La Confédération Générale des Vignerons dans la Fédération des Associations Viticoles pour la défense des vins de France : de la domination à la marginalisation (1913-1971)

  • From domination to marginalization of the Confédération Générale des Vignerons within the Fédération des Associations Viticoles in the aim of defence of French wines (1913-1971)

DOI : 10.58335/crescentis.1234

Résumés

La création, en février 1913, de la Fédération des Associations Viticoles de France (FAVF) à l’initiative de la Confédération Générale des Vignerons (CGV) créée à Narbonne en 1907 pour la défense des vins de consommation courante languedociens, résultait d’un objectif commun : assurer la défense de la qualité et des prix de tous les vins en France. La CGV a réussi à y préserver jusqu’au début des années 1950 la solution unique qu’elle préconisait pour cela : poursuivre et réprimer les fraudes. Après cette date, le développement des vins de cru délimités fondant leur valeur sur l’origine et l’usage a altéré la domination de la CGV (M), toujours défenseur des vins de consommation courante à valeur constante, en phase de déclin. La notion d’objectifs communs à défendre s’est donc délitée progressivement jusqu’à la prise de pouvoir des associations de vins de cru à la FAV en 1971 et le passage pour la CGV (M) de la domination à la marginalisation.

The creation in February 1913 of the Fédération of Wines Associations of France (FAVF) on the initiative of the General Confederation of Winegrowers (CGV) created in Narbonne in 1907 to defend everyday wines of Languedoc, resulted from a common objective: to ensure the defence of the quality and prices of the wine in France. The CGV has managed to preserve the early 1950 the unique solution that it advocated for this: the prosecution and repression of frauds. After that date, the development of vintage wines basing their value on origin and use has altered this domination of the CGV (M), still defender of everyday wines with constant value, in decline phase. The notion of common objectives to defended has thus gradually disintegrated until the takeover of the associations of the vintage wines in the FAV in 1971 and the transition for the CGV (M) from domination to marginalization. [translation reviewed by Elaine Anderson and LEACA masters students]

Plan

Notes de l’auteur

CGV : Confédération Générale des Vignerons.
FAV : Fédération des associations viticoles.
Créée en février 1913, la Fédération des associations viticoles de France (FAVF) ne fédérait pas à cette date les associations algériennes. Après leur arrivée, le sigle FAVFA a été parfois utilisé, mais c’est le plus souvent l’acronyme simplifié FAV qui sera utilisé.

Texte

Dans la grande histoire de la viticulture française (Vidal 2001, Lachiver 2002, Gavignaud-Fontaine 2012), la reconstitution après l’épisode phylloxérique d’un vignoble de masse méridional producteur de vins de consommation courante (Galtier 1960, Gavignaud-Fontaine et Larguier 2007, p. 154-155) a été rapidement suivie d’une crise des prix majeure, et à partir d’avril 1907 de manifestations réprimées dans le sang à Narbonne en juin (Napo 1991, Sagnes et Puech 1997, Sagnes et Séguéla 2007). Les vignerons languedociens organisés en comités de salut viticole proposent alors la création d’une Confédération générale des vignerons1 pour réaliser « l’union sacrée » de la viticulture languedocienne et permettre d’éviter son effondrement en mettant en œuvre une solution unique : « poursuivre et réprimer les fraudes sur le vin et essentiellement le sucrage, dont souffre principalement la viticulture »2 (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 67-71, Lauze 2001, p. 27). Cinq ans plus tard, le congrès tenu à Narbonne les 21 et 22 décembre 1912 dresse un premier bilan en termes de vigueur des adhésions reçues dans les cinq syndicats professionnels créés3 (de 50 000 dans 323 sections à 75 000 dans 425 sections4) et de solidité du lien confédéral établi entre eux. Il souligne les succès obtenus en matière de poursuite et de répression des fraudes ainsi que leurs effets sur la progression de la demande taxée et les prix de marché. Ces succès, « sans exemple dans l’histoire »5, vont permettre l’amplification nationale des interactions entreprises avec l’État. En effet, est créée à l’initiative de la CGV le 13 février 1913 une Fédération des associations viticoles de France, soutenue par l’essentiel d’entre elles6 pour agir ensemble solidairement, afin de préciser la définition et d’organiser la défense de la qualité du vin en France. Dans ce rassemblement, aux côtés du vignoble de masse languedocien et du Sud-Est, figurent des vignobles d’importance locale du Centre et du Nord du territoire pour lesquels le sucrage est une pratique culturellement ancienne et techniquement nécessaire, et des vignobles de cru (Galtier 1960) principalement articulés sur le trinôme Bourgogne-Champagne-Gironde.

Organiser la défense de la qualité du vin de France suppose donc d’interagir avec l’État dans trois directions :

  • Renforcer la mise en œuvre de l’activité de poursuite et de répression des fraudes sur le vin.
  • Améliorer en la matière la législation existante.
  • Élargir ces moyens de défense, notamment par la délimitation des appellations d’origine, en prenant en compte le prisme d’une identité viticole perçue comme unitaire mais affichant déjà la diversité des forces vives la constituant.

La CGV depuis 1907 et la FAV à partir de 1913 représentent chacune un corps intermédiaire interactif (Rosanvallon 2002, Chatriot 2016), un « Groupe social et humain, situé entre l’individu et l’État, indépendant et autonome, constitué en vue d’atteindre un objectif commun aux personnes qui le composent ; dont l’action s’inscrit dans la défense d’intérêts larges, car il est partie prenante de la construction démocratique » (Druelle-Korn 2012). La question posée par cet article porte sur les niveaux de performance de ces interactions, en relation avec les variables qui doivent leur être associées : défense par la CGV du vignoble de masse languedocien producteur de vins de consommation courante à valeur constante7 par la répression des fraudes, actions coordonnées des vignobles de cru pour la mise en place et la défense de délimitations judiciaires fondées sur l’origine et l’usage, position défensive de certains vignobles d’importance locale favorables au sucrage ; le tout en relation avec les crises viticoles, les ruptures observées dans les structures de consommation de vin, et l’accélération de la modernisation du vignoble. Ces interactions s’inscrivent d’abord dans un espace national8, puis à partir du début des années 1960 européen, et dans un temps historique compris entre la date de création de la FAV (1913) et la limite chronologique des archives que nous avons pu exploiter9 au début des années 1980. Pour répondre à la question posée, nous avons examiné l’histoire de ces interactions d’abord en termes de dynamique unitaire prédominante à la FAV et de domination acquise et parfois difficilement conservée par la CGV entre 1913 et 1930, puis d’altérations et de restaurations de cette dynamique jusqu’en 1940 avant la novation imposée par la Corporation paysanne et la sauvegarde finale à la fin des années 1940 des deux organisations, enfin, sur fonds de clivages aggravés et explicitement déclarés, de séquences alternant rapprochements et ruptures jusqu’à la marginalisation de juin 1971.

La CGV dominante dans la FAV : une dynamique unitaire difficilement préservée (1913-1930)

Le congrès de la CGV, tenu à Narbonne en décembre 1912 en présence des représentants de la Gironde, des vignerons catalans et de dix parlementaires parmi lesquels Félix Aldy, Emmanuel Brousse et Edouard Barthe, célèbre à la fois la puissance viticole languedocienne reconstruite depuis 1907, mais aussi ses succès institutionnels et en particulier la création dès 1911 d’un groupe viticole à la Chambre des députés, puis dans le cadre de la loi de finances du 27 février 1912, l’intégration de fait des trente contrôleurs confédéraux au service national de répression créé par le décret du 21 octobre 1907 au ministère de l’agriculture. La CGV est donc à la fois force de proposition par ses relations parlementaires privilégiées via le groupe viticole (Emmanuel Brousse, Félix Aldy, Edouard Barthe [Bagnol 2007], en sont jusqu’en 1940 les présidents successifs)10 ; mais aussi le bras armé de l’État en matière de poursuite et de répression des fraudes sur le vin avec un budget de 400 000 F. représentant le tiers de celui de l’État qui n’emploie à cette date que 15 contrôleurs nationaux non spécialisés contre 30 spécialisés pour la CGV.

La résolution phare du congrès mentionne que :

Compte tenu de la vertu moralisatrice de l’exemple, qui a provoqué en France la création d’un grand nombre d’associations de défense viticole, les conseils d’administration des Confédérations des vignerons du Midi et du Sud-Est, dans une même pensée avec les délégués de l’Union girondine des syndicats agricoles, de la Ligue des viticulteurs de la Gironde, et avec l’adhésion des associations viticoles de Bourgogne et de Champagne ; décident de convoquer périodiquement les associations des diverses régions viticoles de France. La première réunion aura lieu à Paris, le 18 février 191311.

Ce mouvement est activé à la fois « par la volonté d’une union nationale capable de porter les intérêts économiques des propriétaires via la représentation parlementaire » (Jacquet et Laferté 2006), et par la construction de relations interpersonnelles et de solidarité entre associations, tout particulièrement entre la Champagne et le Midi viticole.

Sur les intérêts économiques des propriétaires, la question de la répression des fraudes sur les produits alimentaires, et notamment sur le vin « qui de toutes les substances employées dans l’alimentation [était] celle qui subi[ssai]t le plus de falsifications » (Delcourt 1889, p. 103-131), liée aux premières manifestations de la consommation de masse, est depuis le début du siècle au centre de préoccupations nationales (Stanziani 2005 ; Bauer Bonin et Lemercier 2006). La loi du 1er août 1905, dans son article 1er leur a donné un début de réponse : « Quiconque aura trompé […] le contractant, soit par la nature, les qualités substantielles […] de toutes marchandises ; soit sur leur espèce ou leur origine […] ». Celle du 29 juin 1907 l’a précisée à propos des fraudes sur le vin en limitant sans les interdire les fabrications de vins de sucre et de piquettes12 et en permettant l’organisation de poursuites contre les contrevenants par les syndicats. La CGV, en réclamant l’éradication pure et simple du sucrage se radicalise ainsi par rapport à la loi nationale, et aux autres associations non méridionales : « Les vins fabriqués avec des vins de sucre… ne deviennent dangereux que par les maquillages qu’on leur fait subir. Si la loi cessait d’interdire leur mise en vente… la fabrication de vins ordinaires deviendrait absolument industrielle… et les viticulteurs du Midi perdraient le monopole de fait qu’ils doivent à leur soleil » (Augé-Laribé 1907, p. 339-340).

Par ailleurs existe dès cette époque en France, notamment en Bordelais, en Bourgogne et en Champagne, une tradition ancienne de viticulture de qualité (Vidal 2001, p. 22-42), présente également en Languedoc (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 21-29 ; 2007, p. 120-125 ; 144, 156-159) dont les tentatives de délimitation administrative, sur fonds de fortes tensions, notamment champenoises, dans une moindre mesure bordelaise et bourguignonne, appellent une nouvelle loi (Vidal 2001, p. 87-88 ; Wolikow 2012, p. 149-150).

Sur les relations interpersonnelles et les solidarités, le compte rendu en 1927 de la rencontre à Narbonne des associations viticoles pour le 20e anniversaire de la CGV reprend un message d’Alphonse Perrin, directeur du syndicat de la Champagne depuis sa création en 1904 : « pourquoi nous aimons nous tant : Nous sommes de peu leurs ainés13, notre télégramme est le premier qui leur est arrivé après Narbonne14 pour affirmer notre solidarité […] comme eux, nous avons souffert de la répression. Après 1907 est arrivé 1911. On a changé les noms, mais c’étaient toujours les mêmes miséreux qui réclamaient du pain. Narbonne en Champagne se traduit par Ay ou Epernay. On n’a pas trouvé de tribunal pour juger Narbonne et ses morts, mais on en a trouvé un pour juger Ay et l’incendie [Wolikow 2012, p. 143]. Nous avons scellé cela en fondant à quatre ou cinq la FAV en 1913 »15.

La volonté de coopération affichée dès 1912 a été concrétisée dès l’assemblée constitutive de la FAV tenue à Paris le 13 février 1913 par une concertation entre méridionaux, bordelais, bourguignons et champenois pour « accepter la discussion du projet de loi Pams-Dariac sur les délimitations judiciaires d’appellations d’origine » et « se prononcer en faveur du maintien de la législation existante en matière de répression des fraudes sur le vin »16. Ainsi étaient solidairement validés et pérennisés au niveau national les acquis législatifs et institutionnels obtenus par la CGV entre 1907 et 1913, et ouverte la perspective d’une loi nouvelle sur les délimitations judiciaires censée apaiser les conflits nés, notamment en Champagne, des tentatives de délimitation administrative.

Un an plus tard, en février 1914, l’assemblée générale tenue à Paris adopte les statuts de la FAV, préparés à Narbonne par les services confédéraux17 : le siège social est fixé à Narbonne avec un secrétariat général exécutif permanent, chargé de mettre en œuvre les orientations fixées par l’assemblée générale, occupé jusqu’à son décès en 1937 par Elie Bernard, secrétaire général de la CGV, et une présidence tournante. Les droits de vote aux assemblées générales annuelles chargées d’adopter les motions d’orientation sont fixés en fonction des cotisations collectées en relation avec le nombre d’adhérents de chaque association, la CGV construisant ainsi et conservant une majorité absolue jusqu’en 193918.

La CGV dans la FAV, et leurs relations avec le Groupe viticole19 s’organisent donc à partir de la puissance institutionnelle de la CGV en tant que corps et de sa domination en nombre de mandats, qui la placent à cette date dans une position quasi-hégémonique, toutefois tempérée par la volonté de coopération affichée dès 1914 : « Je souhaite que nous soyons unanimes dans les décisions que nous allons prendre… et que s’il y a une minorité, elle aura le devoir de s’incliner parce que le bien sera là où la majorité l’aura indiqué »20. Cette situation se traduit sous la présidence de la CGV par Ernest Ferroul (1913-1921) par un unisson permettant des progrès significatifs de la législation existante en matière de fraude et de répression, notamment par les décrets du 22 janvier 1919 et du 19 août 1921 (Bagnol 2007). Par ailleurs, cette année 1921 est à la CGV une année de crête avec quarante agents déployés sur le territoire national et un effort financier représentant 30 % de celui de l’État21. Avec le retour des crises de prix à partir de 1919 et jusqu’en 1930, sous les présidences de Justin Mirepoix puis de Marius Cathala (1921-1930) on note, malgré des dissonances encore contrôlées sur les autres axes de défense, la persistance de cet engagement national unanime comme en témoigne le rapport de Justin Mirepoix les 2 et 3 mars 1925 devant la CCIV, faisant la synthèse des positions de la FAV exprimées au congrès de Dijon en 1924. La création à partir de 1923 à la FAV d’une association de vins de cru ne les a pas empêchées d’aboutir22, parfois difficilement après plusieurs années de négociation. La loi votée le 6 août 1929 sur la chaptalisation du vin (Bagnol 2007), résulte cependant d’un plus difficile compromis (la question est mise en débat à la FAV dès 1925) entre partisans du maintien d’un sucrage culturellement ancien et techniquement perçu comme nécessaire, et tenants de son interdiction totale, donc entre vignobles du nord et du sud de la Loire et entre appellations d’origine et vins de consommation courante. Celle du 1er janvier 1930 sur les vins anormaux enrichit encore un cahier de charge de la qualité des vins en France.

L’ensemble de ces points met en relief l’action d’une CGV dominante à la FAV, pesant avec elle efficacement pour ses priorités essentielles (répression des fraudes et sucrage du vin) via le groupe viticole de l’assemblée, mais en difficulté sur d’autres axes de défense.

Sur les critères de qualité du vin, elle a proposé dès 1911 un amendement à la future loi sur les appellations d’origine inspiré de l’article 1er de celle du 1er août 1905, fondé sur « la qualité substantielle de la chose », associant directement l’efficacité des actions de poursuite et de répression menées à une démarche de délimitation, tout en précisant qu’elle « agissait par solidarité avec les autres associations viticoles concernées, le projet de loi ne semblant pas devoir intéresser le Midi »23. Après de vifs débats parlementaires, les bourguignons, et notamment le député Etienne Camuzet, s’opposent à cette approche, lui préférant celle, finalement soutenue par la FAV fondée sur « l’origine et l’usage » et adoptée le 20 novembre 1913 par la Chambre des députés (Jacquet et Laferté 2006). La loi Pams-Dariac, qui instaure un système de délimitation par décision judiciaire est finalement votée en raison du conflit mondial seulement en 1919. Elle reprend le texte de 1913, lui-même conservé et enrichi par la loi Capus de 1927 qui introduit des conditions de qualité liées au terroir et aux cépages. En donnant aux associations la possibilité d’ester en justice pour fixer des délimitations, puis de définir et de contrôler des niveaux de qualité du vin liés à l’origine, mais aussi à des usages anciens, loyaux et constants, ces avancées témoignent de la force de proposition, sur un axe différent de celui de la CGV des associations concernées à la FAV. Bien qu’obtenues avec son soutien solidaire, elles introduisent sur la définition de la qualité, un clivage entre producteurs de vins de cru délimités à valeur différenciée par l’origine et les usages, et producteurs de vins de consommation courante, dits à valeur constante.

Dès 1919, le retour des crises de prix, aggravées au début des années 1920 par l’installation d’une surproduction structurelle métropole-Algérie (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 97) révèle les limites de l’efficacité de la répression des fraudes et la nécessité de nouvelles solutions de régulation pour les vins de consommation courante. Le refus par l’Algérie du projet de contingentement du marché métropole-Algérie24, porté par la CGV aux congrès de 1927 et 1929 de la FAVFA25, marque une première rupture d’unanimité malgré le soutien des associations métropolitaines. Il divise également, tout en l’affaiblissant à l’interne la Confédération.

Jusqu’en 1930, la dynamique soutenue en matière de poursuite et de répression des fraudes, et la solidarité affichée au moment du vote des lois Pams-Dariac et Capus ont donc permis le maintien d’une forme de domination de la CGV à la FAV, corps intermédiaire où la notion d’objectifs communs poursuivis pour la défense d’intérêts larges était pour l’essentiel préservée. En revanche l’engagement de la CGV sur de nouvelles lignes de défense (définition et défense de la qualité du vin, loi de chaptalisation, contingentement) a mis rapidement en évidence l’émergence d’intérêts sectoriels opposant vins ordinaires et vins de cru, métropole et Algérie, ainsi que producteurs et négoce sur l’organisation des marchés (Le Bras 2019). Ces oppositions l’ont fragilisée, et, sur la question algérienne, compte tenu de leur ampleur, isolée.

La CGV dans la FAV et l’intérêt public : pertes d’unité et isolement, compromis positif mais affaiblissement, sauvegarde des deux organisations (1930-fin des années 1940)

Entre 1930 et 1939, dans un contexte de crise de prix du vin lié à la surproduction structurelle de l’ensemble métropole-Algérie, persistant jusqu’en 1935, la position de la CGV s’est progressivement affaiblie à la FAV jusqu’à sa perte de majorité absolue en 1939. La réforme statutaire du 11 juillet 1926 intégrant les représentants des coopératives aux CA syndicaux et fédéraux26 n’a pas suffi pour stopper l’érosion des cotisations et du nombre de mandats aux assemblées générales annuelles de la FAV, due aux effets cumulés de la crise viticole et du départ de la Fédération du Sud-Est et du syndicat du Var en 1931. La création en 1932 de la Ligue des petits et moyens viticulteurs, mais aussi la progression de la viticulture algérienne et de la section des vins de cru, créée dès 1923, ont aggravé la situation27.

Sous la présidence de la CGV par Gustave Costes en 1931, dans le cadre de la préparation de la première loi anti-crises du 4 juillet 1931 (Bagnol 2011, p. 128 et suivantes), la FAV, en avril à son congrès d’Angers, soutient à la majorité la proposition de blocage départemental28 portée par la CGV pour tenter de contourner le refus de son projet de contingentement, d’abord par les vignerons algériens, puis par les pouvoirs publics « au nom d’un principe d’égalité entre les territoires »29. Le blocage général avec échelle progressive, soutenu dans le Petit Méridional entre les 20 et 27 avril par Edouard Barthe30 s’oppose au projet confédéral. Le 11 mai, devant la commission des boissons qu’il préside, toutes les associations à l’exception de la CGV approuvent la taxe au rendement (soutenue par les petits propriétaires et les viticulteurs de côteaux) et se prononcent à l’exception de la CGV et de la Confédération du centre-ouest en faveur du blocage général. Deux ans plus tard, le congrès d’Avignon de la FAV reste sur ses positions de 1931 pour préparer la loi du 8 juillet 1933 (Bagnol 2011, p. 128 et suivantes) et c’est le Baron Le Roy31 qui les défend devant la commission des boissons. Pourtant en 1931 comme en 1933, les textes définitifs votés imposent la taxe au rendement et ne retiennent pas les propositions confédérales. De plus, la bataille contre les exonérations de blocage et de distillations menée par Gustave Costes et les parlementaires méridionaux est deux fois perdue par la CGV au profit des vignobles délimités depuis 1919 qui sont exonérés. Cette situation témoigne, outre l’affaiblissement de la force de proposition parlementaire de la CGV, bridée par Edouard Barthe (Bagnol 2007, Gavignaud-Fontaine 2007, p. 207-211 ; Lauze 2021, p. 144), d’un délitement à la FAV de la notion d’objectifs communs, difficilement préservée jusqu’à la fin des années 1920, au profit d’intérêts spécifiques (Algérie, petits viticulteurs de côteaux contre viticulture industrielle, vignobles de cru) sous l’arbitrage, au nom de l’intérêt général, de l’État (Lauze 2001, p. 148-149).

La présidence de la CGV par Henri Maillac entre janvier 1934 et mai 1940 marque un renversement de tendance. Le nouveau président réussit à obtenir une décision unanime (incluant l’Algérie) de la FAV réunie à Paris entre le 28 et le 30 juin 1935, sur le soutien d’un projet de caisse de compensation professionnelle des alcools, permettant de payer les alcools de distillation à 700 F l’hectolitre ainsi que des indemnités d’arrachage facultatif. En contrepartie, la CGV renonce à ses revendications sur le blocage départemental et le contingentement du marché métropole-Algérie. La proposition, bien que largement adaptée par la CCIV dans le sens d’un plus strict contrôle gouvernemental, va devenir l’épine dorsale du décret-loi du 30 juillet 1935, dispositif central du statut viticole qui (Bagnol 2007, Gavignaud-Fontaine 2000, p. 100-103, 2007, p. 211) permettra une stabilisation, puis une significative reprise de la progression des prix courants du vin jusqu’en 1940. De plus, ce décret, installe, via l’INAO32 un contrôle institutionnel de la qualité des vins délimités d’origine simple en créant le concept d’appellation d’origine contrôlée (AOC) (Vidal 2001, p. 88-90). Il s’agit, après la phase de marginalisation subie entre 1930 et 1934, d’un retour vers la notion d’intérêts communs partagés entre la Confédération, la Ligue des petits et moyens viticulteurs, promotrice (article 8 du décret) d’un échelonnement des sorties par dixième avec prix minimum fixé par décret, le courant de plus en plus vigoureux en métropole prônant « une entente avec les algériens »33, et les représentants des vignobles de cru. Ce compromis a le soutien de la FAV qui, outre son rôle dans la préparation du décret, en garantit jusqu’en 1940 les conditions de mise en œuvre. En effet, en 1939, pour cause de non-utilisation partielle d’une partie des contingents d’achat d’alcool autorisés, le gouvernement décide leur suppression, mais, sous la pression de la FAV, un nouveau décret restaure en avril la situation antérieure34.

La FAV continue à soutenir les orientations de la CGV sur la poursuite et la répression des fraudes bien que les appellations d’origine ne rentrent pas, depuis 1919, dans son champ de compétences35. Au congrès de Dijon en juillet 1934, Edouard Barthe déclare que le sucrage clandestin est très développé en Bourgogne, dans la région du Centre et en Algérie36. Cependant, l’efficacité de l’engagement confédéral reste limitée par la mansuétude des tribunaux qui fait l’objet de nombreuses protestations soit directement auprès du ministre de l’agriculture, soit par Edouard Barthe lui-même au Parlement, jusqu’en 194037. Pourtant, le compromis constructif qui avait permis d’assurer entre 1907 et 1930 le succès interne de la Confédération, puis sa domination nationale à la FAV reste d’actualité. Il s’appuyait au départ sur une articulation entre défense de la qualité de tous les vins de France par la répression des fraudes, sécurisation psychologique du consommateur, maintien du niveau de la consommation taxée métropolitaine, et soutien des prix. Pour Pierre Benet en 1936 à Narbonne, ce mécanisme fonctionne toujours : « La consommation taxée France-Algérie (sic) a été de 49 millions et 583 000 hectolitres et les statistiques des premiers mois de la campagne en cours nous permettent d’espérer une augmentation de deux millions ! »38.

Ces statistiques mises en relation avec la courbe ascendante des prix courants après 1936 plaident en faveur de l’efficacité du schéma défendu. Pourtant, en 1938, une communication d’Henri Vidal39, présentée au conseil d’administration de la CGV indique que les dépenses annuelles du service de la répression des fraudes, de l’ordre de 800 000 F, uniquement financées par les cotisations, ne permettent plus que l’entretien de 22 contrôleurs contre 40 entre 1922 et 192740. La crise de la trésorerie confédérale41 pose brutalement la question de la compatibilité d’un système de ressources fragilisé avec l’engagement fondateur de 1907, et surtout sa transposition en 1913 au niveau national42. Pourtant les pouvoirs publics entre 1930 et 1940 ne reviennent pas encore sur leur engagement de 1912. Au début du XXe siècle l’État acceptait souvent de déléguer une part importante de sa mission de service public à des corps intermédiaires interactifs, faute de moyens propres suffisants pour agir directement. Après 1930, le service national est renforcé, signe d’une volonté gouvernementale d’assurer directement une partie plus substantielle de sa mission de service public. L’État apporte par exemple une attention particulière au contrôle des vins importés et à la « police » du régime des alcools, ainsi qu’aux aspects fiscaux de la réglementation43. La nécessité d’une réorganisation du dispositif de 1912 est donc clairement perçue par l’État et l’ensemble des associations de la FAV.

À la veille du second conflit mondial, la CGV voit donc sa domination à la FAV altérée par une perte de majorité absolue44 doublée d’un recul de son potentiel de poursuite et de répression des fraudes, par ailleurs limité aux vins de consommation courante. Pourtant se dessine le paradoxe, après les tensions de la période 1931-1933 d’une meilleure reconnaissance par les pouvoirs publics grâce au succès unanimement reconnu du statut viticole. Le 7 décembre 1936, Henri Maillac est choisi comme président de la section viticulture du Conseil National Économique et quelques jours plus tard, le 24 décembre, le Journal officiel de la république publie un nouveau code du vin, codification des lois existantes non abrogées à ce jour, aboutissement de l’effort de normalisation produit depuis 1907 (et 1913) via la force de proposition des associations.

Entre 1940 et 1948 la viticulture française subit l’impact et les effets du second conflit mondial. Après le décès d’Elie Bernard, en 1937, Pierre Benet, président de la CGV de 1940 à 1948, est aussi secrétaire général de la FAV. Pour la période de mise en place entre 1940 et 1942 de la Corporation Nationale Paysanne par le pouvoir de Vichy, la décision finale jusqu’au début de l’année 1943 appartient au Comité des trente45, contrôlé par les ministères de l’Agriculture et des Finances46. La FAV est donc absente d’un dispositif centré sur le productivisme et la diversification qui se consacre principalement, contre les options de la CGV, à la déconstruction partielle du statut viticole et du code du vin, à la mise en sommeil de la répression des fraudes, et à l’organisation d’une gestion administrée des prix du vin et des approvisionnements.

Cette première étape se termine le 2 décembre 1942 par la démission collective du Comité des 30 qui appelle à la mise en place immédiate du Conseil National Corporatif, ainsi qu’à la création des groupes spécialisés professionnels dont le groupe spécialisé de la viticulture (GSV) prévus par le titre I de la loi fondatrice du 2 décembre 1940. La CGV s’est acquittée, sous la direction de Pierre Benet, de sa mission d’installation de la Corporation paysanne dans la région administrative de Montpellier, obtenant ainsi une reconnaissance en tant qu’organisation prépondérante dès 1940, mais sans les moyens d’agir efficacement pour infléchir les choix gouvernementaux.

Pierre Benet, le 13 avril 1942, indique que « la Fédération des associations viticoles a été habilitée à préfigurer le groupe spécialisé de la viticulture au niveau national »47. La FAV tient sa dernière assemblée générale à Nîmes les 15 et 16 mai 1942 sans (pour des raisons liées au déroulement du conflit) la Confédération des Vignerons algériens, et la CGV y retrouve donc une courte majorité absolue48. Un comité directeur du GSV est élu par une assemblée générale de 100 membres tenue à Vichy en décembre 1942 qui compte 20 représentants de la CGV (quatre par syndicat fondateur49). Pierre Benet est son président, entouré d’un bureau comptant quatre représentants du vignoble méridional dont Jean Voisin de Béziers Saint-Pons au poste de secrétaire général permanent. Ce comité coiffe une organisation à deux niveaux, régional et local de sections spécialisées (dont la CGV), disposant de la personnalité morale dans le nouvel ordre corporatif50.

Cette organisation juridique se double d’un projet d’organisation fonctionnelle en quatre sections verticales, représentatives des nouvelles dynamiques structurelles de la viticulture nationale : une section des vins de cru déjà créée en 1923, la Fédération des caves coopératives de vinification, une Fédération des distilleries coopératives (tardivement instaurée par un décret du 22 février 1944), et une section des vins de consommation courante dont la finalisation juridique n’a pas été réalisée faute de temps51.

Le GSV doit selon les dispositions de la loi de 1940 prendre en charge la défense économique de la profession, la politique des prix, ainsi que la régulation et l’équilibre des marchés. La CGV y contrôle avec la présidence de Pierre Benet la direction nationale et conserve dans l’organisation des sections régionales et locales une influence, héritée de la FAV qui dépasse encore largement son assise méridionale comme le suggère en 1944 Antonin Palazy :

C’est le président de la CGV qui en est le président élu du Groupement spécialisé de la viticulture française et qui se trouve de ce fait, le chef de la viticulture nationale, preuve de la haute estime en laquelle les viticulteurs des autres régions tiennent la CGV du Midi52.

À la veille de la libération, la FAV de 1942 est donc restructurée dans un GSV où la CGV tient une position dominante et a réussi à survivre à la violence du conflit sans toutefois pouvoir obtenir le maintien des orientations prises depuis 1935. Sa durée de vie sera courte du début de l’année 1943 à la promulgation de l’ordonnance du 26 juillet 1944 « déclarant nulles et non avenues toutes les dispositions mises en place par le texte dit loi du 2 décembre 1940 ». Elle sera suffisante pour assurer à la CGV et aux autres associations viticoles nationales une existence légale dans la Corporation Paysanne qui sera prolongée après 1945 par l’aménagement de l’héritage corporatif (Larchevêque 1959) ; et pour leur permettre d’enregistrer des succès significatifs en matière de fixation administrée des prix du vin, mais sans les préserver de l’échec de leurs demandes sur le retour au statut viticole de 1935, une gestion moins contraignante des approvisionnements, et la levée du gel persistant de la répression des fraudes.

Réorganisations, antagonismes déclarés, rapprochements et ruptures jusqu’à la marginalisation de 1971

Le comité consultatif agricole53 créé par l’ordonnance du 12 octobre 1944 autorise à partir de janvier 1945 la CGV à fonctionner à nouveau à condition notamment que « l’épithète [Générale] soit revue car elle ne correspond pas [plus ?] à la réalité ». Il faut aussi que la FAV « [… ] soit réaménagée. Elle aura l’obligation de prendre en charge l’activité de poursuite et de répression des fraudes ce qui va nécessiter un budget important assuré par les associations adhérentes, et, dans la continuité du GSV dissous, d’avoir un bureau à Paris »54. Elle s’installe au 4, rue de Rigny dans les locaux précédemment occupés par le GSV.

Cette nouvelle FAV tient donc son assemblée à Paris les 14 et 15 mars 1945. Elle décide, dans la continuité du GSV, de s’organiser en quatre sections : vins de consommation courante, vins délimités de qualité supérieure (VDQS)55, appellations d’origine contrôlée (AOC)56 et caves coopératives. Pierre Benet est secrétaire général permanent, Pierre Romieu et Philippe Lamour respectivement vice-présidents chargés des sections VCC et VDQS. Alors que se diversifie, avec la création de la CGA (Confédération générale agricole) et de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitation agricole) le paysage syndical français (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 134). La Confédération générale des vignerons algériens, qui va devenir majoritaire dans le groupe des VCC, réintègre la FAV57. La vieille CGV réussit à conserver l’épithète « générale », mais assortie du complément de lieu « du Midi » et devient CGV (M). Elle recommande à ses syndicats, pour se mettre en conformité avec la FAV de s’organiser en deux sections distinctes, VCC et VDQS58.

On observe dès 1950-1951 une nouvelle perte de majorité de la CGV (M) à la FAV au bénéfice de l’Algérie59, qui durera jusqu’au congrès de Villefranche sur Saône en 1964, alors que se précise l’entrée en phase de déclin de la consommation des vins de consommation courante, par rapport aux VDQS et aux AOC en phase d’expansion. Par ailleurs, le tableau des cotisations pour l’année 1950-1951 au congrès de Montpellier de la FAV fait apparaître des lignes distinguant le versement de chacun des syndicats unis de la CGV (M) alors qu’elle est la seule adhérente statutaire. Cette situation révèle, outre la perte de majorité, une fragilisation à la CGV (M) du lien confédéral sur lequel elle s’était fondée en 190760.

La CGV (M), en cohérence avec son engagement confirmé après 1945 au service de la restauration d’un vignoble de masse déprimé au carrefour de son avenir (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 125) est confrontée jusqu’en 1960 à des orientations alternatives privilégiant AOC et VDQS, soutenues à la fois par la plupart des autres associations présentes à la FAV, et par les pouvoirs publics. Elle réaffirme pourtant par la voix de Pierre Benet son souhait de retour au statut viticole dans sa forme de 193561. Cette position, d’inspiration d’abord sociale s’oppose à celle d’un courant libéral préférant la recherche d’un prix d’équilibre déterminé uniquement par les mécanismes d’un marché réaménagé et modernisé. La position majoritaire de la FAV, comme en témoigne la synthèse du compte rendu de son congrès du 11 juillet 1953 à Bordeaux, semble avoir nettement glissé, après le décès en 1948 de Pierre Benet, en faveur de cette dernière orientation :

  1. Adhésion totale aux principes de base du statut viticole, mais sous réserve de modifications.
  2. Nécessité de voir s’instaurer une orientation de la production par une sélection du vignoble en vue d’une politique permanente de qualité.
  3. Réserves explicites sur l’opportunité d’une politique de soutien systématique des prix et même de la fixation d’un prix minimum de libération avant que ne soit connu précisément le montant des disponibilités après la récolte 195362.

Finalement, le décret pris le 30 novembre 1953 sur l’assainissement du marché du vin et l’orientation de la production agricole s’inscrit clairement dans cette ligne en prévoyant des mesures d’assainissement héritées du statut viticole, mais sans soutien des prix, et une orientation de la production vers une « modernisation », qui sera à partir de sa création en 1954 organisée par l’IVCC63 (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 163-173, 2007, p. 229-230).

En conséquence, le premier acte de la présidence Caffort à la CGV (M) est le 11 mars 1954 de prononcer la démission de la CGV (M) de la FAV à l’unanimité des syndicats adhérents64, car « elle ne s’attaque pas au privilège de chaptalisation conservé par les vignobles du Centre et du Nord, se montre tolérante à l’égard des cépages prohibés et n’intervient pas contre de nombreuses injustices comme la non-surveillance des déclarations de récoltes dans les départements non méridionaux […] La CGV (M) regrette aussi que son effort national en matière de répression des fraudes ne soit pas suffisamment reconnu »65.

Sur ce dernier point, la Confédération n’a pas suivi les directives de 1945 en déclarant au contraire que « La CGVM doit continuer à défendre le vin et à assurer la répression des fraudes, déchargeant d’autant la Fédération et les syndicats d’exploitants »66. Pour atteindre cet objectif elle a organisé la centralisation de ses services à Narbonne, mais cette démarche a échoué d’abord pour des raisons financières liées au tarissement des cotisations et à l’arrêt des financements publics récemment obtenus de l’ITV67, mais aussi à cause des suspicions soulevées à propos de son engagement d’intérêt public68 et d’incontournables restrictions juridiques comme l’arrêt Vaudoire du 25 novembre 195469. L’opportunité de la création à l’initiative d’Henri Vidal de la FNVCC70 est saisie en 1956 pour tenter de surmonter ces difficultés par un transfert de l’activité à cette nouvelle structure nationale. Ses statuts l’autorisent à disposer d’une brigade d’agents, et d’un service du contentieux71, dirigé par Daniel Combes, qui restera localisé à Narbonne. Son siège social est fixé à Paris, rue de Rigny dans les locaux de la FAV dont elle devient un des constituants72. Onze ans plus tard, le vœu de prise en charge par la FAV de l’activité de poursuite et de répression des fraudes, exprimée par le Comité national consultatif agricole en 1945 se trouve donc en partie exaucé. En novembre 1956, les dirigeants confédéraux, après avoir acté juridiquement ce transfert73, se posent logiquement la question de « la mort de la CGV (M) »74, affaiblie en Languedoc par la montée en puissance, l’originalité et la prise progressive d’autonomie du mouvement coopératif (Gavignaud-Fontaine 2000, p. 19-116 ; 2017, p. 213-216), le départ des deux syndicats de Béziers-Saint Pons et de Montpellier-Lodève, mais surtout la perte de ses trois piliers fondateurs (intégration institutionnelle partielle à l’administration d’État pour poursuivre et réprimer les fraudes, force suffisante de proposition via le groupe viticole et l’IVCC, majorité à la FAV), donc de toute domination nationale et languedocienne (Martin 1994).

La question de 1956 est restée posée jusqu’en 1960, date du congrès de Narbonne de la FAV où le tableau des cotisations témoigne de la réadhésion directe, sans passer par la CGV (M) de certains de ses syndicats professionnels, mais confirme une position toujours minoritaire de la viticulture méridionale dans le groupe des VCC en nombre de mandats75.

En octobre 1960, Jean-Baptiste Benet, fils de Pierre Benet est élu président de la CGV (M) avec l’ambition de réhabiliter le syndicalisme méridional pour faire progresser les vins du Midi sur le marché français et le futur marché européen. Sa « doctrine » consiste à défendre « le bon vin naturel du Languedoc » en assurant des vins « complets », directement consommables à la sortie des chais, au départ de la région. Par ce choix, congruent avec les orientations nationales des vins de cru, il mise sur les préférences des consommateurs pour guider le marché et la fixation des prix, éliminant ainsi toute fixation théorique par voie d’autorité, « ayant largement montré ses insuffisances à plusieurs reprises »76. En 1964, en l’absence de l’Algérie, au congrès de Villefranche sur Saône de la FAV, le Midi retrouve une majorité, maintenant portée par la FNVCC77. Bien que le groupe des VCC continue à s’affaiblir par rapport aux AOC et aux VDQS – y compris en région où les associations méridionales de vins délimités cotisent à la FAV sur des lignes distinctes de celles de la CGV78 – Jean-Baptiste Benet y apparaît toujours comme secrétaire général jusqu’en 1971.

Le décret français du 31 août 1964, dernier décret national avant le passage à un marché européen du vin, est préparé par un groupe de travail sous la présidence de Philippe Lamour représentant des producteurs de VDQS à l’IVCC79, et Jean-Baptiste Benet y participe comme secrétaire général de la FAV80 (Gavignaud-Fontaine 2007, p. 232-237). Son article 26 prévoit un régime préférentiel (exonération de blocage, priorité de remise en marché, financement préférentiel) pour des vins « provenant d’exploitations viticoles bien encépagées dans leur totalité, répondant à des critères analytiques sévères, et ayant subi un examen organoleptique de confirmation par une commission agréée »81. Ces vins sélectionnés le seront pour leur quasi-totalité dans les départements du Midi, zones d’influence de la Confédération. Ils représentaient en 1966 pour l’Hérault, les Pyrénées-Orientales, l’Aude et le Gard environ 10 % de la récolte totale et leur volume a progressé jusqu’en 1968, année de la création des vins de pays82.

Il faut noter que ces succès résultent principalement du rapprochement d’une CGV (M) affaiblie avec la FAV. En effet, entre 1960 et 1965, le président de la CGV (M) a utilisé plusieurs fois l’arme de la démission, liée à ses dires « à l’impossibilité de poursuivre une tâche constructive par des négociations »83, effective le 29 octobre 1964 avant un retour en mai. Durant cette période, et jusqu’en 1968, le terrain de la revendication viticole méridionale est largement occupé par les Comités régionaux d’action viticoles84.

En revanche, dans la négociation concernant le futur marché européen du vin, commencée dès 1958 et sanctionnée par la promulgation le 24 décembre 1969 du règlement 816/70, applicable dès la campagne 1970-1971, les centres d’intérêt de la CGV et des autres adhérents de la FAV se différencient rapidement. Dès 1962, le premier règlement européen n° 24-989/62 prévoit « la mise en place d’une réglementation communautaire des vins de qualité produits dans une région déterminée », les VQPRD, au plus tard le 31 décembre sur des bases inspirées de la réglementation française définissant les AOC et les VDQS. Des contingents d’exportation sont fixés pour les pays producteurs et les questions de définition et de contrôle de leur qualité largement laissées à l’initiative des associations de producteurs et à l’INAO85. En revanche, Jean Baptiste Benet se heurte pour les vins de table à des intérêts concurrents et asymétriques. Deux segments sont finalement retenus : celui des VQPRD fondé sur une offre centrée sur l’origine et les usages mais aussi sur une logique de préférence consommateur (Lambin 1991, p. 252-253), et celui des vins de table, produits seulement définis comme non VQPRD, soumis à une stratégie d’avantage coût et dominé par l’Italie et le nouveau négoce européen. Jean Baptiste Benet a argué, à deux reprises sans succès, de sa qualité de secrétaire général de la FAV en alertant le ministre de l’Agriculture Edgard Faure sur cette situation d’impasse86 (Gavignaud-Fontaine 2007, p. 243.), puis en essayant, toujours sans succès, d’obtenir un moratoire sur l’application du futur règlement87. La FAV dans cette négociation n’appuie pas son secrétaire général et soutient même en avril 1968 la notion de « vin de table perfectible par coupage » contre les options défendues par la CGV (M).

Enfin, quasiment aux mêmes dates, l’axe central de la politique viticole unitaire des années 1913-1930, fondé sur la poursuite et la répression des fraudes rentre en phase d’extinction. Le rattachement à l’administration d’État de la brigade de poursuites de la FAV met fin en février 1968 à 56 ans (1912-1968) d’exercice d’une formule originale qui, avec le soutien puis le relais actif de la FAV, intégrait partiellement le syndicalisme professionnel viticole à l’administration. Le contentieux narbonnais, confronté à une réglementation européenne fondée sur le principe « du recours à la réglementation nationale la plus favorable » poursuit difficilement son activité jusqu’en 1985, après être passé du statut de fleuron à celui de doublon, avant de s’éteindre, faute de moyens88.

Au début des années 1970, le diagnostic de 1956 est donc non seulement confirmé, mais aggravé. C’est en s’appuyant sur une forte légitimité viticole languedocienne que la CGV de 1913 avait réussi en créant la FAV la mise en place d’alliances par lesquelles sa position majoritaire construisait sa légitimité nationale. 58 ans plus tard, au congrès de la Fédération tenu à Reims du 29 juin au 2 juillet 1971, les vins de table dont elle reste la composante principale disposent encore d’une courte majorité de 51,59 % des mandats, mais son potentiel de poursuite en matière de fraudes et sa force de proposition auprès des instantes nationales et européennes sont proches de l’extinction. Une révision des statuts, actée le 29 juin met en place un nouvel article 7 qui fixe le nombre de délégués par type de production à l’assemblée générale ainsi qu’une discipline de vote exigeant une majorité des ¾ des votants. Les VQPRD définis par le règlement européen 816/70 obtiennent ainsi une majorité absolue statutaire et (ou) une minorité de blocage89. La FNPVTP90 et avec elle la CGVM perdent donc définitivement le contrôle national de la représentation viticole, construit à partir de 1913.

 

En conclusion, on observe que la CGV a une première fois perdu sa majorité absolue, mais conservé une majorité relative à la FAV entre 1930 et 1939. Après la parenthèse du groupe spécialisé de la viticulture, la FAV à partir de 1945 a distingué institutionnellement les VCC dont la consommation entrait en phase de déclin, des VDQS et des AOC en progression. La CGV a retrouvé (après 1945) puis reperdu au profit de l’Algérie (après 1950) avant de la retrouver entre 1964 et 1971 une courte majorité dans ce groupe des VCC.

En 1913, au moment de la création de la FAV, un des objectifs des associations nationales, compte tenu de l’ampleur des fraudes sur le vin en France, était d’interagir efficacement et solidairement pour les éradiquer. La position radicalisée de la CGV en faveur d’une interdiction totale du sucrage a d’abord tendu le débat sur la préparation de la loi de chaptalisation de 1929. Le décret de juillet 1935 en créant l’INAO l’a définitivement privée de toute action en la matière sur les AOC. Ces points de rupture expliquent l’affaiblissement de l’action confédérale jusqu’en 1940 et le constat par la CGV (M) elle-même de l’impossibilité d’assumer à partir de ressources régionales limitées une mission de service public nationale installée en 1912 et confirmée en 1913 à la FAV. Ils expliquent aussi, après le gel de cette mission entre 1940 et 1947, son blocage progressif entre 1947 et 1956. Après 1956 et l’intégration de l’activité dans la structure de la FAV, via la FNVCC, l’action de la brigade ne représentait plus qu’une possibilité d’interaction faible, éteinte en 1968, alors que celle du contentieux narbonnais est restée significative malgré le nouveau contexte européen et une progressive perte de moyens menant à son extinction en 1985.

Par ailleurs, les différences de sensibilité sur l’approche qualité du vin, et donc mécaniquement sur sa défense, entre la CGV privilégiant la poursuite et la répression des fraudes, et les associations de vins de cru recherchant un système de délimitation, finalement judiciaire, fondé sur l’origine et les usages ont été surmontées à l’occasion du vote des lois 1919 et de 1927, puis de la promulgation du décret de 1935, préservant ainsi les choix de solidarités affichés en 1913. Ces solidarités, menacées dès 1945 avec la réforme de l’organisation de la FAV différenciant VCC et vins de cru, ont été définitivement rompues après le congrès de Bordeaux de 1953 où la FAV s’est explicitement déclarée hostile au soutien des prix du vin demandé par la CGV (M). Le règlement européen 816/70 en distinguant au profit des seconds sur les marchés français et européen vins de table et VQPRD, consacrait ce glissement de la solidarité de 1913 au conflit d’intérêts ouvert, suivi mécaniquement de la réforme des statuts de la FAV en 1971.

Dans ce processus, la force de proposition via la représentation parlementaire construite depuis 1907 par la CGV et solidairement exploitée jusqu’en 1940 à la FAV s’est effondrée avec la IIIe République en 1940. Après cette date, l’instabilité de la IVe, l’orientation présidentielle de la Ve et l’organisation technocratique de la Communauté européenne ont généré par la voie du décret (1953, 1964) et du règlement (1970) des orientations de politique viticole qui la marginalisaient en tant que corps intermédiaire tout en préservant, globalement, au nom d’un l’intérêt général fondé sur les évolutions du marché du vin en France et en Europe, les demandes de la FAV.

Ce n’est donc pas la majorité détenue à la FAV qui a radicalement pesé sur l’efficacité de l’action des deux corps intermédiaires, mais la congruence des orientations proposées avec l’intérêt public perçu et mis en œuvre par l’État, puis par les institutions européennes. Sur les ruptures du parcours lié au rôle et au poids de la viticulture algérienne (1929, 1935, 1945, 1962), c’est le principe d’égalité entre les territoires porté par Edouard Barthe au nom de l’État qui a prévalu, le plus souvent contre les options confédérales. L’historique de la répression des fraudes, reconnue cause d’intérêt national permet de fixer la période 1945-1950 et la sortie du conflit pour distinguer en la matière le passage pour la CGV d’une première phase de domination à une phase de déclin. En revanche, la création en 1913 de la FAV constitue pour les associations de défense des vins délimités l’occasion d’entamer, avec le soutien solidaire de la CGV la construction d’une identité spécifique, notamment à l’égard des concurrents et du négoce, puis à partir des années 1950 de poursuivre cette construction sur les marchés français et européen en se distinguant jusqu’à l’antagonisme des options confédérales. À partir de cette date la notion d’objectifs communs à atteindre en matière de défense viticole s’est assez délitée pour que les représentants de la FAV puissent finalement déclarer « qu’en France, il y a deux politiques viticoles, à cause des intérêts divergents de deux catégories de viticulteurs et de vins produits »91. La formule s’inscrit finalement au seuil d’une nouvelle rupture, celle du retournement du Midi Viticole (Genieys, 1998) avec la généralisation en Languedoc de signes de qualité intégrant les réglementations française et européenne, à partir de terroirs ou cette qualité avait souvent été façonnée dès l’époque des abbayes (Gavignaud-Fontaine 2017, p. 120, 125, 144, 156-159).

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Annexe

Annexes

Annexe 1

Associations viticoles présentes à Paris en 1913 à la réunion constitutive de la FAV

Confédération Générale des Vignerons
Fédération des syndicats de la Champagne viticole
Fédération Auboise de défense viticole
Syndicat fédéral de l’Aube
Ligue des viticulteurs de la Gironde
Union Girondine des syndicats Agricoles
Syndicat de défense viticole Girondine
Association Girondine de lutte contre la fraude
Syndicat central des agriculteurs de Haute Garonne
Association viticole des propriétaires viticulteurs de Gironde
Fédération des viticulteurs Charentais
Confédération des associations viticoles de Bourgogne
Syndicat Bourguignon de répression des fraudes
Syndicat de propriétaires des cotes de Monbazillac
Syndicat des vignerons d’Arbois
Société d’agriculture d’Indre et Loire
Union des viticulteurs de Maine et Loire
Confédération des vignerons du Sud Est
Syndicat des vignerons des côtes du Cher
Fédération viticole Roannaise
Syndicat des viticulteurs de l’arrondissement de Bergerac

Source : La CGV du 28 février 1913 et archives CGV carton 6 (Fédération des associations viticoles régionales de France).

Annexe 2

Cotisations reçues par la FAV en 1931 et en 1939

Associations 1931 1939
Vins de crû
Syndicat des grands vins de la Côte d’Or 600 500
Syndicat des vignerons des Côtes du Rhône 112,50 500
Association des viticulteurs d’Alsace (Colmar) 500
Confédération des associations viticoles de Bourgogne 500
Syndicat viticole de Vouvray 50
Commission du cru de Frontignan 50
Syndicat de Gaillac 300
Vignerons d’Arbois 40
Syndicat général des vignerons de Champagne 300
Total 752,50 2 700
Autres adhérents
Syndicat du Var 500
Fédération des viticulteurs Charentais 500
Syndicat des vignerons du Sud Est 250 500
Confédération des trois départements algériens 200 500
Fédération des syndicats agricoles de l’Oranie 500
Union Girondine de syndicats agricoles 500
Ligue des viticulteurs de la Gironde 150 550
Confédération des vignerons du Centre-Ouest 220.7 1 000
Confédération générale des vignerons (CGV) 5 200 3 500
Total 6 020,7 8 050

Source : archives de la CGV, FAV (1920-1944), carton 6.

Annexe 3. Position de la CGVM à la FAV au congrès de Montpellier dans le groupe des VCC

Tableau n° 1. Évolution de la position de la CGVM à la FAV dans le groupe des VCC entre 1950 et 1951

1950 1951
Fédérations Cotisation 1950 Part CGVM Cotisation 1951 Part CGVM
CGVM 4 088 68 53 % 2 706 549 44 %
Total VCC 7 702 829 100 % 6 059 641 100 %

Source : Archives de la CGV, FAV entre 1950 et 1980, congrès de Montpellier en 1951 carton 73.

Tableau n° 2. Évolution de la position du groupe des VCC par rapport aux autres catégories à la FAV entre 1949 et 1950

1949 1950
Fédérations Cotisation 1950 Pourcentage sur total VCC Cotisation 1951 Pourcentage sur total VCC
Total VCC 7 702 829 69,76 % 659 641 69,46 %
Total VDQS 150 233 1,36 % 162 826 1,87 %
Total A.O.C. 3 188 241 28,87 % 2 500 000 28,66 %
Total caves et distilleries coopératives 1 000 0,01 % 1 000 0,01 %
Total général 11 042 293 8 723 467

Source : Archives de la CGV, FAV entre 1950 et 1980, congrès de Montpellier en 1951 carton 73.

Annexe 4

Détail du versement de chaque syndicat à la FAV au congrès de Montpellier (1951)

Image

Source : Archives de la CGV, FAV entre 1950 et 1980, congrès de Montpellier en 1951 carton 73.

Annexe 5

Syndicats méridionaux cotisant directement à la FAV en 1960

Syndicats cotisants Nombre de mandats Pourcentage
Vignerons d’Oran 3 088
Est Algérien 415
Vignerons d’Alger 2 244
Total Algérie 5 747 53,25 %
Pyrénées orientales 749
Vignerons de Narbonne 793
Carcassonne Limoux 890
Gard 526
Vaucluse 97
Total CGVM 3 055 28,31 %
Autres 1 989 1,45 %
Ensemble producteurs de VCC 10 791 100 %

Source : Compte rendu du congrès de la FAV à Narbonne en mars-avril 1960, archives de la CGV, FAV, carton 73.

Annexe 6

Nouvel article 7 des statuts de la FAV (congrès de Reims de 1971)

Type de production Nombre de délégués
Confédération nationale des AOC 50
Fédération nationale des VDQS 50
Fédération nationale des producteurs de vins de table et de pays 50
Confédération des caves coopératives 20
Fédération des raisins de table 10
Fédération des distilleries coopératives 10
Total 190

Notes

1 Le Tocsin, n°10 du 23 juin 1907. Retour au texte

2 Le Tocsin, n°9 du 16 juin 1907. Retour au texte

3 Narbonne, Carcassonne-Limoux, Béziers-Saint- Pons, Montpellier-Lodève et Perpignan. Retour au texte

4 Archives de la CGV, Congrès de Narbonne, décembre 1912, carton 17. Retour au texte

5 Discours d’Ernest Ferroul, président de la CGV au congrès des 21 et 22 décembre 1912. Retour au texte

6 Voir annexe 1. Retour au texte

7 La CGV, n° 64 du 20 mars 1911 : le rédacteur, Raymond Lagarde, avocat et secrétaire de la section locale de Montpellier-ville de la CGV oppose valeur constante et valeur spéciale, liée à l’origine. Retour au texte

8 Incluant jusqu’au début des années 1960 la dimension coloniale du vignoble algérien. Retour au texte

9 Ce travail repose essentiellement sur l’exploitation des archives de la CGV déposées aux archives municipales de Narbonne (et particulièrement les cartons 73 et 76 de la série 1 et les cartons 16 à 23 de la série 2). Retour au texte

10 On peut également citer pour cette première période comme parlementaires notoires porteurs de la force de proposition de la CGV Charles Caffort, Léon Castel, Maurice Sarraut et Mario Roustan. Retour au texte

11 Archives de la CGV, Congrès de Narbonne, décembre 1912, carton 17. Retour au texte

12 Boisson faite d’eau et de marc de raisin. Par extension : mauvais vin. Retour au texte

13 Le Syndicat Général des Vignerons de Champagne avait été créé en 1904. Retour au texte

14 L’armée a tiré le 20 juin sur la population civile de la ville (5 morts). Retour au texte

15 La CGV du 30 octobre 1927. Retour au texte

16 La CGV du 28 février 1913, compte rendu de la réunion inter vinicole de Paris du 18 février 1913. Retour au texte

17 Archives de la CGV, carton 6. Retour au texte

18 Voir annexe 2. Retour au texte

19 Dispositif complété à partir de 1921 par la création par décret (et à la demande des associations) de la Commission Consultative interministérielle de la Viticulture (CCIV). Retour au texte

20 La CGV du 28 février 1914, discours d’Auguste De Crozals, Vice-président de la CGV, séance d’ouverture de l’assemblée générale annuelle des 17 et 18 février 1914 de la FAV Retour au texte

21 La CGV n° 220 du 30 avril 1921. Retour au texte

22 Un développement spécifique en cinq points demandait le renforcement du contrôle douanier aux frontières, l’obligation d’indication de dénomination d’origine sur les bouteilles cachetées, la réforme de l’expertise contradictoire, la prise en compte séparée des vins par couleurs chez les grossistes et l’intervention du ministère de la justice auprès des parquets contre les abus de reclassement en délits mineurs d’affaires relevant du pénal. Retour au texte

23 Archives de la CGV, CA du 15 octobre 1911, carton 17. Retour au texte

24 Le projet consistait, sur 50 millions d’hectolitres de consommation taxée, à en réserver 40 pour la métropole, 7 pour l’Algérie et 3 pour les autres pays producteurs. Retour au texte

25 Fédération des Associations Viticoles de France et d’Algérie. L’acronyme est utilisé depuis l’adhésion de l’Algérie au début des années 1920. Dans les comptes rendus c’est le sigle « FAV » qui est le plus souvent utilisé. Retour au texte

26 CA de la CGV du 11 juillet 1926, carton 17. Retour au texte

27 Voir annexe 2. Retour au texte

28 Dans ce système, utilisé par la CGV comme une alternative au contingentement, Le procédé de calcul du volume des vins à bloquer, fondé sur le rythme des plantations durant les dix dernières années, avantageait nettement le Midi et pénalisait l’Algérie, mais aussi d’autres départements métropolitains. Retour au texte

29 La CGV du 29 mai 1930. Retour au texte

30 http:/www.St-florent-passe-present.fr, articles consultés le 1er juin 2016. Edouard Barthe a été député de l’Hérault entre 1910 et 1942. Il est le promoteur des lois et décrets constitutifs du Statut Viticole. Retour au texte

31 Futur co-fondateur de l’INAO en 1935, il était en 1932 président de la FAV. Retour au texte

32 Institut national des appellations d’origine, devenu en 2007 Institut national des appellations d’origine et de la qualité. Retour au texte

33 Archives CGV, divers CA tenus entre 1930 et 1935, carton 17. Retour au texte

34 Discours d’Edouard Barthe devant les délégués de la FAV à Reims en 1939, repris dans L’Album des Vins de France (Gallica). Retour au texte

35 Rapport de Pierre Benet devant l’AG 1930 du syndicat des vignerons de Narbonne ; La CGV du 24 décembre 1930. Retour au texte

36 Archives de la CGV, compte rendu du congrès de la FAV tenu à Dijon en juillet 1934, carton 73. Retour au texte

37 Archives nationales BL/18/6037, 13BL 533 à 582. Retour au texte

38 La CGV n° 580 du 30 mars 1936, compte rendu de l’AG du SVN de 1936. Retour au texte

39 Président du syndicat des Pyrénées Orientales, futur président de la CGV. Retour au texte

40 Archives de la CGV, CA du 8 juillet 1938, carton 17. Retour au texte

41 Archives de la CGV, CA du 11 juillet 1937, carton 17. Retour au texte

42 C’est finalement la CGV qui jusqu’en 1930 a réalisé l’essentiel de l’effort en matière de poursuite et de répression des fraudes. Retour au texte

43 Discours d’Edouard Barthe, prononcé à Reims devant l’AG de le FAV. Op. Cit., p. 5,. Retour au texte

44 Voir annexe 2. Retour au texte

45 Commission nationale d’organisation corporative avec deux représentants de la CGV : Pierre Benet et Henri Vidal. Retour au texte

46 Les décisions du comité des trente étaient rendues exécutoires par décret (loi du 2 décembre 1940, titres V, article 19). Retour au texte

47 Archives de la CGV, CA du 13 avril 1942, carton 17. Retour au texte

48 Archives de la CGV, FAV, carton 6. Retour au texte

49 Archives de la CGV, carton 2, lettre de Roger Chaminade du 12 décembre 1942 comportant la liste des délégués de la CGV à l’AG du GSV. Retour au texte

50 Archives de la CGV, CA du 29 septembre 1943, carton 17. Retour au texte

51 Archives de la CGV, CA du 12 mai 1943, carton 17. Retour au texte

52 Lettre du 15 février 1944 d’Antonin Palazy, président du syndicat de Béziers Saint-Pons aux syndics de sa circonscription. (Fonds personnel Jacques Lauze). Retour au texte

53 Archives de la CGV, CA du 3 janvier 1945, carton 17 : Le GSV a été transformé en comité consultatif de la viticulture. Retour au texte

54 Archives de la CGV, CA du 7 mars 1945, carton 17. Retour au texte

55 Les Vins Délimités De Qualité Supérieure (VDQS) seront officiellement créés que par la loi n° 49-1603 du 18 décembre1949, dite loi Guille. Retour au texte

56 AOC, créées par le décret-loi du 30 juillet 1935. Retour au texte

57 Archives de la CGV, compte rendu de l’AG de la FAV des 14 et 15 mars 1945, carton 73. Retour au texte

58 Archives de la CGV, assemblée générale de la CGV(M) du 5 juin 1946, carton 6. Retour au texte

59 Voir annexe 3. Retour au texte

60 Voir annexes 3 et 4. Retour au texte

61 Archives départementales de l’Aude (AD11, 98 J 78), discours prononcé à Narbonne en 1947 à l’occasion du quarantième anniversaire de la CGVM. Retour au texte

62 AD11, 98 J 1, coupure de La Dépêche du 12 juillet 1953, compte rendu du Congrès de la FAV du 11 juillet 1953. Retour au texte

63 L’institut des vins de consommation courante, IVCC, a été créé par décret, le 14 avril 1954. Retour au texte

64 Archives de la CGV, CA du 11 mars 1954, carton 17. Retour au texte

65 Archives de la CGV, Lettre de Charles Caffort du 6 août 1954 en réponse à une lettre recommandée de la FAV demandant le paiement des arriérés de cotisations pour la campagne 1953-1954 ; FAV, procès contre CGVM, carton 73. Retour au texte

66 Archives de la CGV, CA du 9 mai 1945, intervention du docteur Dénoyés, carton 17. Retour au texte

67 L’Institut technique du vin (ITV) a financé la CGV entre 1950 et 1954 au titre de l’amélioration de la production et de la qualité. Retour au texte

68 CA de la CGV(M) du 11 janvier 1954, carton 17 : « la Ligue des viticulteurs de la Gironde a demandé à la CGV(M) de ne plus exercer les prérogatives de la partie civile dans son département ». Retour au texte

69 Arrêt de la cour de cassation du 25 novembre 1954 confirmant une décision de la Cour d’appel de Lyon, limitant l’action civile de la CGV(M) a sa zone d’influence méridionale. Retour au texte

70 La Fédération Nationale des Vins de Consommation Courante regroupait autour de la CGVM une importante partie des associations de défense des VCC et avait pour premier objectif de sortir de l’isolement installé après la démission de la FAV. Retour au texte

71 Service chargé à partir de 1948 de centraliser et de suivre les constitutions de parties civiles pour la CGV. Retour au texte

72 Archives de la CGV, Compte rendu de la commission de la répression des fraudes du 18 juin 1956, carton 10. Retour au texte

73 Archives de la CGV, CA du 21 novembre 1956, carton 10. Retour au texte

74 Archives Départementales de l’Aude, 98 J2, discours prononcé à Narbonne par Raymond Azibert en 1957 à l’occasion du cinquantième anniversaire de la Confédération. Retour au texte

75 Voir annexe 5. Retour au texte

76 Archives de la CGV, CA du 13 octobre 1930, carton 10. Retour au texte

77 Archives de la CGV, Compte rendu du congrès de la FAV à Villefranche sur Saône, 1964, carton 73. Retour au texte

78 Archives de la CGV, FAV, carton 73, mandats des associations au congrès de Narbonne (avril 1960). Retour au texte

79 Institut des vins de consommation courante créé en 1954 en remplacement de la CCIV. Retour au texte

80 Archives de la CGV, CA du 28 mars 1964 tenu à Perpignan, carton 10. Retour au texte

81 Institut des vins de consommation courante (1964-1972), SI(FRA), IVCC, Paris 1972. Retour au texte

82 Décret du 13 septembre 1968 créant des vins de pays de département ou de zone soumis à des conditions spécifiques de production. Retour au texte

83 Archives Départementales de l’Aude, 116 8W 230, note du 30 octobre 1963, ministère de l’intérieur, direction générale de la sureté, renseignements généraux, S.P. Igame Marseille. Retour au texte

84 ADA 98 J 76, Daniel Combes : Corps non statué, spontané, utilisant l’action directe au service d’un enjeu collectif en temps de crise. Retour au texte

85 Institut National des Appellations d’Origine, créé par le décret de juillet 1935. Retour au texte

86 Archives de la CGVM, Europe, Lettre du 14 décembre 1967 à Edgard Faure, ministre de l’Agriculture. Règlements, 1968, carton 47. Retour au texte

87 Bureau de la CGVM du 6 novembre 1967, carton 10. Retour au texte

88 Archives de la CGV, FNPVTP, correspondance 1975-1987, série « documents » carton 16. Retour au texte

89 Voir Annexe 5. Retour au texte

90 Après 1970, compte tenu de la terminologie européenne, la FNPVCC est devenue FNPVTP (Fédération nationale des producteurs de vins de table et de pays). Retour au texte

91 Bureau de la CGVM du 8 juin 1978, carton 13. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Jacques Lauze, « La Confédération Générale des Vignerons dans la Fédération des Associations Viticoles pour la défense des vins de France : de la domination à la marginalisation (1913-1971) », Crescentis [En ligne], 5 | 2022, publié le 15 novembre 2022 et consulté le 19 avril 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. DOI : 10.58335/crescentis.1234. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/crescentis/index.php?id=1234

Auteur

Jacques Lauze

Laboratoire C.R.I.S.E.S., Université Paul Valéry Montpellier III

Droits d'auteur

Licence CC BY 4.0