Stéphane Courtois (dir.), Communisme en France. De la révolution documentaire au renouveau historiographique, Paris, Cujas, 2007, 282 p.

Index

Mots-clés

Communisme, Historiographie

Texte

Image

L'ouvrage rassemble les contributions du colloque éponyme du 11 mai 2006 organisé par le Centre de Recherches Hannah Arendt. Le titre vaut en soi problématique. Dans sa contribution introductive, Stéphane Courtois pointe sous l'angle de la chronique historiographique du communisme français, l'enjeu des contributions : répondre à l'apostrophe de Laird Boswell dans la Revue française de science politique1, L'historiographie du communisme français est-elle dans une impasse ? Si Stéphane Courtois répond par la négative, indiquant le renouveau de la revue Communisme, plaidant pour une approche positiviste du phénomène communiste, les contributions réunies peinent finalement à acquiescer totalement au renouveau historiographique. Telles quelles, ces contributions se scindent en deux. Une première catégorie travaille l'objet communiste à partir du local (Sylvain Boulouque – le mouvement communiste dans l'Aube entre les deux guerres  ; Franck Liaigre – le PC et la lutte armé en Bretagne ) ou d'une entrée spécifique ( la municipalité d'Aubervilliers pour Maxime Guichard les fusillés communiste du Mont Valérien pour Brno Chiron). La seconde se fonde sur des interrogations plus amples, contractant des pistes balisées par des travaux antérieurs (Yves Santamaria, Le PC SFIC dans la lutte pour la paix  ; Michel Hastings, Anthropologiser le communisme français ) ou travaillant la question sur le temps présent (Dominique Andolfatto, Autour du XXXIII e congrès de mars 2006  ; Yolande Dilas-Rocherieux, Communisme et néo-communisme à l'heure de la mondialisation ).

Il y a peu à dire des monographies, explorant des cas limites, mais révélateur, de l'inscription politique, sociale et territoriale du PCF, ce que Frédéric Salmon nomme, après 1978, l'archipel communiste . En fait, l'ouvrage importe davantage pour ce qu'il esquisse de l'état des recherches sur le communisme. A cet égard, la contribution de Yolande Dilas-Rocherieux vaut signe. Partant d'une définition essentialiste - et pré-marxiste- du communisme comme lutte contre l'ordre social autour de la figure du pauvre, elle interroge le néo-communisme, brassant sous cette étiquette militants communistes et trotskistes, libertaires, altermondialistes… Filée sous le seul angle de l'utopie, la métaphore permet dans un premier temps l'amalgame et, dans un second temps, autorise à l'analyse de conclure sur le caractère composite, hétérogène du mouvement altermondialiste voué à succomber à ses contradictions internes, plus qu'à composer une nouvelle Internationale, qu'appellent de leurs vœux quelques militants. Où l'on voit là que l'historien et le politiste répugnent à la nouveauté : toujours le mort saisit le vif…, nonobstant les travaux d'Isabelle Sommier, Georges Ubbiali entre autres. En soi, cette interprétation de la mouvance altermondialisme au seul prisme du néo-communisme souligne le tropisme d'une part des collaborateurs de Communisme à étendre leur investigation du phénomène communiste à l'extrême gauche. Les travaux de François Furet sur l'illusion communiste , repris ensuite par Marc Lazar sous l'angle notamment des passions révolutionnaire et totalitaire, autorisent ce déplacement2. En regard de cette pente, la proposition d'une anthropologisation du communisme français par Michel Hastings indique un autre questionnement, auquel Dissidences ne peut qu'acquiescer : «  est-on si sûr que tout est communiste dans le communisme ?  (p 276) ».

Tel quel, l'ouvrage peut-il constituer une réponse à l'apostrophe de Laird Boswell ? La positivité documentaire renouvelle finalement peu l'historiographie. A tout le moins, ce colloque signale une école, une manière d'entendre l'histoire du communisme, son étrangeté comme l'indique Michel Hastings. Dans le sillage du Siècle des communismes , il est sans doute d'autres manière d'entendre cette histoire… de la conceptualiser ?

Notes

1 Laird Boswell, « L'historiographie du communisme français est-elle dans une impasse ? », Revue française de science politique , n° 5/6, octobre / décembre 2005. Retour au texte

2 François Furet, Le passé d'une illusion , Paris, Plon, 1995. Et Marc Lazar, Le communisme, une passion française , Paris, Perrin, 2003. Retour au texte

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

Vincent Chambarlhac, « Stéphane Courtois (dir.), Communisme en France. De la révolution documentaire au renouveau historiographique, Paris, Cujas, 2007, 282 p. », Dissidences [En ligne], Communisme français, publié le 04 septembre 2012 et consulté le 21 novembre 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=453

Auteur

Vincent Chambarlhac

Articles du même auteur