Témoignage de doctorante : Traduire l’altérité culturelle dans la littérature de jeunesse australienne

  • Translating Cultural Otherness in Australian Children’s Literature

Texte

Ma thèse s’intitule « Traduire l’altérité culturelle dans la littérature de jeunesse australienne : l’exemple de Nanberry Black Brother White, de Jackie French ». Je l’ai commencée en septembre 2016 et j’espère la soutenir fin 2022.

Je me suis inscrite en doctorat pour deux raisons. Je souhaitais continuer la recherche et me spécialiser dans un domaine qui me passionne : la traduction. De plus, j’aimerais enseigner dans le milieu universitaire à long terme, carrière qui nécessite notamment l’obtention d’un doctorat. Le laboratoire de recherche auquel je suis rattaché est spécialisé en linguistique et regroupe des enseignants-chercheurs qui travaillent dans différentes langues : anglais, allemand, espagnol, italien, polonais, russe, arabe parmi les principales. C’est un laboratoire de recherche très actif qui organise de nombreuses journées d’études, colloques, séminaires et doctoriales et se regroupe plusieurs fois par an pour des réunions de travail qui permettent de faire avancer les projets, dont le lancement de la revue du labo : ELAD – SILDA (Études de Linguistique et d’Analyse des Discours/Studies in Linguistics and Discours Analysis) et la mise en place d’un projet de recherche sur la vieillesse regroupant plusieurs laboratoires de recherche lyonnais.

Ma recherche de doctorat porte sur la traduction de la littérature de jeunesse australienne. Mon corpus de travail est constitué d’un seul roman destiné à un public âgé de 10 à 14 ans environ, que j’entreprends de traduire dans le cadre de ma thèse. J’ai eu la chance de pouvoir vivre et travailler pendant un an à Melbourne en 2017‑2018 afin de mener à bien ma recherche sur le terrain. J’ai obtenu un poste d’enseignante de FLE (français langue étrangère) à l’Université Monash, ce qui m’a permis de consulter les ressources universitaires spécialisées dans mon sujet d’études et de pouvoir me procurer les ouvrages nécessaires pour mon analyse de corpus. Cette année en Australie a été particulièrement productive car j’ai pu effectuer la majeure partie de mes recherches. J’ai aussi eu la chance de pouvoir collaborer avec Leah Gerber, professeure à Monash spécialisée dans la traduction de la littérature de jeunesse et de rencontrer d’autres doctorants comme Caroline Trousseau dont le sujet de recherche a quelques aspects similaires au mien. J’ai réussi à consacrer deux jours par semaine à mon doctorat pendant cette année à Melbourne, ainsi que les périodes de vacances universitaires. Suite à cette année en Australie, j’ai enseigné l’anglais pendant 3 ans à l’Université de Lille, et je suis désormais enseignante d’anglais à l’Université de Saint-Étienne.

Ma recherche de doctorat s’inscrit dans deux domaines d’études : la littérature de jeunesse et la traduction. L’étude conjointe de ces spécialités est assez récente dans le domaine universitaire car les premiers ouvrages théoriques de traduction de la littérature jeunesse datent d’une cinquantaine d’années. Il existe beaucoup d’études sur la littérature de jeunesse ou la traduction mais peu regroupent ces deux domaines. J’ai donc souhaité m’intéresser à ces deux disciplines afin de favoriser leur visibilité. L’enjeu de ma thèse est double : montrer l’intérêt de la traduction des œuvres de littérature de jeunesse pour exposer les jeunes publics à des cultures et littératures étrangères et ainsi les former à la diversité culturelle mais aussi évaluer les méthodes de traduction disponibles en littérature de jeunesse et proposer des alternatives en termes de traductions à la fois linguistique et culturelle. La limite majeure de ce sujet d’étude concerne le manque de ressources car peu d’œuvres de littérature de jeunesse australienne sont traduites. De plus, la spécificité culturelle de mon sujet de thèse, à savoir l’Australie, rend la recherche particulièrement difficile en France à cause du manque de ressources disponibles dans ce domaine. L’opportunité de vivre et travailler en Australie pendant un an pour effectuer les recherches s’est révélée indispensable à la bonne avancée de ma thèse.

Grâce à cette thèse, j’espère apporter une visibilité, une reconnaissance et une valorisation à la traduction de la littérature de jeunesse, qui a trop longtemps été victime d’un statut inférieur. Je pense qu’il est essentiel d’envisager la traduction de la littérature de jeunesse comme un apport culturel et linguistique pour les jeunes publics qui se voient dès lors exposés à une plus grande diversité d’ouvrages et de connaissances sur le monde qui les entoure. De plus, l’Australie n’est que très rarement le sujet de cours universitaires en France et peu de recherches sont consacrées à cette aire géographique et culturelle du monde anglo-saxon. Or j’ai une vive passion pour ce pays et sa culture et je souhaite l’exposer davantage dans le domaine des cultures anglophones.

Les questionnements liés à cette thèse sont multiples et concernent principalement le domaine de la traduction. En effet, je prends le parti de favoriser la traduction pédagogique, c’est-à-dire qui s’intéresse à respecter au maximum le texte source à la fois aux niveaux linguistique et culturel et à amener le lecteur enfant à découvrir « l’exoticité » du texte qu’il lit, c’est-à-dire être confronté à une forme d’inconnu. Cela passe notamment par la conservation de certains mots ou expressions en langue source, mais aussi de certains concepts clés de la culture source, comme par exemple des éléments de faune et flore australiennes que je conserverai dans les passages traduits proposés dans ma thèse. Ceci dit, il ne faut pas perdre de vue le jeune âge des lecteurs ciblés par notre corpus et prendre en compte le fait qu’ils ont une compréhension un peu plus limitée que les adultes. Il est donc important de trouver le juste équilibre entre la préservation d’éléments culturels et linguistiques étrangers dans la traduction et le plaisir de la lecture pour l’enfant.

L’objectif de cette thèse est donc d’amener à une réflexion non seulement sur la nécessité de traduire la littérature de jeunesse mais aussi, et surtout, sur les façons de la traduire. Si l’adaptation a longtemps été prônée comme méthode de « traduction » pour des œuvres de littérature de jeunesse, une traduction culturelle et linguistique plus fidèle au texte source semble aujourd’hui être davantage favorisée par les chercheurs et praticiens dans ce domaine. Dans le cas de ma thèse plus précisément, je souhaite montrer l’importance de la littérature de jeunesse australienne et la nécessité de la traduire pour la rendre visible sur la scène internationale.

Citer cet article

Référence électronique

Virginie Pfeiffer, « Témoignage de doctorante : Traduire l’altérité culturelle dans la littérature de jeunesse australienne », Éclats [En ligne], 1 | 2021, . Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : https://preo.u-bourgogne.fr/eclats/index.php?id=197

Auteur

Virginie Pfeiffer

Université Lyon 3 Jean Moulin, Centre d’Études Linguistiques, UR 1663

Droits d'auteur

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