Unitarisme, conscience identitaire et résistance dans l’Aragon franquiste : discours et réalités

  • Unitarianism, Identity Awareness and Resistance in Franco’s Aragon: Discourses and Realities

Résumés

Le discours franquiste se caractérisait par l‘affirmation d’un nationalisme unitaire. Malgré l’influence des droites catholiques et la phraséologie empruntée au phalangisme, il était avant tout pragmatique et se limitait à légitimer une guerre et un pouvoir. L’Aragon, comme les autres régions d’Espagne, subit ce discours érigé en propagande et mis en scène par l’organisation syndicale unique, les cadres du régime et, bien entendu, par le Caudillo en personne lors de ses visites théâtrales en terres d’Aragon.
Bien que le discours unitariste franquiste rejetât division et séparatisme associés aux particularismes régionaux, il ne put nier la diversité des terres et des peuples d’Espagne. Confronté aux réalités, Franco, pour le moins pragmatique, ne nia pas les spécificités locales jugées bénignes. Il sut même, le cas échéant, les instrumentaliser.
Il n’en reste pas moins vrai que la propagande franquiste et une indubitable répression mirent à mal une conscience identitaire authentique. L’Aragon, il est vrai, ne possédait pas le patrimoine différentiel de certaines nationalités périphériques. Le régionalisme aragonais d’avant-guerre avait été par ailleurs essentiellement élitiste et donc très minoritaire. Dans un contexte répressif, rien d’étonnant à ce que le discours différentiel fût en Aragon pratiquement inexistant jusqu’à la fin des années 60 et réservé, dans le meilleur des cas, à des élites intellectuelles et bourgeoises proches du régime ou inféodées à ce dernier.
Ce ne fut que dans les années 70, dans une atmosphère de fin de règne, qu’eurent lieu les premières manifestations populaires montrant un intérêt sensible pour le fait régional. Dans une Espagne qui réclamait des changements politiques, l’Aragon finit par suivre une dynamique déjà amorcée par les nationalités périphériques. Les luttes contre le transvasement des eaux de l’Èbre et l’installation de centrales nucléaires sur le territoire régional ainsi que le sentiment, chez certains Aragonais, de vivre dans une région humainement et économiquement spoliée allaient constituer un creuset où, sous l’impulsion d’élites intellectuelles et de partis politiques encore illégaux, allait « se façonner » une conscience régionale.
Face aux changements apparemment irréversibles, certains cadres du régime et une droite opportuniste tentèrent de composer, se contentant dans bien des cas d’encourager une régionalisation purement technique voulue par le régime. L’opposition antifranquiste multiforme, mais dominée par les tendances marxistes, tout en se défendant de toute visée séparatiste, adopta, quant à elle, un discours éminemment politique où un Aragon victime, colonisé, exploité, pillé par le grand capital et un pouvoir autoritaire et centralisé, ne pouvait trouver son salut que dans un changement de régime et par l’acquisition d’une réelle autonomie.

Franco’s speech was characterized by an insistance on unitary nationalism. Despite the influence of the Catholic right and the phraseology borrowed from falangism, he was above all a pragmatist and contented himself with legitimizing a war and a power. Aragon, like the other regions of Spain, was subjected to this speech, established as propaganda and adopted by the single trade-union organization, the officials of the regime and, of course, by the Caudillo in person during his dramatic visits to Aragon.
Although Franco’s unitary speech rejected the separatism and division associated with regional characteristics, he could not deny the diversity of the lands and peoples of Spain. Confronted with these realities, pragmatic Franco did not deny the local specificities which he considered acceptable. When necessary, he was even able to instrumentalize them.
It is nevertheless true that Francoist propaganda and undeniable repression undermined a genuine sense of identity. Aragon, indeed, did not have the differential heritage of certain peripheral nationalities. Pre-civil war Aragonese regionalism was moreover essentially elitist and therefore embodied in a minority. It is no wonder that, in a repressive environment, differential speech was virtually non-existent in Aragon until the end of the 60s and was, at best, found only among intellectual and bourgeois elites close to the regime or subservient to it.
It was only in the 70s, when Franco's power was waning, that the first popular demonstrations that revealed a notable interest in the regions took place. In a nation which demanded political change, Aragon eventually followed the lead of a movement launched by peripheral nationalities. The struggle against the transfer of water from the Ebro and the building of nuclear plants on the regional territory as well as the feeling, among some Aragonese people, of living in a region humanely and economically despoiled were to be the crucible in which, following the lead of the intellectual elites and the still illegal political parties, regional consciousness was going “to be shaped”.
Faced with apparently irreversible changes, some officials of the regime and an opportunistic right tried to compromise, and in many cases encouraged the purely technical regionalization which the regime called for. As for the multiform anti-Franco opposition (dominated by Marxists) while denying any separatist aim, it adopted a very political rhetoric which presented Aragon as the colonized victim, exploited and plundered by capitalists and the authoritarian and centralized power, which could find safety only in a change of regime and by the acquisition of true autonomy.

Plan

Texte

Introduction

Le discours, qu’il soit texte écrit ou développement oratoire, qu’il s’adresse à des lecteurs ou à un auditoire, est énonciation de la pensée et message politique au sens large. Il sous-entend des intentions dont le discours autoritaire fait amplement étalage. Ce sont ces intentions qu’il convient de décrire et de décoder en les replaçant dans le contexte particulier qui leur donne tout leur sens.

Nous allons pour cela nous plonger dans l’Espagne franquiste en accordant un intérêt privilégié à l’Aragon, région souvent délaissée ou ignorée par les chercheurs, mais qui n’en demeure pas moins, dans un contexte national englobant, il est vrai, le fruit d’une histoire particulière digne d’attention.

L’objet de notre étude sera plus précisément d’analyser le discours unitaire et unitariste franquiste et de le confronter aux réalités aragonaises du moment, à un patrimoine différentiel et à l’expression d’une conscience régionale qui finira par transparaître dans un discours de résistance tardif, mais éminemment politique.

Pour mener à bien ce travail, nous analyserons tour à tour le discours unitariste franquiste en terres d’Aragon, l’instrumentalisation et la tolérance des réalités différentielles avant de conclure par l’évocation d’un discours et d’une praxis de résistance régionale face à un pouvoir politique finissant.

1. Discours et région

Le nationalisme unitaire franquiste prétendait se fonder sur une tradition et une histoire ancienne où la religion, la Reconquista, les Rois Catholiques et l’Empire jouaient un rôle crucial. Si le nationalisme conservateur1, dont Antonio Cánovas del Castillo fut une des figures de proue, se consolida dans le dernier quart du xixe siècle, le nationalisme unitaire franquiste fut en grande partie l’expression d’un nationalisme espagnol qui se développa au cours du premier tiers du xxe siècle au sein de l’armée. Cette dernière, qui s’était radicalisée et ‘retrouvée’ au cours des guerres du Maroc, était source d’un nationalisme militariste et unitariste pour qui le parlementarisme était division et signe de décadence nationale. Le pronunciamiento du général Miguel Primo de Rivera ne se fit-il pas, selon le manifeste du 12 septembre 1923 adressé par les putschistes au peuple et à l’armée, contre « les professionnels de la politique » ? (http://www.generalisimofranco.com/opinion/347d.htm). Tournée vers un passé glorieux mis à mal par le désastre de 1898, l’armée se présentait comme le ciment de l’unité nationale et la garante, mais aussi le ferment, d’un État fort et autoritaire. Franco, en tant que militaire africaniste qui s’était notamment illustré au Maroc, n’était-il pas un des ces officiers pour qui religiosité, grandeur passée et unité nationale allaient de pair et de soi ?

Si le discours franquiste perpétua ce nationalisme militariste espagnol, il s’appropria également des idéologies conservatrices compatibles, convergentes ou proches, elles mêmes influencées par un nationalisme passéiste et impérialiste marqué au sceau de la religiosité, de l’Hispanité et/ou prétendument révolutionnaire (cas de la Phalange). Le nationalisme unitaire franquiste et le discours qu’il impliquait étaient avant tout appropriation et héritage politique. La phraséologie phalangiste, mais aussi le patrimoine politique des droites catholiques espagnoles regroupées au sein de l’ACNP (Asociación Católica Nacional de Propagandistas)2, d’Acción Española3 ou d’Acción Popular4, donnèrent au discours autoritaire franquiste un vernis idéologique (Bonells 2001 : 127-130). Ce furent donc différentes familles politiques qui apportèrent au franquisme les éléments d’un discours dont les éléments et la teneur varièrent selon les circonstances politiques et les époques, sans jamais disparaître totalement.

Fait de bric et de broc, ce discours pragmatique servait avant tout le pouvoir en place : il fallait unir ou réunir les Espagnols en leur insufflant une conscience nationale et une démarche commune, les galvaniser, leur donner ou renforcer une conscience politique imposée par le régime. La Ley de Reforma de la Enseñanza (Loi de réforme de l’enseignement secondaire) du 20 septembre 1938 insistait déjà sur la nécessité « d’influer sur la transformation d’une société et sur la formation intellectuelle et morale de ses futures classes dirigeantes »5 (BOE 23 septembre 1938 : 1385), sur le besoin de former la personnalité des individus à partir de préceptes religieux et patriotiques (BOE 23 septembre 1938 : 1388) et donc de consolider le montage idéologique du régime par un endoctrinement des apprenants.

Le sentiment d’être Espagnol, chrétien et de participer à une aventure commune et grandiose, bien qu’il fût souvent présenté comme naturel, devait s’apprendre. Le 3 octobre 1942, le général Franco déclarait à l’occasion de l’acte de fermeture du II congrès national du Front de la Jeunesse :

Nous avons besoin dès les premiers jours de notre vie de graver dans notre esprit d’enfant, avec des concepts simples, les vérités de notre doctrine et l’inébranlable volonté de nous sacrifier pour notre unité, construite sur des principes éternels extraits de notre Histoire et des préceptes de l’Évangile.6 (Franco 1958 : 54)

Le discours unitaire et unitariste franquiste, indissociable du fait politique et religieux7, renvoyait à une destinée commune qui devait être apprise, mais aussi enseignée. Il s’agissait bien d’une construction et pour que cette construction se concrétisât, il fallait tout d’abord légitimer le régime, justifier l’ordre établi, un pouvoir et donc une autorité que le général Franco personnifiait. De là le rôle du discours qui mêlait dans un même combat unité nationale et historique, unité entre les peuples d’Espagne, catholicisme, refus du séparatisme, et rejet du marxisme et du libéralisme politique. Un libéralisme politique qui, comme le pensaient les droites conservatrices espagnoles, était, avec l’encyclopédisme et la franc-maçonnerie, fausse liberté et cause de la décadence espagnole. Cette vision, Franco la partageait. C’est bien à cause de ces « germes d’infection » que « notre unité se craquèle et que nous perdons notre Empire »8, précisait Franco dans son discours de l’Escurial du 3 octobre 1942 (Franco 1958 : 55).

Franco n’écrivait pas tous ses discours et était loin d’être un penseur. Le discours franquiste, s’il n’était pas purement idéologique, avait cependant ses idéologues. L’élément catholique et patriotique fut, dès les premières heures du franquisme, la clé de voûte de ce discours. Des hommes d’Église comme Enrique Plá y Deniel9 ou Isidro Gomá s’en firent les chantres et les idéologues convaincus, justifiant théologiquement l’insurrection militaire de juillet 1936 qu’ils appelèrent « croisade ». Le cardinal Isidro Gomá fut, quant à lui, un de ceux qui propagèrent l’idée d’une nation et d’une communauté espagnoles fondées non pas sur des critères ethniques, mais spirituels. En tant qu’idéologue d’une hispanité commune à toutes les droites conservatrices et déjà amplement véhiculée par des auteurs comme Ramiro de Maeztu, il s’employa à lier unité nationale et catholicisme.

L’Hispanité associée à des aspirations impérialistes ne fut pas étrangère au discours phalangiste dont Antonio Tovar, responsable pendant la guerre civile de Radio Nacional de España, fut un des idéologues. Lié à Dionisio Ridruejo, chef de la Propagande Nationale, il joua un rôle important pendant le premier franquisme, légitimant une autorité avant d’abandonner la vie politique en 1942 au moment même où les phalangistes commençaient à être écartés du pouvoir par un Caudillo contesté en Espagne et désireux de donner une autre image de son régime à des forces alliées qui semblaient à partir d’alors mettre à mal l’hégémonie des forces de l’Axe.

La victoire alliée de 1945, détermina des changements au plus haut niveau et l’avènement d’un ‘national-catholicisme conquérant’ qui imposa la vision d’une hispanité plus morale, culturelle et spirituelle que politique. Au-delà du discours d’un Martín Artajo10 ou d’un Ibáñez Martín11, respectivement ministres de l’Éducation Nationale et des Affaires Étrangères dans les années 40, la phraséologie phalangiste continua de loin en loin de servir de support discursif. Les références à José Antonio Primo de Rivera, leader historique et charismatique de la Phalange, furent quant à elles de mise jusque dans les années 60, tout comme les concepts d’unité nationale, d’ordre politique et social, tout comme, enfin, le désir de légitimer un régime qui continuait, malgré des changements en surface, d’être autoritaire.

Notre propos n’est cependant pas de procéder à une analyse chronologique et exhaustive de l’évolution du discours autoritaire franquiste, mais de confronter les grandes lignes d’un discours unitaire persistant aux réalités régionales et plus exactement aux réalités aragonaises. Un discours certes multiforme, relevant à l’occasion de la manipulation idéologique (n’en fut-il pas ainsi à l’égard du patrimoine phalangiste ?), mais ayant pour fondement l’affirmation et la justification d’une autorité, un paternalisme protecteur et apparemment compréhensif et une acceptation, certes très discutable, des différentiels locaux et régionaux dans le respect d’une unité nationale irrévocable. Ces quelques mots prononcés en septembre 1945 par Franco semblent en la matière résumer l’essentiel :

Aimer les comarques c’est aimer deux fois l’Espagne. L’État que notre Movimiento a fait naître aspire à renforcer la personnalité de nos provinces, à les doter, à leur donner les moyens d’affronter leurs propres problèmes et à les aider à conserver leurs spécificités dans le respect de l’unité harmonieuse et indestructible de la Patrie.12 (Centenario de Francisco Vitoria, 17 septembre 1945)

Le discours unitaire et autoritaire franquiste, érigé en propagande par les cadres du régime et de l’organisation syndicale unique, était mis en scène par le Caudillo en personne lors de ses visites en terres d’Aragon.

En 1967, à l’occasion du XIe conseil national du Movimiento, Franco insistait encore sur « les discours prononcés au cours de mes continuelles pérégrinations en terres espagnoles »13 (Franco 1968 : 339). Des pérégrinations qui marquaient sa présence non seulement en Aragon, mais aussi sur l’ensemble du territoire espagnol et s’inscrivaient dans le cadre d’une propagande bien huilée où théâtralité, solennité, défilés et cérémonies religieuses formaient un tout.

Franco était toujours en ces occasions au centre d'un système dont il était le garant. Les allusions à l'importance primordiale du Caudillo présenté comme un conducteur du peuple étaient fréquentes. Citons à titre d'exemple ces propos du chef national du Syndicat de l’élevage, Diego Aparicio, qui ferment un discours prononcé en 1954 durant la cérémonie d’ouverture du premier congrès national dudit syndicat : « Que Franco soit le conducteur de la volonté créatrice des éleveurs espagnols ! »14 (Ganadería 1954 : 554).

L'autorité suprême du chef de l'État était sacralisée, institutionnalisée. Franco aimait d'ailleurs les grandioses manifestations de propagande où il était le personnage central, circulant en voiture entouré de ses cavaliers marocains ou s'adressant à la foule depuis le balcon d'un édifice public. De telles manifestations étaient l’occasion d’adresser des discours aux représentants des corps de métier, aux syndicalistes, à la foule. Le nationalisme phalangiste servait alors bien souvent de cadre, d'appui idéologique et symbolique.

Les revues Ganadería et Cooperación15 éditées depuis 1943, les rapports des conseils syndicaux ou encore les rapports d’activités de divers organismes d’État se chargeaient d’encenser le Caudillo et sa politique. La grandiloquence, l’emphase dithyrambique y étaient de mise. Les documents émanant des organisations syndicales des provinces de Saragosse, Huesca et Teruel que nous avons consultés, se font souvent l'écho d'une sacralisation du Caudillo encore particulièrement vive dans les années 50. Ces documents et les discours stéréotypés qu’ils contiennent, participaient également de cette mise en scène qui mettait sur un piédestal l’autorité suprême, le guide qu’était le chef de l’État.

Les visites du Caudillo en province avaient pour but non seulement d’affirmer une propagande et une politique dont Franco devait être l’incarnation, mais aussi de rendre tous les habitants d’Espagne égaux devant une réalité nationale imposée. Le Caudillo et son État providentiel apparaissaient comme les grands ordonnateurs d’une solidarité protectrice. Franco pouvait alors dire fièrement en juin 1953 au peuple de Teruel à propos d’une politique d’irrigation chère aux Aragonais :

Nos provinces privilégiées seront toujours celles qui auront le plus besoin de notre aide. Et comme nous avons forgé l’unité entre les hommes par la justice sociale et la fraternité entre les classes, nous forgeons l’unité et la fraternité entre les provinces espagnoles. »16 (http://www.generalisimofranco.com/Album/octubre/0007.htm)

L’unité entre les provinces d’Espagne relevait d’une volonté politique qui complétait une prétendue unité historique et de destin. L’inauguration le 6 août 1952 du barrage de l’Èbre situé aux confins de la province de Burgos et de la Cantabrie, fit dire au Caudillo qu’un tel ouvrage était sacrifice de la patrie, mais aussi des riverains dont les terres furent inondées et que « notre grand fleuve » irriguerait de grandes superficies grâce à l’unité des peuples et des terres d’Espagne « qui bénéficieront du précieux liquide pour le bien de nos récoltes »17 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1952/00019.htm).

L’État protecteur, garant de l’unité nationale, était présenté comme solidaire des peuples d’Espagne qui eux-mêmes l’étaient entre eux et formaient un tout volontairement indissociable dans le but de parvenir à un bien-être partagé. L’Èbre, loin d’être un symbole régional comme cela a souvent été le cas en Aragon, n’était pas particularisme, mais patrimoine commun bienfaisant, symbole d’unité économique et sociale.

C’est encore ce que suggérait Franco le 9 avril 1959 dans la localité aragonaise de Ejea de los Caballeros au sujet des travaux hydrauliques à réaliser. En effet, après avoir mis en avant les sacrifices de la nation en la matière et mis sur un pied d’égalité les régions d’Espagne dans la mesure où lesdits travaux étaient aussi nécessaires à la Navarre et à l’Aragon qu’à l’Estrémadure, l’Andalousie et la Castille, le Caudillo précisait que les œuvres hydrauliques à réaliser « bénéficieront non seulement à la comarque directement intéressée, mais à toute la Nation »18 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1959/00004.htm). Tout semblait être union et réciprocité solidaire dans un cadre idyllique suggéré par le pouvoir politique.

Derrière tout cela, il y avait bien entendu l’État, mais aussi et surtout Franco, son représentant suprême, chef et protecteur de tous les Espagnols dans une Espagne essentielle et unitaire. Voilà ce que déclarait un bilan d’activité de la Chambre officielle syndicale agraire de Saragosse à propos d’une visite du Caudillo en terres aragonaises :

En juillet Franco s’est rendu en terres d'Aragon croisant les hommes qui travaillent avec et contre les éléments. Les terres − Caspe, les Cinco Villas − et les hommes s'en sont réjoui car la présence de Franco, ses paroles et ses décisions annoncent toujours avec certitude des réalisations et la solution des problèmes. Le Caudillo a rendu visite aux villages anciens et récents19, a traversé les terres assoiffées et considérant cette dure réalité, a pris la ferme décision d'entreprendre des travaux. L'Organisation syndicale agraire a profité de la visite de son chef pour lui faire part de son adhésion inconditionnelle et de sa foi sans limites […].20 (COSA de Zaragoza 1959 : sans pagination).

De nombreux discours passéistes du Caudillo font des paysans, quelles que soient la région où ils vivent et leurs possibles caractéristiques différentielles, des Espagnols authentiques liés à une histoire glorieuse et fédératrice indissociable d’une destinée commune. En février 1953, le général Franco prononçait ces mots devant la cinquième assemblée nationale des Hermandades (unités syndicales locales) de paysans et éleveurs :

Paysans et propriétaires terriens : tout ce que nous pouvons désirer, y compris ce qui peut nous paraître difficilement réalisable, nous l'obtiendrons grâce à notre cohésion unitaire (une voix jaillit : « Avec toi ! ». Nombreux applaudissements et acclamations adressés au Caudillo), une cohésion unissant les hommes et les terres d'Espagne qui n'est jamais aussi forte que sur le plan syndical.
Venant des villages les plus éloignés, vous vous êtes ces jours-ci réunis pour échanger des impressions et adresser aux pouvoirs publics des revendications dans l’espoir de trouver une solution à vos problèmes. Depuis la vallée la plus fertile jusqu’à la montagne la plus abrupte, l'Espagne, aux trois quarts rurale, est ici représentée. L'Espagne authentique, l'Espagne des travailleurs ; des hommes attachés à la terre d'Espagne, représentants authentiques de la Patrie non corrompue, de l'Espagnol par excellence et si on pouvait comparer ces Espagnols à ceux qui formèrent les anciennes compagnies de gens d'armes qui suivaient nos chefs militaires médiévaux, on pourrait affirmer que ceux qui firent la grandeur de l'Espagne et stupéfièrent le monde n'étaient pas différents de ceux qui travaillent la terre, obtenant des récoltes souvent misérables dues aux conditions climatiques de notre Patrie, mais gardant le moral et la foi, croyant en une Espagne meilleure (applaudissements nourris)21. (Asamblea de Hermandades Sindicales de Labradores y Ganaderos 1953 : 263)

L’unité, qui est le maître mot de ce fragment de discours, prend par ailleurs tout son sens sur le plan syndical, l’organisation syndicale unique divisée en syndicats verticaux et en branches de production apparaissant en effet comme un lien entre tous les travailleurs d’Espagne. Dans un discours prononcé en 1954 à Logroño (chef-lieu de la province de La Rioja faisant frontière avec la province de Saragosse), le Généralissime disait à propos du syndicalisme vertical qu'il devait : « pousser tous les producteurs à participer à la vie de l'entreprise assurant ainsi pour toujours une véritable union entre les hommes et les régions d'Espagne »22 (Cooperación 1954 : 1).

L’organisation syndicale devait encadrer les producteurs dans un système où une politique interventionniste et autoritaire unifiait et était présentée comme le fer de lance du redressement économique face à une Seconde République et à un libéralisme symboles de désordre et de déclin. Ce fragment de discours prononcé par le Caudillo lors d'un congrès national de l'élevage qui se tint à Madrid en novembre 1954, suggère ce schéma politique :

Vous savez mieux que moi, parce que vous l'avez vécu, ce qu'a représenté à tous les niveaux et en matière d'élevage le régime libéral, ‘le laisser-faire’. De la contemplation de l'histoire économique de notre Patrie, de ce conseil de la Mesta, de ces chemins royaux de transhumance, de cette importance et transcendance qu'avait dans la vie des Espagnols l'élevage, nous passâmes, sous la férule libérale, à l'abandon, quand ce ne fut pas à une véritable ruine de nos productions.23 (Ganadería 1954 : 544)

Comme s’il s’agissait de freiner toute évolution sociale et de préserver un ordre séculaire et figé, l’élevage était présenté comme un patrimoine historique malmené par les changements politiques d’avant-guerre. Le passé d'une nation glorieuse et guerrière, perceptible dans le vocabulaire employé, renvoyait à cette unité authentique et essentielle dont la Castille était l’artisan comme le sous-entend l’allusion à la Mesta castillane. Perçue comme un élément d’un patrimoine commun et indirectement comme un facteur d’union, elle ne joua pourtant, sur le plan historique, aucun rôle dans le Royaume d’Aragon où prédominaient la Casa de Ganaderos de Zaragoza et dans une plus faible mesure d’autres associations d’éleveurs24.

À l’occasion des visites du Caudillo en Aragon, l’union entre les peuples d’Espagne était fréquemment martelée comme un destin national fruit d’une volonté divine car la nation était cet « espace naturel que Dieu nous a donné »25 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1953/00017.htm).

Les Aragonais étaient régulièrement encensés comme les dignes représentants de ce peuple d’Espagne qui, durant la guerre civile, n’hésita pas à prendre héroïquement les armes pour défendre la juste cause des insurgés. Ainsi, dans un discours prononcé devant les habitants de Belchite le 13 octobre 1954, le Caudillo mettait en avant leur héroïque sacrifice durant la fameuse bataille d’août-septembre 1937 :

Pour toutes ces raisons la bataille de Belchite occupe une place d’honneur dans l’histoire de notre Croisade. La victoire de l’ennemi fut […] plus une victoire de l’héroïsme des défenseurs que des hordes communistes beaucoup plus nombreuses qui l’occupèrent […] Dieu donne la victoire aux meilleurs26 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1954/00018.htm).

L’Aragonais valeureux et authentique était celui qui avait participé à la croisade de tous les Espagnols. Cette croisade était sous la protection de Dieu et justifiait une guerre civile face aux hordes rouges qui étaient désordre par essence, négation de ce qui était authentiquement espagnol (et donc authentiquement aragonais) et forces d’occupation par excellence. Ces communistes ou républicains (il s’agit-là de synonymes) étaient l’anti-Espagne de la division, les valets serviles de cette terrible parenthèse historique, de cette rupture dans la tradition espagnole que fut, pour les nationalistes, la Seconde République. Comme le précisait encore le 30 juin 1959, à Huesca, Francisco Franco, c’était bien « contre l’invasion des nouveaux barbares » (les rouges, les républicains ou les libéraux) qu’il avait fallu lutter, ce qui avait rendu nécessaire « l’union sacrée des Espagnols pour défendre encore une fois notre terre ». Une autre Reconquête, en quelque sorte, qui « constitue un autre jalon fondamental de notre histoire »27 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1959/00011.htm).

Le 23 juin 1953, Franco, en visite à La Violada (province de Huesca), faisait l’éloge de la résistance de Huesca et de Teruel pendant la guerre civile et de l’héroïsme des Aragonais. Il mettait en avant la déroute de « la canaille rouge qui s’emparait peu à peu de vos terres »28 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1953/00016.htm). Une canaille rouge qui défendait pourtant la légalité républicaine, mais qui était considérée une fois de plus comme une force d’occupation, comme une force étrangère. Les agresseurs, les supposés espagnols authentiques passaient pour des victimes dont la juste lutte justifiait la guerre civile.

Franco montrait aux Aragonais prétendument acquis à sa cause qu’ils étaient d’autant plus Espagnols qu’ils avaient œuvré à « la libération de l’Espagne » et « avaient été les protagonistes d’un des événements les plus importants de l’Histoire de l’Espagne »29 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1953/00017.htm).

Dans un discours prononcé à Teruel le 16 juin 1953, le Chef de l’État s’adressait aux habitants de ce chef-lieu de province en les qualifiant de « population martyre ». En faisant de ces Aragonais authentiques des victimes et des héros anonymes et collectifs d’une juste cause, il établissait un lien direct entre une perspective politique et une unité nationale affirmée au début du discours par les mots « Habitants de Teruel et Espagnols » et par l’inversion finale : « Espagnols et habitants de Teruel : Vive l’Espagne ! ». Le lien avec l’Espagne (et donc la mère Castille) était de surcroît mis en avant. La ville de Teruel, située au sud de l’Aragon, était en effet qualifiée de « porte de la meseta espagnole »30 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1953/00014.htm).

Tous les discours cités n’étaient que des variantes de celui adressé aux habitants de Burgos à propos de la bataille de Teruel le 30 décembre 1937. Un discours où le Caudillo mettait en exergue avec l’emphase de rigueur une « Terre aragonaise, espagnole. Terre de sacrifice » et concluait par un « Teruel pour l’Espagne, pour l’Espagne nationale, pour une Espagne une, grande et libre »31 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1937/00026.htm).

Les Espagnols aragonais ou les Aragonais espagnols étaient liés à la cause nationale et à la victoire et étaient présentés dans bon nombre d’allocutions officielles comme la glorieuse partie d’un tout historique et politique.

L’unité suggérée qui renvoyait à une histoire et excluait tous ceux (les rouges) qui n’en étaient pas dignes, devait être cultivée politiquement. Dans un discours prononcé le 13 octobre 1954 devant les habitants de Belchite, le Caudillo déclarait à propos du devoir qui incombait aux nationalistes insurgés :

Nous devions remplir tout ceci d’un contenu politique, nous devions créer des idéaux, nous devions unir les Espagnols en les faisant marcher dans le même sens et dans la même direction : pour la grandeur de la Patrie, pour le succès de nos idéaux »32 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1954/00018.htm).

Cette unité montrait ses limites puisque dans les années 50 il fallait encore l’entourer d’un contenu politique, lui apporter une légitimité phalangiste et une rigidité pseudo-révolutionnaire : « Et cela, on ne réussit à le faire qu’avec l’unité, en suivant la marche laborieuse de la Phalange qui annonce au monde une nouvelle splendeur et une nouvelle ère »33 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1954/00018.htm).

L’unité était surtout une nécessité, une réalité qu’il fallait construire et qui n’était donc pas acquise. Il s’agissait avant tout de persuader, de convaincre, de créer toute une culture du ‘nous’ qui, dans le discours franquiste, transparaissait à travers l’omniprésence des premières personnes du pluriel. Des premières personnes qui incluaient, bien entendu, l’Aragon et les Aragonais. Ces quelques mots prononcés par le Caudillo à Saragosse le 23 juin 1953 en sont un bon exemple : « que l’Espagne croit en elle, que nous croyons en nous-mêmes et que nous soyons convaincus que notre unité est notre force. Vive l’Espagne ! »34 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1953/00017.htm).

Il fallait asséner comme une vérité première et incontestable une unité d’ordre politique qui viendrait renforcer cette unité des peuples dictée par l’histoire et la tradition. Le 9 avril 1959, dans la localité de Ejea de los Caballeros (province de Saragosse), Franco insistait même sur la nécessité « de suivre sur le plan national une politique qui soit le couronnement de tout ce qui nous unit et recherche le bien-être de tous »35 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1959/00004.htm). L’unité apparaissait alors subordonnée à une démarche politique supérieure et commune chapeautant l’ensemble et se posant en garante du système pour le bien de la nation.

2. Instrumentalisation politique et tolérance des réalités différentielles

La politique franquiste de nationalisation et d’espagnolisation de la société qui décrétait « l’unité entre les hommes et les terres de notre patrie »36 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1953/00014.htm), s’accompagna d’un rejet du séparatisme et d’une négation d’un droit régional à l’auto-expression et à l’auto-détermination. Sur le plan pratique, un tel rejet se traduisit par la suppression des statuts d’autonomie basque et catalan durant la guerre civile, une censure et une répression qui poussa bon nombre de régionalistes et de nationalistes à fuir la péninsule pour trouver refuge en des terres plus hospitalières.

La région ou la province devait être exempte de tout germe d’infection, c’est-à-dire de tout particularisme tendant à la désagrégation d’un tout volontairement monolithique. Pourtant, bien que le discours unitariste franquiste eût rejeté division et séparatisme associés aux particularismes régionaux, il n’impliqua pas dans la pratique une négation des spécificités locales s’inscrivant dans le cadre d’une histoire revue et corrigée et respectueuse de l’unité nationale.

Le 1er octobre 1936, à Burgos, Franco prononçait un discours pragmatique retransmis par Radio Castilla qui précisait que « La personnalité des régions sera respectée pour ses particularités héritées des moments de plus grande gloire, mais sans que cela suppose une diminution ou une détérioration de l’unité nationale la plus absolue »37 (http://www.generalisimofranco.com/Album/octubre/0007.htm).

Le pouvoir franquiste sut ainsi reconnaître, mais aussi exploiter l’histoire ou les légendes médiévales aragonaises qui, savamment instrumentalisées, renvoyaient à la grandeur et à l’unité de l’Espagne. Ainsi, le Saint Graal ou Saint Calice qui, selon la légende, aurait été placé au xie siècle au monastère de San Juan de la Peña (Pyrénées aragonaises), fut instrumentalisé par le Chef de l’État dans le discours qu’il prononça à Huesca le 30 juin 1959. À son propos et dans un jeu subtil entre un vosotros et un nosotros qui finissaient par se fondre, il précisait :

Nous rendons visite à votre province pour nous prosterner devant le Saint Calice. Et c’est là chose transcendantale qui doit rester gravée dans nos esprits. Il y eut en Espagne une période où la division des Espagnols permit l’invasion sarrasine et où ce que l’Espagne avait de meilleur, les reliques sacrées de nos saints, tout ce qui représentait un trésor de spiritualité, dut être transporté jusqu’à nos montagnes pour échapper à l’invasion étrangère38 (http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/1959/00011.htm).

En quelques mots, l’Aragon devenait à travers l’un de ses symboles historiques − le monastère de San Juan de la Peña –, un élément majeur de l’histoire de l’Espagne. Associé aux valeurs chrétiennes face à l’invasion musulmane, il aurait été refuge de ce que l’Espagne − qui pourtant, en tant que nation, n’existait pas encore − avait de plus cher. L’Aragon aurait donc été le refuge et le bastion d’une tradition chrétienne authentiquement espagnole et aurait préservé l’âme d’une nation qu’une prétendue division des peuples d’Espagne avait failli réduire à néant.

Ferdinand II, né à Sos, au nord de l’Aragon, était fréquemment mis en scène en tant que Roi Catholique. Indissociable d’Isabelle Ire de Castille, il aurait été avec elle à l’origine de l’unité et de la grandeur de l’Espagne. Les Aragonais, en compagnie des Castillans, devenaient par là même la colonne vertébrale de cette unité. Le 22 avril 1951, à Saragosse, le ministre de l’Éducation Nationale José Ibáñez Martín, aragonais de souche, se fit notamment le laudateur de cette unité politique, religieuse et culturelle pseudo-historique, de cette unité des peuples et des terres d’Espagne incarnée par Ferdinand et Isabelle. Des rois associés pour l’éternité qui, bien avant Franco, durent, selon José Ibáñez Martín, agir d’une main de fer « contre l’esprit antinational »39 (ABC 24 avril 1951 : 19).

La vierge du Pilar, autre célébrité locale, éminemment religieuse40 cette fois, fut également instrumentalisée. Le 12 octobre 1939, Franco présidait à Saragosse les cérémonies de la fête de la Race ou de l’Hispanité qui commémorait la découverte de l’Amérique et la naissance d’une identité hispanique. L’événement fut marqué par une dévotion particulière envers la vierge du Pilar. La fête du Pilar qui depuis 1613 était fixée au 12 octobre, coïncidait par la date des festivités avec la fête de la Race et de l’Hispanité. De là à faire de la vierge du Pilar la patronne de l’hispanité et une mère protectrice de l’Espagne traditionnaliste et catholique, il n’y avait qu’un pas que Franco n’hésita pas à franchir dès octobre 1939 dans son discours aux peuples d’Amérique. La vierge devenait une Sainte Patronne invincible associée à l’Èbre et aux grands épisodes historiques : sièges de Saragosse durant la Guerre d’Indépendance, découverte de l’Amérique, bataille de Lépante ou bataille de l’Èbre. Présentée comme la protectrice de la chrétienté, elle était à la fois Aragon et Espagne car elle veillait « depuis son inamovible Pilier aragonais sur le destin de toute l’Espagne »41 (Franco 1958 : 39). La vierge aragonaise était aussi symbole d’unité et en cela très espagnole. Voilà pourquoi le Caudillo clamait « J’implore notre Vierge souveraine de nous mener à l’unité, à la liberté et à la grandeur de la communauté hispanique dans le monde »42 (Franco 1958 : 41). La vierge, à la fois aragonaise et espagnole, était aussi mère protectrice de l’Hispanité.

Un arrêté du 9 mars 1940 qui établissait le premier calendrier des fêtes de l’ère franquiste faisait de la fête de la Race, et donc de la fête du Pilar qui lui était associée, une fête nationale (BOE 13 mars 1940 : 1767). La vierge du Pilar devint un symbole politique de l’Hispanité et de l’attachement de l’Espagne franquiste à la religion catholique. L’instrumentalisation de cet emblème identitaire régional servit de trait d’union hautement symbolique entre une histoire mythifiée, un nationalisme exacerbé et une foi chrétienne perçue comme l’essence de l’Hispanité. Le bombardement qui épargna miraculeusement la basilique et cathédrale du Pilar le 20 juillet 193643, le congrès marial national d’octobre 1940 et les grandes manifestations politico-religieuses qui se déroulèrent sur la place du Pilar lièrent le culte de la vierge au pouvoir en place.

La politique d’irrigation, chère à l’Aragonais don Joaquín Costa, considéré comme le père de la politique hydraulique moderne, fut également instrumentalisée. Elle le fut d’autant plus qu’elle était en Aragon, au-delà de son aspect technique et économique, un véritable phénomène culturel. Ce fut justement cette politique d’irrigation qui, comme nous l’avons déjà suggéré, symbolisa le mieux la solidarité entre les hommes et les terres d’Espagne.

Outre l’instrumentalisation de particularités régionales qui servaient le régime, le franquisme, dans son acharnement à construire une improbable Espagne monolithique présentée pourtant comme l’expression « d’une naturelle harmonie »44 (Franco 1958 : 41), dans sa négation systématique des différences et dans sa condamnation de « tous les séparatismes, depuis ceux de la philosophie jusqu’à ceux de la politique »45 (Franco 1958 : 41), ne put cependant que reconnaître, accepter, voire même encourager, l’expression de certains traits différentiels jugés bénins. Ces traits qui ne remettaient pas en cause le régime, le Caudillo les résumait encore le 28 novembre 1967 à l’occasion du XIe conseil national du Movimiento en mettant en exergue une société harmonieuse et solidement établie « dans laquelle la légitime et nécessaire variété ne rompt pas, mais enrichit plutôt l’unité essentielle des Espagnols »46.

En Aragon, l’image du typique baturro (paysan aragonais) balourd et candide, parfois futé, mais toujours franc et attachant, n’était pas chose nouvelle, mais elle fut fortement mise à l’honneur à l’époque franquiste et connut son heure de gloire dans les années 60 avec les films du Fernandel aragonais, Paco Martínez Soria. Un baturro qui, sur les cartes postales des années 60 et 70, apparaissait fréquemment dans ce qui devait être son ‘milieu naturel’, c’est-à-dire la place du Pilar. Portant botijo (gargoulette) ou tenant guitare, chantant le cas échéant la jota avec sa bien aimée, accompagné parfois de danseurs vêtus de leur costume folklorique, il faisait partie de ce décor en carton-pâte toléré, voire encouragé par le pouvoir.

Le pragmatisme franquiste alla jusqu’à autoriser la tenue de Congrès de droit civil régional dès les années 40. La préservation de particularismes régionaux en matière de droit équivalait pour le régime à lâcher du lest de façon mesurée. Le professeur de droit, Pascual Marín Pérez, magistrat et délégué national des conseillers juridiques du secrétariat général du Movimiento, précisait en 1965 :

La finalité des compilations, selon le Congrès national de droit civil qui s’est tenu à Saragosse en 1956, n’est pas tant de compiler le droit civil régional de façon systématique pour l’appliquer que de le connaître et l’utiliser dans le futur code général.47 (Marín Pérez 1965 : 17)

Dans ce discours prononcé devant une assemblée d’entrepreneurs du secteur agricole, Martín Pérez insistait également sur la nécessité de parvenir à une unité législative qui supposerait « la réforme du droit privé, la substitution de la diversité législative actuelle par le code civil espagnol […] en accord avec l’orientation spirituelle et sociale du régime politique espagnol48 (Marín Pérez 1965 : 21).

Il n’en demeura pas moins, qu’en Aragon, le pouvoir en place permit que les juristes locaux réalisassent une compilation de droit civil aragonais destinée à remplacer l’appendice de droit coutumier inclus depuis les années vingt dans le code civil national. Les travaux de ces juristes rendus possibles par un décret du Ministère de la Justice du 2 mai 1947 et facilités par la création en mai 1953 d’un séminaire de droit aragonais, débouchèrent sur la production d’un code civil aragonais qui fut adopté par les Cortès le 4 avril 1967. Il entra en vigueur le 1er mai 1967 et constitua malgré tout une reconnaissance officielle d’une réalité régionale qui, au-delà du juridique, relevait de l’identitaire. Il est vrai que cette reconnaissance ne mettait pas en péril les fondements du régime et ne faisait que prendre acte d’un ‘régionalisme’ bourgeois s’accommodant bon gré mal gré de l’ordre imposé par le pouvoir en place.

Sur le plan culturel, comme partout ailleurs en Espagne, le pouvoir en place encouragea les manifestations folkloriques comme expression des traditions locales. Elles firent partie du ‘décor’ lors des visites du Caudillo aux régions d’Espagne et furent même cultivées par la section féminine de la Phalange à travers ses Coros y Danzas (Barrachina 2001 : 272-273). Les coutumes locales dénuées de toute connotation politiquement suspecte, les danses, les jotas et autres chansons populaires, le cas échéant préalablement aseptisées, furent donc tolérées, voire encouragées. Le Carnaval potentiellement subversif, supprimé dans toute l’Espagne par trois arrêtés successifs datant du 5 février 1937, du 22 février 1938 et du 12 janvier 1940, fut cependant toléré dans certaines localités aragonaises comme Bielsa. On considéra sans doute que ces manifestations typiquement aragonaises49, une fois expurgées de leurs aspects les plus critiques, ne représentaient pas un danger pour le pouvoir en place.

La période franquiste fut par ailleurs marquée au sceau d’un traditionalisme culturel bon genre. Ainsi, des associations et cercles d’avant-guerre cultivant l’histoire, les arts et les sciences comme la Real Sociedad Económica Aragonesa de Amigos del País50, la Real Academia de Bellas Artes de San Luis51, El Ateneo de Zaragoza52, purent continuer à œuvrer, alors que d’autres associations comme La Cadiera, La Hermandad de Caballeros de San Juan de la Peña53 ou l’association Amigos de la Jota54, fondées respectivement en 1948, 1949 et 1953, voyaient le jour avec l’approbation du régime franquiste.

La Cadiera55 avait pour finalité, selon son règlement de « b) cultiver l’amour pour Saragosse, l’Aragon et ses traditions et d’étudier les problèmes afférents ; c) de publier à sa charge, sans but lucratif, des ouvrages d’histoire, de géographie et plus généralement des ouvrages portant sur la culture de la région aragonaise »56 (Gran Enciclopedia Aragonesa http://www.enciclopedia-aragonesa.com/voz.asp?voz_id=2770).

La Hermandad de Caballeros de San Juan de la Peña joua un rôle important dans la mythification du monastère de San Juan de la Peña liée au Saint Graal. Une mythification à laquelle, Franco, comme nous l’avons vu, participa activement.

À ces associations privées élitistes ou à caractère purement folklorique (cas de l’association Amigos de la Jota) , vinrent s’ajouter des institutions créées par les Diputaciones (sortes de conseils généraux) des provinces de Saragosse, Teruel et Huesca. C’est ainsi que virent le jour l’Institución Fernando el Católico, l’Instituto de Estudios Turolenses et l’Instituto de Estudios Altoaragoneses en 1943, 1948 et 1949 respectivement. Ces organismes, forgés de toutes pièces par le pouvoir en place, furent consacrés à la recherche et à la publication d’ouvrages à thématique aragonaise et à caractère scientifique, historique ou culturel. Zaragoza, Teruel et Argensola, leurs respectives revues, se chargèrent de faire connaître les travaux réalisés dans le cadre fixé par le régime. L’esprit qui présida à la constitution de l’Institución Fernando El Católico est clairement suggéré par un article anonyme paru en 1955 dans le premier numéro de la revue Zaragoza :

La Diputación provinciale de Saragosse, […] créa en 1943, un service de haut niveau sous le patronage du meilleur roi d’Espagne et d’Aragon, don Ferdinand le Catholique […], à un moment où s’imposait la reconstruction et la promotion de la culture espagnole, tourmentée par d’anciens maux, tout en vivifiant la connaissance du patrimoine aragonais sur le plan universel […]. »57 (Royo Villanova 1978 : 142)

3. Discours et résistance politico-identitaire

Le régime franquiste réprimait ceux qui s’opposaient à l’unité des peuples d’Espagne et à une conception politique et sociale unitaire et unitariste. Après la victoire des nationaux, la répression s’en prit non seulement aux libéraux et aux gauches, mais aussi aux porte-drapeaux de l’identité aragonaise. Les nationalistes aragonais vivant en Catalogne, très influencés par le catalanisme, voire le fédéralisme, furent sans doute les plus touchés. Ce fut notamment le cas de José Aced qui avait participé au Congrès autonomiste de Caspe en mai 1936 et de Gaspar Torrente, la grande figure du nationalisme aragonais émergent. Tous deux faisaient partie des défenseurs de la cause aragonaise les plus radicaux et furent à ce titre emprisonnés à plusieurs reprises. Julio Calvo Alfaro, qui avait été un des grands animateurs du Congrès de Caspe et directeur de la revue El Ebro58, dut, quant à lui, cesser ses activités politiques sous la pression des forces de coercition. D’autres, comme l’avocat Mariano García Villas59, durent s’exiler.

En terres d’Aragon, le nationalisme n’avait pas eu un grand succès. Bon nombre de régionalistes vivant en Aragon abandonnèrent très tôt60 leurs activités politiques. Quant au régionalisme prédominant, traditionnellement urbain, éminemment saragossain, plutôt bourgeois et essentiellement modéré, il s’accommoda dans l’ensemble aux nouvelles donnes politiques imposées par le régime. Certains régionalistes d’avant-guerre coopérèrent même avec le nouveau régime. Ainsi, d’anciens membres de l’URA (Unión Regionalista Aragonesa créée en 1916 à Saragosse) finirent par occuper des postes importants dans divers secteurs61.

Jusque dans les années 60, l’intérêt pour la chose régionale, dans un Aragon bien peu régionaliste, fut essentiellement le fait d’élites acceptées par le pouvoir en place et parfaitement intégrées dans un système que parfois elles soutenaient ou avec lequel elles collaboraient.

Peut-on parler dans les années 40 et 50 de résistance régionale face à l’unitarisme franquiste ? Certes non. Il conviendrait plutôt de parler d’accompagnement plus ou moins accepté d’une politique nationale qui, ne pouvant nier les réalités régionales, se vit dans l’obligation de les encadrer ou de les tolérer dans les limites prévues par le système.

Le folklore, la préservation du droit civil aragonais et le travail réalisé par les sociétés, cercles et organismes à vocation scientifique et culturelle évoqués plus haut, peuvent bien être considérés comme des manifestations identitaires. Encadrées, contrôlées, aseptisées, elles ne purent cependant créer une forte conscience identitaire régionale qui en Aragon faisait déjà défaut avant-guerre. De surcroît, le caractère élitiste des organismes, associations et cercles mentionnés, s’il permettait de préserver un certain patrimoine régional − ignoré le plus souvent du peuple auquel on ne s’adressait du reste pas −, ne pouvait en aucune façon être à l’origine d’une prise de conscience politico-identitaire populaire. Enfin, le régionalisme aragonais qui s’était déjà caractérisé par une grande faiblesse et une grande modération avant la guerre (Garasa 2007 : paragraphes 29-32), s’était, dans l’ensemble, adapté aux réalités du moment et n’avait ni la force, ni sans doute la volonté d’aller au-delà de ce qui lui était permis.

L’Aragon n’était ni la Catalogne, ni le Pays Basque. Ses signes distinctifs et particularismes véhiculés par une histoire déjà ancienne, un droit civil maintenu sous perfusion, un folklore aseptisé et quelques stéréotypes (dont celui du baturro), ne pouvaient donner lieu à une résistance digne de ce nom.

Il en était tout autrement au Pays Basque et en Catalogne. Dans ces régions périphériques, les particularismes cultivés dans les chaumières et les traditions profondément ancrées dans les esprits, n’avaient pu être véritablement muselés par la répression franquiste. Or, ce furent ces régions périphériques à forte conscience identitaire qui profitèrent le plus de la politique économique du moment et qui se développèrent le plus. Rien d’étonnant à ce qu’elles connussent plus tôt que les autres régions des mouvements revendicatifs liés au développement économique et, dans bien des cas, à une conscience identitaire sous-jacente qui s’accommodait fort mal d’une absence de liberté politique.

Au pays Basque, dès les années 50, une partie du clergé et de la jeunesse tendit, sous diverses formes, à s’opposer au diktat et à la répression du régime. La radicalisation dans les années 60 de l’ETA donna par ailleurs un nouveau visage à un nationalisme basque qui se voulait plus combatif et plus engagé politiquement. En Catalogne, dès les années 40, un catalanisme catholique se manifesta et se structura au cours de la décennie suivante autour d’organisations comme Catòlics Catalans (1954) qui réunissaient une jeunesse bourgeoise pressée d’affirmer sa foi en dehors du cadre fixé par le régime. La bourgeoisie catalaniste, contrairement à la bourgeoisie aragonaise, ne s’accommoda pas, en effet, des règles fixées par le régime et manifesta, à l’image de Jordi Pujol, son attachement à ses racines, son identité et son désir de liberté lié parfois à une conception économico-sociale différenciatrice. Parallèlement, le FC Barcelone et la Sardane devenaient les véhicules d’un sentiment identitaire populaire. Enfin, dès le début des années 60, la langue catalane commençait à être enseignée ouvertement et les publications en langue vernaculaire se multipliaient. Dans ce bouillonnement culturel, l’opposition antifranquiste catalaniste s’affirmait.

Le discours franquiste des années 60 reconnaissait bien que changements il y avait et prétendait en tenir compte dans une Espagne qui connaissait un développement économique aux multiples répercussions sociales. Les propos virulents et/ou paranoïaques des années quarante et cinquante à l’encontre de l’athéisme, des ‘rouges’, du libéralisme et de la franc-maçonnerie coupables de ‘comploter’ contre le régime et l’œuvre rédemptrice du Caudillo, laissaient place à des discours beaucoup plus modérés. La guerre civile était déjà loin et l’ordre nouveau établi. Franco, entouré et conseillé par les technocrates de l’Opus Dei favorisait une politique d’ouverture et tissait des liens avec le libéralisme capitaliste tant critiqué. L’Espagne enfin, s’ouvrait à partir de 1969 aux pays du bloc Soviétique tant sur le plan commercial que diplomatique.

Le régime franquiste semblait donc s’adapter aux réalités du moment. Le 9 avril 1964, dans un discours prononcé devant les participants au IXe conseil national du Movimiento, le Caudillo affirmait à ce propos que se trompaient « ceux qui croient que nous sommes partisans de l’immobilisme politique et que nous manquons d’initiatives » (Franco 1968 : 37)62. Pourtant, la seule attitude qu’il prônait face aux changements était de croire aux valeurs de la tradition et à la « capacité de transformation révolutionnaire »63 (Franco 1968 : 39) du Movimiento. En d’autres termes, le pouvoir personnifié par Franco, ne se remettait pas en question. Il prétendait même adopter une attitude révolutionnaire, vieil héritage phalangiste révélateur d’un discours sclérosé contrastant avec « une époque d’une extraordinaire vitalité et d’accélération de l’Histoire très importante pour l’humanité »64 (Franco 1968 : 374) que le régime prétendait maîtriser.

La politique unitaire et unitariste du régime fut, dans ses grandes lignes, réaffirmée jusqu’à la mort de Franco. La loi organique du 10 janvier 1967 déclinait encore le mot unité en plusieurs versions et disposait dans son article 3 que parmi les objectifs fondamentaux de l’État se trouvait « la défense de l’unité entre les hommes et entre les terres d’Espagne »65 (BOE 11 janvier 1967 : 467). Le testament politique de Francisco Franco, lu devant les caméras de la télévision par le chef du gouvernement Arias Navarro le 20 novembre 1975, martelait encore et toujours le même message : « Préservez l’unité des terres d’Espagne, tout en exaltant ses multiples régions en tant que sources de la solide unité nationale »66 (http://www.memoriarepublicana.com/Documentos/Franquismo/testamfranco.html).

Dans les années 60, l’Aragon, encore essentiellement rural67, sans grande conscience identitaire, fut bien moins réactif que les régions périphériques les plus industrialisées. L’absence de mouvements revendicatifs d’ampleur associés de près ou de loin au fait régional et à l’identité, ne permirent pas, comme au cours des décennies précédentes, une réelle résistance. Une conscience politico-identitaire revendicative ne commença à s’ébaucher qu’à la fin des années soixante, c’est-à-dire beaucoup plus tard qu’en Catalogne. Elle fut liée à l’atmosphère nationale, voire internationale du moment et eut sa part de mimétisme, mais aussi son originalité et sa sincérité. C’était l’époque où le pouvoir devenait par instants plus permissif, dépassé qu’il était par une subversion que son ouverture économique ne pouvait freiner et qu’elle avait même mise en scène bien involontairement.

En Espagne, les brèches qui s’ouvraient dans la carapace du régime permirent notamment à des chanteurs compositeurs comme le valencien Paco Ibáñez de chanter à la télévision espagnole le fameux poème de Miguel Hernández, Andaluces de Jaén, tiré de Viento del Pueblo (1937). L’Aragon participa de cette mouvance et ce fut sans doute le disque de José Antonio Labordeta intitulé Cantar y Callar (Chanter et se taire) qui, en 1971, symbolisa le mieux cette renaissance identitaire, balbutiante, certes, mais pour le moins engagée. Tantôt exprimant son amour pour l’Aragon, tantôt sa soif de liberté, il brava une censure et une répression toujours d’actualité et avec d’autres artistes comme Joaquín Carbonell ou La Bullonera, il ouvrit la voie à des groupes et auteurs compositeurs comme Tierra Húmeda (Terre humide), Renaxer (Renaître), Tomás Bosque, Pilar Garzón, Ana Martín ou Valentín Mairal. Épaulés parfois par des défenseurs de la chanson aragonaise comme Plácido Serrano, tous mettaient en lumière l’authenticité de leurs racines. Les parlers aragonais qui avaient été jusque-là bien peu mis en avant, si ce n’est de façon fragmentaire et dans le cadre d’une littérature de mœurs68, finirent par se poser comme les éléments d’une revendication politico-identitaire dès la publication en 1971 du recueil de Francho Nagore intitulé Sospiros del Aire (Soupirs de l’air).

Dans la première moitié des années 70, les luttes contre le transvasement des eaux de l’Èbre en faveur de la Catalogne (1971) et l’installation en Aragon de centrales nucléaires69, mais aussi la sensation de plus en plus répandue d’être spoliés humainement et économiquement70 (Garrido López 1995 : 117), réunirent d’amples secteurs de la société aragonaise. Ces levées de boucliers, orchestrées par Radio Zaragoza, El Heraldo de Aragón, des intellectuels et une jeunesse de plus en plus politisée, impliquèrent une série de manifestations et d’actes culturels qui révélaient non seulement une nette opposition à la politique du régime, mais aussi un intérêt grandissant pour la région. Dès lors, la société et la langue aragonaises furent l’objet d’une attention croissante qui se traduisit au cours des années 70 par une activité éditoriale et médiatique accrue. Une conscience régionale diffuse et diverse impulsée par de multiples tendances politiques s’esquissait.

Une presse progressiste de gauche, dont l’élément le plus en vue fut le bimensuel Andalán71, se mit au service de la région, de ses intérêts et de son identité, alors que des associations comme l’Asociación de Chovens d’a Fabla Aragonesa créée en 1974, faisaient des parlers aragonais pyrénéens, connus sous le nom de fabla (parler, langue), des éléments identitaires hautement symboliques.

Face à un tel bouillonnement, le pouvoir en place, après avoir fait capoter une régionalisation purement économique (Garrido López 1999 : 39-43)72, finit par concéder une prudente régionalisation administrative et apolitique qui, sans mettre en cause la structure de l’État, tentait de s’adapter aux nouvelles réalités. Il donna ainsi son aval au regroupement des trois Diputaciones ou administrations provinciales sous le nom de Comunidad General de Aragón. Réunies pour la première fois en 1974, les trois Diputaciones envisagèrent de créer une fédération des trois provinces aragonaises qui se bornerait à prêter quelques services d’ordre médical, économique et documentaire. Les conclusions finales de la réunion du 2 décembre 1975 ne pouvaient ignorer les réalités du moment et donc les conséquences d’une évolution sociopolitique. Elles précisaient dans leur article 6 que la Comunidad General de Aragón s’opposait au transvasement des eaux de l’Èbre si ledit transvasement se faisait sans tenir compte des intérêts aragonais et qu’elle défendrait cette position devant les Cortès. Ces déclarations d’intention vaguement régionalistes, occultaient mal le caractère purement technique de cette ‘régionalisation’. Le texte soulignait notamment « la nécessité d’obtenir du gouvernement la formulation dans le cadre du IV plan de développement d’un programme spécifique pour la région aragonaise afin de remédier au problème du dépeuplement »73 (Royo Villanova 1978 : 219).

Le pouvoir en place fit aussi quelques concessions formelles et vaguement identitaires en promouvant en particulier la Journée de l’Aragon célébrée le 7 octobre 1972. L’autonomie politique était loin d’être envisagée, mais cette manifestation symbolique équivalait nonobstant à reconnaître, du moins en théorie, l’Aragon comme région et non plus comme une juxtaposition de provinces.

En 1971, durant la campagne contre le transvasement des eaux de l’Ѐbre, Pedro Baringo Rosinach, Président de la Diputación de la province de Saragosse et donc représentant du régime, s’affichait « en tant qu’Aragonais et comme président d’une des provinces aragonaises »74 (Domínguez Lasierra 1974 : 58) et prétendait que les ouvrages hydrauliques prévus de longue date pour étendre en Aragon la superficie irriguée devaient passer avant le transvasement en faveur de la Catalogne. Il tenait le discours stéréotypé de l’époque, privilégiant avec un brin de sentimentalisme les intérêts économiques de l’Aragon, « notre propre terre »75 (Domínguez Lasierra 1974 : 58). Il s’affichait pourtant comme un lieutenant de la politique étatique qui le poussait à agir « sans oublier les suprêmes intérêts de la nation »76 (Domínguez Lasierra 1974 : 58). Sa conception du fait régional était essentiellement technique. Il faisait en outre confiance à la planification franquiste et au troisième plan de développement économique et social, dont il espérait « qu’il intègre au moins l’achèvement du premier tronçon des Bardenas »77 (Domínguez Lasierra 1974 : 57) et des infrastructures hydrauliques prévues à cet effet.

Le délégué provincial du Ministère de l’Agriculture, José Lostao Camón, considérait bien le « peuple d’Aragon » comme un acteur à part entière, mais se bornait également à faire confiance au troisième plan de développement et à encourager les Aragonais à se battre pour que « les plans d’irrigation soient mis en pratique immédiatement »78 (Domínguez Lasierra 1974 : 45).

Emilio Fondevila, président du Syndicat provincial de l’élevage de Saragosse, proposait aussi que les travaux hydrauliques prévus de longue date en Aragon79 fussent menés à bien avant de procéder au transvasement des eaux de l’Èbre et mettait en avant la nécessité de s’assurer que l’Aragon pourrait disposer des quantités d’eau indispensables à ses activités agricoles avant que le précieux liquide ne fût transvasé en faveur de la Catalogne (Domínguez Lasierra 1974 : 49-50).

Trois ans plus tard, le député aux Cortès franquistes, Julián Muro Navarro, parlait encore et toujours de l’Aragon comme d’un acteur à part entière, mais, comme les personnalités citées précédemment, il s’en tenait à des considérations économiques et financières et à accréditer l’idée déjà fort répondue « d’un transvasement que l’on juge injuste »80 (Domínguez Lasierra 1974 : 461).

Rien de véritablement subversif dans tous ces témoignages. Rien en tout cas qui pût compromettre des figures locales qui étaient tout de même assez proches du pouvoir, mais qui, dans un contexte politico-social changeant, devaient considérer l’Aragon dans un cadre national englobant. Une certaine conscience identitaire était en train de poindre, y compris chez les plus modérés.

Ce furent les gauches et une jeunesse revendicative qui purent se targuer d’une certaine virulence. José Antonio Labordeta, en cette première moitié des années 70, fut un des principaux porte-drapeaux d’un engagement politique lié à la terre des ancêtres et au désir de liberté81. Après avoir produit deux disques en 1971 et 1974 sous le même titre, Cantar y Callar, il enregistra en 1975 Tiempo de Espera qui contenait le fameux « Canto a la Libertad », considéré par beaucoup comme l’hymne de l’Aragon. Le poème commençait par ces vers suggestifs : « Un jour viendra où tous, / en levant les yeux, / nous verrons une terre / qui clamera : Liberté » (Labordeta 1975).82

Parallèlement et comme dans d’autres régions d’Espagne, les partis politiques et les syndicats de gauche, toujours illégaux, se structuraient et montaient en puissance et, à l’image de ce qui se passait en Catalogne et au Pays Basque, commençaient à revendiquer une autonomie indissociable de la démocratie. Il n’est donc pas étonnant que ce phénomène ait touché des organisations traditionnellement centralisées et/ou très éloignées des aspirations autonomistes comme le Parti Communiste d’Espagne. Ainsi dans son manifeste du 1er mai 1972, le PCE présentait l’Aragon comme une victime qui subissait

la tyrannie d’une dictature centralisatrice et bureaucratique, au service des castes les plus réactionnaires, supportant dans son ensemble le pillage et la spoliation orchestrés par le capital financier et monopoliste du pouvoir central et d’autres régions d’Espagne. »83 (Royo Villanova 1978 : 173)

L’Aragon était victime d’un grand capital favorisé par un pouvoir central autoritaire et pour le plus grand profit de sociétés nationales et d’autres zones d’Espagne comme la déjà riche Catalogne, principale bénéficiaire des transvasements des eaux de l’Èbre. L’analyse de la situation rendait nécessaire et ce, de façon surprenante pour un parti aussi centralisé et centralisateur que le PCE, « l’autonomie à tous les niveaux »84 (Royo Villanova 1978 : 175). Une autonomie qui permettrait à un Aragon pauvre de décider de son avenir et d’être maître de son destin. Une démocratie, enfin, dont la teneur serait déterminée démocratiquement par le peuple d’Aragon car « la démocratie politique constitue un point de départ sur le chemin de la démocratie économique »85 (Royo Villanova 1978 : 175). La revue Andalán, porteuse de revendications économiques liées au problème régional, se faisait pour sa part un des plus ardents défenseurs d’une autonomie et d’une démocratie ressenties par beaucoup comme nécessaires.

À l’image de ce qui se passait sur le plan national avec la Junta Democrática de España, des partis et organisations syndicales de diverses tendances (Derecha Democrática, Alianza Socialista de Aragón, Partido Socialista Popular, Partido del Trabajo de España, Partido Comunista de España, Comisiones Obreras et Comisiones Campesinas), bien qu’illégales, agissaient ouvertement dans une atmosphère de fin de règne et créaient une Junta Democrática de Aragón, dont le manifeste de juillet 1975 résumait la philosophie : « L’autonomie n’a de sens que dans un cadre démocratique qui reflète réellement les intérêts du peuple aragonais »86 (Royo Villanova 1978 : 231). Comme le manifeste du PCE de 1972, il mettait en avant un Aragon victime du grand capital, des intérêts monopolistiques et du pouvoir central :

Nous n’avons pas profité de nos ressources naturelles ou avons vu comment notre énergie ou nos matières premières partaient vers d’autres horizons au profit d’intérêts monopolistiques : l’énergie électrique de Huesca, le minerai de fer et le lignite de Teruel, les produits agricoles, forestiers ou de l’élevage. Est venue s’ajouter ces derniers temps une agression systématique du régime contre notre région, centrée sur le projet de transvasement de l’Èbre, l’installation de champs de tir militaires et l’installation de centrales nucléaires, etc.87 (Royo Villanova 1978 : 230).

Au-delà de ces considérations économiques, le manifeste s’en prenait au régime comme fossoyeur de l’identité et de la culture régionales qui, nonobstant, ressurgissaient car le peuple d’Aragon « a réussi à récupérer un sentiment identitaire régional »88 (Royo Villanova 1978 : 231). Se voulant l’expression des forces démocratiques, le manifeste prenait ses distances par rapport au ‘régionalisme’ de l’époque franquiste et des droites réactionnaires en mettant en avant un intérêt pour la région « éloigné de toute nostalgie passéiste historique »89 et du folklorisme caractéristique des décennies précédentes.

La résurgence ou l’apparition des sentiments identitaires et différentiels qui pouvait découler d’une réaction mimétique inspirée par l’exemple des régions périphériques, semblait aussi être la résultante d’un combat commun contre l’ogre franquiste et d’une prise de conscience d’un écart économique trop grand entre l’Aragon et d’autres régions d’Espagne, dont la proche Catalogne, favorisée de surcroît par le transvasement des eaux de l’Èbre.

L’Aragon était considéré comme le parent pauvre de la réalité nationale. Il était pillé et colonisé par le grand capital et les intérêts extrarégionaux et il fallait lutter « contre cette exploitation coloniale et contre le pouvoir central qui la produit »90 (Royo Villanova 1978 : 175). La condamnation d’un colonialisme intérieur (à l’intérieur de la nation), véhiculée dans un premier temps par la revue Andalán, était devenue commune aux gauches. La spoliation ‘colonialiste’ était, à la veille de la mort de Franco, un des leitmotivs des publications revendicatives, dont Andalán était plus que jamais l’élément phare : « Comme les ressources minières sont exploitées par le capitalisme extrarégional, les revenus que Teruel tire de ses ressources minières sont réduits aux seuls salaires versés aux mineurs »91 (Andalán 1975 : 5). Le Seminario de Estudios Aragoneses (Séminaire d’Études aragonaises)92, quant à lui, n’était pas en reste et jouait un rôle non négligeable dans la défense des intérêts régionaux (Garrido López 1995 : 117).

L’Aragon, victime et réactif face au pouvoir central et aux intérêts hégémoniques des grandes sociétés industrielles, du grand capital et de la puissante Catalogne, prenait consistance dans l’adversité. Un régionalisme politique s’ébauchait sans pour autant glisser vers un séparatisme nié d’emblée par les acteurs aragonais de la lutte antifranquiste.

Le manifeste du PCE de 1972 précisait à cet effet que la lutte pour la défense de l’Aragon fait indiscutablement partie de la lutte pour la liberté sur l’ensemble du territoire espagnol »93 (Royo Villanova 1978 : 175). La Junta Democrática de Aragón assurait que l’autonomie régionale « n’implique pas une rupture de l’unité de la Patrie, comme certains tentent de le faire croire »94 (Royo Villanova 1978 : 231). Enfin, l’équipe d’Andalán, face aux critiques provenant notamment des droites, crut nécessaire de préciser dans un article intitulé El separatismo de Andalán que ledit séparatisme était « la notion et l’option que défendirent les bourgeoisies basque et catalane dans le premier tiers du xxe siècle »95 (Andalán 1973 : 8) et que « Andalán n’est pas séparatiste mais lutte ouvertement pour sa région »96 (Andalán 1973 : 8). La philosophie de l’équipe du bimensuel s’inscrivait dans le cadre d’un régionalisme qui revendiquait l’existence d’un gouvernement régional qui serait « choisi par les Aragonais à travers des mécanismes démocratiques »97 (Andalán 1973 : 8), rappelant ainsi la philosophie du manifeste du PCE.

Conclusion

Dans l’Espagne franquiste, tradition hispanique, catholicisme conservateur et phraséologie fascisante fournissaient au discours autoritaire et unitariste prédominant les mots qui le justifiaient. Ce discours, fait de bric et de broc et pour le moins pragmatique, était instrument de propagande et jouait un rôle non négligeable dans l’affirmation d’un pouvoir qu’il légitimait.

Francisco Franco usait pleinement de cette arme lorsqu’il se rendait en province pour marquer sa présence, prêcher la bonne parole et affirmer son autorité. Ces visites théâtrales et solennelles à l’occasion desquelles le Caudillo était sacralisé en tant que guide et protecteur de la nation, lui permettaient par ailleurs de mettre sur un pied d’égalité toutes les provinces et donc tous les Espagnols, démontrant ainsi par l’exemple que les hommes et les terres d’Espagne formaient un tout indissociable et méritaient une égale attention.

Dans ses discours adressés aux Aragonais, Franco montrait son obsession pour une unité à la fois politique, religieuse et culturelle, fruit d’une histoire glorieuse, d’une tradition et d’une destinée commune et universelle. Une unité qu’il fallait enseigner dès la plus tendre enfance et dont Franco se faisait le chantre suprême. Dans une Espagne qu’il voulait « une, grande et libre », poser les bases unitaires et unitaristes du régime, c’était affirmer une puissance, un état de fait et aussi convaincre. L’unité acceptée ou imposée devait être le fondement du pouvoir, pourtant illégitime, qu’il détenait. Elle était en tout cas une des conditions de sa survie.

Sans pouvoir nier la diversité des peuples d’Espagne et donc les particularismes aragonais, Franco faisait appel dans ses discours à une histoire partisane, encensant le ‘véritable’ Aragonais, héros de la guerre civile, descendant des glorieux guerriers qui firent l’histoire de l’Espagne. Un Aragonais espagnol ou un Espagnol aragonais politiquement aseptisé qui participait à l’effort national, loin de tout libéralisme et donc de toute source de division. Un Aragonais prétendument authentique, désigné comme un des piliers du pouvoir en place.

Le discours unitaire et unitariste franquiste n’évolua guère dans ses grandes lignes jusqu’à la mort du Caudillo. Sur le plan pratique, le pouvoir en place, avec grand pragmatisme, dut reconnaître certains faits différentiels qu’il sut cependant instrumentaliser ou consentit à tolérer dans la mesure où ils ne représentaient pas un danger pour le régime.

C’est ainsi que l’on mit en avant un folklore aseptisé et une politique hydraulique chère aux Aragonais. Le culte de la vierge du Pilar donna lieu à une habile récupération politico-religieuse qui en fit un des symboles de l’Hispanité. Le droit civil aragonais fut, quant à lui, préservé sous le contrôle des autorités. Le pouvoir, enfin, donna son aval aux associations, institutions et cercles élitistes qui défendaient et promouvaient une culture aragonaise exempte de tout germe d’infection politique dans le cadre et dans les limites fixés par le régime. Ces réalités, qui peuvent être considérées comme autant de manifestations identitaires instrumentalisées ou encadrées, permirent de préserver un certain patrimoine local, mais ne purent en aucun cas forger une forte conscience régionale. Tel n’était d’ailleurs pas le propos des autorités franquistes.

La faiblesse du régionalisme d’avant-guerre et de la conscience identitaire régionale, l’exil de bon nombre de défenseurs de la cause aragonaise à la suite de la victoire franquiste et la répression firent qu’en Aragon une réelle résistance face à la politique unitaire et unitariste franquiste ne se manifesta que tardivement. L’Aragon n’avait pas le différentiel identitaire de régions périphériques comme le Pays Basque ou la Catalogne. Dans les années 60, il n’avait pas non plus connu, contrairement à ces régions, de mouvements revendicatifs d’envergure liés tant à un essor économique qu’à une conscience identitaire marquée. Rien d’étonnant à ce qu’une contestation populaire de la politique étatique accompagnée d’une revendication politico-identitaire plus ou moins consciente, ne se manifestât que dans la première moitié des années 70. Ce furent alors les luttes contre le transvasement des eaux de l’Èbre en faveur de la Catalogne et l’installation de centrales nucléaires en terres aragonaises qui révélèrent une dynamique politico-identitaire mimétique, mais due également à une prise de conscience de l’écart économique existant entre la région et d’autres régions d’Espagne.

Face à une société en pleine évolution, le pouvoir en place proposa une régionalisation purement technique et convenue qui ne remettait pas en cause la structure de l’État. L’opposition de gauche suivait une autre dynamique, tenant le plus souvent un discours de type marxiste où un Aragon victime, spolié par le grand capital, l’autoritarisme et le centralisme étatiques, était le parent pauvre de la nation.

Ce discours récurrent suggérait un certain consensus politique face au franquisme, une lutte commune qui rendait indissociables démocratie et autonomie. Dans un tel creuset, le désir des gauches et d’une droite opportuniste de se positionner sur l’échiquier politique dans la perspective d’un changement de régime annonçait les luttes pour le pouvoir et l’instrumentalisation de la ‘cause aragonaise’ de l’après-franquisme.

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Notes

1 Il exista également un nationalisme espagnol unitaire et libéral. Retour au texte

2 Association fondée en 1908 par le Jésuite Ángel Ayala dans le but de propager un catholicisme traditionnaliste dans une société que l’on jugeait contaminée par les idées libérales. Elle eut des ramifications dans diverses organisations citoyennes, dans les milieux journalistique, universitaire, politique et syndical. Durant la seconde République, son président, Ángel Herrera Oria, créa Acción Nacional (future Acción Popular), dans le but de favoriser la représentation du monde catholique sur le plan politique. Retour au texte

3 Association politico-culturelle créée à Madrid en octobre 1931. Acción Española publia une revue du même nom de décembre 1931 à juin 1936. L’organisation défendit un catholicisme monarchiste et devint l’un des piliers de la doctrine franquiste. Retour au texte

4 Créé en avril 1931 sous le nom de Acción Nacional, ce parti devint en 1932 Acción Popular et fut un des noyaux durs de la CEDA (Confederación Española de Derechas Autónomas), coalition des droites créée en 1933 et dirigée par José María Gil Robles. Retour au texte

5 « Influir en la transformación de una Sociedad y en la formación intelectual y moral de sus futuras clases directoras.» Retour au texte

6 « Necesitamos desde los primeros años grabar en el ánimo de nuestra infancia, en conceptos sencillos, las verdades de nuestra doctrina y la idea firme de sacrificio por nuestra unidad, construida sobre principios eternos extraídos de nuestra Historia y de los preceptos del Evangelio. » Retour au texte

7 À l’époque contemporaine, l’Église prit fait et cause pour le nationalisme espagnol et obtint en échange de l’État privilèges et faveurs. Retour au texte

8 « Se resquebraja nuestra unidad y perdemos nuestro Imperio. » Retour au texte

9 Il fut président d’Acción Católica et un des fondateurs d’Acción Popular. Il devint en 1935 évêque de Salamanque, puis archevêque de Tolède en 1941. Retour au texte

10 Il fut jusqu’en 1945 président d’Acción Católica. Retour au texte

11 11 Il était membre de l’ACNP. Retour au texte

12 « Amar a las comarcas es amar dos veces a España. El Estado que nuestro Movimiento ha alumbrado aspira a reforzar la personalidad de nuestras provincias, a dotarlas y a facilitarles los medios de encararse con sus propios problemas y ayudarles a conservar esas peculiaridades de cada una dentro de la unidad armónica e indestructible de la Patria. » Retour au texte

13 « los discursos pronunciados en mi continuo peregrinar por las tierras de España » Retour au texte

14 « ¡Sea Franco nuestro conductor en la ansiedad creadora de los ganaderos españoles! » Retour au texte

15 Respectivement organes du Syndicat national de l’élevage et du coopératisme franquistes. Retour au texte

16 « Nuestras provincias predilectas han de ser siempre aquellas que más lo necesitan. Y lo mismo que construimos la unidad entre los hombres por la justicia social y la fraternidad entre las clases, igualmente se edifica la unidad y la hermandad entre las provincias españolas. » Retour au texte

17 « Nuestro gran río» ; « a los que llegará ese oro líquido para nuestras cosechas » Retour au texte

18 « Sin embargo, estas obras hidráulicas tienen tal potencia en sí mismas, encierran en sí tantos beneficios, no solamente para la comarca favorecida, sino para toda la Nación. » Retour au texte

19 Allusion aux villages créés en Aragon dans les années 50 dans le cadre de la colonisation menée à bien par l’INC (Institut National de Colonisation). Parmi les nouveaux villages créés dans les années 50 en terres fraîchement irriguées, citons El Temple del Caudillo ou Bardena del Caudillo (province de Huesca), dont le nom révèle l'esprit qui présida à leur création. En 1960, 33 nouveaux villages avaient été construits en Aragon : 15 dans la zone des Bardenas, 16 dans celle des Monegros et 2 dans le Bas-Aragon, soit un total de 4 098 logements (d’après Biescas Ferrer 1977 b : 68). Retour au texte

20 « En julio pasó Franco por las tierras de Aragón ante los hombres que trabajan sobre los elementos y contra los elementos. Y las tierras − Caspe, Las Cinco Villas − y los hombres sonrieron porque la presencia de Franco, su palabra y su decisión son siempre anuncio de realizaciones y seguridad de la solución de problemas. Retour au texte

21 « Campesinos y labradores: Retour au texte

22 « Conseguir que todos los productores se sientan partícipes en la Empresa y se asegure así para siempre la verdadera unidad de los hombres y de las tierras de España. » Retour au texte

23 « Vosotros sabéis mejor que yo, porque lo habéis vivido, lo que representó en todos los órdenes y en la ganadería el régimen liberal, el "dejar hacer". De las lecturas de la historia económica de nuestra Patria, de aquel concejo de la "Mesta", de aquellas cañadas reales, de aquella importancia y transcendencia que tenía en la vida de España la ganadería, la presencia de sus ganados, hemos pasado, a través del mundo liberal, al abandono, cuando no a la ruina verdadera de nuestras producciones. » Retour au texte

24 Seule l’association d’éleveurs d’Albarracín (localité située au sud de l’Aragon) fut liée à la Mesta castillane par Charles II d'Espagne qui, en échange d'un prêt, accorda aux éleveurs de cette communauté les privilèges dont bénéficiaient les éleveurs de Castille et du León. Il est intéressant de constater que cette association est appelée tantôt Ligallo de Albarracín, tantôt Mesta de Albarracín. Le mot Mesta la relie à la Castille, alors que le substantif Ligallo, qui signifie en aragonais ‘association’, la relie à l’Aragon. Son caractère hybride était nonobstant une exception due aux aléas de l’histoire et des finances. Retour au texte

25 « este reducto natural que Dios nos ha dado » Retour au texte

26 « Por esto la batalla de Belchite tiene un puesto de honor en la historia de nuestra Cruzada. La victoria momentánea del enemigo fué […] más una victoria del heroísmo de los defensores que de las muy superiores huestes comunistas que lo ocuparon […] Dios da la victoria a los mejores. » Retour au texte

27 Pour l’ensemble du paragraphe : « contra la invasión de los nuevos bárbaros », « la unión sagrada de los españoles para defender de nuevo nuestro solar », « constituye otro jalón fundamental en nuestra historia ». Retour au texte

28 « la canalla roja mordía poco a poco el área de vuestros caminos » Retour au texte

29 « […] buscando la liberación de España. Habéis sido protagonistas de uno de los sucesos más importantes de la Historia de España. » Retour au texte

30 Ensemble des citations du paragraphe : « Población mártir », « Turolenses y Españoles todos », « Españoles y Turolenses todos: ¡Arriba España! », « puerta de la meseta española. » Retour au texte

31 « Tierra aragonesa, española.Tierra de sacrificio », « Teruel por España, para la España Nacional, para la España Una, Grande y Libre. » Retour au texte

32 « Teníamos que llenar esto de contenido político, teníamos que crear unos ideales, teníamos que unir a los españoles en una misma marcha y dirección: en la grandeza de la Patria, en la consecución de nuestros ideales ». Retour au texte

33 « Y esto sólo se consigue con la unidad, con la marcha laboriosa de la Falange anunciando al mundo un nuevo resplandor y una nueva era. » Retour au texte

34 « Que España tenga fe en el porvenir, que creamos en nosotros mismos y que estemos convencidos de que en nuestra unidad está nuestra fortaleza. Retour au texte

35 « el que en la Nación exista una política levantada sobre todo aquello que nos une y que persiga el bien común » Retour au texte

36 « la unidad entre los hombres y las tierras de la Patria » Retour au texte

37 « La personalidad de las regiones españolas será respetada en la peculiaridad que tuvieron en su momento álgido de esplendor, pero sin que ello suponga merma alguna para la unidad absoluta de la Patria. » Retour au texte

38 « Hemos venido a vuestra provincia a postrarnos ante el Santo Cáliz, a rememorar aquellos otros tiempos en que el Cáliz estuvo en San Juan de la Peña. Esto, que constituye algo trascendental, debe quedar grabado en nuestro ánimo. Hubo una etapa en la vida de España en que la desunión de los españoles permitió que fuéramos invadidos por los sarracenos, y que lo mejor de España, las reliquias sagradas de nuestros santos, todo aquello que representaba un tesoro de espiritualidad, tuvieran que ser trasladadas a nuestras montañas para salvarse de la invasión extranjera. » Retour au texte

39 « contra el sentido antinacional » Retour au texte

40 Son culte qui dans un premier temps fut typiquement saragossain, s’étendit à l’ensemble de l’Aragon au xviie siècle et finit par devenir un particularisme religieux et identitaire pour les Aragonais. Retour au texte

41 « desde su Pilar inamovible de Aragón, por la suerte de la España entera » Retour au texte

42 « Imploro de nuestra Virgen Capitana la unidad, la libertad y la grandeza de la comunidad hispánica del mundo » Retour au texte

43 Trois bombes furent lancées sur le Pilar par un Fokker républicain, mais miraculeusement aucune n’explosa. On prétend même qu’une des bombes qui vint s’écraser juste à côté du Pilar laissa la trace d’une croix sur le sol. Retour au texte

44 « de una natural armonía » Retour au texte

45 « todos los separatismos, desde los de la filosofía a los de la política » Retour au texte

46 « en la cual la legítima y necesaria variedad no rompe, antes enriquece, la unidad esencial de los españoles » Retour au texte

47 « La finalidad de las Compilaciones, según el Congreso Nacional de Derecho Civil, celebrado en Zaragoza, el año 1956, no es tanto la de recoger el Derecho regional de un modo sistemático para su aplicación, como para su conocimiento y utilización en el futuro Código general. » Retour au texte

48 « la reforma del Derecho privado, la substitución de la diversidad legislativa actual por el Código civil español […] concorde con la orientación espiritual y social del Régimen político español. » Retour au texte

49 Pour Bielsa voir Garasa (2006 : 88). Retour au texte

50 Fondée en 1776 dans la mouvance de l’encyclopédisme, elle fut une des nombreuses sociétés d’Amis du Pays qui virent le jour en Espagne au xviiie siècle. Chargée de développer et de promouvoir l’économie, elle tenta aussi de promouvoir la culture et les sciences sur le plan régional. Retour au texte

51 Créée en 1792 sous Charles IV, cette académie mit notamment en valeur les lettres et les arts. Son siège est aujourd’hui le musée de Saragosse et elle est notamment chargée d’encourager l’étude des arts, de préserver et de promouvoir les monuments et les œuvres d’arts situés sur le territoire de l’actuelle Communauté Autonome d’Aragon. Retour au texte

52 52 Émanation de la belle société locale, cet athénée ou centre culturel, fut fondé en 1864. Son but fut de cultiver les sciences et d’insuffler l’amour pour la culture et les beaux-arts à travers des débats, des conférences, des concours poétiques, des commémorations, des expositions et des publications à caractère scientifique, littéraire ou artistique centrés fréquemment sur les réalités régionales. Retour au texte

53 Cette confrérie avait essentiellement pour but de vouer un culte à Saint Jean Baptiste, de restaurer le vieux monastère de San Juan de la Peña et d’assurer la promotion de ce lieu et de son histoire. Ses membres étaient issus des trois provinces d’Aragon. Retour au texte

54 Cette association devint, au début des années 70, El Cachirulo-Amigos de la Jota (le cachirulo est le typique foulard de tête aragonais). Retour au texte

55 En fabla (parler) du Haut-Aragon, ce mot signifie ‘banc en bois’. Dans la cuisine où se déroulait l’essentiel de la vie familiale, les cadieras étaient situées des deux côtés du fogaril (l’âtre, la cheminée intérieure). Retour au texte

56 « b) fomentar el amor a Zaragoza, Aragón y sus tradiciones ; c) publicar a sus expensas, sin ánimo de lucro, obras impresas dedicadas a la historia, a la geografía y, en general, a la cultura de la región aragonesa. » Retour au texte

57 « La Excelentísima Diputación Provincial de Zaragoza […] fundó el año 1943 un Servicio de Alta Cultura bajo el patronazgo del mejor rey de España y de Aragón, don Fernando el Católico […] en el momento preciso de su tiempo, en el que se imponía la reconstrucción y propulsión de la cultura española, aquejada de antiguos males, y con ello, avivándose el conocimiento de lo aragonés desde un plano universal […]. » Retour au texte

58 Porte-parole de l’aragonisme édité à Barcelone. Retour au texte

59 Il collabora avec la revue El Ebro, fut à la tête de Juventud Aragonesista de Barcelona de 1929 à 1932, puis devint un des dirigeants de Unión Aragonesista avant de s’exiler à Londres, puis en Amérique Centrale. Retour au texte

60 La partie occidentale de l’Aragon qui comprenait notamment Saragosse et les deux autres chefs-lieux de province (Huesca et Saragosse), tomba aux mains des insurgés dès le début de la guerre civile. Retour au texte

61 Le spécialiste de l’Aragon, Antonio Peiró, révèle par exemple que les ex-régionalistes José María Sánchez Ventura, Miguel Sancho Izquierdo ou Salvador Minguijón devinrent respectivement gouverneur civil (sorte de préfet) de Teruel, recteur de l’université de Saragosse et magistrat du Tribunal Suprême (Peiró 2002 : 102). Retour au texte

62 « se equivocan quienes creen que somos partidarios del inmovilismo político o que adolecemos de falta de iniciativas » Retour au texte

63 « capacidad de transformación revolucionaria » Retour au texte

64 « una época de extraordinaria vitalidad de una aceleración histórica importantísima en la vida de la humanidad » Retour au texte

65 « la defensa de la unidad entre los hombres y entre las tierras de España ». Retour au texte

66 « Mantened la unidad de las tierras de España, exaltando la rica multiplicidad de sus regiones como fuente de la fortaleza de la unidad de la Patria. » Retour au texte

67 Les campagnes furent peu affectées par les mouvements de grève des années 60, si l'on fait exception de luttes sporadiques dans le sud de l'Espagne où l'importance numérique des ouvriers agricoles était sans doute à l'origine de ces phénomènes. Les campagnes aragonaises où les salariés et en particulier les travailleurs occasionnels étaient relativement peu nombreux ne connurent pas, au cours des années 60, de manifestations ouvrières de masse (Garasa 2000 : 639-641). Retour au texte

68 Ce fut le cas de Aragón de las Tierras Altas de Pedro Arnal Cavero. Cet ouvrage publié en 1955 par El Heraldo de Aragón, contient quelques chapitres en aragonais du Somontano (piedmont) de Barbastro (Haut-Aragon). Il a une certaine portée linguistique et ethnographique qui s’apprécie notamment dans la description des paysages et les tableaux de mœurs. Il renferme également des photographies du pays. Retour au texte

69 Respectivement à Sástago, Escatrón et Chalamera en 1973, 1974 et 1975. Retour au texte

70 Détérioration économique, colonisation de l’Aragon au nom d’intérêts extrarégionaux, fuite des capitaux vers d’autres régions et émigration sensible vidant l’Aragon de son potentiel humain. Retour au texte

71 Périodique créé en septembre 1972. Son titre est évocateur. Il signifie ‘sillon pour planter des arbres’. Le mot renvoie donc à une façon de faire qui contraste avec la technique qui consiste à creuser un trou pour chaque arbre à planter. Retour au texte

72 En Aragon, selon Carlos Garrido López, le conseiller provincial du Movimiento, Alberto Ballarín Marcial, perçut dès 1968 la nécessité de mener à bien une régionalisation de type économique. Il proposa l’élaboration d’un plan destiné à mobiliser les énergies régionales autour d’un projet territorial commun. À partir de 1971, les autorités provinciales aragonaises tentèrent diverses démarches en ce sens auprès de l’administration centrale. Leurs efforts ne furent pas couronnés de succès et la constitution de l’Instituto de Desarrollo Regional de Aragón (Institut de Développement régional de l’Aragon), organisme qui devait techniquement permettre la mise en pratique d’un plan de développement régional, n’aboutit pas. Retour au texte

73 « La necesidad de recabar del Gobierno que se formule dentro del IV Plan de Desarrollo un programa territorial específico para la región aragonesa, a fin de remediar el grave problema de la despoblación » Retour au texte

74 « Como aragonés y como presidente de la Diputación de una provincia aragonesa » Retour au texte

75 « nuestra propia tierra » Retour au texte

76 « sin olvidar los supremos intereses de la nación » Retour au texte

77 « incorpore cuando menos el primer tramo de Bardenas) » Retour au texte

78 « se concluyan de inmediato » Retour au texte

79 En 1975, 40 % seulement de la superficie prévue par le Plan de Riegos del Alto Aragón (Plan d’irrigation du Haut-Aragon) adopté en 1913, avait été irriguée. En 1962, l'ensemble des terres irriguées aragonaises représentait 14,2 % de la superficie espagnole irriguée, en 1972, il ne représentait plus que 13,6 % du total national (d’après INE 1966). On estimait que pendant ces dix années l'État avait investi moins de 6 000 millions de pesetas dans la réalisation des travaux d'irrigation en Aragon, alors qu'il avait déjà prévu pour le transvasement Èbre-Pyrénées un budget de 35.000 millions de pesetas (Biescas Ferrer 1977a : 138). Ajoutons à cela le déséquilibre démographique et économique dû à l’émigration, à l’exode rural (en 1975, la capitale Saragosse avec ses 568 098 habitants accueillait 48,55 % de la population régionale : d’après INE http://www.ine.es/inebaseweb/pdfDispacher.do?td=128844&ext=.pdf) et aux transferts de capitaux aragonais en faveur des régions les plus industrialisées, dont la Catalogne. Retour au texte

80 « un trasvase que estimamos injusto » Retour au texte

81 Chanteur de l’Aragon et fervent partisan de la démocratie, il fut un des principaux représentants de la chanson à texte espagnole. Retour au texte

82 « Habrá un día en que todos/al levantar la vista,/veremos una tierra/que ponga: Libertad ». Retour au texte

83 « la tiranía de un régimen de dictadura centralista y burocrática, al servicio de las castas más reaccionarias, está soportando en su conjunto el saqueo y expoliación del capital financiero y monopolista central y de otras zonas del país » Retour au texte

84 « la autonomía a todos los niveles » Retour au texte

85 « la democracia política es el punto de partida para conseguir la democracia económica ». Retour au texte

86 « La autonomía sólo puede entenderse dentro de una estructura democrática que refleje verdaderamente el interés del pueblo aragonés » Retour au texte

87 « Nuestros recursos naturales se han desaprovechado o hemos visto cómo nuestra energía o nuestras materias primas, en aras de intereses monopolísticos, salían para otros lugares: la energía eléctrica oscense, el mineral de hierro y el lignito turolenses, los productos agrícolas, forestales o ganaderos. A lo que se ha unido en el último período una agresión sistemática del Régimen contra nuestra región, concentrada en el proyecto del Trasvase del Ebro, los campos de tiro de ejercicios militares, la instalación de centrales nucleares, etc. » Retour au texte

88 « ha conseguido recuperar su sentido regional » Retour au texte

89 « lejos de añoranzas históricas pasadas » Retour au texte

90 « contra esa explotación colonial y contra el poder central que la produce » Retour au texte

91 « Al ser explotados los recursos mineros por capital de fuera de la provincia, la única fuente e ingresos que proporciona a Teruel su riqueza minera queda reducida a los salarios que se pagan en las minas. » Retour au texte

92 Des membres du groupe primitif de la revue Andalán furent à l’origine de la célébration de la I Semana Cultural Aragonesa (Ière Semaine culturelle aragonaise) qui se tint du 5 au 11 février 1973. C’est dans le prolongement de cette manifestation que fut créé le Seminario de Estudios Aragoneses, organisme ayant pour but de dynamiser et de coordonner les actions culturelles. Jusqu’en 1974, il s’intéressa essentiellement à cet aspect culturel pour, à partir de 1974, traiter également de thèmes comme le transvasement des eaux de l’Èbre, l’installation de centrales nucléaires en Aragon ou le colonialisme intérieur et la spoliation économique et financière subie par l’Aragon. Retour au texte

93 « La lucha en defensa de Aragón forma parte indiscutiblemente de la lucha por la libertad en todo el país. » Retour au texte

94 « no implica una ruptura de la unidad de la Patria, como algunos pretenden hacer creer » Retour au texte

95 La noción y opción que defendieron las burguesías vasca y catalana en el primer tercio del siglo xx » Retour au texte

96 « Andalán no es separatista pero lucha abiertamente por Aragón. » Retour au texte

97 « que se haga desde la región a través de mecanismos democráticos » Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Fausto Garasa, « Unitarisme, conscience identitaire et résistance dans l’Aragon franquiste : discours et réalités », Textes et contextes [En ligne], 6 | 2011, publié le 01 décembre 2011 et consulté le 22 novembre 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/textesetcontextes/index.php?id=310

Auteur

Fausto Garasa

Centre Interuniversitaire de Recherche sur l'Education et la culture dans le Monde Ibérique et ibéro-Américain (CIREMIA EA 2112), Université François-Rabelais, 3 rue des Tanneurs, BP 4103, 37041 Tours Cedex 1

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