Denis Berger, Roger Martelli, Michèle Riot-Sarcey, Francis Sitel et Pierre Zarka, Révolution, les impensés d'un héritage, Paris, La Dispute, 2009, 204 p. (Comptoir de la politique).

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Ce petit ouvrage, qui résulte de la rencontre et des échanges de cinq acteurs de la gauche de la gauche, issus pour l'essentiel de la mouvance communiste et trotskyste, s'inscrit dans le vaste processus d'inventaire provoqué par les conséquences de la disparition de l'URSS et du bloc de l'Est. Sans apparaître comme une pièce fondamentale à ce débat, cet ensemble apporte néanmoins quelques réflexions intéressantes.

Michèle Riot-Sarcey, historienne des femmes et des utopies, insiste sur le nécessaire retour vers les vaincus de l'histoire et les possibles non advenus, en particulier du XIXème siècle, mais elle le fait à travers un propos un peu touffu et abstrait. Denis Berger, lui, brosse un intéressant tableau du monde d'aujourd'hui (évoquant un quasi fascisme islamique ou le bonapartisme de Sarkozy) pour insister sur le retour critique vers les expériences passées et appeler à des analyses approfondies des acteurs sociaux du changement. Roger Martelli, dans le prolongement de ses livres des années 1990, revient sur le stalinisme, qu'il voit comme une rupture avec le léninisme mais s'appuyant sur des failles réelles du bolchevisme ; il analyse également l'impossible déstalinisation totale, liée selon lui aux « carences des mémoires » au sein d'un mouvement communiste régulièrement expurgé.

Francis Sitel, pour sa part, revient sur l'héritage du trotskysme, avec l'idée d'éviter aussi bien la crispation sur les acquis programmatiques que leur abandon généralisé. Il diagnostique pour l'essentiel une difficulté de la part des trotskystes à analyser l'évolution du réel, que ce soit celle de l'URSS (en particulier dans les années 1980, sous estimant la crise des idéaux socialistes) ou celle du capitalisme (vu avant tout comme mécanisme économique, conduisant à la sous estimation de l'offensive néo-libérale). Il estime parallèlement que la démarche des revendications transitoires est précieuse, tout en appelant à s'ouvrir davantage au mouvement ouvrier dans son ensemble et à construire un parti de type nouveau, loin de l'impossible parti révolutionnaire, peu adapté aux luttes politiques à court terme. Quant à Pierre Zarka, militant du PCF, il prône la recherche d'un vaste parti anticapitaliste, sous forme d'une fédération de militants riche de la diversité de ses composantes idéologiques, qui ne surplomberait pas les masses mais serait immergé en elles ; un espoir qui n'a de cohérence pour l'heure que sur le papier.

Si chacun propose des pistes de réflexions diverses, dont plusieurs ont un goût de déjà lu voire de rappel d'évidences, la plupart d'entre eux se retrouvent sur certaines nécessités : tenir davantage compte des travaux de Foucault et des apports de la psychanalyse ; rejeter la notion de parti guide et le substitutisme (dans lequel Michèle Riot-Sarcey voit d'ailleurs une vision parallèle à l'idée de délégation du pouvoir défendue par le libéralisme) au profit d'un retour vers la démocratie de la base ; développer l'auto-organisation, et accepter la clôture de la période ouverte par Octobre et ses leçons. Gageons que le débat est loin d'être clos.

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Jean-Guillaume Lanuque, « Denis Berger, Roger Martelli, Michèle Riot-Sarcey, Francis Sitel et Pierre Zarka, Révolution, les impensés d'un héritage, Paris, La Dispute, 2009, 204 p. (Comptoir de la politique). », Dissidences [En ligne], Politique et société en France, publié le 10 décembre 2012 et consulté le 21 novembre 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=573

Auteur

Jean-Guillaume Lanuque

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