Publié dans la collection « L’histoire entre nos mains », ce beau livre vient s’ajouter à la série des titres déjà publiés sur la période de la l’Occupation ou de la Guerre d’Algérie. Il tranche cependant, car si les ouvrages déjà publiés reposent sur des archives privées (lettres, carnets, récits), celui-ci se base sur les archives du PCF. Le principe en est néanmoins le même : à travers un récit réduit au minimum, mettre en avant la valeur et l’intérêt des documents archivistiques. Cela s’illustre notamment par le fait du nombre très important de fac-similés offerts au lecteur. La nature desdites reproductions varie en fonction du thème du chapitre, ordonnée en une série chronologique. Par exemple, les deux pages consacrées à l’Humanité proposent, en sus d’un très court texte de présentation, l’éditorial du premier numéro du 18 avril 1904 (le document consiste précisément en la reproduction du numéro, présenté sous une enveloppe transparente), le contrat de travail de Jaurès et trois photos : Jaurès en train de lire le journal, des clients d’un restaurant exhibant le journal et deux militants, visiblement d’une période ultérieure, faisant la publicité pour l’Humanité, avec une banderole ornée de la faucille et du marteau. Le résultat est bien souvent très émouvant : on songe notamment au courrier de Guy Môquet envoyé quelques heures avant d’être fusillé ou aux ultimes poèmes de Manouchian à sa compagne. L’effet souhaité, faire s’émerveiller le lecteur de la richesse de cette histoire. Une histoire qui d’ailleurs est loin d’être contée sur un mode hagiographique. Que l’on s’on se reporte à la narration sur la période de la drôle de guerre où il est rappelé que le PCF attend la déclaration de guerre à l’Union soviétique pour véritablement entrer en résistance : événement « qui ramène le PCF dans la lutte antifasciste », p. 53. On peut également évoquer les deux pages consacrées à l’exclusion de l’adhérente Marguerite Duras, de son mari, Robert Antelme et de son amant, Dionys Mascolo, avec les conclusions du rapport de la commission d’enquête. Si le rapport esthétique à ce bel objet est assurément obtenu, en revanche, il ne faut pas prétendre y voir ou y lire une contribution à l’histoire du PCF. Ainsi, après la crise tchécoslovaque évoquée p. 80-81, le lecteur en tournant la page (p. 82-83) découvre « Le piège afghan », un bond de treize années. Le raccourci est assez osé. D’ailleurs à la fin du volume, l’histoire semble s’accélérer, puisque la dernière séquence est centrée sur les personnalités de Marchais et Krasucki (dont les fiches bio sont reproduites) et une conclusion sur la chute du bloc soviétique, constituant l’épilogue. Malgré ses évidentes limites historiographiques, le lecteur sera conquis par ce livre-objet. Car c’est bien pour cette caractéristique, un tantinet nostalgique, que cette France rouge sera acheté.
Bruno Fuligni, La France rouge. Un siècle d’histoire dans les archives du PCF, 1871-1989, Paris, Les Arènes, 2011.
12 May 2012.
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Georges Ubbiali, « Bruno Fuligni, La France rouge. Un siècle d’histoire dans les archives du PCF, 1871-1989, Paris, Les Arènes, 2011. », Dissidences [Online], Mai 2012, 12 May 2012 and connection on 05 October 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=682