Pourquoi l’humour des écrivains de l’ex‑Allemagne de l’Est est‑il intraduisible ? (Mais pourquoi faut‑il quand même le traduire ?)

  • Why is the humor of former GDR prose writers untranslatable? Why should it however be translated?

DOI : 10.58335/eclats.91

Traduire l’humour est difficile. Lorsque celui‑ci est essentiellement contextuel, référentiel et codé, comme il l’est dans la littérature de l’ex‑Allemagne de l’Est, sa traduction s’apparente à un défi. À partir de l’exemple représentatif du Hinze‑Kunze‑Roman de Volker Braun sont considérées les difficultés de traduire un tel humour éminemment politique, voire sa résistance totale à cette épreuve, ainsi que les différentes significations que peut revêtir alors une traduction.

Translating humour is difficult. When it is essentially contextual, referential and encrypted, as it is in GDR literature, its translation represents a real challenge. Using the representative example of the Hinze‑Kunze‑Roman by Volker Braun, this paper considers the difficulties to translate such a political humour, if not the absolute impossibility to do it, as well as the different meanings a translation can adopt then.

Humor zu übersetzen ist schwierig. Wenn dieser im Wesentlichen kontextuell, referentiell und verschlüsselt ist, wie es in der DDR‑Literatur der Fall ist, grenzt die Übersetzung an Herausforderung. Am repräsentativen Beispiel von Volker Brauns Hinze‑Kunze‑Roman werden die Schwierigkeiten aufgezeigt, solch eminent politischen Humor zu übersetzen, ja sogar dessen absolute Unübersetzbarkeit, sowie die verschiedenen Bedeutungen, die eine Übersetzung dann annehmen kann.

Plan

Texte

Durant les 40 années de régime socialiste dans l’ex‑Allemagne de l’Est, l’humour a fait partie des ressorts utilisés par les écrivains afin de poursuivre leur travail malgré les directives strictes imposées. Reposant sur la satire, la parodie et le jeu avec un héritage littéraire et philosophique, détournant les normes imposées par le réalisme socialiste – doctrine et orientation officielle donnée à l’art et à la littérature en RDA – ou les conduisant ad absurdum, cet humour qui fait fi de l’idéologie en vigueur résiste‑t‑il à l’épreuve de la traduction ? Parmi les écrivains ayant recouru à l’humour, nous prendrons l’exemple représentatif de Volker Braun et de son Hinze‑Kunze‑Roman1 publié en 1985, un des rares textes satiriques de la RDA à avoir été traduits en français2. L’humour y est généré par un cadre du parti et son chauffeur qui pérégrinent dans l’Est de Berlin, peu importe vers quelle destination pourvu que ce soit toujours « en avant ! », selon le mot d’ordre de toute société socialiste. À travers les « détours du réalisme3 », que le narrateur se propose de décrire en détail « dans l’intérêt de la société » (Braun, 1988b, p. 7), s’ébauche une peinture à la fois drôle et intransigeante de la RDA dans les années 1980. Or, l’humour essentiellement contextuel, référentiel et codé, qui puise une grande partie de sa force dans les interlignes, y représente une véritable gageure pour le couple franco‑allemand de traducteurs4 qui s’est attelé à la tâche. Nous observerons ce que Volker Braun nomme ironiquement « des produits facilement exportables5 », tâcherons de dégager si leur transposition dans la langue‑cible peut s’effectuer ou non et dans quelle mesure celle‑ci peut aussi être d’intérêt pour une autre société.

« Des produits facilement exportables » ?

Quand Volker Braun évoque à la dernière page du Hinze‑Kunze‑Roman « les traducteurs déjà à l’affût derrière les colonnes Morris » (Braun, 1988b, p. 176), il sait (et s’en délecte !) qu’il leur réserve une tâche délicate, car le texte présente une multitude de stratégies humoristiques de différents ordres, communes à la plupart des textes littéraires de RDA qui se servent de l’humour. Dans la préface du numéro de la revue Humoresques consacré à la traduction de l’humour, Yen‑Maï Tran‑Gervat écrit :

[…] Interroger sur « ce qui passe » ou non en traduction, de l’humour analysé dans le texte original, c’est aussi poser la question de ce qui constitue le cœur de cet humour : son fonctionnement, ses présupposés, ses éléments et la manière dont ils jouent nécessairement ensemble pour produire l’effet humoristique. (2011, p. 6)

Dans le texte qui nous occupe, l’humour comme « stratégie » nous place d’emblée au cœur de la question.

Commençons par les accrocs les plus évidents, ceux qui sont liés tout simplement à la langue allemande. On connaît la difficulté que rencontrent les traducteurs à transposer des jeux de mots ou des locutions figées, or le roman de Volker Braun en est truffé. Par exemple, Kunze le fonctionnaire rebaptise la rue dans laquelle habite Hinze son chauffeur, la Lottumstraße, en Lotterstraße. Sachant que lotterig signifie « négligent », Lotterbube « vaurien » et Lotterleben « une vie de débauche », Kunze déprécie par ce simple jeu de mots le lieu de vie de son chauffeur, il lui fait aussi une injustice car le lecteur sait déjà à ce stade de l’histoire que c’est Kunze qui mène une vie de patachon et non Hinze, et peut‑être Kunze anticipe‑t‑il en outre l’aventure amoureuse qu’il vivra dans cette même rue avec la femme de Hinze. Le jeu de mots véhiculant tous ces sens pouvait difficilement être traduit et fit l’objet d’une brève note du traducteur. Il en va de même pour certaines locutions figées, détournées (défigées !) par les personnages : Dir ist geholfen, weil du aus dem Schneider, oder aus dem Schlosser bist (Braun, 1988a, p. 31). En allemand, l’expression aus dem Schneider sein signifie « être sorti d’affaire » et der Schneider « le tailleur », ici Hinze ajoute le métier de Schlosser (serrurier) ce qui sape le sens premier de la locution pour insister sur le fait que Kunze le cadre du parti est sorti (dans le double sens de « est issu de » et « a échappé à ») de la condition ouvrière (alors que la RDA se revendique comme le « pays des ouvriers et des paysans »). Ce trait d’esprit du chauffeur envers son maître n’a pas été traduit en français et rendu par une formulation sans image et explicite « Tu t’en es sorti parce que tu n’es plus ouvrier » (Braun, 1988b, p. 29). Même si l’humour porte sur de l’allemand standard, il prend d’emblée une connotation singulière du fait d’être formulé dans le contexte politique de la RDA, où un jeu de mots est toujours plus qu’un jeu de mots, porteur qu’il est d’une critique ou d’une revendication.

La difficulté augmente si l’on considère que l’allemand parlé et écrit en RDA n’est pas tout à fait le même que celui de l’Ouest de l’Allemagne, certains écrivains comme Uwe Johnson partant même du principe que deux langues se sont développées de part et d’autre du Mur6. Comment rendre alors cette différence en français ? D’autant que Volker Braun dans son roman ne cesse de parodier cette langue, notamment les emprunts du russe (Kombinat, Initiator, ou encore Intelligenz pour désigner une classe sociale), les enchaînements de termes au génitif que le russe utilise souvent, ou encore les mots composés, tels que Marx aimait à en former, (ici Datenfernübertragungseinrichtung, Frauenförderungsplan [Braun, 1988a, p. 75]). Kunze lui‑même commente la langue de bois qui en résulte lorsqu’il écoute les discours :

Oder er selektierte für Minuten Kleinworte: materiellen geistigen allseitig gebildeter sozialistischer sozialistischen beizutragen, politischen materiellen kulturellen gesellschaftlichen wichtigste. Es ergab immer noch die gleiche Information, es langte die Hälfte der Wörter. (Braun, 1988a, p. 27)

Ou bien pendant quelques minutes, il ne retenait que des adjectifs : matériel spirituel universel formé socialiste, politique matériel culturel social essentiel. Le résultat, c’était toujours la même information, la moitié des mots suffisait. (Braun, 1988b, p. 25)

L’effet comique est assuré7, et ce d’autant plus pour les citoyens de RDA qui, face aux discours martelés à l’identique n’avaient plus eux aussi qu’à laisser glisser les mots sans y prêter plus d’attention. Volker Braun parodie ainsi la langue de bois des fonctionnaires, ce qui n’a en soi rien d’exclusivement est‑allemand, mais l’humour de tous ces passages est surtout référentiel car les discours de Honecker, Secrétaire général du parti, et ceux d’autres hommes politiques influents en RDA sont constamment repris, détournés.

L’humour relevant de la langue8 (et nous ne mentionnons ici ni le berlinois ni le saxon parodiés par Volker Braun) va plus loin encore dans la mesure où l’allemand des écrivains satiriques de RDA se doit aussi de déjouer la censure. L’auteur utilise à plusieurs reprises un langage codé plein d’humour. Citons l’exemple des scheinbare Spaziergänger (Braun, 1988a, p. 62), des « faux flâneurs » (Braun, 1988b, p. 56), pour désigner des informateurs secrets de la Stasi, un mot totalement anodin qu’un lecteur vigilant ne peut toutefois manquer de repérer. Il en va de même pour les hauptamtlichen Leser (Braun, 1988a, p. 150), traduits par des « lecteurs professionnels » (Braun, 1988b, p. 133) et qui ne signifient ni plus ni moins que les lecteurs de la censure dont on disait pourtant qu’elle n’existait pas en RDA. Dans quelle mesure un lecteur français sera à même de saisir tous ces traits d’humour cachés, la dimension humoristique d’un téléphone ou d’une banane ? De la même façon, l’utilisation non conventionnelle de la langue dans ce roman (nombreux néologismes, interruptions en milieu de phrase, syntaxe inhabituelle, etc.) représente autant de victoires dans la joute permanente avec la censure (une manœuvre de compromis et de concessions qui durera dans le cas de ce roman quatre ans). Elle sera non seulement très difficile à rendre dans une langue qui ne connaît pas les mêmes règles grammaticales, mais elle perdra aussi tout le sens qu’un écrivain est‑allemand peut lui donner et qu’un lecteur est‑allemand peut comprendre, à savoir un jeu lexical et syntaxique qui représente en même temps un acte de résistance envers l’anti‑formalisme prôné par le réalisme socialiste.

D’emblée, il apparaît clairement que l’humour – et même quand il est dans le roman sexuel ou scatologique – est éminemment politique et sa traduction toujours de l’ordre d’une perte. Ceci n’a rien de nouveau. « Combien de fois n’a‑t‑on pas fait remarquer […] », écrit Henri Bergson dans Le Rire, « que beaucoup d’effets comiques sont intraduisibles d’une langue dans une autre, relatifs par conséquent aux mœurs et aux idées d’une société particulière9 ? » Dans le roman, les nombreux dialogues entre Hinze et Kunze abordent des thèmes cruciaux de la politique est‑allemande (la conscience des ouvriers, les différences entre hommes et femmes, le capitalisme et le socialisme, la sagesse du peuple, etc.). Et c’est surtout Hinze, le chauffeur, qui pointe les contradictions, et Kunze le fonctionnaire d’État qui cède face à ses arguments poussés à l’absurde : Kunze mochte die Packpapiersprache dieses Experten nicht ertragen (Braun, 1988a, p. 182)(Kunze n’avait plus le cœur à supporter la langue de papier d’emballage de cet expert, [Braun, 1988b, p. 161]). Comment rendre durant la quasi-totalité du roman la drôlerie de cette « langue de papier d’emballage » que Volker Braun dénonce ici10 ? L’auteur brocarde l’ambition démesurée de la RDA qui prétend réaliser la grande idée du socialisme sans vouloir avouer que l’emballage est vide. Une anecdote racontée au début du roman l’illustre au sens littéral et au sens figuré du terme : pour que le plan soit respecté et tous les papiers tamponnés, une entreprise qui n’a pas pu fabriquer à temps les appareils demandés par un « pays frère » fait une livraison… de rien ! L’anecdote est rendue avec force détails cocasses tout à fait traduisibles, toutefois quand le narrateur joue sur la complicité avec ses lecteurs comme le veut l’humour de manière générale, ici cette complicité est d’ordre politique et représente une dénonciation vaste et périlleuse. En effet, quand Braun écrit : Die psychologischen Details hat jeder aus der Anschauung parat […] (Braun, 1988a, p. 18) (Les détails psychologiques, chacun les connaît par sa propre expérience […], [Braun, 1988b, p. 17]), il sous‑entend que tous ont été confrontés à ces arrangements quotidiens avec la théorie ou les normes11 et, plus avant, que la réalité vécue en RDA n’est qu’un leurre auquel tous participent comme si de rien n’était. C’est aussi la raison pour laquelle Hinze exige à plusieurs reprises de la RDA qu’elle revoie ses exigences à la baisse, ce qu’il nomme ramener die große Idee in ein handliches Format (Braun, 1988a, p. 105) (la grande idée à un format maniable [Braun, 1988b, p. 94]) ou encore la Weltanschauung à une Landanschauung (Braun, 1988a, p. 104) (« une vision du monde » à « une vision du pays » [Braun, 1988b, p. 93]), ce qui est d’autant plus drôle en allemand que le terme Weltanschauung (qui d’ailleurs est repris souvent tel quel en français) connaît une longue histoire philosophique et politique, le ridicule du néologisme Landanschauung en est d’autant plus marqué.

L’humour à l’épreuve de la traduction

S’agissant ici d’une Landanschauung, les écueils sont évidemment nombreux à l’heure de traduire, car la conception de l’humour dans ce roman repose sur l’observation et la déformation d’une réalité que le lecteur connaît parfaitement puisqu’il l’éprouve au quotidien. L’humour est plus qu’un acte de complicité, il brise des normes, des silences et des tabous, véhicule une critique difficilement formulable. Son effet en traduction présuppose une connaissance précise du contexte, comme beaucoup de prérequis.

L’humour a du mal à résister à la traduction dans la mesure où il entraîne de multiples associations propres au système de la RDA. Celles‑ci commencent dès le titre du roman. L’expression Hinze und Kunze signifie quelque chose de l’ordre de notre « Pierre, Paul, Jacques » français, impossible à utiliser ici du fait que les personnages ne sont que deux et que tout tourne autour de cette dualité, de cette dialectique. Un lecteur français n’associe certainement pas grand‑chose avec le titre « Le roman de Hinze et Kunze ». Et pourtant, une grande partie de l’humour du texte va en découler. Les noms Hinze et Kunze, c’est‑à‑dire ceux d’un « monsieur tout le monde », laissent entendre que les personnages sont peu différenciés, voire égaux, or il s’agit d’un cadre du parti et de son chauffeur, l’association donc du haut et du bas, de l’élite et du peuple, de la tête et des mains : ils sont donc égaux et inégaux dans le socialisme12 ! En même temps, leur distinction montre bien, malgré leur proximité apparente, que la conscience et le travail qu’ils incarnent ne sont pas unifiés en RDA, une schizophrénie de la société qui sera dénoncée de façon explicite. À eux deux, ils représentent également et surtout une nouvelle variante du rapport entre maître et valet : Der Herr und sein Knecht ritten durch die preußische Prärie (Braun, 1988a, p. 35) (Le maître et son valet chevauchaient par la plaine de Prusse [Braun, 1988b, p. 33]). On retrouve dans Herr und Knecht les mêmes initiales que Hinze et Kunze ; il est amusant de noter que c’est Hinze en tant que chauffeur qui est donc le Knecht et Kunze le fonctionnaire le Herr. Le chiasme montre l’imbrication extrême des personnages (le maître est le valet et inversement) et surtout remet en question les rôles respectifs de classes sociales censées ne pas exister en RDA. Le lien étroit qui unit les personnages va également les conduire jusqu’à une scène d’homo‑érotisme et l’auteur fictif qui ne cesse d’intervenir dans son récit avouera lui‑même se sentir Herr und Knecht13. Le jeu est poursuivi dans le texte avec toutes les déclinaisons possibles, auxquelles se mêlent le rapport très marqué à l’héritage philosophique (la conception du maître et du valet qui depuis Hegel joue un rôle central dans l’analyse des relations de pouvoir) ainsi qu’à l’héritage littéraire (ont servi clairement de modèle le Don Quichotte de Cervantès, Jacques le fataliste de Diderot ainsi que la pièce de Brecht Herr Puntila und sein Knecht Matti). Volker Braun par l’humour avec lequel il impose sa nouvelle variante socialiste du maître et du valet reprend souverainement cet héritage qu’il déplace, déforme, dévie, un pied de nez aux normes d’appropriation de l’héritage culturel telles qu’elles étaient prônées.

Dans le fond et la forme, le Hinze‑Kunze‑Roman tire d’ailleurs une grande partie de son humour de l’écart avec les normes en vigueur concernant la littérature, planifiée au même titre que tout autre domaine en RDA. Le réalisme socialiste imposé aux écrivains comme règle à suivre détermine tant les sujets que la forme dans laquelle ils doivent être décrits et représente un véritable carcan dénoncé comme tel par les écrivains de l’ex‑RDA. Volker Braun annonce dès l’incipit le principe de son roman, à savoir un jeu permanent et hilarant avec la norme :

Was hielt sie zusammen? Wie hielten sie es miteinander aus? Ich begreife es nicht, ich beschreibe es. Und immer der eine mit dem anderen, und der andere machte mit? So verhielt es sich, was weiß ich; verflixt und zusammengenäht. Wenn man sie fragte, antwortete der eine für den anderen und der andere mit:
— Im gesellschaftlichen Interesse.
— Aha, natürlich,
erwidere ich: das Ding, um dessentwillen ich schreibe. (Braun, 1988a, p. 7)

Qu’est‑ce qui les maintenait ensemble ? Comment supportaient‑ils d’être ensemble ? Je ne le saisis pas, je le décris. Et toujours l’un avec l’autre, et l’autre était partant ? Il en était ainsi, que sais‑je ; sacrebleu, le diable et son train. Quand on les interrogeait, l’un répondait pour l’autre et l’autre en même temps :
— Dans l’intérêt de la société.
— Ah ! Ah !, naturellement,
réponds‑je : cette chose au nom de laquelle j’écris. (Braun, 1988b, p. 7)

Même si le traducteur a su donner un ton plaisant à ce passage, il n’en reste pas moins qu’une grande partie de ce qui en constitue l’humour échappe à la traduction. L’écrivain, tel que le conçoit le réalisme socialiste, se doit d’éclairer la réalité socialiste en la décrivant de manière précise et optimiste et ce dans un objectif d’éducation du peuple. Or ici, le narrateur à la première personne, dont on ignore qui il est véritablement14, commence par poser des questions sur des personnages (au lieu de les décrire) dont il ne dévoile encore ni l’identité15 ni le lien et avoue son impuissance à cerner la réalité tout en soulignant évidemment sa bonne volonté. Il sème d’entrée de jeu la confusion, critique implicitement une doctrine qui demande de décrire sans chercher à comprendre, entame un dialogue avec ses personnages qui lui livrent la raison pour laquelle ils sont ensemble (comme s’ils étaient autonomes) et pour laquelle il doit écrire, l’intérêt de la société (ses personnages lui dictent sa conduite, nouvelle preuve amusante que celle‑ci est tout à fait artificielle). Toute l’ironie du passage rend l’incipit amusant, dynamique et spontané, rien de commun avec ce que la RDA attendait de ses écrivains et rien de bien drôle pour un lecteur méconnaissant le contexte16. Le roman va se poursuivre ainsi et le narrateur de reconnaître (avec une satisfaction à peine dissimulée) que son texte n’avance guère et que l’action ne suit pas de plan, eine planlose Handlung (Braun, 1988a, p. 55), ce qui dans un pays totalement planifié a de quoi faire rire.

En outre, il se disculpe en alléguant que c’est justement l’intérêt de la société qui l’oblige à ces détours : Vergessen wir nicht, dass wir im gesellschaftlichen Interesse schreiben und auch lesen. Weshalb sonst kann so vieles nicht direkt gesagt werden? (Braun, 1988a, p. 18) (N’oublions pas que nous écrivons et que nous lisons dans l’intérêt de la société. Pourquoi sinon tant de choses ne peuvent‑elles pas être dites directement ? [Braun, 1988b, p. 17]). L’auteur fictif/narrateur va même jusqu’à anticiper la critique qui peut être adressée à son roman. Comme le titre l’indique, le Hinze‑Kunze‑Roman est avant tout l’histoire d’un roman, de sa naissance dans le contexte de la RDA et par conséquent de sa nécessaire critique. Afin de devancer des reproches inévitables, l’auteur fait intervenir dans sa fiction une critique littéraire nommée Messerle (ce qui signifie « petit couteau » et est en soi un trait d’humour sachant qu’une critique littéraire très connue à l’époque en RDA se nomme Anneliese Löffler, qui rappelle le mot Löffel [cuiller], le jeu de mot n’a pas été traduit). Le comble de l’humour, c’est que les critiques que Messerle adresse au roman dans la fiction sont peu ou prou identiques à celles que Löffler adressera au roman dans la réalité17. La fiction croit donc dépasser la réalité, mais se trouve rattrapée par elle. Le roman fait de l’humour par anticipation, presque malgré lui.

Si l’humour fait partie des intraduisibles et en tant que tel « […] n’est pas le symptôme d’un échec de la traduction, mais un événement constitutif de l’acte de traduire […]18 », l’intraduisible est tellement démesuré ici qu’il semble dévastateur. Mais ne faut‑il pas plutôt inverser la perspective pour se demander ce qu’il reste dans la traduction de ce texte de l’humour qui lui est inhérent ?

Traduire l’humour dans l’intérêt de la société

Quand l’humour dans le contexte précis de la RDA des années 1980 a un objectif bien déterminé (l’intérêt de la société, même si celui‑ci n’est évidemment pas celui que conçoivent pour elle les dirigeants du pays) se pose la question du bien‑fondé de sa traduction. Non seulement l’humour du roman en question est difficilement traduisible, mais peut‑on aussi prétendre qu’il ait encore de l’intérêt une fois traduit ? La question sous‑jacente étant : le texte de Volker Braun, comme ceux de bon nombre d’écrivains en RDA, doit‑il être lu uniquement pour sa dimension politique et non pour sa qualité littéraire (objet de longs débats en Allemagne) ?

L’auteur fictif, anticipant de nouvelles critiques, dit de son roman qu’il est un « texte douteux » (Braun, 1988b, p. 176), nécessaire dans une société dont le fonctionnement est douteux19. Dans quelle mesure le sera‑t‑il toujours une fois traduit ? Volker Braun mène dans le Hinze‑Kunze‑Roman « une esthétique opérationnelle20 », et ce à l’aide d’un humour subversif qu’il définit vers la fin du roman en ces termes : Was jetzt zu sagen ist von unseren Menschen, mögen sie auch Hinze und Kunze heißen […], verlangt einen Realismus, der an die Nerven geht, einen entschiedeneren, einen konspirativen Realismus (Braun, 1988a, p. 184) (Ce qu’il faut dire en ce moment de nos compatriotes, dussent‑ils s’appeler Hinze et Kunze […], cela exige un réalisme qui touche le nerf sensible, un réalisme plus résolu, un réalisme conspirateur [Braun, 1988b, p. 163]). Son réalisme conspirateur, à la fois origine et objectif de son humour, s’adresse à un système particulier et par conséquent à un groupe de lecteurs restreint. Traduit, il perd sa principale cible et ne peut avoir le même effet. Mais l’« esthétique opérationnelle » telle qu’il la conçoit n’a‑t‑elle pas aussi de la valeur au‑delà des frontières de l’ex‑RDA ? Toute Landanschauung que soit le roman, son intérêt dépasse la politique locale. Ne serait‑ce que pour sa réflexion sur le rapport maître et valet, sur la langue de bois des politiciens, sur la remise en cause du progrès et de la marche de l’Histoire. Il en va de même pour le dynamisme de la langue qu’il instaure, prouvant que l’écriture est encore un acte de création, non de production ou de reproduction de modèles établis. Et ceci n’est pas l’apanage de la société est‑allemande.

Peut‑on dire pour autant que l’humour est traduit si l’on ne (sou)rit pas tout à fait pour les mêmes raisons ? L’un des principes narratifs majeurs du « réalisme conspirateur » consiste en une manipulation de la réalité. Dans le contexte de la RDA, ce principe devient un acte politique : le narrateur manipule plus qu’il ne décrit, la réalité narrée est fiction tout comme l’est la réalité entière en RDA, un vaste trompe‑l’œil qu’il dénonce. Les interventions permanentes de l’auteur fictif laissent entendre que le décalage est grand entre le plan tel qu’il existe et qu’il est annoncé et ce qu’il nomme « la réalité », pire encore il s’avoue parfois dépassé par cette dernière : Es war eben noch Frühling, in meinem Plan, die Realität auf dem Papier sieht anders aus. Schnee fiel, Mitte Januar (Braun, 1988a, p. 55) (Dans mon plan, c’était encore le printemps, la réalité sur le papier est tout autre. La neige tombait. Mi‑janvier. [Braun, 1988b, p. 50]). Le narrateur brouille les pistes, ladite « réalité » n’est jamais qu’« une réalité sur le papier » et remet en cause la vérité objective (!) qu’il est tenu de décrire. Là où un lecteur est‑allemand reconnaîtra une provocation politique21, un lecteur français associera à ce genre de conduite narrative d’autres fictions littéraires où l’auteur « s’immisce en permanence dans l’action, en démasquant les conventions de la narration » (Braun, 1988b, 4e de couverture), entre autres, Cervantès, Sterne, Diderot ou peut‑être même Jean Paul. L’auteur s’inscrit ainsi dans un héritage romanesque européen. Ce n’est pas un hasard si la quatrième de couverture de la traduction française du Hinze‑Kunze‑Roman insiste sur le rapport avec Jacques le fataliste, qui est pourtant loin d’être la seule référence dans ce texte. C’est qu’il s’agissait de pointer ce que l’humour de ce texte a de commun avec celui auquel sera sensible un lecteur français. Mais cela est‑il suffisant pour être perçu par un lecteur français comme de l’humour ?

Loin de se contenter de manipuler la réalité vécue, l’auteur reprend et malmène tout un héritage littéraire et philosophique : « tout héritage », dit‑il, « relève de la polémique22 ». Il en va ainsi dans la leçon de philosophie appliquée que représente une scène de Hinze à la cantine qui ne sait se décider entre du goulasch, des petits pois et des nouilles à la vanille. Le passage qui fait près de quatre pages est tissé de citations de Engels (issues du Anti‑Dühring) se référant à Hegel sur la dialectique liberté‑nécessité, telle qu’elle fait partie du marxisme vulgarisé et donc connu de tous en RDA. Le passage traduit est forcément beaucoup moins drôle si l’on méconnaît la référence que l’auteur fictif dynamite en appliquant de façon absurde une théorie philosophique au premier degré (réalisme conspirateur oblige). Toutefois, la forme narrative choisie, celle de la collision entre la philosophie et la vie quotidienne, collision renforcée par l’intervention d’un lecteur (qui souligne l’absurdité de la chose ou pointe les contradictions) et les actions du personnage (qui contredisent le discours) donne un vrai élan à cette parodie burlesque dont la traduction française rend compte. Hinze qui vient de manger du goulasch, hésite à se resservir :

Je freier Hinzes Urteil in Beziehung auf das Menü, mit desto größerer Notwendigkeit wird der Inhalt seines Urteils, Nudeln, Erbsen, Gulasch, bestimmt sein; während die auf Unkenntnis beruhende Unsicherheit, die zwischen Erbsen, Nudeln und Rippchen scheinbar willkürlich wählt, eben dadurch ihre Unfreiheit beweist, ihr Beherrschtsein von dem Gegenstande – Von Nudeln und Gulasch? – Freiheit besteht in der auf Erkenntnis der Naturnotwendigkeit gegründeten Herrschaft über uns selbst und über – Und wenn er sich nun nicht beherrschen kann? Wenn er, aus irgendeinem Grund… aber er macht es wirklich! Da, Hinze läuft wieder zur Essensausgabe und schnappt sich… tatsächlich eine Schüssel süße Nudeln und lässt die Banane in der Jacke verschwinden. – Das ist ein Freßsack, ein Genießer, er tanzt aus der Reihe – Es ist Hinze. Er war einfach nicht satt. – Das ist ein anderes Problem. – Wieso? – Wir diskutieren nicht über den Hunger, sondern über die Philosophie. – Ja, die Philosophie ist richtig, sie ist die beste auf der Welt… (Braun, 1988a, p. 43 et suiv.)

Plus le jugement porté par Hinze sur le menu est libre, plus le contenu de son jugement en matière de nouilles, petit pois, goulasch sera déterminé par une nécessité d’autant plus grande ; tandis que l’hésitation, résultant de la méconnaissance, qui opère un choix apparemment arbitraire entre petits pois, nouilles et côte de porc, prouve par là‑même son absence de liberté, ou qu’elle est sous l’emprise de l’objet – Des nouilles et de la goulasch ? – La liberté, c’est la maîtrise de nous‑mêmes, basée sur la reconnaissance de la nécessité naturelle et de – Et s’il ne peut pas se maîtriser ? Si pour une raison quelconque… mais il le fait réellement ! Voilà, Hinze retourne au buffet et saisit effectivement un plat de nouilles sucrées et fait disparaître la banane dans sa veste. – C’est un goulu, un jouisseur, il refuse de s’aligner. – C’est Hinze. C’est simple, il n’était pas rassasié. – C’est un autre problème. – Comment ça ? – Nous ne discutons pas de la faim, mais de la philosophie. – Oui, cette philosophie est la bonne, elle est la meilleure du monde… (Braun, 1988b, p. 39 et suiv.)

L’auteur fictif, dans son souci de citer ses classiques et de décrire en détail la situation, se doit de tout rapporter, y compris les contradictions de son discours, montrant que théorie et réalité sont inconciliables. L’effet escompté du texte allemand est d’interroger, de déranger. Mais au‑delà de la dimension politique et subversive de ce passage, c’est aussi la mise en scène d’un auteur fictif poussé dans ses retranchements qui est drôle ici. Comme dans le reste du roman, la traduction fera ressortir le côté grotesque de la situation, l’humour viendra de la forme, sera peut‑être compris autrement et n’aura pas le même effet. Mais la traduction finalement n’est peut‑être jamais qu’un malentendu.

 

Parce que l’humour dans le Hinze‑Kunze‑Roman de Volker Braun est en allemand, en est‑allemand, en est‑allemand codé et en « langue de papier d’emballage » parodiée, il représente autant d’obstacles à l’entreprise de traduction. En tant que Landanschauung, le roman génère un humour aux strates aussi nombreuses que complexes, un humour entraînant des associations qui nécessiteraient bien des explications et n’auraient donc plus rien d’humoristique, un humour qui déjoue une norme connue et éprouvée, et qui compte sur une complicité périlleuse (des critiques se sont d’ailleurs interrogés sur l’effet de cet humour subversif quelques années seulement avant la chute du Mur). La traduction devra donc utiliser d’autres ressorts pour trouver une légitimité et sauver autant que faire se peut l’humour inhérent à ce texte. Peut‑être les différentes stratégies à l’origine de l’humour, une fois replacées dans une tradition littéraire que l’humour malmène, feront‑elles sourire un lecteur français. Comme un bon texte peut donner lieu à diverses interprétations, un bon texte humoristique peut l’être aussi pour des raisons différentes. Si l’on considère « […] l’intraduisible comme un point de bascule ou un lieu critique permettant d’analyser les objets, littéraires, culturels, médiatiques – non comme une limite de la traduction ou de la communication interculturelle23 […] », disons donc que la traduction ici peut être entendue comme une invitation à découvrir et à comprendre un contexte politique, social et culturel peut-être lointain pour un lecteur français. Une invitation au rire.

Bibliographie

Bauer Dirk (1993), Das sprachliche Ost-West-Problem: Untersuchungen zur Sprache und Sprachwissenschaft in Deutschland seit 1945. Étude, Peter Lang, Frankfurt am Main, Allemagne

Bergson Henri (1940), Le rire. Essais, PUF, Paris, France.

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Notes

1 Braun, 1988 [1985]. Retour au texte

2 La nouvelle de Christoph Hein, Einladung zum Lever bourgeois (1980), est aussi traduite en 1989, comme d’autres textes de Volker Braun. Retour au texte

3 Braun, 1988. Retour au texte

4 Il s’agit d’Alain Lance et Renate Lance-Otterbein. Retour au texte

5 Texte de rabat d’une édition du roman citée dans Braun, 1991, p. 225. Retour au texte

6 En 1964, trois ans seulement après la construction du Mur, Uwe Johnson écrit : Ich halte den Satz für zweifelhaft, dass wir alle in einer gemeinsamen Sprache schrieben und uns ausdrückten (Je considère comme douteux de prétendre que nous écrivions et nous exprimions dans la même langue).Voir Emmerich, 2005 [1996], p. 519. Nombre de linguistes se sont penchés sur la question, voir, entre autres, Bauer, 1993 ou encore Dieckmann, 1989. Retour au texte

7 De surcroît, l’oratrice est blanchisseuse, et tout le champ lexical de la lessive utilisé pour la décrire, elle et son discours, amène inévitablement l’idée d’un lavage de cerveau. Retour au texte

8 Humour qui relève déjà d’une première « traduction » : « En effet, même en langue source, il nécessite souvent une interprétation par son récepteur, une traduction intralinguistique […]. » Brisset, 2011, p. 131. Retour au texte

9 Bergson, 1940, p. 5. Retour au texte

10 Le narrateur ne cesse de répéter des termes comme Fortschritt (progrès), Emanzipation (émancipation), Bewusstsein (conscience) ou encore das Neue (le nouveau), évoquant par exemple das Neue am Neuen (Braun, 1988a, p. 46)(la nouveauté dans le nouveau, [Braun, 1988b, p. 42]), et même das Neue vom Neuen am Neuen (Braun, 1988a, p. 47) (le nouveau du nouveau dans le nouveau, [Braun, 1988b, p. 43]) pour tourner en dérision l’espoir de progrès dont le mot était porteur et, de manière générale, le décalage entre les grands idéaux et la réalité stagnante. Retour au texte

11 C’est, par exemple, le sens d’une allusion à la parodie de film policier „Agatha lass das Morden sein“, datant des années 1960 en RFA, et que, par conséquent, nul n’est censé connaître en RDA. La mention de ce film comme référence commune signifie que capter une chaîne de l’ouest était chose courante. Retour au texte

12 Cette idée est formulée en d’autres termes dans Braun, 1991, p. 224. Retour au texte

13 Ibid. Retour au texte

14 Le jeu de proximité et distance entre le narrateur, un auteur fictif et « l’auteur B » durera tout au long du roman. Retour au texte

15 Ces questions s’avèrent drôles après coup lorsque l’on apprend qui sont les personnages : comment l’élite supporte le peuple et inversement ? Retour au texte

16 Il en va de même pour la parodie du Leiterroman (roman sur les cadres de la RDA) ou du Ankunftsroman (roman sur l’entrée dans le monde socialiste du travail), on ne sait ici ni ce que Kunze dirige, ni vers quoi les personnages avancent, d’ailleurs ces derniers ou le narrateur ne manquent jamais de le souligner. Retour au texte

17 Voir Löffler, 9/10/1985. Retour au texte

18 Dünne, Schäfer, Suchet & Wilker, 2013, p. 4. Retour au texte

19 Douteux, il l’est dans la mesure où il ne répond pas aux attentes en proposant un miroir déformant de la société, douteux aussi parce qu’il doute et dépasse le doute pour provoquer et inciter à la réflexion. Retour au texte

20 Köhler, 1996, p. 18. Retour au texte

21 Ich muss nicht sagen, ob es ein Traum, eine Erfindung, die Wahrheit oder die Zeitung ist (Braun, 1988a, p. 152) (Je ne suis pas tenu de vous préciser s’il s’agit d’un rêve, d’une invention, si c’est la vérité ou le journal. [Braun, 1988b, p. 135]). Dans ce zeugma, la vérité relève tout autant de la fiction que le rêve, l’invention et la propagande de la presse accusée au passage, ce dont le narrateur se joue dans le roman tout entier. Retour au texte

22 Braun Volker, „Volker Braun und Christoph Hein in der Diskussion” in Chiarloni, Sartori & Cambi (dir.),1987, p. 440. Retour au texte

23 Dünne, Schäfer, Suchet & Wilker, 2013, p. 4. Retour au texte

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Référence électronique

Emmanuelle Terrones, « Pourquoi l’humour des écrivains de l’ex‑Allemagne de l’Est est‑il intraduisible ? (Mais pourquoi faut‑il quand même le traduire ?) », Éclats [En ligne], 1 | 2021, publié le 15 novembre 2021 et consulté le 21 novembre 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. DOI : 10.58335/eclats.91. URL : https://preo.u-bourgogne.fr/eclats/index.php?id=91

Auteur

Emmanuelle Terrones

Université François Rabelais de Tours (ICD, EA6297)

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