverses, et, le plus fréquemment, le hautain. Le tuteur est aussi induit par l’exiguïté de l’espace agricole dans une région où le relief est « peu élevé mais très accidenté »15 et où la pression démographique est constante. Le lecteur français sera sans doute surpris par l’importance accordée dans cet article aux modes de conduite de la vigne. Nulle part ailleurs, sans doute, la qualité des vins et leur personnalité propre n’ont autant dépendu de leur tuteur.

Mais si les facteurs physiques sont caractéristiques et déterminants, ils n’épuisent pas pour autant la spécificité culturale et culturelle du vinho verde. L’évocation du cidre, à propos du vinho verde, en est un exemple : « Le pain est de maïs, la broa, le vin est vert, léger, acide et frais, comme une espèce de transition vers les boissons de l’Europe moyenne, bière ou cidre »16, écrit Orlando Ribeiro. François Guichard, fait une remarque assez similaire : « ce vinho verde dont la légèreté et l’acidité ne sont pas sans rappeler le cidre d’autrefois »17. Il y a chez ces deux géographes comme un étonnement devant l’existence même de ce « vignoble septentrional » de la péninsule ibérique, au point de trouver au vin une ressemblance avec le jus fermenté de la pomme. C’est donc aussi du goût des Hommes qu’il s’agit, et de leur représentation de ce qu’est le vin.

Romains ou abbés ?

L’ancienneté du vignoble du nord-ouest, avant même les Romains, est, comme nous l’avons vu, une célébration nécessaire dans sa quête de légitimité. On peut ainsi lire dans un recueil d’articles (de qualité) consacrés au vinho verde : « C’est depuis des temps ancestraux, avant même les Romains, que l’on fait du vin dans ce qui est aujourd’hui la région délimitée des vinhos verdes (rdvv) mais ce sont précisément ces derniers qui ont amélioré les anciennes méthodes de culture, telles que la taille, qui ont sélectionné les cépages, qui ont procédé à la diffusion de la vigne dans les territoires conquis et qui ont consacré aux techniques de vinification une littérature significative. »18 Ou, dans les Actes du 1er Congrès international consacré aux vignes et aux vins : « Nous pouvons affirmer avec quelque certitude que le vin a été consommé à l’époque préromaine, mais seulement par les élites. »19 On lit aussi fréquemment que le vin a été introduit au Portugal par les commerçants phéniciens, grecs, crétois, étrusques, etc.20 Cependant, les textes prouvant l’origine romaine ou préromaine du vinho verde restent rares. Quant aux fouilles archéologiques, si elles démontrent l’ancienneté de la consommation de vin, elles n’ont, en revanche, toujours pas livré beaucoup de vestiges permettant d’affirmer l’existence d’une production locale. Les petits pressoirs de pierre datant du début de notre ère sont peu nombreux. Dans la région Entre-Douro-et-Minho, l’implantation de la vigne pourrait donc ne pas tout devoir à la conquête romaine.

Hélder Marques considère que la vigne est peu développée dans la région jusqu’aux 12e et 13e siècles. La viticulture méridionale est apparue beaucoup plus tôt, pour des raisons climatiques, mais aussi du fait de l’intensité des échanges méditerranéens21. Même si la présence de la vigne est attestée dès le 9e ou le 10e siècle, soit avant la fondation du Portugal, comme António Barros Cardoso l’établit nettement22, son développement semble surtout lié à l’essor démographique du 10e au 13e siècle et à la Reconquête chrétienne23. Pour Albert Silbert, « parler du passé dans les pays ibériques, c’est sans doute mettre au premier plan les conséquences de la reconquête. Historiens, géographes, économistes, tous ceux qui se sont penchés sur les structures agraires de la péninsule ont vu dans l’occupation du sol après la victoire sur les Maures le fondement de ces structures ».24 Dans le sillage de la Reconquête, les abbayes, surtout bénédictines et cisterciennes, jouent un rôle important dans l’essor de l’agriculture et, en particulier, de la culture de la vigne. « S’il y a un modèle, il est bourguignon, apporté par les moines cisterciens du 12e siècle, et commun [à la Galice et au nord du Portugal] » écrit Virgílio Loureiro. La filiation bourguignonne de Dom Afonso Henriques25, le premier roi du Portugal, et sa proximité avec Bernard de Clairvaux, en constituent une justification. La célébration du rôle des moines et, tout particulièrement, des cisterciens, est un leit-motiv dans l’histoire du vinho verde. Le Clos de Vougeot est une référence fréquente, un étalon. Un voyageur anglais du 18e siècle compare ainsi le vin produit dans l’abbaye cistercienne d’Alcobaça, dans le centre du Portugal, et le vin du Clos de Vougeot et traite ce dernier de « piquette »26. Cependant, en ce qui concerne les modes de conduite de la vigne, Jean-Robert Pitte note que, au Clos de Vougeot, les moines de Citeaux ont abandonné au Moyen-Âge « le complantage, vieille habitude romaine qui consiste à mêler aux vignes des arbres fruitiers (pêchers, cerisiers, noyers, etc.), voire à laisser la vigne s’enlacer sur les troncs et les branches de ceux-ci. »27 Or, Entre-Douro-et-Minho, personne ne conteste que le hautain a été d’emblée, sinon le seul, du moins le mode de conduite le plus fréquent. Cette différence est intéressante. S’explique-t-elle par la rareté du sol agricole utile et la densité de la population qui rendaient la culture de la vigne en bordure et sa conduite sur des arbres inévitables ? Pour résumer, les moines, cisterciens ou bénédictins, ont-ils dû composer avec les contraintes issues du sol et de la démographie et avec des pratiques culturales bien établies ? On sait, par ailleurs, que les moines ne buvaient pas leur vin : ceux de l’abbaye de Tibães comme ceux du monastère de Santo Tirso préféraient le vinho maduro du Douro proche 28. Cela nous amène à nuancer la caution qualitative que constituent pour certains auteurs et viticulteurs l’origine bourguignonne des cisterciens et la représentation d’une viticulture monastique, cistercienne ou bénédictine, soigneuse et savante, calquée sur l’exemple d’Alcobaça.

Des paysages : quand parler de la vigne c’est parler du maïs

Comme l’écrit le géographe G. Pereira en 1932, « la vigne est partout et nulle part » et il précise : « Le Minho n'est pas, dans un certain sens, un pays de vignobles, c'est-à-dire qu'on n'y rencontre pas ces étendues exclusivement recouvertes de vigne qui, par leur masse même concentrent nécessairement l'attention du paysan. Si importante soit-elle dans l'économie agricole des quintas [domaines], elle ne domine pas, elle n'est qu'associée à d'autres cultures. »29 Même si elle n’a pas été nécessairement amenée par les Romains, la coltura promiscua, association sur une même parcelle de cultures céréalières ou maraichères et de vigne ou d’arbres fruitiers, est ancienne. Avant la découverte de l’Amérique, dominent, à côté ou souvent à la place du blé, les céréales des sols pauvres que sont le seigle, l’avoine, et d’autres « pains » tombés depuis en désuétude telles que le panic et le millet30. Renouvelée par l’introduction du maïs, l’association hiérarchisée de cultures, parmi lesquelles la vigne est omniprésente, a façonné le paysage du Minho jusqu’à la fin des années 1990. Malgré la transformation des modes de culture et la constitution d’un vignoble, au sens contemporain du mot, avec des parcelles entièrement dédiées à la vigne, ce paysage peut encore se voir ici ou là.

A partir du 16e siècle, l’implantation de la vigne dans le nord du Portugal se joue dans une relation de dépendance par rapport à la plante reine, le maïs. Le grand événement qui relance et transforme la coltura promiscua, c’est l’introduction au Portugal de la trilogie amérindienne maïs-haricot-courge. La culture du maïs bénéficie de conditions naturelles favorables : la chaleur des étés et l’abondance de l’eau, permettant l’irrigation. Elle a plusieurs conséquences heureuses. Elle stimule l’élevage bovin, qui contribue à son tour à l’enrichissement des sols, permettant la disparition de la jachère. Elle détermine également une autre caractéristique paysagère, que le géographe Orlando Ribeiro a nommé campo prado, le champ-pré : pendant plusieurs mois de l’année, entre la récolte et la nouvelle plantation, le sol sert de prairie naturelle. Surtout, le maïs, s’il requiert plus de travail humain, réussit, avec beaucoup plus de régularité que le blé, à nourrir une population nombreuse. « À la différence des autres céréales cultivées sans irrigation, avec des jachères plus ou moins longues intercalées, le maïs irrigué produit tous les ans, sur un espace qui supporte d’autres cultures encore. Aussi est-il devenu rapidement le pain des zones de forte densité humaine, permettant de nourrir et de faire croître les deux-tiers de la population portugaise. »31 En effet, le maïs atténue les crises économico-démographiques de type ancien.

La vigne occupe une position marginale, au sens propre du mot, autour de la parcelle et toujours en association avec les cultures complémentaires qui poussent sous elle : haricots, courges, plus tard, pommes de terre, toutes plantes dont la récolte a lieu avant que le feuillage de la vigne ne soit trop développé. Une variété de haricot planté sous la vigne porte le nom de haricot de l’ombre32. Ce sont donc la gestion d’un espace agricole exigu et la recherche d’un rendement cultural maximal qui ont induit la culture de la vigne en treilles (latas ou ramadas) et hautains (enforcados ou uveiras) sur le pourtour de la parcelle. La vigne s’échappe aussi des champs pour couvrir des espaces incultes, les chemins et les rues des villages qu’elle plonge en été dans la pénombre. Cette omniprésence de la vigne en treilles au sein même du village, que nous avons vue en Galice, près de Padrón (province de A Coruña), autour du changement de millénaire, a quasiment disparu. Dans le nord du Portugal, on ne la trouve plus que dans quelques villages, comme, par exemple, dans la sous-région du Lima, à Gração-São Jorge (concelho de Arcos de Valdevez)33.

L’introduction du maïs au 16e siècle et, deux siècles plus tard, le monopole de la Compagnie générale d’agriculture du Haut-Douro entraînant l’assujettissement de la production de vinho verde à la fabrication du porto ont-ils déterminé l’implantation marginale de la vigne autour des champs et sa plantation en hautains et treilles ? L’origine de cette thèse très populaire est à rechercher, pour ce qui concerne l’effet des mesures de Pombal sur la vigne du nord-ouest, chez Alberto Sampaio (1841-1908). Historien, considéré comme un grand précurseur de l’histoire rurale, engagé dans l’éducation populaire, agronome, producteur dans sa propriété de Boamense, près de Famalicão, de vins de qualité, primés nationalement et internationalement, il a fait preuve à la fin du 19e siècle d’une vision très claire des évolutions qu’allait entraîner le phylloxéra et des changements nécessaires pour développer les vinhos verdes (cépages, modes de conduite…). Dans As vilas do norte de Portugal, Alberto Sampaio écrit : « Il n’est pas possible de distinguer aujourd’hui […] quelle était la forme adoptée dans les vineas et vineales au temps des chartes et des diplômes : il ne fait pas de doute que, à l’époque, la viticulture était réservée à des parcelles spécifiques […]. Mais une vigne pouvait aussi bien être formée de vignes basses que de vignes grimpantes adossées à des arbres. […] Il est à croire que les deux ont coexisté, les vignes basses ayant peut-être dominé. Très probablement, […] elles ont disparu depuis la moitié du siècle dernier, à la suite des lois du marquis de Pombal. »34

Cette thèse a profondément marqué les esprits et on en trouve de nombreux échos chez les historiens du vinho verde. En 1987, Hélder Marques remarque que « la plus grande partie des études réalisées sur ce sujet concluent que la vigne basse a dû être prédominante et que ce n’est qu’à partir de l’introduction du maïs et, plus tard, des mesures restrictives de l’époque de Pombal que la vigne a été progressivement reléguée à la périphérie des champs. »35 Bien plus tard, Gonçalo Maia Marques écrit : « Il importe de rappeler que ce n’est qu’après l’introduction du maïs (et des mesures de limitation de nouveaux vignobles décidées par Pombal) que la vigne s’installe à la périphérie des champs. »36 Et António Barros Cardoso rappelle que « nombreuses sont les références aux vignes basses dans les Inquirições de 1220-1258 »37.

Tout d’abord, la définition de la vigne basse demeure sujette à interprétations. Il est indéniable que le terme a été employé mais à quel(s) mode(s) de conduite renvoie-t-il ? Les auteurs divergent à ce sujet. Ainsi, les treilles font-elles ou non partie des « vignes basses » ? Non, pour Francisco Carvalho Correia : « Anciennement, d’après Alberto Sampaio, il a existé deux types d’exploitation viticole : les vignes basses et les vignes grimpantes, adossées aux arbres. Que, au Moyen-Âge, aient existé côte à côte les vignes basses et les hautains, il semble que oui. Mais, à mon avis, les vignes basses allaient céder la place […] aux treilles, technique beaucoup moins coûteuse et de rentabilité égale. »38 Gonçalo Maia Marques parle, quant à lui, de « vigne basse – en treille haute ou basse »39 ou encore « de vigne basse, implantée de façon préférentielle en treilles ou palissée »40. Quant à Amândio Galhano, il manifeste son « désaccord avec ceux qui considèrent qu’il y a eu des formes basses dans ce qui est aujourd’hui la rdvv. […] Une analyse sereine de l’écologie locale nous amène à considérer que les “vineas” dont parlent les documents médiévaux étaient nécessairement des treilles voire des hautains, en culture continue (extreme) et non associée [à d’autres cultures]. » Il importe sans doute de définir plus rigoureusement si le débat porte sur le mode de conduite – vigne basse ou vigne haute –, ou sur l’implantation de la vigne – en bordure de la parcelle ou plantée en continu.

Surtout, le caractère un peu mécanique des transformations qu’aurait induites l’introduction du maïs appelle des réserves. D’une part, on sait que la plantation des vignes en hautain en bordure des champs existait déjà au 14e et même au 13e siècle. Hélder Marques rapporte que, en 1372, des plaignants exposaient devant un tribunal de Porto qu’ils subissaient un grand préjudice du fait de « la coupe de leurs arbres [par des bucherons] car la plus grande partie de leur vin provenait des vignes et des ormes qu’ils taillent ainsi. »41 D’autre part, la thèse ne tient pas compte de l’ancienneté de la densité de la population de la région. Le Portugal a connu une période de croissance jusqu’à la moitié du 14e siècle, puis, comme les autres pays européens, un étiage démographique après la peste noire de 1348. Dans cet ensemble, la forte densité de population du Minho est déjà notable aux 13e et 14e siècles : « Après la Reconquête, il existait une zone densément peuplée correspondant au Minho, à la vallée du Douro et à la Beira Alta. »42 Orlando Ribeiro parle même de « fourmilière humaine » à propos du nord-ouest à l’époque de la Reconquête, par opposition au sud du pays43. Il dit aussi : « Il n’y a pas un morceau de terre qui ne soit utilisé. »44 Dès avant la « révolution du maïs » du 16e siècle, et à l’exception de la période qui va de 1350 à la fin du 15e siècle, la population est donc dense, dans un espace agricole réduit du fait des conditions géographiques naturelles, et dans un système de production à faible productivité. La culture des céréales avant l’introduction du maïs reposait sur l’assolement avec jachère. Du fait du nécessaire temps de repos des sols, elle avait besoin de toute la terre disponible pour une production céréalière comparable ou très certainement inférieure à celle que permettrait ultérieurement le maïs.

Enfin, peut-être le terme même de « révolution du maïs » est-il trompeur ? En effet, si le maïs révolutionne l’alimentation des populations et accroît leur espérance de vie, il n’induit pas nécessairement un bouleversement des systèmes culturaux. C’est ce qu’écrit l’historien galicien Felipe Criado Boado qui voit dans l’introduction du maïs une transition dans la continuité de ces systèmes : « On a pu voir que la pénétration du maïs, au lieu d’être un phénomène tout à fait nouveau qui aurait transformé de fond en comble les systèmes agraires précédents s’est réalisée avec facilité et rapidité, parce que, de fait, elle a pris la forme d’une substitution. C’est à dire que, avant la diffusion du maïs, il existait un type de système agraire dans lequel il y avait un creux ; le maïs s’est installé facilement dans ce creux, du fait de sa rentabilité et de ses rendements. On trouvait ce système agraire dans les zones littorales et les terres basses où, avant l’introduction du maïs, il existait un assolement triennal dans lequel la position de céréale de printemps était occupée par le millet (mijo ou millo miudo), précurseur du maïs. […] Sur cette base, l’introduction du maïs ne fit qu’accélérer des processus qui existaient déjà. »45

Si le maïs a imposé définitivement l’implantation de la vigne en bordure, il ne l’aurait donc pas créée de toutes pièces. L’existence de parcelles entièrement plantées en vignes avant le 16e siècle, justifiée par l’évocation dans plusieurs textes anciens de vinhas baixas (vignes basses) ou l’existence d’une toponymie particulière46 ne peut être niée, malgré les discordances entre auteurs quant au sens possible de vinhas baixas. On nous permettra une hypothèse historique : les vignes basses ont-elles pu conquérir, de façon temporaire, entre 1350 et 1500, des espaces laissés libres par le recul des surfaces consacrées aux céréales, du fait de la forte baisse de la population ? Ce phénomène est constaté en France à la même époque47.

Pour Hélder Marques, la question du mode de conduite ne peut pas être isolée de l’intégration plus ou moins aboutie du vin dans des circuits commerciaux. Dans ce « vignoble » essentiellement paysan, où la plus grande partie de la production est bue par les producteurs eux-mêmes, où importent la quantité de la production mais aussi la faiblesse du travail à fournir et de l’expertise nécessaire, se détachent des zones de production et des exploitations qui produisent des vins sensiblement différents – et meilleurs, destinés à être vendus, y compris à l’étranger, en utilisant éventuellement des systèmes particuliers d’implantation et de conduite de la vigne. Pour l’essentiel, la circulation du vinho verde vers les marchés urbains et d’exportation se fait par deux fleuves. Le Lima draine vers l’Atlantique les meilleurs vins produits autour de Monção et dans la vallée du Lima. Depuis le port de Viana do Lima (aujourd’hui Viana do Castelo), ils sont exportés ou rejoignent Porto par la voie maritime. Sur le Douro sont transportés les vins provenant du sud et de l’est de la région. Une partie de ce vin est destinée aux tavernes de Porto48.

De Monção à Tibães : qu’est le vinho verde au 17e siècle ?

Aurélio de Oliveira montre que les vins de Monção, dans l’extrême nord de la région du Minho, sont distincts, au 16e siècle, du reste des vins produits Entre-Douro-et-Minho. Au même titre que le vignoble du Douro, Monção constitue l’exemple d’une délimitation de fait, précoce, impulsée par les autorités municipales. La qualité de ses vins est célébrée depuis longtemps. Leur zone de chalandise est très large sur le marché intérieur et extérieur. La première mention de l’exportation d’une barrique de vin en direction de l’Angleterre depuis le port de Viana date de 1295. Ces vins sont appelés vinhos maduros de Monção (vins mûrs de Monção). Faut-il y voir le simple énoncé d’une teneur alcoolique plus élevée, une reconnaissance par d’autres de leur qualité et une assimilation à la qualité des vins du Douro, ou une auto-proclamation affirmée de leur distinction par opposition aux vinhos verdes produits dans le reste de la région ? Il est utile, en tout cas de préciser que leur qualité reconnue ne s’explique pas par l’alvarinho, le grand cépage blanc, propre à la sous-région contemporaine de Monção-Melgaço. En effet, le développement de l’alvarinho date de la seconde moitié du 20e siècle49.

Dans la région de Monção, la culture de la vigne est intensive (à la différence du reste de la région). Comme l’écrit Aurélio de Oliveira, « les vignobles […] de Monção et des alentours avaient atteint une expansion importante et significative. La production viticole était en hausse vers 1620. Quelques années plus tard, les principales doléances au monarque, exprimées aux Cortes jusqu’à la moitié du 17e siècle concernent les méfaits de la guerre sur les vignobles. Le constat est clair et frappant : le travail agricole était déjà concentré autour de la vigne et de la fabrication du vin. Ils en viendraient même à reconnaître que c’était leur activité principale, sans avoir besoin d’autres cultures pour vivre. »50. Ce sont ces vins qui sont transportés depuis le port de Viana do Lima (aujourd’hui Viana do Castelo) vers Porto, mais aussi vers l’Angleterre et le nord de l’Europe. Comme toujours, l’existence d’une rivière navigable est un facteur de qualité du vignoble.

L’étude du même auteur sur l’abbaye de Tibães, près de Braga, au 17e siècle51, nous éclaire un peu plus sur l’exception de Monção. Cette abbaye est depuis 1567la tête de réseau des monastères bénédictins au Portugal. La vigne constitue la deuxième production de l’abbaye, après les céréales. Les modes de conduite des vignes diffèrent entre le domaine propre, exploité en faire-valoir direct par les moines et les domestiques de l’abbaye, et les tenures. Les treilles (latadas) sont peu fréquentes chez les tenanciers et, quand elles existent, elles ont une structure de bois alors que celles de la réserve seigneuriale reposent sur des piliers de pierre52. Quant aux vignes « basses » – qu’il ne faut sans doute pas entendre dans le sens contemporain du mot – elles sont en régression, « du moins, celles qui sont plantées par les tenanciers. Désormais, ce sont les hautains (enforcados ou uveiras) qui dominent. »53 Pendant la période de 50 ans étudiée par l’auteur, la production de vinho verde augmente, grâce à la mise en culture de nouvelles terres et à une politique de plantation de pieds de vigne autour des parcelles. Le vinho verde est réservé à l’alimentation des nombreux serviteurs et des journaliers, les moines préférant les vinhos maduros du Douro, « moins acides et plus savoureux »54. Enfin, la partie de la production qui n’est pas consommée est vendue, l’abbaye utilisant souvent son droit de banvin pour interdire la commercialisation de tout vin avant le sien propre. Dans un autre texte, plus récent, Aurélio de Oliveira nuance son propos : les moines consommaient aussi des vins verts provenant de zones plus généreuses, comme Basto ou Ganfei55. Gonçalo Maia Marques montre que l’abbaye achetait également des vins de Monção et de la vallée du Lima56. Une étude consacrée au monastère de Santo Tirso confirme que les moines ne buvaient pas leur propre vin : « Les préférences des religieux de Santo Tirso allaient au vinho maduro, au détriment du vinho verde, plus acide, de leur région ». Elle est aussi très précise quant aux stratégies du monastère en ce qui concerne la production des tenanciers et leurs redevances : « Les redevances en nature des tenanciers les plus éloignés n’étaient pas transportées jusqu’au monastère. Elles étaient converties, en raison de la difficulté du transport, en numéraire. Le vinho verde que le monastère recevait [à titre de redevance] de ses tenanciers les plus proches était principalement vendu. À cet effet, on ouvrait les portes franches, en empêchant la concurrence, en application du droit d’exclusivité dont jouissait l’abbé, dans les limites de sa juridiction. Les tenanciers ne pouvaient pas vendre leur vin tant que le monastère n’avait pas écoulé le sien. »57 L’étude ne parle pas du vin produit sur le domaine propre de l’abbaye : on peut supposer que, comme à Tibães, il était servi aux nombreux salariés et tenanciers de l’abbaye.

Ces deux exemples, celui des vins de Monção et celui des vins de l’abbaye de Tibães – et il faudrait nuancer le propos en distinguant parmi ces derniers ceux que produit l’abbaye en faire-valoir direct et ceux des tenanciers – nous éclairent, a contrario ou directement, sur ce qu’est majoritairement le vinho verde au 17e siècle. Il provient essentiellement de vignes en hautains. L’exposition de la vigne et l’abondance du feuillage ne permettent pas une maturation optimale, et la contrainte de la hauteur n’autorise qu’un traitement limité de la vigne. Les Mémoires paroissiaux de 1758 sont une source précieuse à ce sujet. Dans 17 paroisses du concelho d’Amarante, les hautains dominent. Un curé signale l’existence de treilles (latadas) produisant un vin de qualité58. La production de vin est toujours présente chez les paysans qui exploitent de la terre mais elle ne constitue pas une activité économique spécialisée ; elle s’insère dans la polyculture familiale. Seuls, les domaines ecclésiastiques ou seigneuriaux disposent, soit par leur production directe, soit par les rentes seigneuriales ou par les dimes qu’ils prélèvent en nature, d’excédents commercialisables.

Il existe, cependant, des différences régionales marquées. L’article de Aurélio de Oliveira qui confirme la supériorité reconnue des maduros de Monção au 17e siècle met également en exergue la qualité des vins du sud-est de l’actuelle Région délimitée des vinhos verdes : « La Geografia Económica Geral do Reino, de Duarte Nunes Leão, permet une première visualisation de cette implantation à la fin du 16e et au début du 17e siècle. Parmi les vins dits de Lamego [qui relèvent depuis 1756 de la région d’appellation du Douro], on trouve d’autres vins, qui sont aujourd‘hui inclus dans la Région délimitée des vinhos verdes, qui étaient eux-aussi exportés et qui ont toujours jusqu’ici été considérés comme maduros […]. Pour finir, les vins de Monção que l’on exporte également dans le marché intérieur, du Minho vers Lisbonne. […] Il convient de citer l’intérêt des Flamands, des Français et des Anglais pour ces vins. Les Anglais les ont préférés pendant longtemps à ceux du Haut-Douro. »59 Il existe aussi des différences sociales, souvent résumées dans l’opposition entre « vin de seigneur » et « vin de paysan » (vinho senhorial / vinho camponês). Seigneurs, laïcs ou ecclésiastiques, et paysans ne boivent pas le même vin. Ainsi, dans sa Descripção do Reyno de Portugal, publiée en 1610, Duarte Nunes Leão écrit que « dans certaines parties de la région de Entre-Douro-et-Minho on récolte […] beaucoup de vin appelé enforcado qui est consommé par le peuple, tandis que les nobles boivent les très bons vins de Ribadavia et d’autres vins de la voisine Galice, de Lamego et de Monção, dont ils ont de grandes quantités. »60 La différence citée par Duarte Nunes Leão est, cependant, toujours régionale.

Le 18e siècle : concurrence et éclipse

Un connaisseur du début du 20e siècle rappelle que les premiers vins portugais exportés vers l’Angleterre étaient des vinhos verdes : « Déjà en 1497, sous le règne de Don Manuel le Fortuné, [les Portugais] 
avaient établi des pêcheries à Terre-Neuve, et envoyaient de la morue dans les Iles Anglaises. Ils y portaient aussi des vins qu'ils offraient en échange de produits manufacturés. Ces vins, renfermés dans des outres ou dans de petits fûts, s'appelaient Vinhos Verdes. C'est là l'origine réelle du commerce des Vins 
Portugais avec l'Angleterre. Ils étaient produits par la province de Minho. Aujourd'hui, seuls, les vins de la vallée du Douro s'exportent. »61 Ce qu’écrit Alfred Smyth corrobore ce que l’on sait de l’exportation des vins appelés maduros de Monção dès la fin du 13e siècle et aussi de l’essor de l’exportation des vins du Douro vers l’Angleterre au 17e siècle62.

Le traité de Methuen en 1703, après plusieurs autres traités, confirme la préférence douanière accordée par les Anglais aux vins portugais, essentiellement au détriment des vins espagnols – l’Angleterre s’étant déjà détournée des vins français, à la suite des guerres de la fin du 17e siècle. Les historiens voient le plus souvent dans ce traité un exemple précoce de division internationale du travail, qui organise le sacrifice de l’industrie textile portugaise naissante en échange de l’approvisionnement de l’Angleterre en vins portugais. Dans un premier temps, les traités stimulent l’exportation de l’ensemble des vins portugais vers l’Angleterre. Dans un deuxième temps, au milieu du 18e siècle, la politique de Pombal, premier ministre de Dom José I, renforce la position dominante du vignoble du Haut-Douro au détriment de tous ses concurrents portugais63. « Si le traité de Methuen a éliminé le concurrent français, il a également eu pour conséquence l'apparition d'autres concurrents nationaux sur le marché anglais. Et […] l'élimination de ces concurrents, qui ne pouvait être réalisée par un accord international, a été entièrement obtenue par la création de la Compagnie générale d’agriculture des vignes du Haut-Douro. »64

La création de cette compagnie par actions, véritable « corps politique avec autorité et juridiction »65 
est soutenue par Pombal, en 1756. Elle poursuit deux objectifs : d’une part, combattre le monopole britannique en matière de commercialisation des vins de Porto ; d’autre part, restaurer la qualité et le prestige des vins du Douro, que la recherche du profit facile avait compromis, et, en conséquence, élever le niveau des exportations et des prix. À cet effet, elle délimite la zone exclusive de production, elle fixe et hiérarchise la qualité des vins, elle contrôle leur authenticité et règlemente leur production. Henri Enjalbert remarque que la législation pombalienne ne cherchait pas à définir une appellation contrôlée mais à « sauver un vignoble perdu de réputation »66. Le monopole accordé à la Compagnie générale d’agriculture des vignes du Haut-Douro a deux conséquences principales pour les vinhos verdes : le déclin de leur exportation s’accentue et la région Entre-Douro-et-Minho est réduite au rôle de pourvoyeuse de l’eau de vie nécessaire à l’élaboration du porto67. « Un des principaux privilèges concédés à la Compagnie [générale d’agriculture des vignes du Haut-Douro] par une charte du 16 décembre 1760 était l’exclusivité de fabrication et de commercialisation de l’eau de vie dans les trois provinces du nord (Minho, Trás-os-Montes et Beira). »68 On parle même d’un cycle « d’eaudeviesation » (aguardentação) de la production vinicole de la région69. La transformation n’a dû frapper que la frange commercialisée du vinho verde. Indirectement, cependant, il est probable que le déclin de l’exportation et la fabrication de vins de chaudière à bas prix ont eu des conséquences sur l’ensemble du vignoble, confinant le vinho verde à son statut principal de vin d’autoconsommation paysanne, à faible technicité.

L’histoire « populaire » du vinho verde attribue à la création de la Compagnie générale d’agriculture des vignes du Haut-Douro en 1756 la responsabilité du déclin du vinho verde. Avec elle commencerait « la période noire de l’histoire du vinho verde »70. Mais la comparaison avec Bordeaux permet de dégager un modèle commun de « protectionnisme régional »71 et amène à nuancer quelque peu cette analyse. Le « privilège de Bordeaux », qui a duré du Moyen-Âge jusqu’en 1776, permettait aux négociants bordelais de retarder la commercialisation des vins de l’arrière-pays afin d’ôter toute concurrence à ceux de Bordeaux pendant la période de vente la plus favorable – celle qui suivait immédiatement la vendange –, à une époque où le vin se buvait dans l’année. Certes, les modalités diffèrent entre Bordeaux et Porto. Dans le cas de Bordeaux, il s’agit du refus de permettre l’exportation avant Noël des vins du Périgord, de l’Agenais et du Quercy, ou avant la Saint-Martin de ceux du Languedoc, et de l’imposition à ces vins de nombreuses entraves (lieux d’entreposage distincts, fûts spécifiques, etc.72. Le rôle du pouvoir royal est, lui aussi différent : au Moyen-Âge, dans le Sud-ouest de la France, le roi, tant anglais que français, doit ménager les communautés de marchands de l’arrière-pays. Au Portugal, en revanche, l’État prend fait et cause pour la Compagnie générale d’agriculture des vignes du Haut-Douro, soumettant même à cette dernière, en 1784, le projet de création d’une Société publique d’agriculture et de commerce de la province du Minho, portée par les négociants de Viana do Castelo et conçue sur le modèle de la Compagnie73. Mais la motivation est identique : protéger les vins dominants contre des concurrents possibles en rendant plus difficile l’accès de ces derniers au marché international. Et les effets sont de même nature : par exemple, la production de vins de qualité dans la vallée de la Garonne s’est anémiée et a disparu au profit d’autres cultures74 ; et si les vignobles plus éloignés – Bergerac, Cahors et Gaillac – ont continué à exporter en dépit des freins imposés par les négociants bordelais, leur destin international a été durablement freiné.

La création de la Compagnie générale d’agriculture des vignes du Haut-Douro en 1756 joue donc un rôle indéniable mais la partie semble déjà en grande partie jouée. En effet, dès la première moitié du 18e siècle, l’importance du port de Viana do Castelo décline. La ville avait pourtant vu dans la deuxième moitié du 17e siècle la réinstallation75 de commerçants britanniques, signe de la vitalité du commerce atlantique des vins de Monção, Melgaço et de la vallée du Lima. Jusqu’en 1678, la plus grande partie des exportations de vinho verde se fait par le port de Viana do Castelo qui conserve un rôle actif jusque vers 1730. Pendant cette décennie, un double mouvement s’achève : Porto supplante Viana pour l’exportation des vinhos verdes, et, dans le même temps, « les vins du Douro [gagnent] nettement la première place dans les exportations portugaises de vins à partir du port de Porto76 ». Le nom de Beardsley est symbolique de cette évolution. Job Beardsley, négociant britannique installé à Viana do Castelo, joue un rôle actif dans l’exportation des vins de Monção, Melgaço et de la vallée du Lima, au début du 18e siècle. À partir de 1720, la maison Beardsley est évoquée dans les sources commerciales de Porto. Elle est à l’origine d’une des plus grandes maisons de vins de Porto et même si elle continue à faire venir des vinhos verdes à Porto, elle a désormais changé d’objectif principal77.

Pour comprendre la concurrence entre vinhos verdes et vins du Douro, il faut l’inclure dans le mouvement plus large des vins dans l’Europe atlantique au début du 18e siècle. Les affrontements du 17e siècle entre États européens auront des conséquences durables sur l’évolution des goûts : « Anglais et Hollandais, éloignés du marché français, vont chercher en Espagne et au Portugal des vins rouges colorés et alcoolisés et […] le porto représente l’archétype de ces vins, mais un porto naturel, pas encore muté à l’alcool, ce qui n’interviendra que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. »78 Les vinhos verdes du 18e siècle ne sont ni colorés – le recours au vinhão, cépage quasi-teinturier, caractéristique du vinho verde rouge actuel, est postérieur au phylloxéra – ni alcoolisés. Ils ne correspondent pas au goût nouveau des consommateurs de l’Europe du Nord du 18e siècle. Les vinhos verdes auraient ainsi connu, dans la confrontation au porto et au sherry, un sort similaire à celui des clarets bordelais79. La comparaison avec le nord-ouest de la péninsule ibérique, à commencer par la Galice voisine, montre que le cas du vinho verde n’est pas exceptionnel : « les vignobles du Nord-Ouest de l'Espagne, […] n’ont joué qu'un rôle très modeste dans le commerce international »80.

L’essor brisé au 18e siècle est-il celui du vinho verde ou celui des maduros de Monção ? La référence continue à ses vins dès le Moyen-Âge met en évidence l’exception que constitue Monção au sein de la région Entre-Douro-et-Minho. Plusieurs facteurs ont permis la qualité de ses vins : un microclimat mieux protégé des perturbations océaniques, des modes de conduite de la vigne souvent différents de ceux qui prévalaient dans le reste de la région, la proximité d’un fleuve navigable jusqu’au port de Viana do Castelo et une qualité ancienne du travail humain. Cette imbrication des facteurs physiques et humains favorables apparaît exceptionnelle et non transposable au reste de la région. Rappelons-nous : les moines de Tibães ou ceux de Santo Tirso boivent du vin du Douro ou du vin de Monção mais pas celui qu’ils produisent. Les raisons du « non décollage » de ce vignoble sont sans doute multiples Pour l’essentiel, le vinho verde est un vignoble paysan qui, à l’exception de Monção, n’a pas attiré de négociants ou de propriétaires – bourgeois, abbés ou riches laboureurs – soucieux de développer la qualité des vins et la production. On évoquera comme raison l’absence d’un tissu urbain plus dense mais on ne saurait négliger le goût très particulier des vinhos verdes anciens, tel qu’on peut l’imaginer, tel que le décrivent les voyageurs du 19e ou du début du 20e siècle ou tel qu’on le buvait encore il y a 50 ans. Seules, les guerres coloniales et l’ouverture du Portugal à la modernité et à l’Europe, puis la mondialisation ont permis de dissocier l’essence même du goût de ces vins et ce qui était dû à des méthodes de culture et de vinification aujourd’hui révolues.

Les maladies du 19e siècle et leurs effets

En traitant conjointement le 19e et une grande première moitié du 20e siècle, nous lissons la période en omettant des changements d’importance : les transformations économiques et sociales avec en 1834, à la suite de la révolution libérale, la vente des biens nationaux parmi lesquels les biens des ordres religieux ; les transformations techniques avec l’apparition des treilles hautes, si caractéristiques du paysage rural de la région au 20e siècle, rendue possible à la fin du 19e siècle par le recours au fil de fer81. Nous avons privilégié un découpage temporel centré sur les bouleversements induits par les maladies de la vigne.

Oïdium et phylloxéra

Le Portugal est un des trois foyers d’entrée du phylloxéra dans la péninsule ibérique. On en connaît l’origine précise. Il est apparu en 1870 dans le village de Gouvinhas, sur la rive droite du Douro, au sud-est de Vila Real, à la suite de l’achat de vignes américaines, de cépage Isabelle, par un viticulteur82. Le développement de la maladie a été freiné par la grande humidité du climat du nord-ouest de la péninsule et le phylloxéra n’a pas eu de conséquences aussi graves Entre-Douro-et-Minho que dans le Haut-Douro. Il est de fait que, s’agissant du vinho verde, le phylloxéra n’est évoqué que comme une des maladies de la vigne, l’accent étant plus fréquemment mis sur les maladies cryptogamiques, parmi lesquelles l’oïdium, endémique à partir des années 1850. C’est d’ailleurs pour lutter contre l’oïdium, favorisé par l’humidité du climat, que l’on a eu recours aux vignes américaines, qui ont introduit le phylloxéra. Le phénomène particulier dans cette région est que après l’arrachage des vignes franches de pied traditionnelles, les plants américains puis les hybrides, destinés à être greffés, ont souvent été utilisés comme producteurs directs. Est-ce à cause de la résistance de ces vignes à l’oïdium, du manque de savoir technique nécessaire pour le greffage ou de l’espoir d’une production abondante avec ces vignes généreuses ? Sans doute les trois83. Une autre conséquence indirecte du phylloxéra, ou plus exactement, une conséquence du phylloxéra en France est la valorisation dans la région Entre-Douro-et-Minho de cépages rouges plus riches en couleur et en alcool, dont la production est destinée au marché français. Le premier d’entre eux est le vinhão, cépage quasi-teinturier, natif de la région, devenu de nos jours le cépage presque inévitable du vinho verde rouge. Le goût pour le « rouge qui tache » serait ainsi apparu tardivement. « Le vin n’était bon que s’il était très coloré. Il fallait qu’il ait une couleur très chargée. »84

Une photographie arrêtée au tournant du 20e siècle

Deux documents exceptionnels ont été publiés à l’occasion de l’exposition universelle de Paris de 1900. Il s’agit de Le Portugal au point de vue agricole, dirigé par B.C. Cincinnato da Costa et D. Luiz de Castro, de l'Institut agronomique de Lisbonne, directeurs de la Royale Association centrale de l'agriculture portugaise85 et de Le Portugal vinicole. Recherches sur l’ampélographie et les valeurs œnologiques des principaux cépages du Portugal de B.C. Cincinnato da Costa86. Le Portugal au point de vue agricole nous montre tout d’abord le paysage rural caractéristique de la région des vinhos verdes, qui disparaît progressivement depuis le dernier quart du 20e siècle. « Dans cette partie du Portugal, la vigne est traitée d'une manière très particulière […]. Rarement, on y rencontre des vignes pleines, couvrant plusieurs hectares de superficie. Presque toujours, au contraire, la vigne apparaît formant des bordures sur la limite des champs cultivés, ou le long des routes […]. La vigne s'élève d'ordinaire en uveiras ou vignes de enforcado […] ; ou encore, comme nous l'avons déjà dit également, sous forme de treilles ou de cordons, selon les localités ou les convenances particulières de chacun. Dans la même propriété, les différents systèmes sont assez souvent simultanément employés ; mais ce qu'on voit surtout, c'est la coexistence, le voisinage fréquent des treilles et des hautains. » Pas de vignoble, donc, dans le sens habituel du mot, et peu de parcelles dédiées à la vigne. D’autre part, les vinhos verdes sont, pour l’essentiel, des vins rouges. Voici, en effet, ce que les deux auteurs disent, comme en creux, des vins blancs : « Les cépages blancs ont une importance très moindre au Minho. On y récolte bien quelques vins de cette catégorie qui ne sont pas sans valeur. »

Enfin, Cincinnato da Costa et Luiz de Catro reprennent une classification, établie par le chimiste Ferreira Lapa, qui distingue, parmi les vinhos verdes (en grande majorité rouges) trois catégories, en prenant en compte l’alcool, le tannin et l’acidité du vin87. On a, ainsi, des vins demi-mûrs (entre maduros en portugais88), plus alcoolisés, moins acides et moins tanniques, des vins verts et, enfin, des vins verdascos ou très verts, le suffixe -asco de verdasco ayant une valeur péjorative89, – des vins « guinguets »90 pourrait-on dire. La classification confirme l’existence au sein des vinhos verdes de vins sensiblement différents, sans que l’origine de ces différences (sol, microclimat, orientation, cépages, type de propriété et d’exploitation) soit clairement établie.

La réglementation de la production et du marché

La création de la Région délimitée des vinhos verdes et de ses sous-régions

Au tournant du 20e siècle, à la suite des crises viticoles et de leurs conséquences culturales et commerciales – les achats importants de la France n’ont duré qu’un temps –, la région connaît une grande confusion. En réponse, l’activité législative et réglementaire est intense. En 1908, la Région délimitée des vinhos verdes (rdvv) est définie par une loi qui crée également plusieurs autres régions délimitées. Elle s’étend du sud du Douro à la frontière espagnole. Dans les textes de 190891, la définition de la Région délimitée est exclusivement administrative, en listant les distritos, concelhos et communes qui la composent, sans préciser ce qui fonde le classement. Vingt ans plus tard, le décret n° 16 684 du 22 mars 1929, qui traite cette fois spécifiquement du vinho verde, apporte des éléments de sens : « Sont considérés comme vinhos verdes aux fins de ce décret les vins rouges de la région agricole du Minho, provenant de vignes élevées en hautains (« enforcados »), treilles (« ramadas et latadas ») et autres formes de vigne haute ou de hauteur moyenne, issus de cépages autochtones considérés comme propres à la région du Minho, qui ont du corps, une couleur affirmée, qui sont acidulés, astringents, faiblement alcoolisés, effervescents (« pourvus de agulha »), et les vins blancs ou sous-régionaux qui, du fait de leurs caractéristiques spéciales ou de la tradition, sont connus comme vinhos verdes. » En résumé, une localisation relevant de la géographie administrative, une prépondérance des vins rouges, des critères cumulatifs parmi lesquels dominent les modes de conduite, et une allusion imprécise à des cépages régionaux et à la tradition. Il faudra attendre 1992 pour que la réglementation définisse les conditions de sol et les cépages permettant de produire du vinho verde92.

La loi de 1908 définit cinq sous-régions (Amarante, Lima, Braga, Basto, Monção), sans énoncer de condition particulière. Elles couvrent entre la moitié et les deux-tiers de la région. Une sixième sous-région, Penafiel, est créée en 1926. En 2001, trois nouvelles sous-régions seront créées (Ave, Baião, Paiva) et le périmètre des sous-régions sera modifié.

La création de la Commission de viticulture de la Région des vinhos verdes (cvrvv)

La Commission est créée en 192693. C’est un organisme interprofessionnel, de droit privé, auquel l’État confie des missions de contrôle de la production et du commerce des vins régionaux. De nos jours, la cvrvv, dont les missions ont été élargies, est un acteur très important.

La lutte contre le vinho americano

En 1926, le décret n° 12 866 a pour objet principal de réglementer la production et le commerce du vinho verde. Son article 1er marque le début de l’offensive légale contre le vinho americano. Il prévoit, en effet, l’interdiction de nouvelles plantations de producteurs directs américains, l’obligation de greffer les pieds existants, et des mesures d’adoucissement pour les zones littorales dans lesquelles l’humidité favorise beaucoup l’oïdium. Mais ce texte n’est suivi que de peu d’effets. Successivement en 1934, en 1935 et en 1938, un décret-loi, puis une loi et à nouveau un décret-loi durcissent le dispositif juridique. Le décret-loi de 1934 supprime les mesures d’exception : « Puisque les plantations actuelles de cépages qui peuvent donner lieu à des vins mauvais et sans caractéristiques qui perturbent les marchés doivent être éliminées, l’obligation s’impose de greffer tous les hybrides producteurs directs existants. » Le texte fixe un nouveau délai de quatre ans pour l’obligation de greffage. Les attendus du décret-loi de 1938 expliquent à quel point les dispositions impopulaires de 1926, rappelées en 1934 et 1935, sont restées lettre morte : « Il a été tenu compte dans l’exécution de la loi, malgré l’ancienneté du texte concerné, de l’incompréhension naturelle des peuples, du désir de ne pas nuire de façon exagérée à leur économie et des faits qui pourraient être invoqués pour justifier le retard. »94 La loi de 1935 et le décret-loi de 1938 ne se contentent pas de rappeler les dispositions édictées antérieurement ; ils vont plus loin en prévoyant la dénaturation de la partie de la production qui n’est pas consommée par les producteurs, la fermeture des commerces qui vendent du vin provenant de producteurs directs américains, et en organisant le contrôle chez les producteurs et dans tous les lieux de vente. Ces mesures sont, cependant, restées en grande partie inefficaces jusqu’aux années 1970-1980. Plus que la répression, c’est le développement du vinho verde blanc et l’évolution des goûts et des usages qui ont joué un rôle déterminant dans la quasi-disparition du vinho americano.

Un étrange ménage à trois

Conséquence indirecte de l’oïdium et du phylloxéra de la seconde moitié du 19e siècle, le vin américain (vinho americano), également appelé de façon évocatrice « vin fraisier » (vinho morangueiro), provenant à l’origine de plants « américains », et par la suite d’hybrides producteurs directs, a pris partiellement la place du vinho verde sur les treilles95. Lors de l’exposition agricole et industrielle de Gaia, en 1894, un producteur présente « un vinho verde fait à partir de raisin américain »96. On a là un indice de la confusion post-phylloxérique et de la tentation du recours aux producteurs directs. Pendant plus de 80 ans, le vinho americano a marqué une partie de la région Entre-Douro-et-Minho, non seulement par sa productivité et ses besoins réduits en travail humain et en savoir technique, mais aussi par son odeur et son goût fruités. Il s’agit d’un vin à faible teneur alcoolique (autour de 7°), de couleur rouge clair, au goût de fruit très prononcé et qui ne se conserve pas plus que quelques mois97. C’est le vin des pauvres. À Vila-Chã (concelho de Esposende), dans la première moitié du 20e siècle, le vinho verde n’était produit que par une demi-douzaine de propriétaires, les plus riches98. Les autres cultivaient le vinho americano. « C’était comme une mauvaise herbe : on faisait un trou, on plantait un plant de vigne, elle commençait à sortir, cela donnait du vin en quantité. »99 C’était, par exemple, le vin que beaucoup de propriétaires donnaient à boire au casse-croûte à leurs journaliers et journalières. C’était aussi un vin que l’on pouvait boire en grande quantité, qui calmait la soif lors des durs travaux agricoles, dans une région où la consommation de vin a été souvent justifiée par la mauvaise qualité de l’eau. Ce vin entrait aussi dans la composition du champarião, boisson désaltérante, composée de bière, de vin et de sucre.

On peut voir sur la carte ci-après que, en dépit de la répression organisée par le gouvernement, le vinho americano est encore présent, au milieu des années 1970, dans tous les cantons de la rdvv mais de façon inégale. Il est surtout important dans plusieurs concelhos, soit du littoral soit de la bordure montagneuse et, d’une façon générale, dans les zones où l’humidité des sols entraîne un fort développement des maladies cryptogamiques de la vigne auxquelles les plants américains résistent mieux. La situation que montre cette carte est déjà résiduelle. En effet, comme on l’a vu plus haut, des mesures énergiques ont été prises entre 1929 et 1938, interdisant la commercialisation et obligeant les producteurs à dénaturer la partie de leur production au-delà de l’autoconsommation familiale. Aurélio Ramos, agriculteur de plus de 80 ans, rappelle que pendant son adolescence, est venu « l’ordre supérieur d’arracher les plants ou de les greffer. La production de vinho americano était désormais interdite. Les greffes ne prenaient pas toutes et le vinho americano continuait à produire. Les contrôleurs, prévenus par des dénonciations, jetaient de la chaux vive en pierre dans le vin pour le dénaturer et empêcher sa consommation. Une barbarie ! »100 Cependant, « les campagnes d’arrachage conduites par l’Estado Novo101 se sont soldées par des succès faibles ou quasiment nuls et l’on sait que des actions de résistance à l’arrachage obligatoire ont eu lieu, revêtant parfois des aspects violents »102. Le vinho americano a désormais quasiment disparu. Il reste, cependant, présent dans l’imaginaire des producteurs et des consommateurs de vin de la région, du moins de ceux qui ont plus de 50 ans. Il a sans doute joué un rôle dans la recherche de la productivité qui a caractérisé la production ultérieure de vinho verde rouge.

L’existence du vinho americano questionne l’intensité de l’attachement au vinho verde. Elle montre, en effet, que, bien avant l’évolution récente, le vinho verde rouge a connu au 20e siècle une première désaffection. Certes, les raisons en étaient différentes et le phénomène n’a pas eu une importance égale dans toute la région. Il rappelle, cependant, que dans ce vignoble que nous qualifions de versatile, les traditions relatives à la couleur du vin ou aux cépages sont fréquemment renouvelées. Il serait donc inexact de considérer que le désamour dont souffre le vinho verde rouge depuis la fin du 20e siècle est radical et inédit.

À partir des années 1960, un vignoble en constitution

L’essor des blancs

À partir de 1955, la part des vins blancs dans l’ensemble des vinhos verdes augmente de façon régulière. Entre 1955 et 1982, elle passe de 10 à 33 % du total de la production. Cette croissance est corrélée à un autre phénomène : l’augmentation de la commercialisation. Comme le remarque François Guichard en 1975, « la croissance du vinho verde blanc est le signe d’une lente intégration à l’économie de marché »103. De nouveaux marchés sont apparus : les villes, mais aussi les colonies portugaises d’Afrique. Pour António Barros Cardoso comme pour Hélder Marques, l’émigration vers les « provinces d’outre-mer » puis la guerre coloniale et la nécessité d’abreuver le contingent ont été des facteurs très importants de cette croissance. Deux évolutions corollaires sont la hausse du prix du vin blanc, désormais supérieur à celui du rouge, et la croissance de la vente en bouteille aux dépens de la bombonne de 5 litres, cette dernière demeurant, cependant, le conditionnement majoritaire. Le développement rapide des exportations de vinho verde vers les pays de la CEE, avant même l’adhésion du Portugal, concerne presque exclusivement le vin blanc. En revanche, il existe un marché d’exportation pour le rouge dans les pays où vivent d’importantes communautés d’immigrants portugais. On le désigne au Portugal sous le joli nom de « marché de la nostalgie » (mercado da saudade). Ces deux marchés correspondent à des goûts distincts.

Production de vinho verde rouge et blanc et d’hybrides producteurs directs dans la RDVV

1975 - Moyenne annuelle (1969-1973)

1975 - Moyenne annuelle (1969-1973)

Quantités produites – 1 : plus de 30 000 pipas (tonneau de 500l) par an ; 2 : de 25 à 30 000 pipas ; 3 : de 20 à 25 000 pipas ; 4 : de 15 à 20 000 pipas ; 5 : de 12 000 à 15 000 pipas ; 6 : de 9 000 à 12 000 pipas ; 7 : de 6 000 à 9 000 pipas ; 8 : de 3 000 à 6 000 pipas ; 9 : moins de 3 000 pipas.

Types de vins – 10 : Vinho verde rouge ; 11 : Vinho verde blanc ; 12 : Vin américain (hybrides producteurs directs).

Source : François Guichard, « La région du vinho verde », Op. cit, p. 415.

La carte ci-dessus fait apparaître deux ensembles. Dans la plus grande partie de la région, la production de vin rouge domine très largement. C’est, par exemple, le cas à l’extrême nord, pour l’actuelle sous-région de Monção-Melgaço qui produit aujourd’hui très majoritairement du vin blanc et a jusqu’en 2021 une exclusivité pour la production d’alvarinho. Au sud, la production de vin blanc, si elle n’est jamais majoritaire, se situe déjà entre 25 et 40 % du total (concelhos de Penafiel, Amarante, Baião). La répartition différente entre blanc et rouge, s’accompagne, grâce au vin blanc, d’une forte croissance de la production. Le tableau de la production 2016-2017, en Annexe, montre que l’avance du sud de la rdvv n’a pas été remise en cause.

L’intégration européenne

Les années 1960-1980 voient aussi un autre phénomène : l’émigration de masse des Portugais vers la France et plusieurs autres pays d’Europe occidentale. Le nord-ouest du Portugal, la région la plus densément peuplée, est particulièrement concerné par cet exode d’hommes jeunes, qui entraîne un manque de main-d’œuvre agricole, dans un contexte général où le vinho verde n’apparaît plus seulement comme destiné à l’autoconsommation familiale mais comme une production agricole susceptible d’une rentabilité plus grande. L’intégration européenne entraîne des changements profonds pour adapter le vignoble aux normes communautaires, qu’il s’agisse du titre alcoolique minimal ou de la perte de monopole de l’État – héritage du salazarisme – dans l’encadrement et la régulation de la production et du commerce. Les financements communautaires favorisent le développement des petits producteurs-embouteilleurs104. Avant même l’adhésion du Portugal en 1986, les politiques d’aide structurelle de la cee visent à la réorientation de la production vers les vins blancs de qualité produits à partir du cépage alvarinho105. Cette transformation contribue à la création d’un paysage agricole nouveau, apparu d’abord dans la sous-région de Monção-Melgaço, puis généralisée à l’ensemble de la rdvv : des campos extremes, qui sont des champs où la vigne, plantée en monoculture, occupe tout l’espace. De nouveaux modes de conduite font leur apparition, parmi lesquels le cordon s’impose. Rappelons aussi les efforts de la cvrvv : diffusion d’information technique à l’intention des viticulteurs, rôle d’expérimentation de la station viti-vinicole Amândio Galhano en matière d’encépagement, de porte-greffes, de modes de conduite, etc.

Le développement des coopératives, créées sous l’Estado Novo, dans la décennie de 1950, a longtemps été modeste et lent et plusieurs auteurs y voient la marque de l’individualisme des paysans du Minho. En 1987, Hélder Marques note que « la coopération vinicole est encore débutante dans la Région délimitée des vinhos verdes ».106 L’adhésion du Portugal à la CEE stimule le rôle des coopératives qui servent d’intermédiaires dans la mise en place des politiques voulues par la Commission européenne : « replantation des vignes avec des variétés recommandées et des méthodes de conduite plus appropriées à la production de vins de qualité, soit en fournissant des facteurs de production, soit en apportant un appui technique »107. La région en compte actuellement une vingtaine. Les retards de paiement aux coopérateurs ont été résorbés, la gestion s’est professionnalisée. Si leurs destins individuels diffèrent, elles demeurent un acteur important du vinho verde.

La période contemporaine voit aussi la montée en puissance des collectivités territoriales. La mobilisation de plusieurs d’entre elles dans le conflit régional autour de la zone de production réglementaire de l’alvarinho montre bien leur rôle actif (voir 8.3. L’alvarinho, source de discorde). La vigne et le vin contribuent à l’image et au dynamisme touristique régional, important pour le développement économique local, et les collectivités de la RDVV s’emploient à valoriser leur patrimoine vitivinicole. L’œnotourisme, en grand développement dans l’ensemble du Portugal, revêt des formes classiques – visite, dégustation et vente directe –, mais aussi découverte de la gastronomie régionale, hébergement au domaine, stages d’initiation, sport et découverte de la nature. La Route des vinhos verdes lie les vignes et le vin à la beauté des paysages ruraux, des villes et de l’architecture rurale (manoirs seigneuriaux, abbayes, tours médiévales). Les collectivités territoriales ont ainsi soutenu la création du Musée de l’alvarinho (Monção) et du Centre d’interprétation et de promotion du vinho verde (Ponte de Lima).

L’évolution de la réglementation

L’IGP Minho

En 1993 est défini le vinho regional Rios de Minho, devenu en 1997 vinho regional Minho puis en 2008 IGP Minho. L’aire de production coïncide avec la Région délimitée des vinhos verdes. La différence entre les deux types d’appellation réside dans le nombre de cépages autorisés (63 pour l’IGP Minho, au lieu de 45 ; parmi eux, beaucoup de standards français et de cépages originaires d’autres régions du Portugal). D’autre part, pour l’IGP Minho « on ne recherche pas nécessairement la typicité du vin mais la production de vins innovants, d’excellence qui puissent générer une grande dynamique et une expérimentation dans la région ».108

La troisième et quatrième modification des sous-régions

En 2001, la carte des sous-régions de la rdvv est modifiée109. Il s’agit, pour une part, de la création des deux régions Ave et Cávado, formées à partir d’une redistribution des concelhos de la sous-région Braga, mais aussi d’une extension vers le sud avec la création des sous-régions de Baião et de Paiva. Les sous-régions couvrent désormais la plus grande partie de la Région délimitée, à l’exception de la ceinture rurale de Porto et d’une zone littorale dans l’extrême nord-ouest110. Le texte actualise les critères de qualité qui permettent de faire figurer l’appellation de sous-région sur l’étiquette : encépagement, teneur en acide et alcool, rendement maximal. Un vin ne satisfaisant pas ces conditions ne peut porter que l’appellation Vinho verde.

La Région délimitée des vinhos verdes et les neuf sous-régions (post-2001)

La Région délimitée des vinhos verdes et les neuf sous-régions (post-2001)

Un vignoble versatile

Nous sommes arrivés dans l’histoire du vinho verde au début du 21e siècle. Le temps est venu de jeter un regard rétrospectif et synthétique. Tous les vins européens ont connu des évolutions au cours de leur histoire. Dans le cas du vinho verde, cependant, les transformations sont d’une autre ampleur. Elles affectent l’ensemble de la filière qui va de la vigne au vin : implantation marginale autour de la parcelle ou parcelle dédiée ; polyculture familiale ou exploitation viticole spécialisée ; vin blanc et vermeil, puis rouge foncé puis blanc à nouveau ; mode de conduite de la vigne ; encépagement, vinification ; inconstance des goûts. Pour illustrer la versatilité de ce vignoble, nous dessinerons quatre images caractéristiques de moments de son histoire.

  • 16e-17e siècles : un vignoble qui n’en est pas un, où la vigne ne joue, sauf exception, qu’un rôle secondaire dans la polyculture. Des vignes conduites en majorité sur des arbres tuteurs, encerclant les champs et couvrant les chemins, produisant des vins blancs et rouges faiblement colorés ; un rôle important des abbayes.
  • la fin du 19e siècle, selon B. C. Cincinnato da Costa : un paysage resté pour l’essentiel identique, avec, cependant, un développement des treilles hautes aux dépens des hautains. Une production croissante de vins rouges forts en couleur et en tanin, à partir du cépage vinhão qui s’est répandu après le phylloxéra. En revanche Cincinnato n’a pas pu constater une autre conséquence de la maladie : le développement des producteurs directs.
  • en 1975, la description d’un géographe français, François Guichard : « Le blanc, léger et fruité, est d’un abord plus aimable mais le rouge domine : corsé et acide, il est surtout consommé dans sa zone de production. […] La vigne se tient sur la bordure et le long du chemin d’accès, grimpant aux arbres ou formant des treilles hautes qui ombragent le travailleur, mais aussi les cultures, pendant les heures chaudes. »111
  • la situation contemporaine : des parcelles dédiées, de plus en plus d’exploitations spécifiques, une primauté du vin blanc, le développement d’un cépage ancien (l’alvarinho) dans la sous-région Monção-Melgaço, une forte croissance du degré alcoolique et un contrôle de l’acidité, l’extinction progressive des hautains et des treilles et l’adoption du cordon comme mode de conduite dominant ; un fort développement de l’exportation.

Présent et avenir du vinho verde

Produit

Campagne 2008-2009

 

Campagne 2017-2018

 

Rouge + rosé

Blanc

Total

Blanc / total (en %)

Rouge + rosé

Blanc

Total

Blanc / total (en %)

AOP Vinho Verde

210 001

545 841

755 841

72

184 934

733 395

918 328

80

IGP Minho

8 111

16 738

24 848

 

11 694

22 950

34 644

 

Source : Instituto da vinha e do vinho, IP

La production totale connaît une forte augmentation, au point que la question de l’espace disponible est posée. La reconversion des surfaces agricoles vouées à d’autres productions (lait, principalement) est en cours. En revanche, la production d’IGP Minho est restée anecdotique. La vigne palissée en cordon simple ou double, parfois superposé, s’impose. La baisse de la production de rouge se poursuit, en dépit du succès du rosé. Les stocks considérables de vin rouge ont été résorbés mais la Région hésite encore, malgré les tentatives intéressantes de plusieurs viticulteurs, à reconnaître que les rouges pourraient avoir un avenir. Le vinho verde reste un vin peu cher, ce qui contribue à son succès à l’exportation mais nuit à son image.

Des cépages autochtones

Pour produire du vinho verde, la réglementation actuelle autorise 45 cépages – 23 blancs et 22 rouges112. Une trentaine d’entre eux sont des cépages autochtones113. La mention distinctive supplémentaire de sous-région, pour les neuf sous-régions redéfinies en 2001, est, depuis cette date, soumise à des règles précises d’encépagement qui concernent 15 cépages : sept blancs et huit rouges, presque tous autochtones (voir Annexe n° 2). En 2015, la cvrvv a commencé l’expérimentation de 14 cépages anciens, figurant dans la liste des 45 cépages et qui ont quasiment disparu. Cette initiative réjouit les amateurs de vinhos verdes qui déplorent une certaine standardisation de ces vins et, en particulier, pour les rouges, la tendance au « tout vinhão », au détriment des cépages traditionnels faiblement colorés (alvarelhão, par exemple). À l’exception de l’alvarinho, les cépages de la région sont des cépages modestes, dont la zone de plantation est limitée à la rdvv et, pour plusieurs d’entre eux, également à la Galice viticole. Les cartes du site Vine to Wine Circle illustrent leur caractère régional114. Il existe une grande variété des dénominations locales que la constitution de répertoires ampélographiques a permis de recenser115.

Cépages et terroirs : l’insuffisante valorisation des sous-régions

Le graphique ci-dessous, conçu à partir de la définition réglementaire des cépages exclusifs par sous-région de la rdvv116, permet de distinguer quatre profils-types. 

Amarante

Sousa

Baião

Paiva

Ave

Cávado

Lima

Basto

Monção-Melgaço

Blancs

Alvarinho

 

Arinto

 

 

 

 

 

 

 

 

Avesso

 

 

 

 

 

Azal

 

 

 

 

Batoca

 

 

Loureiro

 

 

 

 

 

 

 

Trajadura

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rouges

 

Alvarelhão

 

 

 

Amaral

 

 

 

 

 

 

 

Borraçal

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Espadeiro

 

 

 

 

 

 

 

Padeiro

 

 

 

 

Pedral

 

 

Rabo-de-Anho

 

 

Vinhão

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le graphique fait apparaître que cinq cépages constituent des standards régionaux : en rouge, le borraçal et le vinhão sont caractéristiques des neuf sous-régions ; en blanc, les cépages arinto (qui n’est pas un cépage autochtone) et trajadura sont présents dans huit des neuf sous-régions, le loureiro dans six.

Certains cépages sont mieux adaptés aux conditions climatiques et de sol locales, Ainsi, les quatre premières sous-régions et celle de Basto, qui se trouvent au sud-est et à l’est de la rdvv, sont moins soumises aux influences océaniques, avec une diminution de l’hydrométrie totale, des étés plus chauds et des contrastes annuels de température plus marqués. Les trois sous-régions du nord, Ave, Cávado et Lima, présentent un profil quasi-identique, fondé sur les cinq cépages standards. Mais l’histoire, souvent ancienne, de ces cépages est aussi un facteur. C’est ce que montrent les deux profils atypiques des sous-régions de Basto et de Monção-Melgaço avec des cépages exclusifs : la batoca et le rabo-de-anho pour Basto, l’alvarinho et le pedral pour Monção-Melgaço. Pour l’alvarinho, la carte présentée, exacte pour 2018, sera très prochainement modifiée (voir infra L’alvarinho source de discorde).

Source : Vine To Wine Circle (www.vinetowinecircle.com).

La différence entre un standard régional et des cépages à localisation plus restreinte

La différence entre un standard régional et des cépages à localisation plus restreinte

Les viticulteurs, les œnologues, les journalistes spécialisés conviennent que des vins issus de mono-cépages ou d’assemblages de cépages différents ne peuvent pas être identiques et les goûts distincts du loureiro ou celui de l’assemblage alvarinho-trajadura sont souvent évoqués. Cependant, la différenciation sous-régionale des vins, à l’exception de la région Monção-Melgaço et de l’alvarinho, n’est que rarement mentionnée. Sur le site web de la cvrvv, la rubrique « recettes » associe des vins à des recettes de chefs de cuisine. Elle constitue un bon résumé de l’état de la question en matière de cépages et de terroirs. Les vins blancs sont mis en avant par rapport aux rouges et, parmi les blancs, comme on pourrait s’y attendre, l’alvarinho occupe une place prépondérante. Mais si on trouve dans cette rubrique l’ébauche de la reconnaissance par l’instance légitime d’une possible diversification des goûts des vinhos verdes, l’accent est mis sur les cépages et non sur les terroirs, ni même sur leur définition réglementaire et minimale, la sous-région. Et la disposition prévue dans l’arrêté 28/2001 du 16/01/2001 prévoyant que « par règlement interne, la cvrvv peut limiter le conditionnement à un type de bouteille propre à chaque sous-région » est restée sans suite.

Cépage

Surface (m2)

Blanc/Rouge

Loureiro

32 101 435

B

Arinto

20 099 712

B

Vinhão

19 637 531

R

Alvarinho

17 941 044

B

Trajadura

9 669 929

B

Azal

8 618 700

B

Avesso

4 477 718

B

Fernão Pires / Maria Gomes

1 769 920

B

Espadeiro

1 753 476

R

Borraçal

1 020 731

R

Source : CVRVV

Le tableau ci-dessus montre bien la hiérarchie contemporaine entre les blancs et les rouges : à l’exception du vinhão, les cépages rouges occupent des surfaces modestes.

L’alvarinho, source de discorde

Depuis 1992, l’alvarinho a une zone de production exclusive, la sous-région de Monção-Melgaço et, en mono-cépage, une mention spécifique « vinho verde alvarinho »117. On le trouve souvent, depuis une dizaine d’années, associé à un autre cépage, trajadura, dans des vinhos verdes de qualité reconnue, également produits dans la même sous-région. En Galice, il se nomme albariño et donne des vins appréciés dans toute l’Espagne. Bien que le cépage soit ancien, la découverte de son potentiel n’a eu lieu que dans la seconde moitié du 20e siècle, grâce à l’ingénieur agronome Amândio Galhano. L’alvarinho a su faire connaître et reconnaître sa qualité, notamment par une politique de prix beaucoup plus élevés que celui des autres vinhos verdes. Comme l’écrit The Financial Times, « Le prix sérieux dénote un vin sérieux, que l’on peut servir à table, venant de la région très appréciée de Monção and Melgaço. »118 On n’est pas dans le registre des vins aimables pour soirées d’été, si souvent accolé aux vinhos verdes blancs. L’alvarinho est désormais le raisin le plus cher du Portugal (1 € le kg contre 35-45 centimes pour les autres cépages du vinho verde), plus cher même que les cépages du porto119. Seul parmi les cépages du vinho verde, l’alvarinho connaît une expansion notable en dehors de la région. Sa qualité a convaincu les viticulteurs d’autres régions du Portugal et de plusieurs autres pays du monde. On boit désormais à Lisbonne, de très bons alvarinhos, produits, par exemple dans l’Alentejo. En 2014, une intervention de la Commission européenne a mis en cause l’exclusivité dont bénéficient les producteurs de la sous-région Monção-Melgaço, parlant de discrimination. Les viticulteurs et les collectivités territoriales de Monção et Melgaço s’opposent de façon virulente à la cvrvv mais ils sont défaits au sein de la Commission de viticulture (3 voix contre 16). La décision donne lieu à des interventions politiques nombreuses, tant à Bruxelles qu’à Lisbonne et à un conflit ouvert dans la région, les présidents des concelhos de Monção et Melgaço demandant, par exemple, la démission du président de la cvrvv. S’affrontent donc, d’un côté, les représentants de la sous-région Monção-Melgaço qui rappellent son rôle moteur dans l’évolution et dans la reconnaissance internationale du vinho verde, et font état de leurs craintes concernant un développement excessif de la production, et notamment des conséquences sur le prix du raisin et la qualité des vins produits ; de l’autre, les viticulteurs du reste de la rdvv qui considèrent que la sous-région bénéficie d’un privilège désormais sans fondement.

Signe de l’importance régionale et même nationale de l’enjeu, deux arrêtés sont pris en mai 2015, pour l’appellation contrôlée vinho verde et pour l’IG Minho. L’arrêté 152-2015 rappelle l’état de la réglementation : « Actuellement, la mention Alvarinho sur l’étiquette des vins provenant de la Région des vinhos verdes n’est autorisée que pour les vins d’appellation contrôlée “vinho verde” originaires de la sous-région de Monção et Melgaço, produits à 100 % à partir de raisins de ce cépage. » L’arrêté élargit la possibilité de mentionner le cépage alvarinho sur les étiquettes de l’appellation contrôlée vinho verde et de l’IG Minho à l’ensemble de la rdvv à condition qu’il représente 100 % de l’encépagement. Dans le cas de multi-cépage, pour figurer sur l’étiquette, l’alvarinho doit représenter au moins 30 % de l’encépagement. Un accord entre les producteurs prévoit que l’élargissement entrera en vigueur à partir de 2021.

Ce qui est en jeu autour de la revendication de l’exclusivité du cépage, difficile à défendre quand il est désormais planté aux États-Unis ou en Australie, c’est bien l’affirmation d’un terroir. L’histoire pourrait être mobilisée à cet effet : la qualité anciennement reconnue des maduros de Monção ne devait rien à l’alvarinho ; elle provenait avant tout d’un microclimat favorable et de la qualité du travail des hommes.

Le vinho verde blanc, un grand produit d’exportation

La croissance des exportations (+ 19 % en 2015) contraste avec la stagnation du marché national. Les exportations représentent désormais plus de la moitié des ventes à comparer avec les 15 % du début des années 2000120. Manuel Pinheiro, président de la cvrvv, insiste sur la nécessité d’une rationalisation du marché : les marques commerciales sont trop nombreuses (2000), les étiquettes trop complexes.

Le vinho verde est toujours présent sur les marchés traditionnels que constituent les anciennes colonies du Portugal : Brésil, Angola et, dans une moindre mesure, Mozambique. C’est le fruit pour partie d’une tradition ancienne mais surtout du rôle qu’ont joué au 20e siècle les émigrants portugais, souvent venus du nord du Portugal. L’Europe de l’Union européenne – et la Suisse – avec, dans l’ordre décroissant d’importance, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni, constitue le plus gros marché régional. On boit du vinho verde dans tous les pays de l’Europe du nord – Suède, Danemark, Luxembourg et même en Pologne. En revanche, peu de vinho verde chez les pays du sud concurrents. On en comprend la raison pour l’Espagne qui produit des vins très proches. Quant à l’Italie, elle se situe en 2016 un peu au-dessous du Qatar !

Les États-Unis étaient jusqu’en 2017 le plus grand importateur de vinho verde, dépassé récemment et de peu par l’Allemagne. Ils constituent un marché en pleine expansion, comme en témoigne l’abondance des sites états-uniens consacrés au vinho verde. Un article du New York Times a pour titre : « Vinho verde, [cela signifie] en portugais bon marché et joyeux ». L’article parle de bouteilles de vinho verde blanc à 4 $ ; c’est le prix le plus bas de la sélection qui présente des vins jusqu’à 14 $, la majorité se situant en-dessous de 10 $. L’image générale est celle d’un vin « facile à boire », devenu « pour beaucoup d’Américains un symbole de l’été », un peu moins populaire, cependant, que le rosé. L’auteur de l’article, très bien informé, justifie la modicité des prix par l’absence d’alvarinho et remarque au sujet de la bouteille à 4 $ : « À ce prix, on peut avoir une caisse de vinho verde pour le prix d’une bouteille médiocre de chardonnay »121. Une étude consacrée au marché américain met en avant le fait que ces vins se boivent sans attendre et que leurs cépages sont autochtones comme propre à séduire les jeunes buveurs états-uniens122. Sur un autre site, une présentation des 25 « meilleurs vinhos verdes blancs aux États-Unis » fait apparaître une hiérarchie de prix assez semblable, les alvarinhos de la sélection se situant, eux, entre 12,50 € et 22 €. Dans l’ensemble, les vinhos verdes sont donc des vins peu chers aux États-Unis. Les prix pratiqués sont, d’ailleurs, assez proches des prix de la grande distribution au Portugal. Ils sont, à l’évidence, plus élevés au Canada, 4e pays importateur (en volume).

Enfin, le mystère du Swaziland, 11e importateur mondial de vinho verde, alors que c’est un pays faiblement peuplé, ravagé par le sida et très pauvre, doit pouvoir être dissipé : il est probable que l’importateur (ou les importateurs) de vinho verde en Afrique du Sud se trouve au Swaziland.

Vieux vin paysan, souvent décrié dans son propre pays, le vinho verde connaît aujourd’hui une expansion internationale notable. S’il ne semble pas menacé de banalisation dans le mainstream viticole et vinicole mondial, favorisé par la mondialisation et le réchauffement climatique123, sa spécificité pose problème : peut-il ne s’agir que de la fraîcheur de ces vins, marque constante du climat humide et des sols granitiques ? Or, dans cette grande région, des zones et des vins de plus ou moins grande qualité commencent à se différencier, et des goûts particuliers s’affirment. Une stratégie de distinction est à l’œuvre dans la rdvv, sous l’influence de l’alvarinho. Elle concerne surtout les blancs haut de gamme, avec, par exemple, le refus de l’ajout de gaz carbonique pour simuler l’agulha, la légère effervescence traditionnelle du vinho verde. Cependant, la tentation du tout alvarinho serait la négation de spécificités sous-régionales qui sont jusqu’ici restées largement virtuelles, faute d’être assumées par la rdvv. La distinction passera-t-elle par les cépages, les terroirs ou les marques ? Elle impliquera inévitablement des prix plus élevés. En refusant de se limiter à l’image du petit vin facile à boire en été et bon marché, elle va quelque peu à contre-courant de ce qui a fait le succès international du vinho verde. Et les rouges ? Sont-ils condamnés ou peuvent-ils trouver une place, revendiquée par certains producteurs, au prix sans doute d’une rupture avec la typicité régionale de ces vins ?

ANNEXES

L’évolution de la rdvv et des sous-régions – 1908, 1926, 1929, 2001 et 2009

Les 45 cépages ouvrant droit à l’AOC Vinho verde

Concelhos concernés

1908

1926

1929

2001

2009

Amarante

Amarante, Marco de Canaveses

identique

Basto

Cabeceiras de Basto, Celorico de Basto, Mondim de Basto

identique

Cabeceiras de Basto, Celorico de Basto, Mondim de Basto, Ribeira de Pena

identique

Lima

Viana do Castelo, Ponte de Lima, Ponte da Barca, Arcos de Valdevez

Identique

Monção

Monção-Melgaço

Monção et Melgaço

Identique

Identique

Braga

Cávado

Braga, Vila Verde, Amares, Póvoa de Lanhoso, Guimarães, Vila Nova de Famalicão, Barcelos, Esposende

Braga, Vila Verde, Amares, Póvoa de Lanhoso, Guimarães, Vila Nova de Famalicão, Barcelos, Esposende, Vieira (do Minho), Fafe

Braga, Vila Verde, Amares, Póvoa de Lanhoso, Guimarães, Vila Nova de Famalicão, Barcelos, Esposende, Vieira (do Minho), Fafe, Santo Tirso

Braga, Vila Verde, Amares, Barcelos, Esposende, Terras de Bouro

 

 

Ave

 

 

Vila Nova de Famalicão, Fafe, Guimarães, Santo Tirso, Trofa, Póvoa de Lanhoso, Vieira do Minho, Póvoa de Varzim, Vila do Conde et Vizela

Penafiel

Sousa

Paços de Ferreira, Paredes, Lousada, Felgueiras, Penafiel

Identique

Identique

 

Paiva

Castelo de Paiva

Baião

Baião, Resende, Cinfães

Les cépages du vinho verde

En grisés, les 15 cépages ouvrant droit à la mention de sous-région

Blancs

Rouges

Alvarinho

Alicante-Bouschet

Arinto

Alvarelhão

Avesso

Amaral

Azal

Baga

Batoca

Borraçal

Cainho

Doçal

Cascal

Doce

Diagalves

Espadeiro

Esganinho

Espadeiro-Mole

Esganoso

Grand-Noir

Fernão-Pires

Labrusco

Folgazão

Mourisco

Gouveio

Padeiro

Lameiro

Pedral

Loureiro

Pical

Malvasia-Fina

Rabo-de-Anho

Malvasia-Rei

Sezão

Pintosa

Touriga-Nacional

São Mamede

Trincadeira

Semillon

Verdelho-Tinto

Sercial

Verdial-Tinto

Talia

Vinhão

Trajadura

Production par distrito et concelho 2016-2017

(en hl)

Distrito

Concelho

Vin ouvrant droit à l'AOP

Proportion blancs / total (%)

Rouge

Rosé

Blanc

Total

Braga

Amares

2 257

399

16 768

19 423

86

Barcelos

5 044

104

24 106

29 253

82

Braga

2 181

0

2 410

4 591

52

Cabeceiras de Basto

4 330

708

5 681

10 718

53

Celorico de Basto

7 267

644

41 139

49 050

84

Esposende

106

0

1 216

1 322

92

Fafe

3 542

2 323

16 683

22 547

74

Guimarães

5 774

1 054

15 704

22 532

70

Póvoa de Lanhoso

2 370

7

3 584

5 961

60

Terras de Bouro

132

0

6

137

4

Vieira do Minho

64

0

6

70

9

Vila Nova de Famalicão

3 683

1 162

11 452

16 298

70

Vila Verde

1 539

45

3 359

4 943

68

Vizela

1 450

1 832

12 580

15 862

79

Total

39 737

8 276

154 693

202 707

76

Viana do Castelo

Arcos de Valdevez

2 698

47

1 414

4 159

34

Caminha

20

0

11

31

36

Melgaço

2 553

451

38 675

41 679

93

Monção

10 890

3 278

34 356

48 524

71

Paredes de Coura

2

0

0

2

0

Ponte da Barca

7 500

2 082

10 751

20 333

53

Ponte de Lima

14 911

1 993

25 725

42 629

60

Valença

691

2

1 805

2 498

72

Viana do Castelo

2 632

75

4 284

6 992

61

Vila Nova de Cerveira

48

23

133

203

65

Total

41 944

7 950

117 154

167 049

70

Porto

Amarante

9 324

1 669

40 602

51 595

79

Baião

1 369

109

17 376

18 853

92

Felgueiras

6 917

7 972

73 286

88 175

83

Gondomar

114

10

1 235

1 359

91

Lousada

1 966

1 864

12 666

16 496

77

Maia

81

3

394

477

83

Marco de Canaveses

3 230

226

10 337

13 793

75

Matosinhos

0

0

5

5

100

Paços de Ferreira

145

20

573

738

78

Paredes

427

5

1 118

1 550

72

Penafiel

3 127

6 732

70 100

79 959

88

Póvoa de Varzim

54

0

47

100

47

Santo Tirso

1 816

554

8 344

10 714

78

Trofa

141

81

322

543

59

Valongo

542

1 500

19 716

21 758

91

Vila do Conde

155

0

235

390

60

Vila Nova de Gaia

0

0

0

0

Total

29 406

20 743

256 356

306 505

84

Les principaux pays importateurs de vinho verde – 2012-2016

En litres

2012

2013

2014

2015

2016 (*)

Allemagne

3 074 208

3 340 025

4 933 410

4 869 971

6 375 771

ÉTATS-UNIS

4 102 805

4 354 137

4 596 373

5 141 587

5 307 569

FRANCE

2 542 208

2 233 213

2 489 746

2 702 465

3 083 593

CANADA

1 091 513

1 186 583

1 234 124

1 322 496

1 470 055

BRÉSIL

1 139 233

1 179 503

1 423 009

1 417 323

1 387 377

ROYAUME UNI

721 552

706 626

922 404

931 942

1 276 509

SUISSE

1 002 129

1 002 229

963 206

977 981

878 299

BELGIQUE

597 614

800 790

756 699

718 721

667 531

PAYS-BAS

476 588

390 728

516 396

443 650

615 103

POLOGNE

178 974

384 426

539 343

647 605

571 839

SWAZILAND

92 259

170 893

215 403

454 883

517 307

SUÈDE

322 836

274 764

403 234

393 445

436 052

ANGOLA

981 961

950 596

1 037 669

746 880

423 733

LUXEMBOURG

483 330

498 653

544 632

539 424

407 065

DANEMARK

145 866

186 708

175 865

137 988

330 733

JAPON

137 563

179 552

170 702

246 023

272 648

En euros

2012

2013

2014

2015

2016 (*)

ÉTATS-UNIS

9 003 802

9 407 663

10 029 311

13 058 063

13 735 460

ALLEMAGNE

6 567 055

6 984 831

9 921 245

9 642 146

12 463 066

FRANCE

5 691 679

5 015 751

5 571 868

6 107 589

6 905 025

BRÉSIL

2 362 925

2 526 277

3 141 380

3 092 760

2 982 197

CANADA

3 217 486

3 366 671

3 316 235

3 775 849

4 158 618

SUISSE

2 226 947

2 369 148

2 356 034

2 412 312

2 211 048

ROYAUME UNI

1 348 671

1 452 043

1 883 653

1 948 265

2 792 563

ANGOLA

2 410 349

2 372 256

2 683 881

1 833 114

1 046 488

BELGIQUE

1 394 510

1 883 444

1 772 764

1 721 549

1 565 279

LUXEMBOURG

1 201 777

1 162 546

1 261 548

1 306 454

1 066 778

PAYS-BAS

977 555

800 606

1 117 416

904 869

1 276 460

POLOGNE

383 351

791 741

1 021 495

1 407 162

1 245 210

SUÈDE

686 585

585 584

920 188

972 682

1 160 069

SWAZILAND

234 418

424 127

539 118

1 107 658

1 137 428

JAPON

336 274

422 053

398 112

596 741

726 286

DANEMARK

287 598

427 637

405 680

320 427

710 810

Paysages anciens et contemporains du vinho verde

Image

Un paysage traditionnel du Minho : la taille des uveiras (hautains) – années 1940 – Domingos Alvão. Source : site de la cvrvv (www.vinhoverde.pt).

En 1987 encore, Hélder Marques écrit : « Les vallées du Minho et du Lima sont le domaine des treilles basses, alors que dans le Minho central et méridional, ce sont les hautes qui sont les plus fréquentes. Le hautain, important dans les vallées du Cávado, de l’Ave et du Tâmega, domine encore largement dans les terres hautes contigües de la bordure montagneuse. » Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 135.

Image

Survivance exceptionnelle d’un paysage ancien : la vigne couvre les chemins publics, plongeant le village dans la pénombre (São Jorge, concelho de Arcos de Valdevez – août 2012). En revanche, sur les parcelles, le maïs était roi et la vigne était contrainte à une implantation marginale. 

Survivance exceptionnelle d’un paysage ancien : la vigne couvre les chemins publics, plongeant le village dans la pénombre (São Jorge, concelho de Arcos de Valdevez – août 2012). En revanche, sur les parcelles, le maïs était roi et la vigne était contrainte à une implantation marginale. 

Coltura promiscua (complantage) au printemps : culture de pommes de terre sous la treille (Fornelos, concelho de Ponte de Lima – avril 2016).

Sous la treille, poussent des cultures complémentaires : haricots et courges, qui constituent avec le maïs la « trilogie amérindienne », introduite dès le 16e siècle, plus tard, pommes de terre, – toutes plantes dont la récolte a lieu avant que le feuillage de la vigne ne soit trop développé.

Image

Vigne en treille basse abandonnée. Structure de piliers de granit (Concelho de Arcos de Valdevez – juillet 2016)

Vigne en treille basse abandonnée. Structure de piliers de granit (Concelho de Arcos de Valdevez – juillet 2016)

Le paysage nouveau du vinho verde, apparu dans le dernier quart du 20e siècle.

Notes

1  Ce nom est partiellement inexact puisque la région traditionnelle du vinho verde, de même que l’actuelle rdvv, englobait des concelhos (cantons) et communes au sud du Douro. Return to text

2  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », Revista da Faculdade de Letras – Geografia, 1 Série, Vol. III, Porto, 1987, p. 138. Return to text

3  Pereira, G., « Les vignobles du Nord du Portugal », Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, année 1932, volume 3, n° 2, p. 209 ; DOI : https://doi.org/10.3406/rgpso.1932.4056 Return to text

https://www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1932_num_3_2_4056

4  Ribeiro, Orlando, Ensaios de geografia humana e regional, t. 1, Lisboa, Livraria Sá da Costa Editora, 1970. Guichard, François, « La région du vinho verde », dans Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest. Sud-Ouest Européen, année 1975, 46-4 ; Return to text

DOI : https://doi.org/10.3406/rgpso.1975.3450

www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1975_num_46_4_3450

5  « Les treilles qui grimpent aux arbres dans les pays situés entre Minho et Douro, donnant un verjus (Vinho verde) de consommation familiale n’ont plus rien de méditerranéen. Au même titre que le maïs, ces treilles caractérisent assez bien le Portugal atlantique. » Enjalbert, Henri, Compte-rendu de Orlando Ribeiro, Portugal, o Mediterrâneo e o Atlántico, Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest. Sud-Ouest Européen, année 1950, p. 202 ; Return to text

https://www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1950_num_21_2_3811

6  À titre d’exemple de cette méconnaissance du voisin, Hélder Marques, souvent cité dans le présent article, se réfère au livre du géographe français, Alain Huetz de Lemps, Vignobles et vins du nord-ouest de l’Espagne, toutes les fois qu’il est question de la viticulture galicienne. Return to text

7  Pitte, Jean-Robert, Bordeaux, Bourgogne. Histoire d’une rivalité, Paris, Texto, 2016, p. 54. Return to text

8  Oliveira, Aurélio de, « Vinhos verdes, desde quando? », dans António Barros Cardoso et Sílvia Trilho (dir.), 1° Congresso internacional Vinhas e vinhos. Actas, Porto, 2016, p. 96. Return to text

9  Pas de référence au « vert » pour les vins de la Galice voisine : les deux AOP ont pour nom Rias baixas et Ribeiro, ribeiro signifiant « du bord du fleuve » (le Miño – Minho en portugais –, et ses affluents). Quant au vin albariño espagnol (AOP Rias baixas Albariño), il est proche de l’alvarinho portugais. Qu’il se nomme alvarinho ou albariño, le vin porte le nom du cépage et relève d’une région délimitée exclusive. Return to text

10  Marques, Gonçalo Maia, « Entre vinhos verdes e maduros: estudo de casos », Rotur/Revista de Ocio y Turismo, Universidad de A Corunha, n° 5, 2012, p. 179-188. Return to text

11  António Barros Cardoso, entretien, juillet 2016. Return to text

12  Silbert, Albert, Le Portugal méditerranéen à la fin de l’Ancien Régime, Lisboa, Instituto Nacional de Investigação Científica, 1978, p. 9-10. Return to text

13  Loureiro, Virgílio, « A cor do vinho no Entre-Douro-e-Minho », dans Vinho verde. História e Património, n° 1, 2015, aphvin/gehvid, p. 272. Return to text

14  Guichard François, Géographie du Portugal, Paris, Masson, 1990, p. 11. Return to text

15  Guichard François, « La région du vinho verde », Op. cit., p. 404. Return to text

16  Ribeiro, Orlando, Ensaios de geografia humana e regional, t. 1, Lisboa, Livraria Sá da Costa Editora, 1970, p. 303. Return to text

17  Guichard François, « La région du vinho verde », op. cit., p. 403. Return to text

18  Damasio, Manuel Duarte Pimenta de Castro, « A Região do Vinho Verde, os Solares, as Quintas e o Turismo no Espaço Rural, dans Vinho verde. História e Património, op. cit., p. 293. Return to text

19  Marques, Hélder, Marques, Gonçalo Maia, « Certezas e incertezas na (re)construção da memória do Vinho verde », dans António Barros Cardoso et Sílvia Trilho (ed.), Vinhas e vinhos. op. cit., p. 170-171. Return to text

20  Entretien avec un viticulteur du concelho de Arcos de Valdevez ; juillet 2016. Return to text

21  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 139. Return to text

22  « Des documents du 9e et du début du 10e siècle témoignent de la culture de la vigne sur le territoire du Portucale [le comté de Portucale est la matrice du royaume du Portugal]. » Cardoso, António Barros, et Silva, Francisco Ribeiro da, O Porto do Vinho, Porto, Livraria Civilização Editora, 2007, p. 42. Voir également Cardoso, António Barros, Vinhos verdes. A região, a história e o património, op. cit., p. 81. Return to text

23  La conquête arabe semble n’avoir eu que de faibles conséquences sur la production et la consommation de vin dans le nord-ouest du Portugal. Il n’existe que peu ou pas d’informations de première main, mais il est possible de raisonner par analogie. Ainsi, dans El Andaluz, « les amateurs de vin n’éprouvaient aucune difficulté à se procurer l’objet de leur plaisir. La prohibition, on le sait, ne vise que les musulmans, la production, le négoce et la consommation des boissons fermentées n’étant pas interdits aux chrétiens et aux juifs ». Clément, François, Manières de boire et sociabilité du vin en El Andaluz, L’Atelier du Centre de recherches historiques, Ehess-Cnrs.  Et Alberto Sampaio écrit, d’une façon plus générale, sur la marque laissée dans le nord du Portugal par l’occupation arabe : « Les Arabes, du fait de la courte durée de leur domination, n’ont eu aucune influence notable, sociale ou ethnique dans cette région de la péninsule. » Sampaio, Alberto, « As villas no Norte de Portugal », Revista de Portugal, vol. iv, p. 529-530. Return to text

24  Silbert, Albert, Le Portugal méditerranéen à la fin de l’Ancien Régime, op. cit., p. 91. Return to text

25  Le père de Dom Afonso Henriques (1066-1112), Henri de Bourgogne, était le fils cadet de Robert Ier, duc de Bourgogne. Return to text

26  « Mon célèbre cuisinier français, dans l’exaltation du moment, a déclaré, sans aucune forme de patriotisme, que le Clos de Vougeot était une piquette, comparé à l’Aljubarrota – l’Aljubarrota divin, éthéré et parfumé ! » Bekford, William, Alcobaça, Batalha. Souvenirs de voyage, Lisboa, Vega, 1997. Return to text

27  Pitte, Jean-Robert, Bordeaux, Bourgogne. Histoire d’une rivalité, op. cit., p. 40. Return to text

28  Oliveira, Aurélio de, A Abadia de Tibães e o seu domínio (1630-1680), Porto, Publicações da Faculdade de Letras de Porto, 1974, p. 275. Correia, Francisco Carvalho, O Mosteiro de Santo Tirso, de 978 a 1588. A silhueta de uma entidade projectada no chão de uma história milenária, Thèse de doctorat, Universidade de Santiago de Compostela, non datée (postérieure à 2008). Return to text

29  Pereira, G., « Les vignobles du Nord du Portugal », op. cit., p. 209. Return to text

30  Panis : milho painço ; millet : milho alvo. Return to text

31  Ribeiro, Orlando, Ensaios de geografia humana e regional, Lisboa, Livraria Sá da Costa Ed., 1970, p. 301. Return to text

32  « Feijão catarino ou feijão da sombra ». Aurélio Ramos (Vila Chã, concelho de Esposende) ; entretien. Return to text

33  Voir photographie en Annexe. Return to text

34  Sampaio, Alberto, As villas do norte de Portugal. Estudo sobre as origens e estabelecimento da propriedade, Lisboa, Impr. moderna, 1903. Return to text

35  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 143. Return to text

36  Marques, Gonçalo Maia, Do vinho de Deus ao vinho dos Homens: o Vinho, os Mosteiros e o Entre Douro e Minho, Thèse de doctorat d’histoire, Faculdade de Letras da Universidade do Porto, 2011, p. 34. Return to text

37 Cardoso, António Barros, Vinhos verdes. A região, a história e o património, op. cit., p. 203. Les Inquirições étaient des enquêtes royales visant à vérifier la propriété de certains domaines. Return to text

38  Correia, Francisco Carvalho, O Mosteiro de Santo Tirso, de 978 a 1588, op. cit., p. 254. Return to text

39  Marques, Gonçalo Maia, Do vinho de Deus ao vinho dos Homens…, op. cit., p. 44. Return to text

40  Ibid., p. 139. Return to text

41  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit. p. 143. Return to text

42  Ibid. Return to text

43  Ribeiro, Orlando, A formação de Portugal, Ministério da Educação, 1987, p. 39. Return to text

44  Ribeiro, Orlando, Portugal: o Mediterrâneo e o Atlântico, Lisboa, Edições João da Costa, 1992, p. 141. Return to text

45  Criado Boado, Felipe, « Asentamiento megalítico y asentamiento castreño », Gallaetia 11, Universidade de Santiago de Compostela, p. 112. Return to text

46  Alberto Sampaio fait référence en particulier à des terres nommées « campo do bacelo », dont le nom évoque le provignage, excluant donc la treille ou le hautain. Return to text

47  Neveux, Hugues, dans Georges Duby et Armand Wallon (dir.), Histoire de la France rurale, Paris, Le Seuil, t. 2, p. 75-76. Return to text

48  Cardoso, António Barros, Vinhos verdes. A região, a história e o património, op. cit., p. 147-149. « Os Vinhos Verdes e a barra de Viana. Sec. XVIII » dans Vinho verde. História e Património, op. cit., p. 23-35. Return to text

49  Des plants d’alvarinho ne furent greffés au Palacio da Brejoeira, domaine emblématique de cette mention particulière au sein de l’AOC Vinhos verdes qu’à la fin des années 1960, sous la supervision du grand œnologue Amândio Galhano. Return to text

50  Oliveira, Aurélio de, « Vinhos em Portugal antes das regiões demarcadas », op. cit., p. 170. La guerre évoquée entre le Portugal et l’Espagne (1640-1668) fait suite à la Restauration qui mit fin à 60 ans de domination des Habsbourg espagnols sur le Portugal (1580-1640). Return to text

51  Oliveira, Aurélio de, A Abadia de Tibães e o seu domínio (1630-1680), op. cit. Return to text

52  Ibid., p. 204. Return to text

53  Ibid. Return to text

54  Oliveira, Aurélio de, Níveis de produção vinícola no Entre Douro e Minho – 1629-1822, Centro de estudos Norte de Portugal / Aquitânia (CENPA), Porto, 1986. Return to text

55  Ibid., p. 6. Return to text

56  Marques, Gonçalo Maia, Do vinho de Deus ao vinho dos Homens, op. cit., p. 145. Return to text

57  Correia, Francisco Carvalho, O Mosteiro de Santo Tirso, de 978 a 1588…, op. cit., p. 484. Return to text

58  Silva, Francisco Ribeiro da, « Vinha e paisagem nos Concelhos de Amarante e Valpaços nos meados do Séc. XVIII », dans António Barros Cardoso et Sílvia Trilho (dir.), 1° Congresso internacional Vinhas e vinhos. Actas, op. cit., p. 170-171. Return to text

59  Oliveira, Aurélio de, « Vinhos em Portugal antes das regiões demarcadas », op.cit., p. 165-166. Return to text

60  Marques, Gonçalo Maia, Do vinho de Deus ao vinho dos Homens, op. cit., p. 44. Return to text

61  Smyth, Alfred, Oporto et ses vins, Paris, J.-B. Baillère et fils, 1900, p. 25. 
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62  Silva, Francisco Ribeiro da, « Os Ingleses e as circunstâncias políticas do negócio dos vinhos do Porto (1756-1800) », dans Douro. Estudos & Documentos, Porto, Gehvid, n° 18, p. 112. Return to text

63  « On essaie de déraciner la culture des vignobles dans le Sud du pays, et il y a même des mesures assez violentes pour les remplacer par des terres à blé ; non pas seulement dans le but de parer à la disette chronique de céréales, mais plutôt en raison de la concurrence que ces vins portaient au vin de Porto. » Godinho, Vitorino Magalhães, « Problèmes d’économie atlantique. Le Portugal, flottes du sucre et flottes de l’or (1670-1770) » dans Annales, ESC, année 1950, vol. 5, n° 2, p. 184-197. Return to text

64  Silva, Francisco Ribeiro da, « Os Ingleses e as circunstâncias políticas… », op. cit., p. 113. Return to text

65  Sequeira, José Taveira de Magalhães, 1838, cité par Sousa, Fernando de, « A companhia Geral da Agricultura das vinhas do Alto Douro (1756-1978) », dans Os Arquivos da Vinha e do Vinho no Douro, Porto, Cepese/Edições Afrontamento, 2003, p. 27. Return to text

66  Enjalbert, Henri, « L'Alto-Douro : les Vins de Porto. Un vignoble de renommée mondiale », Les Cahiers d'Outre-Mer, année 1949, n. 8, p. 294 ; DOI : https://doi.org/10.3406/caoum.1949.1646 Return to text

https://www.persee.fr/doc/caoum_0373-5834_1949_num_2_8_1646

67  Cardoso, António Barros, « O Douro e o alvará de instituição da companhia pombalina (1756) » dans Glória Teixeira (dir.), Direito rural: Doutrina e Legislação fundamental, Porto, Vida Económica, 2013. Return to text

68  Silva, Francisco Ribeiro da, « Os Ingleses e as circunstâncias politicas do negócio dos vinhos do Porto », op. cit., p. 123. Return to text

69  L’expression est de José Viriato Eiras Capela, citée par Marques, Gonçalo Maia, Do vinho de Deus ao vinho dos Homens…, op. cit., p. 47. Return to text

70  La formule, heureuse, est du viticulteur Simão Pedro Aguiã. Return to text

71  Barreto, António, « O vinho do Porto e a intervenção do Estado, Análise social, vol. XXIV, 1988, p. 376. Return to text

72 La peur qu’ont les négociants bordelais du mélange et de la fraude se retrouve à Porto, par exemple dans la réglementation concernant les tavernes. Cardoso, António Barros, Vinhos verdes. A região, a história e o património, op. cit., p. 134. Return to text

73  Cardoso, António Barros, et Vilas Boas, Cláudia, « Porque é que a Sociedade Pública d’Agricultura e Comércio da Província do Minho não chegou a nascer? » dans Revista da Faculdade de Letras – História, III Série, vol. 8, Porto, Departamento de História da Faculdade de Letras, 2007, p. 49-95. Return to text

74 La production fruitière s’est développée (prunes dans l’Agenais et, plus tard, primeurs et raisin de table dans la région de Moissac), DION, Roger, « L'ancien privilège de Bordeaux » dans Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, tome 26, fascicule 4, 1955, p. 234 ; Return to text

DOI : https://doi.org/10.3406/rgpso.1955.4663

www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1955_num_26_4_4663

75 Cardoso, António Barros, Vinhos verdes. A região, a história e o património, op. cit., p. 125. Le rattachement du Portugal au royaume d’Espagne entre 1580 et 1640 avait éloigné les marchands britanniques. Return to text

76 Ibid., p. 125. Return to text

77 Ibid., p. 126. Return to text

78 Lachiver, Marcel, Vins, vignes et vignerons. Histoire du vignoble français, Paris, Fayard, 1988, p. 298. Return to text

79  En 1699-1700, « vers l’étranger, malgré la paix revenue, l’Angleterre, tout entière tournée vers l’Espagne et le Portugal, boude nos vins. […] Au total, ce sont 33 200 tonneaux de vin [de Bordeaux] qui entrent dans les Provinces Unies contre 3 200 tonneaux dans les îles Britanniques. La disproportion est de taille et méritait d’être soulignée ». Lachiver, Marcel, Vins, vignes et vignerons…, op. cit., p. 306. Return to text

80 Huetz de Lemps, Alain, Vignobles et vins du Nord-ouest de l’Espagne, Bellenef, 1967, p. 220. Return to text

81  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 143. Return to text

82  Juan Piqueras signale, à propos de la Galice, un foyer littoral secondaire qui, venu de la région des vinhos verdes, a traversé le fleuve Miño à la hauteur de Salvatierra et s’est ensuite étendu vers l’amont du fleuve et dans le nord. Piqueras Haba, Juan, « La filoxera en España y su difusión espacial: 1878-1926 », Cuadernos de Geografía, n° 77, Universitat de València, 2005, p. 101-136. Return to text

83  « Le “succès” du vin américain est dû à l’oïdium. En effet, les variétés américaines y sont moins sensibles que la vigne européenne. Dans les régions humides où l’oïdium est une menace constante, les vignes américaines ont survécu longtemps : dans le Minho, dans les îles de l’Atlantique (à Madère et aux Açores, il y a encore beaucoup de vin américain, appelé “vin parfumé” – vinho de cheiro), dans la vallée du Vouga et la région de Lafões. Par ailleurs, les vignes américaines produisent davantage, ce qui est un grand avantage quand les vignes se situent à la bordure des champs agricoles. » Virgílio Loureiro, courrier. Return to text

84  Ibid. Return to text

85  Costa, Bernardo Camilo Cincinnato da, et Castro, D. Luiz de, Le Portugal au point de vue agricole, Lisbonne, Imprimerie nationale, 1900. Return to text

86  Costa, Bernardo Camilo Cincinnato da, Le Portugal vinicole. Recherches sur l’ampélographie et les valeurs œnologiques des principaux cépages du Portugal, Lisbonne, Imprimerie nationale, 1900. Return to text

87  Costa, Bernardo Camilo Cincinnato da, et Castro, D. Luiz de, Le Portugal au point de vue agricole, op. cit., p. 360. Return to text

88  Il faut comprendre « entre maduros e verdes » : entre « mûrs » et verts. Return to text

89  Cette même classification est reprise dans Pereira, G., « Les vignobles du Nord du Portugal », op. cit., p. 211. Return to text

90  Dion, Roger, Histoire de la vigne et du vin en France, op. cit., p. 242. Return to text

91  Loi du 18/09/1908 et décret du 01/10/1908. Return to text

92  Décret-loi n° 10/92 du 03/02/1992. Return to text

93  Décret n° 12 866 de 1926. Return to text

94  Décret-loi n° 28 783 du 23/06/1938. Return to text

95  Le cahors a connu un phénomène comparable après le phylloxéra. L’obtention de l’AOC en 1971 a nécessité au préalable l’arrachage des plants hybrides et la replantation en cépages autorisés. La raison pour laquelle les vignes américaines, responsables du phylloxéra, ont été introduites est la même que pour le vinho verde. En effet, elles ont été initialement plantées pour leur résistance à l’oïdium. « En 1865, des dépérissements avaient été constatés près de Tarascon où un pépiniériste importateur de végétaux exotiques vendait des vignes américaines résistantes à l’oïdium. » Baudel, José, Le vin de Cahors, Éditions quercynoises, 1972. M. Maradennes, vieux viticulteur de Vire sur Lot, rappelle les rendements exceptionnels obtenus avec les hybrides producteurs directs (150 hl à l’ha) dans les années 1950 et la résistance de ces plants au gel de l’hiver 1956. Return to text

96  Guimarães, j. a. Gonçalves, Almeida, Graça Nicolau de, « A comercializaçao do vinho verde por empresas de vinho do Porto », dans Vinho verde. História e Património, op. cit., p. 67. Return to text

97  Pour citer une expérience surprenante, un ami portugais goûtant un cahors sans sulfites y retrouve le goût de raisin du vinho americano de son enfance. Return to text

98  Entretien avec Aurélio Ramos, agriculteur à Vila-Chã (concelho de Esposende) ; août 2015. Return to text

99  Ibid. Return to text

100  Ibid. Return to text

101  Estado Novo : régime politique qu’a connu le Portugal de 1933 à 1974. Return to text

102  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 189. Return to text

103  Guichard, François, « La région du vinho verde », op. cit., p. 417. Return to text

104 Guichard, Francois, « Le vignoble portugais et la Communauté économique européenne ». In: Méditerranée, troisième série, tome 65, 3-1988. Vignobles et vins dans les pays méditerranéens, p. 37-44 ; DOI : https://doi.org/10.3406/medit.1988.2564 Return to text

https://www.persee.fr/doc/medit_0025-8296_1988_num_65_3_2564.

105  Pour une analyse très fine des transformations dans le concelho de Melgaço, et du rôle moteur « des migrants, des notables, des “gros” propriétaires et des éligibles [aux aides de la CEE] », Wateau, Fabienne, « D’une production d’autoconsommation à une production rentable : le cas de la vigne dans l’Alto Minho », dans Brito, Joaquim Pais, Baptista, Fernando Oliveira, Pereira, Benjamim Enes (dir.), O voo do arado, Museu de Etnologia, Lisboa, 1996, p. 289-299.   Return to text

106  Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 190. Return to text

107  Parente, Sofia Carvalho, Adegas cooperativas na região demarcada dos vinhos verdes. Qualidade e estratégias comerciais, Instituto Superior de Agronomia, Departamento de Economia Agrária e Sociologia Rural, non daté, p. 12. Return to text

108  Site web de la cvrvv (www.vinhoverde.pt). Return to text

109  Arrêté n° 28/2001 du 6/01/2001. Return to text

110  Les terroirs viticoles des concelhos de Caminha, Vila Nova de Cerveira, Valença, Paredes de Coura, dans le nord-ouest de la région, et de ceux de Gondomar, Lousada, Maia, Matosinhos, Porto, Valongo, autour de Porto ont droit à l'appellation Vinho verde mais pas à l’indication supplémentaire « sous-région ». Pour Hélder Marques, l’absence de la vigne dans les concelhos littoraux de l’extrême nord-ouest constitue une différence surprenante par rapport à la Galice. Marques, Hélder, « Região demarcada dos vinhos verdes », op. cit., p. 142. Return to text

111  Guichard, François, « La région du vinho verde », op. cit., p. 403 et 408. Return to text

112  Arrêté n° 152/2015 du 26/05/2015. Voir Annexe n° 2. Return to text

113  Mota, Maria Teresa da Fonseca Oliveira Pereira da, « Contributo sobre a origem de alguns nomes de castas…, op. cit., p. 241. Return to text

114  Voir plus bas « Cépages et terroirs ». Return to text

115  Le cépage arinto est ainsi connu « sous le nom de pedernão dans le sud de la Région, d’azal espanhol, azal galego ou branco espanhol à Amarante, de pé de perdiz branco à Cabeceiras de Basto, de rabo de ovelha à Lousada, de chapeludo à Castelo de Paiva, Cinfães et Vale do Sousa, de perdigão à Mondim de Basto et de cerceal à Arouca ». Vine to Wine Circle (www.vinetowinecircle.com). Ce site a notamment pour ambition « de faire connaître l’immense trésor de la glorieuse histoire des variétés ibériques et d’informer sur ce pôle génétique et son adaptation aux multiples situations de terroir de cette Péninsule (zone de climat chaud avec des cépages autochtones spécifiques) ». Return to text

116  Le graphique a été obtenu en regroupant les sous-régions à partir de leurs ressemblances visuelles. Return to text

117  Décret-loi 10/1992 du 3 février 1992. Return to text

118  Financial Times – « Portugal’s New Colours ». https://www.ft.com/content/72de8622-c634-11e1-a3d5-00144feabdc0. Return to text

119  Jornal de noticias, www.jn.pt/local/noticias/viana-do-castelo/melgaco/interior/uvas-de-alvarinho-sao-as-mais-caras-do-pais-4814482.html?id=4814482. Return to text

120  www.jornaldenegocios.pt/empresas/agricultura-e-pescas/vinho/detalhe/vinho-verde-poe-no-fresco-recorde-de-exportacoes-em-2017. Return to text

121  https://www.nytimes.com/2013/07/03/dining/vinho-verde-portuguese-for-cheap-and-cheerful.html. Return to text

122  http://www.snooth.com/articles/millennial-wine-consumers-in-the-united-states/?utm_campaign=15125&utm_medium=email&utm_source=all&utm_content=85178 Return to text

123 L’ombre des valeurs du Nouveau monde se dessine. Dans une brochure de présentation de neuf viticulteurs du concelho de Arcos de Valdevez (sous-région du Lima), il est écrit que tel vin « a obtenu 90 points chez Robert Parker », ou – mention tout à fait inédite au pays des vinhos verdes –, a été « élevé en futs de chêne français ». Return to text

Illustrations

References

Electronic reference

Sylvie Escande, « Le vinho verde », Territoires du vin [Online], 10 | 2019, 16 October 2019 and connection on 21 November 2024. Copyright : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/territoiresduvin/index.php?id=1783

Author

Sylvie Escande

Docteur en Histoire

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