L’embourgeoisement par l’humour. Fever Pitch et le football anglais

  • Gentrification through humour. Fever Pitch and English football

DOI : 10.58335/football-s.377

p. 55-68

Résumés

Trente ans après sa publication, le roman de Nick Hornby, Fever Pitch (Carton Jaune), témoignage d’une époque révolue, apparaît à la fois comme annonciateur, reflet et vecteur du processus d’embourgeoisement du football anglais tout au long des années 1990. Le livre a eu un impact profond et durable, non seulement sur le monde de l’édition mais aussi sur le monde du supportérisme. Fever Pitch procède à une réhabilitation de l’humour dans le domaine du football. Reposant sur une étude de la littérature primaire et secondaire, ainsi que sur des entretiens avec des auteurs contemporains, des journalistes et de traducteurs, l’article cherche à évaluer l’héritage de ce roman singulier, publié à un moment charnière de l’histoire du football.

Thirty years after its publication, Nick Hornby’s autobiographical novel Fever Pitch, testimony of a bygone era, appears at the same time as a harbinger, mirror, and driver of the gentrification process of English football in the 1990s. This book has had a profound and lasting impact, not only on publishing houses but also on the lifeworld of supporters. Fever Pitch also rehabilitated humour, an oft-neglected element of football fandom. Based on the study of primary and secondary literature, as well as a number of interviews with contemporary authors, journalists and translators, the article aims at assessing the heritage of this singular novel, which came out at a turning point in the history of football.

Plan

Texte

Un OVNI littéraire tombé du ciel au mois de septembre 1992 : ni un roman, ni un journal intime, ni une autobiographie à part entière. Juste le récit, par un parfait inconnu, des deux longues décennies entre sa première visite dans un stade de foot, à onze ans, et la rédaction de ce livre, dernière tentative désespérée de lancer enfin une carrière littéraire au point mort. Une vie rythmée par la succession des saisons et des compétitions, et surtout par les matches d’un seul club, Arsenal, qui servent de repères à la quasi-totalité des 75 chapitres. C’est « La Vie d’un fan », comme le précise le sous-titre, pour le cas où l’on n’aurait pas saisi le jeu de mots subtil du titre principal, Fever Pitch, qui exploite l’homonymie entre les mots anglais pour le terrain de football et le pic d’une fièvre. Titre intraduisible et qui s’avéra involontairement prophétique. Aussitôt paru, Fever Pitch a été perçu à juste titre comme le témoignage d’une époque révolue, le souvenir déjà étrangement lointain d’un autre football, d’un type de « fièvre » dont on pressentait qu’il ne serait plus jamais atteint, d’un « pic » à partir duquel il y aurait logiquement une sorte de déclin. Pourtant, ce fut une simple coïncidence. En aucun cas son auteur n’aurait pu prévoir que la publication de son premier roman s’inscrirait à ce point dans la métamorphose profonde de ses objets mêmes, le football professionnel et le supportérisme. Pendant l’écriture, la Premier League était devenue une réalité ; à la parution, la Ligue des champions avait remplacé la bonne vieille Coupe d’Europe ; et quand les traductions du roman, commandées après son succès aussi inattendu que fulgurant, sortaient à travers l’Europe, l’arrêt Bosman avait déjà donné un autre coup d’accélérateur pour l’avènement du football du siècle à venir. Comme l’auteur s’en est souvenu lui-même dans une interview récente : « Quand j’étais en train de l’écrire, je savais que quelque chose se passait, mais je n’avais aucune idée ce que cela allait signifier pour le football1. »

La nostalgie instantanée dont furent saisis les lecteurs de cette narration rétrospective et quasi chronologique d’une époque qu’ils avaient traversée eux-mêmes, et le caractère du « phénomène de librairie », capable d’attirer un public jusque-là peu connu pour son intérêt littéraire, justifient sans doute l’honneur qui lui a été fait en l’admettant en 2012, à l’âge tendre de seulement vingt ans, dans la collection très sélecte des « Modern Classics » de la maison Penguin. Un anoblissement, pour le livre lui-même, mais aussi pour ce phénomène bizarre au cœur de ce roman de confession : l’amour du football, inconditionnel, qui vous tombe dessus sans crier gare.

Figure n° 1 : couverture de l’édition Penguin (poche) de Fever Pitch (2012).

Figure n° 1 : couverture de l’édition Penguin (poche) de Fever Pitch (2012).

Couverture de l’édition Modern Classics de Penguin, sorti pour le 20e anniversaire de la parution du livre en 2012. Notons qu’elle fait l’impasse sur le sous-titre « A Fan’s Life ».

Crédit : Penguin books.

Une autre perception du football et de son public

Fever Pitch a eu un impact profond et durable. Pour commencer, sur le monde de l’édition. Même si Nick Hornby « n’a pas écrit dans un vacuum2 » et a lui-même été influencé par des précurseurs, il n’est pas exagéré de dire qu’il a défini un nouveau genre à lui tout seul. D’abord en montrant aux éditeurs qu’il y avait là un marché dont ils avaient ignoré l’existence, une vraie demande pour une littérature de qualité sur le football (plus d’un million d’exemplaires vendus pour l’original en anglais), puis en inspirant toute une génération d’auteurs nés dans les années 1960 et 1970 qui avaient des choses pertinentes à dire sur ce jeu3. Fever Pitch a aussi renouvelé la manière dont on parle du football. Lors de sa sortie, cette chronique d’une vie sociale dominée à outrance par une passion ordinaire a été perçue, du moins en Europe4, comme un sujet littéraire radicalement nouveau.

Mais au-delà de la thématique abordée, Nick Hornby innova surtout par son style, reprenant avec bonheur des figures d’un humour certes omniprésent depuis dans le discours des fans, notamment sous forme de dérision et d’auto-dérision, mais largement négligé à la fois par le journalisme sportif et l’analyse sérieuse du football par les sciences humaines. C’est un humour qui a percolé dans les magazines, les revues ou les blogs qui traitent du football aujourd’hui. Enfin, Fever Pitch a aussi mis des mots sur un vécu émotionnel partagé par un grand nombre de personnes, à des degrés divers, certes, mais de nature très similaire. Son auteur, issu de la classe moyenne et doté d’une éducation de qualité qui le mena jusqu’à Cambridge, se montra en mesure de traiter avec érudition de la culture populaire, de l’intérieur, sans la moindre condescendance, en rendant sa dignité à un public trop souvent stigmatisé. « C’est le seul livre que mon père n’ait jamais lu de toute sa vie ! », s’exclama un participant britannique lors d’un colloque littéraire où j’avais l’occasion d’évoquer Fever Pitch5. Et comme m’ont dit plusieurs interlocuteurs interviewés pour cet article, c’est sans doute l’un des romans le plus souvent offerts à d’autres, souvent des épouses ou amies, dans l’espoir qu’elles « comprendront ».

Entre biographie anglaise et vécu universel

De toute évidence, Fever Pitch est profondément ancré dans l’immense tradition du football anglais. Tout au long du récit, le texte renvoie à des idiosyncrasies britanniques, non seulement celles du monde du football – l’écart entre les clubs et l’équipe nationale, les stades en pleine ville, le rapport délicat qu’entretiennent les spectateurs et l’alcool, les faits historiques comme la tragédie de Hillsborough et le Rapport Taylor, etc. – mais aussi celles d’une société de classes où le moindre accent vous enferme dans une catégorie socio-professionnelle. Ce roman a été écrit pour un public britannique, et il exigeait de la part de ses lecteurs un prérequis considérable de connaissances sur la culture du football anglais. Par conséquent, il n’y a pas eu de démarches proactives de la part de l’éditeur pour le faire traduire dans d’autres langues. Ce qui ne l’a pas empêché de trouver très vite des lecteurs continentaux, admirateurs de longue date du football anglais et très sensibles à la différence de ton dans les écrits sur le football qui commençaient à poindre depuis le milieu des années 1980 dans les « fanzines » anglais (un néologisme à l’époque) et même dans les revues mensuelles spécialisées comme When Saturday Comes (1986), puis FourFourTwo (1994). Ce sont ces « footeux » anglophiles qui se sont procuré l’original dès les années 1993-1994 et qui s’en sont faits les prosélytes.

En Italie, deux lectrices enthousiastes, Federica Perrotti et Laura Willis, ont vu leur proposition de traduction rejetée par la totalité de maisons auxquelles elles s’étaient adressées : « Ils ont dû le regretter, car le livre, une fois sorti en 1996, a été un grand succès et il n’a jamais quitté les étagères des libraires depuis6». Il est significatif que l’éditeur Guanda ne soit revenu vers elles qu’après le succès international, en 1995, du deuxième roman de Nick Hornby, High Fidelity, de facture similaire, mais sans rapport avec le football7. Pour elles, il s’agit d’un ouvrage « très anglais, ancré dans une période très spécifique, et dans un monde très masculin », mais elles avaient spontanément pressenti qu’il était susceptible « de traverser les frontières, les genres et les générations, parce que les gens peuvent s’y retrouver, même des filles italiennes de 18 ans8! ». En Turquie, Bağış Erten, producteur à Eurosport, a vécu une histoire similaire : « Je ne suis pas un traducteur, mais ce livre m’a poursuivi. C’est le livre que j’aurais voulu écrire ! Je suis allé me renseigner sur les droits, puis je l’ai traduit et proposé à des éditeurs turcs. Il n’est sorti ici qu’en 2003, et il a rencontré un succès exceptionnel pour un livre sur le football sur le marché turc. Il touche des publics improbables : ceux qui n’aiment pas le foot et ceux qui n’aiment pas lire. C’est un sacré exploit ! Et son influence à long-terme est stupéfiante, tout le monde le cite : les journalistes, les auteurs, les fans9. »

Dans une interview du début des années 2000, Arsène Wenger, alors entraîneur du club qui est l’objet même de la passion du narrateur de Fever Pitch, confirme la capacité du roman à traverser les frontières : « Quand nous partons jouer à l’étranger, les gens nous parlent tous de Nick. Ils nous disent à quel point son livre les a touchés10. » Doit-on alors attribuer à ce roman un attrait et une portée « universels » ? Ce serait aller peut-être un peu loin. Traduit, il est vrai, en vingt-six langues11, il ne reste pas moins un récit qui s’inscrit nécessairement dans une culture du football dont il est inséparable. Sa capacité à susciter une adhésion enthousiaste se limite de fait à l’Europe et à l’Amérique latine, puis à la partie du Moyen-Orient où le football connaît ces « pics de fièvre » depuis toujours, où les fans sont effectivement « fanatiques », où les rivalités sont enracinées et les derbys tendus. Il n’est guère surprenant que son adaptation au cinéma, sortie en 1997, n’ait eu qu’un très modeste succès aux États-Unis (avec des recettes négligeables d’environ 113 000 dollars, contre plus de 4 millions de dollars sur le plan mondial), contrairement au remake des frères Farrelly en 2005 qui transposait l’histoire dans l’environnement du baseball (42 millions de dollars aux États-Unis, contre 8 millions dans le reste du monde)12. Ce qui est en revanche universel dans Fever Pitch, ce sont les émotions qu’il décrit et décortique, et ce sont les figures de l’humour qu’il mobilise à cet effet.

Figure n° 2 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

Figure n° 2 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

La version italienne joue sur le chiffre 90, qui renvoie à la dernière minute du match ou à une température proche de l’ébullition. C’est cette dernière qui a d’ailleurs été retenue pour le film.

Crédit : Guanda.

Figure n° 3 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

Figure n° 3 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

La version allemande fait confiance aux connaissances linguistiques des lecteurs, mais rajoute quand même le terme « Ballfieber », « la fièvre du ballon rond » pour être sûr d’être bien compris.

Crédit : KIWI PAPERBASCK.

Figure n° 4 : Couverture de la traduction espagnole de Fever Pitch.

Figure n° 4 : Couverture de la traduction espagnole de Fever Pitch.

La traduction espagnole se contente de situer la « fièvre » dans les « gradins ».

Crédit : ANAGRAMA

Figure n° 5 : couverture de la traduction française de Fever Pitch.

Figure n° 5 : couverture de la traduction française de Fever Pitch.

Le titre de la version française est celui qui s’éloigne le plus de l’original, sans véritable rapport avec le roman.

Crédit : 10/18.

Figure n° 6 : Couverture de la traduction turque de Fever Pitch.

Figure n° 6 : Couverture de la traduction turque de Fever Pitch.

Le titre de la traduction turc joue sur la polysémie du mot « ateşi », qui reprend la « fièvre » de l’original, mais qui signifie aussi « tir ».

Crédit : SEL YAYINCILIK.

Obsession et souffrance

D’emblée, le ton est donné. Sur les quatre courtes pages qui servent d’introduction, les mots « obsédés » ou « obsession » apparaissent à quatre reprises. Le moins qu’on puisse dire est que lecteur aura été averti de la névrose du narrateur. Et dès la première mention, son identification est à la fois sollicitée et présupposée : les obsédés, c’est « nous ». Quand le mot réapparaît, seulement deux paragraphes plus loin, c’est dans une pirouette ironique annonciatrice : « Il n’y a [dans nos pensées] aucune analyse, ou prise de conscience, ou rigueur mentale, puisque les obsédés ne sont dotés d’aucune sorte de regard lucide sur leur propre passion13. » Une phrase à connotation psychologique qui dément par son registre même l’affirmation qu’elle énonce. Elle est suivie, au début du paragraphe suivant, par l’aveu que ce livre sera justement « une tentative de mieux comprendre mon obsession », p. 11. Et le résultat, inévitable, de cette obsession, est annoncé dès les premières lignes du chapitre qui ouvre la narration chronologique : il sera question de « souffrance ». Cette dernière fait son apparition dans une proclamation devenue célèbre :

Je suis tombé amoureux du football, comme plus tard j’allais tomber amoureux des femmes : d’une manière soudaine, inexplicable, irréfléchie, sans me soucier de la souffrance et des désordres que cela allait me causer, p. 15.

À force d’être citée trop fréquemment, cette phrase peut paraître galvaudée, comme l’ont constaté avec regret plusieurs de mes interlocuteurs, mais si c’est le cas, c’est précisément parce qu’à l’instar de certaines chansons populaires dont les couplets sur les peines de l’amour peuvent paraître d’une grande trivialité, elle parle à un grand nombre d’individus qui ont ressenti la même chose sans forcément avoir les mots pour l’expliquer. Le football, c’est quelque chose qui vous arrive sans que vous compreniez pourquoi, et dont vous risquez d’être le prisonnier à vie. Sa résonance émotionnelle peut être illustrée par une anecdote : en 2009, plus de 2000 supporters du FC Union Berlin ont participé à hauteur de 140 000 heures de travail à la modernisation de leur vieux stade devenu obsolète14. Aujourd’hui, sur une paroi extérieure du nouveau stade, les paroles de Hornby saluent les fans visiteurs à leur arrivée. Galvaudée ou pas, c’est touchant.

Figure n° 7 : paroi extérieure du stade « An der Alten Försterei » à Berlin, du côté de l’entrée des fans visiteurs.

Figure n° 7 : paroi extérieure du stade « An der Alten Försterei » à Berlin, du côté de l’entrée des fans visiteurs.

La façade extérieure du stade de l’Union Berlin après la rénovation par les fans de 2009, ornée d’une citation de Horny traduite dans l’article.

Crédits : Union Berlin.

Ce premier chapitre, axé sur sa première visite au stade de Highbury15 en septembre 1968 à l’âge de 11 ans, est l’opportunité de développer davantage le thème de la souffrance, notamment dans les souvenirs de l’observation de la foule :

Ce qui me fascinait plus que tout c’était à quel point les spectateurs détestaient se trouver là. (…) J’avais beau regarder autour de moi, je n’apercevais personne qui eût l’air d’éprouver du plaisir, p. 20.

Pour avoir vécu, par la suite, la même chose dans les stades les plus divers, il en arrive à la conclusion que « l’état naturel du fan de football, quel que soit le score, est celui d’une déception amère », p. 21. Et il enfonce le clou en avouant un penchant masochiste, dans lequel beaucoup de lecteurs ont également dû se reconnaître : « Le divertissement par la souffrance était une idée que j’ignorais entièrement, mais qui semblait être quelque chose pour laquelle j’étais fait. », p. 22.

Réhabilitation de l’humour

Cette insistance explicite sur l’obsession et la souffrance est servie avec une autodérision de complicité qui s’aligne parfaitement sur le vécu du supportérisme, que ce soit le week-end sur les gradins ou durant la semaine dans les échanges quotidiens autour du football, où l’humour, sous différentes formes, est présent, souvent sous-jacent, et très régulièrement franc et explicite. Y compris dans les rituels des joutes verbales, de l’insulte et de la mauvaise foi qui sont de rigueur dans les stades et qui sont souvent mal interprétés par le monde extérieur à cet écosystème. « L’aptitude populaire à la moquerie », que Richard Hoggart se voyait contraint, en 1957, de rappeler à ses lecteurs érudits dans La culture du pauvre16, a été confirmée dans le détail par les premiers regards empiriques portés sur la vie des supporters. Dans un article précurseur de 1982, Marc Augé observait « un certain humour dans l’attitude de beaucoup de supporters », une « attitude passionnée et goguenarde […], mélange d’attention, de passion et de désinvolture17 ». Attitudes et rhétoriques analysées par la suite dans le détail par Christian Bromberger, dont l’étude méticuleuse des différentes formes d’insultes ritualisées, entre parodies burlesques et jeux de mots provocateurs, étayée par d’innombrables exemples, révèle le plaisir ludique de la transgression verbale, « de gestes et de paroles à la limite de la règle18 ». Le mot-clé qu’il utilise très fréquemment est « la facétie », cette « mise à distance amusée de soi, des autres, des événements19 ». Plus récemment, Nicolas Hourcade et Ludovic Lestrelin ont fourni des analyses fines de l’humour dans les groupes de supporters les plus dévoués. Si le premier a notamment mis à nu les codes de la pratique verbale très répandue du « chambrage », ce type particulier de la plaisanterie, en relevant son ambiguïté entre dérision et agressivité20, le second met davantage l’accent sur l’importance, dans le vivre-ensemble des supporters, de la capacité à produire de l’humour, à faire rire. À l’issue de son observation participante, il parvient aisément à démontrer à quel point, dans cette sociabilité, « l’humour est loin d’être un détail anecdotique et insignifiant21 ». Et pour tous ceux et celles qui voient dans l’humour du football l’apanage d’un monde de camaraderie virile (ce qu’il est, sans doute, historiquement), on renvoie à l’étude empirique de Marie-Stéphanie Abouna, pour qui l’humour est « inhérent à l’expérience footballistique au féminin ». Elle distingue notamment « humour ordinaire et humour réflexif », ce dernier s’exprimant notamment dans un « humour sexiste particulièrement corrosif », qui a pour but la mise à nu du ridicule et de l’absurde dans le sexisme et ainsi d’opérer un « retournement de stigmate22 ».

Ce que toutes ces publications excellentes ont en commun, c’est un registre à la limite de la plaidoirie de la défense, comme s’il fallait d’abord convaincre un public académique – qu’on devine enclin à un certain mépris envers la populace des stades – que les supporters ne sont pas des brutes à la recherche d’un exutoire pour leur agressivité et portés sur l’affrontement physique, mais des individus dotés d’une capacité d’ironie à plusieurs échelles. Fever Pitch en apporte la preuve irréfutable. Malgré l’accentuation, dès les premières pages, de la thématique grave de l’obsession, un humour plus léger s’installe aussitôt dans ce récit introspectif, visant à produire justement le recul critique que le narrateur prétend pourtant inaccessible aux obsédés de football. Pour relever la dimension comique de sa névrose, Hornby mobilise les mécanismes du comique déjà identifiés par Henri Bergson dans son essai classique Le rire, à savoir « le comique de situation », et « le comique de caractère ». Si le comique, comme le stipule Bergson, peut naître de « la répétition » des situations, à l’image d’un « ressort qui se tend, se détend et se retend23 », donnant « la sensation nette d’un agencement mécanique24 », la vie d’un fan de football, prise dans l’étau de l’éternel recommencement des saisons avec leurs cortèges d’espoirs et de désillusions, de joies clairsemées et de peines fréquentes, est une source inépuisable de comique.

Mais Fever Pitch illustre aussi à merveille le comique de caractère, marqué par un « raidissement contre la vie sociale ». Selon Bergson, « est comique le personnage qui suit automatiquement son chemin sans se soucier de prendre contact avec les autres25 ». C’est le propre des « personnages moliériens qui s’enfoncent dans leur obsession, qui se laissent déborder par elle, sont habités par une tension énorme », comme l’a récemment résumé Denis Podalydès26, et cette description s’applique parfaitement sur le supporter-narrateur de Nick Hornby. L’humour déployé par Hornby est très efficace, si l’on en croit Ingo Herzke qui en 2014 s’est proposé spontanément à la maison d’édition Kiepenheuer & Witsch pour améliorer la première traduction en allemand qui comportait trop d’erreurs à son goût. Selon lui, « le drôle est difficile mais titillant à traduire, et Hornby sait ce qu’il fait. C’est un écrivain très économe qui va droit vers ses chutes27 ».

Cette efficacité s’explique sans doute aussi par la connaissance profonde, acquise pendant de longues années, de la rhétorique des supporters. C’est tout naturellement que Hornby applique une figure traditionnellement appréciée par le peuple du football : l’hyperbole. Elle intervient tout au long du texte sous forme de surenchère poussée à l’absurde, qui produit non seulement un effet franchement hilarant28, mais aussi une complicité amusée avec le lecteur, susceptible de détecter la « fonction cathartique » que les sociolinguistes lui attribuent29. Souvent, l’hyperbole permet aussi d’exploiter l’effet du « bathos », une chute soudaine du sublime vers le ridicule, par exemple, en concluant une énumération des sensations fortes qu’il devait à Highbury – « souffrance », « extase », « amour » – par le mot « ennui » en précisant entre parenthèses « la plupart des samedis à vrai dire », p. 95.

Figure n° 8 : Nick Hornby en 2009

Figure n° 8 : Nick Hornby en 2009

Le romancier anglais Nick Hornby auteur (titres français) entre autres de Carton jaune (1992), Haute fidélité (1995), À propos d’un gamin (1998).

Crédits : Joe Mabel

Hornby y ajoute cependant deux figures rhétoriques plus complexes. La parrhésie d’abord, qui consiste en un franc-parler courageux, souvent annoncé par une excuse préalable de ce qu’on va dire ou accompagné d’un aveu d’avoir honte. Le chleuasme ensuite, catégorie peu connue (et possédant une consonance qui prête à sourire), mais véritablement centrale dans Fever Pitch. Il s’agit d’une autodépréciation délibérée dans l’espoir implicite d’une réfutation par un interlocuteur (de vive voix) ou de l’empathie par un lecteur (dans le cas d’un écrit). Dans un de ses retournés acrobatiques, Hornby intitule un des chapitres de la dernière partie justement « Inutile de s’excuser », p. 227 et l’introduit de manière explicite avec l’aveu « Je sais qu’au cours de ce livre, je me suis abondamment excusé », pour ensuite démontrer qu’en réalité, le football justifie tous les excès pour lesquels il s’est pourtant auto-flagellé tout au long des pages. Ce jeu permanent avec les mécanismes de l’humour baigne le récit dans une ironie subtile qui témoigne d’un recul critique envers son propre comportement, une véritable réflexivité au sens sociologique, c’est-à-dire une révision de ses pratiques sociales à l’aune de nouvelles connaissances sur ces mêmes pratiques produites par les sciences sociales et reprises par les médias30. L’expression de cette réflexivité, sans pour autant disposer du jargon sociologique, est à la portée de chacun : par l’humour, justement.

La rédemption par le rire

On aurait cependant tort de réduire l’humour dans Fever Pitch à la démonstration élaborée, déguisée en roman, de la capacité de prendre du recul ironique par rapport à une passion qui frôle souvent l’absurde. Il y a, au contraire, aussi des ombres qui planent sur le récit, et qui sont autrement plus difficiles à porter que les hauts et les bas des saisons d’Arsenal. Le sentiment de ne pas appartenir, par exemple à un groupe social dans une société traversée par une distinction souvent pénible entre les classes. Le narrateur, issu de la classe moyenne modeste de la banlieue de Londres, ressent douloureusement qu’il ne fait partie ni du prolétariat qui, dans les années 60 et 70, est encore majoritaire dans les gradins de Highbury, ni de la bourgeoisie qu’il croise après avoir été admis à Cambridge. Ces déchirements sont aussi traités avec humour – les tentatives (ratées) de changer d’accent pour faire « cockney » ne manquent pas de drôlerie –, mais n’en restent pas moins difficiles à surmonter pour un jeune adulte qui cherche sa place dans la société.

Puis, l’on apprend que le narrateur a souffert de dépression pendant une décennie. Si elle n’est que peu abordée de manière explicite – ce n’est que dans le chapitre « De Tottenham à Hampstead », inhabituellement long (p. 201-210) qu’elle est récapitulée – elle rode tout de même depuis le début. C’est le divorce de ses parents qui est à l’origine à la fois du mal-être du gamin31 et de son « infection » par le virus du football, puisque c’est le père qui, faute de mieux, lui propose une sortie au stade un samedi après-midi.

Le stade de football devient ainsi dans un premier temps (durant une adolescence peu joyeuse) l’endroit parfait pour vivre son spleen, au sein d’une foule où la morosité est presque la norme. Plus tard, il contribue à surmonter la dépression, à l’issue d’une psychanalyse qui s’achève en 1987. Il n’est guère exagéré de voir dans le roman, entamé au début des années 1990, une suite à ce travail d’analyse, par le biais de l’autodérision thérapeutique. Hornby mise sur l’authenticité – selon Simon Kuper, « ce livre est intemporel parce qu’il est totalement honnête32 » – et sur l’empathie avec son narrateur qui a fini par exprimer sa vulnérabilité, et qui a su évoluer, prendre du recul. Le rire de Fever Pitch est un rire de la connivence avec les autres33 et de la réconciliation d’avec soi-même. C’est une comédie « doucement mélancolique34 », une histoire du pardon et de la rédemption.

Les héritiers de Hornby

Dans son étude exhaustive des nouvelles fictions du football depuis les années 1990, Cyprian Piskurek attribue à Fever Pitch une place de pionnière incontestée35. Pour Simon Kuper, qui avait déjà commencé à travailler sur son propre ouvrage Football Against the Enemy36, tout aussi innovant dans son genre, le succès de Hornby était « un soulagement ». Il y avait donc un marché ! « Hornby a brisé un tabou, et j’en ai profité37 ». Le journaliste Christoph Biermann – dont le premier livre, consacré au supportérisme et intitulé Si tu es enterré un jour de match, je ne pourrai malheureusement pas venir est sorti en 199538, et qui a été, plus récemment, deux fois lauréat du meilleur livre de l’année sur le football en Allemagne – le rejoint en constatant que « le temps était simplement mûr, un tel livre était dans l’air, et comme tout ce que je trouvais novateur à l’époque était anglais, il devait venir de là39 ». Lui-même avait lu Fever Pitch en 1994, juste avant de finaliser son propre ouvrage.

Cependant, lorsque l’on étudie de plus près l’émergence, au début des années 2000, d’une nouvelle génération de magazines tels que So Foot en France, 11 Freunde en Allemagne, ou encore Ballesterer en Autriche, on s’aperçoit que l’influence de Hornby y est moins prégnante que dans l’espace anglophone. Il est vrai que ces périodiques ont réussi à se faire une place importante et stable sur un marché difficile en adoptant un ton radicalement nouveau, dans lequel l’humour jouait un rôle capital. Mais leur approche de la face comique du football a des sources d’inspiration multiples. Chérif Ghemmour, qui a fait partie de l’aventure So Foot depuis le début, situe l’humour décalé du magazine davantage dans un « sillon » bien français, « creusé » depuis les années 1970 par des voix originales comme Jean-François Bizot (fondateur du magazine Actuel et de Radio NOVA) et bien sûr Didier Rostand, auquel « on ne rendra jamais assez hommage ». Si l’humour dans le traitement du football n’était pas encore mainstream, il était bien présent dans certaines rubriques récurrentes de publications comme Guadalajara, L’Equipe magazine, ou Onze mondial. Pour lui, « “Fever Pitch” n’est pas passé inaperçu, mais il n’avait d’influence que sur les intellectuels parmi les supporters40 ». Notons cependant que ce sont bien ces intellectuels qui sont à l’origine de So Foot, et que l’un des leitmotivs de la revue – « La lose, c’est drôle41 » – semble très proche du masochisme ironique de Nick Hornby.

En Allemagne, le fondateur et directeur du magazine 11 Freunde, Philipp Köster, considère le stade de football comme « un trésor d’humour42 », surtout parce que l’humour est « un moyen rendre des tensions quasi schizophrènes – “mais comment je fais pour supporter tout cela ?” – plus tolérables ». En même temps, il permet « à des fans désormais dotés de réflexivité de maîtriser l’abîme entre leur passion sublimée et la réalité profane du football43 ». Éditeur lui-même d’un fanzine artisanal à Bielefeld dans les années 1990, il identifie l’apparition du mensuel When Saturday Comes au milieu des années 1980 comme un point de bascule du discours des fans sur eux-mêmes. Sur ce point, il rejoint Nick Hornby lui-même, qui qualifie ce magazine dans son roman comme « bouée de sauvetage dans le climat de désespoir post-Heysel » (p. 184), mais aussi David Winner, dans sa magistrale analyse des origines de l’humour dans le football anglais44, qui voit dans Fever Pitch un aboutissement plutôt qu’une révolution, qui réussit à transférer, d’une façon « fraîche et émouvante » une tendance lourde existante vers un niveau littéraire inédit.

Fever Pitch – reflet et vecteur de l’embourgeoisement

Fever Pitch n’est pas sans faiblesses. Répétitif par endroits, décousu parfois, il surprend aussi par des incohérences et des ambiguïtés, notamment dans le rapport contradictoire du narrateur avec le phénomène de l’embourgeoisement du football, cette « gentrification » tant décrié en Angleterre depuis les années 1990. Dans certains passages, Hornby semble prendre le contre-pied de son propre supportérisme à l’ancienne : s’il regrette amèrement la disparition de l’atmosphère bruyante des places debout sur les terraces remplies de prolétaires sous la pression d’une politique de prix exorbitants dans la nouvelle Premier League, p. 85-86, il dénonce en même temps les protestations contre les préconisations du Rapport Taylor comme un « attachement conservateur et sentimental au point d’être névrotique », p. 254, tout en reconnaissant qu’il s’agit bien du « même attachement sentimental et névrotique qui nourrit ce livre », p. 254, avant finalement de justifier pour lui-même l’acquisition d’un abonnement pour une place assise, p. 267-268. Libre au lecteur de s’amuser devant de telles voltefaces susceptibles de donner le vertige ou de constater que le narrateur se perd dans ses propres contradictions.

Il reste indubitable que Fever Pitch, tout comme l’abolition des places debout exigée par le rapport Taylor et le hype commercial de la Premier League, a activement participé à l’embourgeoisement des stades anglais, vécu par beaucoup comme une trahison des origines du football professionnel. Nick Hornby a beau se faire le chantre de l’authenticité du football d’antan, il n’en est pas moins lui-même l’un des porteurs de son cercueil. En donnant une légitimité inédite aux intellectuels parmi les fans, il a rendu les stades anglais fréquentables pour les classes moyennes et les « CSP+ », permettant ainsi aux clubs de repositionner le football comme spectacle « premium » vendu à des prix « premium ». Qu’il ait été, dès le milieu des années 1990, sévèrement critiqué pour cet effet secondaire de son roman est compréhensible. Même si, de toute évidence, il n’y a là aucune intentionnalité. Fever Pitch est simplement l’histoire d’un gamin du baby-boom qui tombe amoureux du football et à qui les réformes éducatives importantes mises en œuvre par les gouvernements de l’après-guerre ont permis d’acquérir des outils intellectuels d’auto-observation et de critique des pratiques sociales auparavant réservés à une élite. Le reste relève d’un « timing » parfait. Le même livre, sorti cinq, six ans plus tôt, serait passé inaperçu, cantonné dans une niche. Cinq, six ans plus tard, on lui aurait reproché de ne faire que surfer sur une vague d’embourgeoisement qui aurait déjà déferlé sur les nouveaux stades. Hornby lui-même réfute les critiques qui lui ont été adressées, avec son humour caractéristique : « J’aimerais bien m’attribuer l’origine d’un important changement social et culturel, même regrettable, mais je ne le peux pas. Ce n’est pas être modeste que de suggérer que le propriétaire d’un empire médiatique international a eu un impact plus profond sur le football anglais que mon premier livre45. »

À la fois annonciateur, reflet et vecteur d’un processus socio-culturel et économique qui le dépasse, Fever Pitch est avant tout un témoignage empreint d’humanisme. Récit de la naissance, de l’emprise, puis de l’apprivoisement (imparfait) d’une obsession, c’est un Bildungsroman (un « roman d’apprentissage ») de notre époque qui érige l’humour, selon le célèbre postulat de Romain Gary, en « une affirmation de la dignité, une déclaration de la supériorité de l’homme face à ce qui lui arrive46 ». C’est aussi un livre qui sonde les ressorts profonds de l’émotionnalité du football, à nulle autre pareil, et de ces désirs archaïques d’appartenance et de loyauté qui sont à la base du supportérisme. « Qu’est-ce qui ne va pas avec nous que nous ayons des besoins de ce genre ? », cette exclamation semi-ironique de Simon Kuper47 résume à merveille la question centrale de Fever Pitch.

C’est également le ressenti de Federica Perrotti, la traductrice italienne que l’on ne saurait soupçonner de prosélytisme : « Je n’étais pas intéressée par le football. Mais j’ai aussitôt aimé ce livre. Ce n’était pas un livre sur le foot, c’était un livre sur la vie ! Le football, c’est la vie 48! ». On ne saurait la contredire. Si Fever Pitch transmet un récit très ironique et précisément daté, c’est pour mieux cacher une vérité grandiloquente et intemporelle. Ceux qui ne comprennent pas hausseront les épaules. Mais ceux qui peuvent s’y reconnaître resteront touchés au plus profond d’eux-mêmes.

Notes

1 Charlie Watts, « Why Nick Hornby’s Fever Pitch remains as popular as ever », interview avec Nick Hornby, Goal, 20 mai 2022, https://www.goal.com/en/news/nick-hornby-fever-pitch-popular-as-ever/blteb3618c00facd29c. Retour au texte

2 Cyprian Piskurek, Fictional Representations of English Football and Fan Cultures, Londres, Palgrave-Macmillan, 2018, p. 86. Retour au texte

3 Charlie Connelly, « The Book of Football: How Fever Pitch was a Gamechanger », The New European, 1er décembre 2022, https://www.theneweuropean.co.uk/the-book-of-football/ Retour au texte

4 Il est vrai que dès 1968, l’auteur américain Frederick Exley avait publié un roman assez comparable sur le football américain, intitulé A Fan’s Notes. A fictional memoir (titre français : Le Dernier stade de la soif, Toulouse, Monsieur Toussaint Louverture, 2011). Et dans une postface à une réédition de son roman en 2012, Nick Hornby a cité cet auteur explicitement parmi ses inspirations (Fever Pitch, Londres, Penguin Modern Classics, 2012, p. 243). Retour au texte

5 Colloque « Le livre, une idée neuve en Europe ? », Le Mans université, 11-12 octobre 2018. Retour au texte

6 Entretien avec l’auteur, 25 septembre 1998. Retour au texte

7 Publié en français en 1997 par Plon, sous le titre de Haute Fidélité. Retour au texte

8 Entretien avec l’auteur, 25 septembre 1998. Retour au texte

9 Interview avec l’auteur, 24 septembre 2018. Retour au texte

10 Marc Beaugé, « Wenger-Hornby : 1-1 » (interview croisée), reproduit dans So Foot, n° 54 HS, printemps 2008. Retour au texte

11 Eamonn Walsh, « Fever Pitch and the Rise of Middle-Class-Football », BBC News, mars 2012. Retour au texte

12 Selon les statistiques publiées par le site spécialisé www.the-numbers.com (consulté en janvier 2023). Retour au texte

13 Nick Hornby, Carton jaune, Paris, Plon, collection 10/18, 1998, p.  11. Toutes les références au texte du roman se réfèrent à cette édition française en livre de poche. Cependant, en raison de la très médiocre qualité de la traduction, truffée d’erreurs factuelles, d’approximations et d’omissions, certaines phrases ont été reformulées par l’auteur. Retour au texte

14 Voir le récapitulatif très précis sur la page wikipédia en français consacrée au stade, https://fr.wikipedia.org/wiki/Stadion_An_der_Alten_F%C3%B6rsterei (consulté en janvier 2023) ou une chronique du début des travaux sur vidéo (en allemand) : https://www.youtube.com/watch?v=nsNGcczoN-c. Ou encore des articles de presse récents : Pierrick Chevrinais, « L’Union Berlin est vraiment un club de foot à part, voici pourquoi », Ouest-France, 13 septembre 2022 ; ou Robin Richardot, « Le Stadion An der Alten Försterei », Le Monde, 17 mai 2020. Retour au texte

15 Pour ceux qui l’auraient déjà oublié : l’ancien stade mythique d’Arsenal entre 1913 et 2006, nommé ainsi d’après le quartier du nord de Londres, désormais remplacé par l’« Emirates Stadium ». Retour au texte

16 Richard Hoggart, La culture du pauvre, Paris, Éditions de Minuit, 1991, p. 21 (original paru en 1957). Retour au texte

17 Marc Augé, « Football – De l’histoire sociale à l’anthropologie religieuse », Le Débat, 1982, n° 19, p. 59-67. Retour au texte

18 Christian Bromberger, Le Match de Football. Ethnologie d’une passion partisane à Marseille, Naples et Turin, Paris, Editions de la Maison des sciences de l’homme, 1995, p. 265. Retour au texte

19 Christian Bromberger, « Sur les gradins, on rit… aussi parfois. Facétie et moquerie dans les stades de football », Le monde alpin et rhodanien, 1988, n° 3-4, p. 137-156. Retour au texte

20 Nicolas Hourcade, « Les supporters peuvent-ils faire preuve d’humour ? », in Jean-Baptiste Baud, Vincent Bierce et Raphaël Luis (éds), Mythologies sportives d’aujourd’hui. Le football et ses langages, Paris, Éditions Herman, 2021, p. 210-225. Retour au texte

21 Ludovic Lestrelin, « Par le détour de l’humour. Le rire dans les groupes de supporters de football », Terrain : revue d'ethnologie de l'Europe (en ligne), 2020, 22 pages, (https://journals.openedition.org/terrain/20858#quotation, consulté en janvier 2023). Retour au texte

22 Marie-Stéphanie Abouna, « Les registres de l’humour dans le football au féminin : la reconnaissance de la pratique en question », communication non publiée, présentée au colloque « L’humour des supporters », Bruxelles, 26 avril 2019. Retour au texte

23 Henri Bergson, Le rire. Essai sur la signification du comique [1924], Paris, Presses Universitaires de France, collection Quadrige, 1995, p. 55. Retour au texte

24 Ibid., p. 53. Retour au texte

25 Ibid., p. 102 et 103. Retour au texte

26 Fabienne Darge, « Un rire de qualité est toujours accompagné de noirceur » (interview croisée avec Denis Podalydès et Christian Hecq), Le Monde, 30 décembre 2021. Retour au texte

27 Entretien avec l’auteur, 13 septembre 2018. Retour au texte

28 Quelques exemples pris au hasard : la litanie des conséquences potentielles du contact social sur la vie d’un supporter, p. 10, l’évocation de son « esclavage », p. 38, son indignation devant une foule présente au stade plutôt qu’au travail un mardi après-midi, p. 65, l’analyse de son caractère maniaque, p. 117, la description de son indifférence totale à autrui durant un match, p. 120, son incompréhension devant la présomption que le football ne serait qu’un jeu, p. 124 ami supporter encore pire que lui, p. 220-222. Retour au texte

29 Claudia Claridge, Hyperbole in English. A Corpus-based Study of Exaggeration, Cambridge, Cambridge University Press, 2011. Retour au texte

30 Anthony Giddens, Les conséquences de la modernité, Paris, L’Harmattan, 1994. Yves Bonny, Sociologie du temps présent. Modernité avancée ou postmodernité, Paris, Armand Colin, 2004, p. 161-162. Retour au texte

31 Voir l’analyse très pertinente de Ludovic Lestrelin, « Comment parler du football ? Littérature, science et société du samedi », in Collectif, Décalages. Périple à travers le foot, Mejannes, Éditions Salto/Myths, 2016, p. 70-75. Retour au texte

32 Entretien avec l’auteur, 27 septembre 2018. Retour au texte

33 Patrick Charaudeau, « Des catégories pour l’humour ? », Questions de communication, revue en ligne, n° 10/2006, p. 19-41. Retour au texte

34 Andrew Tate, « Nick Hornby's Melancholy Comedy », Anglistik, 27/1, 2016, p. 31-44. Retour au texte

35 Cyprian Piskurek, Fictional Representations of English Football, op. cit., p. 95-104. Retour au texte

36 Simon Kuper, Football Against the Enemy, Londres, Orion, 1994. Retour au texte

37 Entretien avec l’auteur, 27 septembre 2018. Retour au texte

38 Christoph Biermann, Wenn Du am Spieltag beerdigt wirst, kann ich leider nicht kommen, Cologne, Kiepenheuer und Witsch, 1995. Retour au texte

39 Entretien avec l’auteur, 18 septembre 2018. Retour au texte

40 Entretien avec l’auteur, 4 janvier 2023. Retour au texte

41 Ibid. Retour au texte

42 Entretien avec l’auteur, 10 janvier 2023. Retour au texte

43 Ibid. Retour au texte

44 David Winner, Those Feet. An Intimate History of English Football, Londres, Bloomsbury Publishing, 2005, notamment le sixième chapitre « It’s cold and we’re rubbish », p. 144-176. Retour au texte

45 Postface à Fever Pitch, Londres, Penguin Modern Classics, 2012, p. 242. Retour au texte

46 Romain Gary, La promesse de l’aube, Paris, Gallimard, édition définitive, 1980, p. 160. Retour au texte

47 Entretien avec l’auteur, 27 septembre 2018. Retour au texte

48 Entretien avec l’auteur, 25 septembre 2018. Retour au texte

Illustrations

  • Figure n° 1 : couverture de l’édition Penguin (poche) de Fever Pitch (2012).

    Figure n° 1 : couverture de l’édition Penguin (poche) de Fever Pitch (2012).

    Couverture de l’édition Modern Classics de Penguin, sorti pour le 20e anniversaire de la parution du livre en 2012. Notons qu’elle fait l’impasse sur le sous-titre « A Fan’s Life ».

    Crédit : Penguin books.

  • Figure n° 2 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

    Figure n° 2 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

    La version italienne joue sur le chiffre 90, qui renvoie à la dernière minute du match ou à une température proche de l’ébullition. C’est cette dernière qui a d’ailleurs été retenue pour le film.

    Crédit : Guanda.

  • Figure n° 3 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

    Figure n° 3 : couverture de la traduction italienne de Fever Pitch.

    La version allemande fait confiance aux connaissances linguistiques des lecteurs, mais rajoute quand même le terme « Ballfieber », « la fièvre du ballon rond » pour être sûr d’être bien compris.

    Crédit : KIWI PAPERBASCK.

  • Figure n° 4 : Couverture de la traduction espagnole de Fever Pitch.

    Figure n° 4 : Couverture de la traduction espagnole de Fever Pitch.

    La traduction espagnole se contente de situer la « fièvre » dans les « gradins ».

    Crédit : ANAGRAMA

  • Figure n° 5 : couverture de la traduction française de Fever Pitch.

    Figure n° 5 : couverture de la traduction française de Fever Pitch.

    Le titre de la version française est celui qui s’éloigne le plus de l’original, sans véritable rapport avec le roman.

    Crédit : 10/18.

  • Figure n° 6 : Couverture de la traduction turque de Fever Pitch.

    Figure n° 6 : Couverture de la traduction turque de Fever Pitch.

    Le titre de la traduction turc joue sur la polysémie du mot « ateşi », qui reprend la « fièvre » de l’original, mais qui signifie aussi « tir ».

    Crédit : SEL YAYINCILIK.

  • Figure n° 7 : paroi extérieure du stade « An der Alten Försterei » à Berlin, du côté de l’entrée des fans visiteurs.

    Figure n° 7 : paroi extérieure du stade « An der Alten Försterei » à Berlin, du côté de l’entrée des fans visiteurs.

    La façade extérieure du stade de l’Union Berlin après la rénovation par les fans de 2009, ornée d’une citation de Horny traduite dans l’article.

    Crédits : Union Berlin.

  • Figure n° 8 : Nick Hornby en 2009

    Figure n° 8 : Nick Hornby en 2009

    Le romancier anglais Nick Hornby auteur (titres français) entre autres de Carton jaune (1992), Haute fidélité (1995), À propos d’un gamin (1998).

    Crédits : Joe Mabel

Citer cet article

Référence papier

Albrecht Sonntag, « L’embourgeoisement par l’humour. Fever Pitch et le football anglais », Football(s). Histoire, culture, économie, société, 2 | 2023, 55-68.

Référence électronique

Albrecht Sonntag, « L’embourgeoisement par l’humour. Fever Pitch et le football anglais », Football(s). Histoire, culture, économie, société [En ligne], 2 | 2023, publié le 20 avril 2023 et consulté le 25 avril 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. DOI : 10.58335/football-s.377. URL : https://preo.u-bourgogne.fr/football-s/index.php?id=377

Auteur

Albrecht Sonntag

Professeur à l’ESSCA (Angers)

Articles du même auteur

Droits d'auteur

Licence CC BY 4.0