Dominique Lejeune, auteur de divers manuels pour étudiants et spécialisé plus particulièrement dans l'histoire de la France durant la seconde moitié du XIXe siècle, propose ici une synthèse sur un sujet particulièrement intéressant, déjà partiellement exploré par Jean-Jacques Becker et Serge Berstein avec leur premier volume de l'Histoire de l'anticommunisme en France, ou pour la Belgique par l'ouvrage collectif La peur du rouge, dirigé par Pascal Delwit et José Gotovitch. A la différence de cet ouvrage, plus resserré et portant sur la période 1917-1940, l'étude de Dominique Lejeune veut embrasser l'ensemble du XIXe et du XXe siècle, en se limitant seulement au cadre français. Partant de l'apparition du terme péjoratif de rouge en 1834, qu'il lie à la séparation croissante alors en train de s'opérer entre patrons et ouvriers, il constate l'évolution de ceux qu'il désigne, démocrates socialistes pré-radicaux à l'époque de la IIème République, révolutionnaires ouvriers sous le Second Empire et lors de la Commune, anarchistes, socialistes et syndicalistes à l'orée du XXème siècle… A plusieurs reprises, l'auteur insiste sur les conséquences de cette peur parfois panique parmi les classes dirigeantes, du coup d'Etat de Louis-Napoléon Bonaparte au " délire verbal " des Versaillais, démontrant bien le rôle essentiel de cette angoisse dans l'évolution de la société française, entre autres. Néanmoins, cette étude transversale ne remplit pas toutes les promesses que l'on pouvait placer en elle : les analyses sont souvent partielles, voire superficielles ; des répétitions semblent témoigner d'un résultat insuffisamment relu ; le plan choisi n'évite pas certaines coupures pour le moins surprenantes (le chapitre 3 de la deuxième partie va ainsi de 1890 à 1920, sans mettre assez en valeur la coupure de 1917) ; enfin, à partir de l'apparition du PCF en France, l'accent se porte au moins autant sur la peur du rouge que sur la description de l'univers communiste ; au contraire, la période post-68 est survolée de manière très généraliste, sans véritable axes directeurs. De plus, si la peur du rouge a bien évolué, elle n'en existe pas moins toujours aujourd'hui, contrairement à la sous-estimation de l'auteur . Le sujet reste donc encore à approfondir.
Dominique Lejeune, La peur du " rouge " en France - Des partageux aux gauchistes, Paris, Belin, 2003, 304 p. (Histoire et société - Temps présents).
Article publié le 10 septembre 2012.
Index
Mots-clés
CommunismeTexte
Illustrations
Citer cet article
Référence électronique
Jean-Guillaume Lanuque, « Dominique Lejeune, La peur du " rouge " en France - Des partageux aux gauchistes, Paris, Belin, 2003, 304 p. (Histoire et société - Temps présents). », Dissidences [En ligne], Communisme français, publié le 10 septembre 2012 et consulté le 21 novembre 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=466