Le choix de l’écriture

Utopie, poésie, insurrection au Chiapas et au Guatemala

  • The Choice of Writing: Utopia, Poetry and Insurrection in Chiapas and Guatemala

Résumés

Espaces de multiples confins, les régions selvatiques du Chiapas (au Mexique) et de l’Ixcán (au Guatemala) feront, à la fin du xxe siècle, l’expérience de la guerra sucia, cette sale guerre menée entre oubli et affrontement contre les populations indigènes, une sale guerre et sa cohorte de massacres, de déplacements, de déchirures toutes bercées par une rhétorique de l’écrasement.
A l’expérience de la guerre, répondra tant bien que mal celle de la résistance, l’expérience de l’insurrection des corps, de la désobéissance des mots. Avec Latitud de la flor y el granizo, essai publié en 1988 par Mario Payeras, le fondateur au Guatemala de l’Ejército Guerrillero de los Pobres, et la production littéraire plus hétérogène (publiée entre 1994 et 2001) du Subcomandante Marcos, porte-parole de l’Ejército Zapatista de Liberación Nacional, nous disposons de deux sources convergentes qui nous disent un choix, une impertinence : le choix de l’écriture. C’est que le pouvoir du dire – inventif, non assigné, débordant –, au demeurant hétérodoxe au sein des productions dogmatiques des guérillas, interviendra comme un biais susceptible de faire face à la corruption de l’autorité.
Matériaux de la lutte dont on pourra aussi éprouver la résistance, utopie et poésie s’offrent ici comme des alternatives exemplaires à la rhétorique antipolitique et au silence qui accompagnent la barbarie. Lieux extraordinaires du langage et de la pensée, hors lieux nocturnes et vagabonds, utopie et poésie constituent le territoire d’ancrages et de litanies, de glissements idéels et de désirs, celui d’une résistance ouverte sur l’horizon éthique, le lieu commun aux Justes
Notre perspective s’attache à démontrer comment, face à la brutalité du réel et contre les discours autoritaires, insurrection poétique et dissidence utopique veillent à refondre véritablement le discours d’autorité en suivant le merveilleux modèle d’une Nature réinventée.

Spaces of shared memories and geographical limits, the forest regions of Chiapas (Mexico) and Ixcán (Guatemala) were, at the end of the 20th century, to undergo the painful experience of guerra sucia, an underground war against native communities; a war fed by forgetting and crushing and settled in rhetoric set in a context of oppression.
With Latitud de la flor y el granizo, the essay published in 1988 by Mario Payeras, founder in Guatemala of the Ejército Guerrillero de los Pobres, and the heterogeneous corpus of the texts (published between 1994 and 2001) constituted by the Ejército Zapatista de Liberación Nacional and its then famous Subcomandante Marcos, we can explore two convergent sources that both expose a choice, an impertinence: the choice to write.
In this article, we make the assumption that the power of writing, by transfiguring the universe of speech, then engaged in the double nonalignment of utopia and poetry, will constitute a dignified way to face the corruption of authority.
Consequently, both utopia and poetry, as forms of dissidence and dissonance, present themselves as exemplary alternatives to the anti-political rhetoric and silence that accompany barbarity. Extraordinary places made up of language and thought, nocturnal and roving spaces, utopia and poetry embody the territory of political anchorage and litany, the land of a resistance opening up to an ethical horizon.
We propose to show how, in the face of real brutality and authoritative discourses, writing spreads itself entirely out through the renovation of utopian dissidence and poetical insurrection, seeking to deeply reestablish a sense of political authority following the marvelous model of a re-invented Nature.

Plan

Texte

Établir un lien entre discours politique et expression poétique ne relève pas en soi d’une démarche critique novatrice : l’art de parler entretient une vieille complicité avec l’art de gouverner. Ce lien est le pouvoir, pouvoir du discours – différents degrés d’autorité des mots peut-être –, discours de pouvoir – différents discours autoritaires alors…

À se pencher ainsi sur le parcours de la rhétorique, l’on se trouverait d’emblée face à l’histoire d’une discipline qui met en scène le spectacle de la parole afin de produire du politique. Pris dans la corrélation de l’instance politique et de l’instance citoyenne, le discours est en effet a priori animé par le désir ou la nécessité d’influencer l’autre, dressant là les préoccupations fondamentales de la circulation de la parole dans un espace public démocratique. Or, sur le territoire géographique qui nous occupe, souvent le discours s’énonce et en s’énonçant, impose un pouvoir. D’autres fois, le pouvoir ne s’embarrasse même pas de mots, exposant dans l’un ou l’autre cas la dimension coercitive du langage ou du silence comme pratique sociale (Bourdieu 2001 : 9) et faisant fi de la légitimité de la parole politique. Espaces aux confins, les territoires frontaliers du Chiapas, au Mexique, et de l’Ixcán, au Guatemala, feront à la fin du xxe siècle l’expérience de la guerra sucia, cette sale guerre menée contre les populations indigènes majoritairement mayas, une sale guerre et sa cohorte de massacres, de déplacements, de multiples déchirures orchestrées par la rhétorique de l’écrasement de discours autoritaires convergents dans leur praxis politique : discours ancrés dans le populisme d’une langue répétant à l’envi une rengaine révolutionnaire devenue arbitraire appareil d’État1, ou bien discours téléguidés depuis une autre Amérique et relayés par les pouvoirs ultra-conservateurs puis contre-insurrectionnels locaux… Que ces discours de pouvoir modèlent l’espace public par une praxis de la saturation – saturation de violence ou de béance – ils généreront, loin, hors des fils de fer barbelés du dire ancillaire, l’émergence et le rayonnement d’une autre parole d’autorité : la parole insurrectionnelle, débordée par l’horizon poétique autant que débordante, capable de secouer la donne politique tout entière et de refonder l’espace littéraire comme en droit du politique, l’endroit d’une résistance, d’une rébellion des mots prompts dès lors, par-delà la fragilité de leur position2, à se réinventer « dans des formes inadmissibles » (Espitallier 2006 : 69).

Avec Latitud de la flor y el granizo de Mario Payeras3 et la production littéraire plus hétérogène (EZLN 1994, 1995, 1997 et 2003) du Subcomandante Marcos4, nous disposons de deux sources convergentes qui nous disent un choix, une impertinence : le choix de l’écriture. C’est que le pouvoir du dire – inventif, non assigné, écumant –, au demeurant hétérodoxe au sein des productions dogmatiques des guérillas, interviendra comme un biais susceptible de faire face à la corruption de l’autorité. Que l’on chemine dès lors dans l’un ou l’autre de ces deux discours d’insurrection, et l’on se retrouvera en face de textes de combattants qui sont aussi des intellectuels, détenteurs l’un et l’autre d’une culture universitaire héritière de la bibliothèque universelle, une culture poreuse au monde sensible qui les entoure, aux multiples perspectives unissant histoire, idéologie, espoir et utopie…

Il s’agira concrètement d’explorer ici, sous la surface thématique des textes, les mondes convoqués, les possibilités formelles et génériques nées de ce choix de l’écriture. Un choix et une écriture non conformes, qui s’élaborent hors du champ dogmatique devenu comme insuffisant à dire, qui se dressent dans la poésie, seul espace du langage, dirait-on, capable d’éprouver dans les mots le désir et la nécessité utopiques. Émanant tous deux de mondes aux confins, ces discours semblent persister dans l’espoir et la croyance d’un autre possible et, comme reflets de sons, de signes, de sens qui tous disent le monde, semblent s’affirmer comme des espaces de conflits, emblématiques « zones de guerre » (Carrillo, Galland 2007 : 6) où agissent en nombre appels, désirs d’altérité, replis intimes et plages épistolaires, fissures, transports liminaires, effractions poétiques… Ces deux discours qui offrent une trame en prise avec ce réel spécifique de la violence d’État, font en réalité l’épreuve du réel, du frottement à l’effroyable rugosité du monde, à l’injustice, à ce qui donnera (un) lieu à l’indignation, à l’inauguration de l’utopie. Alors précisément les textes apparaissent, tendus entre deux états du monde : à la fois « réactifs » et « initiatifs » (Burger 2002 : 40), ils décrivent un mouvement pendulaire qui se nourrit d’une réalité pré-existante à eux et d’une réalité non encore advenue dont ils seraient en quelque sorte à l’origine. Affleurerait ainsi sur ces pages, l’expression d’un savoir négateur du réel toutefois placée dans la positivité de la croyance dans le futur. Ce pont tendu entre amont et aval du texte n’est autre que celui tendu entre Histoire et Utopie, expérience du réel et convocation de l’altérité dans l’écriture. À l’expérience de la guerre, répondra tant bien que mal celle de la résistance, l’expérience de l’insurrection des corps, de la désobéissance des mots, pour que depuis la selva Lacandone ou l’Ixcán, depuis cette géographie de l’incertain, s’invente bien un horizon.

Matériaux de la lutte dont on pourra aussi éprouver la résistance, utopie et poésie se présentent ici comme des alternatives exemplaires à la rhétorique antipolitique et au silence qui accompagnent parfois la barbarie. Lieux extraordinaires du langage et de la pensée, hors lieux nocturnes et vagabonds, utopie et poésie constituent le territoire d’ancrages et de litanies, de glissements idéels et de désirs, celui d’une résistance ouverte sur l’horizon éthique, le lieu commun aux Justes

Notre perspective s’attachera à démontrer comment, face à la brutalité du réel et contre les discours autoritaires, insurrection poétique et dissidence utopique veillent à refondre véritablement le discours d’autorité.

La fleur, la grêle et la refondation utopique

L’essai de Mario Payeras se saisit d’emblée par son titre : Latitud de la flor y el granizo, où se déploient les champs sémantiques de réalités contradictoires (la fleur, la grêle), s’inscrit dans un double registre scientifique et poétique non circonscrit à la seule dimension écologique qu’on lui attribue d’habitude. Le choix d’écriture repose sur un glissement, une amplitude, quelque chose qui sans doute tient à la proposition esthétique du révolutionnaire : retrouver dans une poésie de l’espace, une cosmo-poétique très alimentée par un discours scientifique sur la nature, une représentation de l’historicité. Plus clairement peut-être, mettre en tension cycles des saisons, boucles de migrations des oiseaux, parcours de la sève et de l’eau et cycles historiques des luttes et des reconstructions…

La prose semble chercher une manière d’interroger et de retracer l’histoire récente du Guatemala et cette quête va trouver dans la juxtaposition des registres d’énonciation une issue originale : associant fragments descriptifs très empreints des récits de voyageurs européens du xixe siècle (et de manière emblématique ceux d’Humboldt), prose philosophique conceptuelle et production poétique. Le texte de Payeras est le lieu des chemins qui bifurquent, des rencontres impromptues entre discours scientifique où règne le mot précis et production poétique métaphorique, le lieu d’un équilibre par-delà nature et culture, équilibre qui devient la condition d’une éthique politique, d’une autre autorité.

En dépit de ce titre pourtant, en 1988, les forêts et les montagnes de l’Ixcán, c’est-à-dire l’espace de référence, constituent bien davantage le territoire de la dévastation5. Aussi l’œuvre fait-elle rupture, en proposant une brèche ouverte sur la perception d’un monde vierge uniquement régi par la loi naturelle et donc dépourvu de héros ou d’antihéros. En réalité, la diégèse construite par Payeras s’offre comme contrepoint au temps et à l’espace référentiels, transcende l’ordre ou le désordre des expériences quotidiennes, personnelles et politiques. L’auteur bouleverse le monde sensible immédiat en imposant un univers alternatif, une autre selva échappant à la linéarité du Temps et au cours de l’Histoire, échappant aussi à toute voix, à toute vie humaine, à toute autorité, un univers immémorial où se joue un scénario mythique qui sert de toile de fond à cet inventaire de la nature. Plus précisément, trois chapitres rythment l’essai : le premier tout entier se concentre sur cet espace selvatique vierge, non codifié par l’État, peut-être non avili par le pouvoir, modèle par ailleurs analysé par Jean Franco (Franco 2003 : 161) comme forme de représentation de l’anti-État dans la littérature latino-américaine, espèce de modèle utopique qui réalise l’impossible retour du primitif, un espace vierge singulièrement empli de la vie et du mouvement des cyclones, des ruisseaux et des migrateurs, et qui fait donc l’objet d’une réflexion critique en tant qu’espace initial où est libre de s’élaborer un tout autre projet politique ; le deuxième chapitre est consacré à l’histoire du Guatemala, histoire coloniale notamment entendue comme contradiction historique et sociale née de la Conquête des peuples indigènes et de leur exploitation ; le troisième chapitre, conçu comme un programme politique anticapitaliste, interroge la contemporanéité des conflits depuis l’univers du conflit lui-même et change l’espace du texte en zone de combats où se confrontent, s’allient, se dépassent les savoirs et les registres de langue, la perspective géographique et la sagesse populaire, la tradition lettrée et la tradition orale. Le texte dans sa totalité acquiert à la lumière de cette pluralité, un caractère dialogique, polysémique et hétérogène, la même dimension totalisante qu’il suggère dans son appréhension de l’espace et devient exemplaire de cette « totalité monde » qu’évoquait le poète antillais :

Avoir une poétique de la totalité-monde, c’est lier de manière rémissible le lieu, d’où une poétique ou une littérature est émise, à la totalité-monde et inversement. La littérature ne se produit pas dans une suspension, ce n’est pas une suspension en l’air. Elle provient d’un lieu, il y a un lieu incontournable de l’émission de l’œuvre littéraire, mais aujourd’hui l’œuvre littéraire convient d’autant mieux au lieu, qu’elle établit relation entre ce lieu et la totalité-monde (Glissant 1996 : 34).

L’essai parallèlement construit un univers élastique sans instance d’énonciation identifiable dans la permanence et convoquant tour à tour un passé lointain, le présent de la narration et celui du possible. En parcourant l’Histoire depuis ce territoire oblique de l’écriture, Payeras tente de réconcilier l’homme moderne et la nature depuis la situation si singulière où dialoguent déroute, espoir et utopie.

Influido por el campo primaveral terrestre, Guatemala es un país que florece a lo largo del año y donde a la vez graniza. […] Al acercarse al equinoccio, la inclinación del eje de la Tierra expone nuestra latitud, con mayor intensidad a la radiación solar, y en las ramas en receso estalla la floración con su máxima fuerza. La subversión de la flor se registra al mismo tiempo en los cuatro puntos cardinales: suquinayes, pitos y tamborillos tiñen las estribaciones serranas en las planicies del sur y en las selvas del norte, en irrupción sigilosa que a mediados de mes cubre el horizonte. Arriba, en la región transparente, el proceso culmina con el tiempo fugaz de retamas y duraznos. A través de la energía mecánica del viento y del trabajo físico de las abejas, queda establecida, para el ciclo siguiente, la nueva geografía del polen.
Las mareas de luz, la dirección de los vientos y el régimen de lluvias empujan las selvas en el sentido del sur. La tromba vegetal asciende a la tierras altas a partir de la jungla tropical cerrada (el ámbito de bejucos, camaloteras y chicozapotes a donde no entra la luz), cuya frontera son los bosques nublados. Por viejos corredores del relieve, sin embargo, la flora torrencial entra a las cuencas fluviales, florece en las vertientes húmedas de las sierras (helechos, pinos, musgos, orquídeas) pasa en forma de cipreses y encinos de la altiplanicie y como pinabetes y líquenes se remonta a los páramos (Payeras 1988 : 19)6.

La perspective adoptée par Payeras se dilue dans la mention de la latitude qui déporte le regard, au-delà du seul Guatemala, vers ces territoires que la géographie désigne en rapport à l’équateur. Le regard dès lors est capable d’embrasser d’amples territoires de montagnes, de forêts, de selvas et de plateaux avant d’être capturé par un objet singulier qui soudain attire l’œil et le retient : des abeilles, un arbre. Le narrateur crée un espace qui, même s’il n’est pas sans référence au Guatemala réel, se distingue de lui en s’élaborant de manière autonome. Ce qui apparaît dès lors est un Guatemala textuel, un Guatemala de papier ou d’encrier qui s’incarne dans ce pays qui fleurit à longueur d’année et où pourtant il grêle. La fleur et la grêle réunies dans le même espace textuel projettent un paysage sensible qui crée l’émotion poétique, qui place la prose dans la matière « imaginante » dirait Bachelard, où l’on peut sans contrainte réunir des symboliques en tout point opposées. La dualité de ce Guatemala intemporel implique la juxtaposition de deux systèmes de représentation : celui de la géographie et celui de l’expérience vécue qui ensemble contribuent à une déstabilisation du donné, qui ensemble alimentent l’existence de cet espace dans les limites du texte. Autrement dit, un nouveau code se superpose à la seule vérité physique : le décalage des focalisations, faisant alterner en somme grand angle et zoom, ajoute à l’image précédemment établie une autre image, distincte et complémentaire et qui en modifie le sens et la perception. Payeras fait ainsi fusionner des horizons que l’on ne pourrait embrasser simultanément, et en cela, il reconfigure le réel, refonde l’espace guatémaltèque, dessine une carte imaginaire, une nouvelle géographie à saisir dans des échelles différentes et qui se déploie dans un temps de la longue durée, un temps comme suspendu dans la lenteur de son écoulement. Cette nouvelle géographie qui induit l’idée de perdurabilité, semble figurer l’origine du monde et en constituer à la fois le socle, un socle susceptible de resurgir, à l’image d’un phénomène géologique, d’affleurer à nouveau pour configurer le futur. C’est le paysage in arte bien plus qu’in situ (Collot 2005 : 11), de l’autorité, dont la vertu tient au cycle et à la qualité d’harmonie, c’est la géographie du pollen où éclate la floraison, quand la fleur est subversive et qu’elle « ensuave » (Glissant 1990 : 199)…

Offert au regard, l’espace déployé est bien un espace double, qui contient son propre dépassement : un espace qui reflète l’espace réel vraisemblable et le transforme en un autre espace déréalisé, un espace dialectique où la dimension chthonienne de la fleur, son appartenance au monde des forêts humides, bientôt vient à la rencontre de la grêle, aérienne, née des montagnes et de la brume. En gommant les assignations biologiques réelles, la description crée un monde où sont dépassées les oppositions et hiérarchies, pour gagner par-delà la diversité une unité cosmique, une intégrité, un autre Guatemala fondamentalement politique. S’élabore un modèle narratif qui présente une description totalisante de l’espace national : géographie, climat, histoire, structure sociale, inventaire naturel qui tous composent un espace/temps alternatif, espèce de sauvegarde urgente d’un imaginaire et peut-être d’une mémoire collective rescapée de la fin du cycle révolutionnaire. Car l’époque est à l’effondrement, effondrement local et annoncé de la guérilla, triomphalisme et militarisme à la dérive, effondrement idéologique des pays de l’Est ; aussi pourrait-on lire le texte comme la trace de ce qui fut et ce qui pourrait être, seule trace peut-être à conserver comme modèle parmi les décombres de la guerre.

Le temps est fait de cycles, et l’Histoire elle-même n’échappe pas à cette circularité des phénomènes. Elle en impose aussi. Le deuxième fragment s’expose dans cette veine du retour mortifère de l’Histoire, enroulement, déroulement, l’Histoire est l’histoire des hommes… Conquête, colonie, guerre civile, ces temps configurent le présent de l’humanité…

Il n’est pas surprenant de constater que la guerre en vigueur au Guatemala, dont Payeras est à la fois observateur et acteur, est évoquée dans le même univers lexico-sémantique que la rébellion indigène menée face aux Conquistadors du xvie siècle. L’essai propose une représentation de l’Histoire – essentiellement histoire de conflits, histoire de conquête, histoire coloniale et finalement histoire contemporaine – comme une histoire sans vérité, sans vie, où seul le cycle de la nature assure la permanence du temps. Il fait une proposition de monde, de temporalisation de l’Histoire à partir des relations qui unissent ou désunissent passé pré-hispanique – comme espace/temps d’un équilibre entre l’homme et son milieu naturel – et présent de rupture qui s’étire de la Conquête jusqu’au présent immédiat. La rupture consommée de cet équilibre de l’Âge d’Or, de ce monde enchanté, est bien née de la violence déployée envers l’homme et la nature ; violence de l’homme qui intervient dans le temps de l’Histoire comme prédateur et fait de la modernité le temps de la fragmentation où s’établissent des fossés catégoriques entre l’homme et la nature, où la perspective holiste se défait. L’Histoire qui devient histoire de la déprédation des ressources naturelles et de la condition humaine, semble s’accélérer avec le xxe siècle, frange du temps où s’inscrivent modernisation exponentielle de l’intérêt capitaliste et civilisation technologique de la barbarie. Là, gît aussi l’histoire des peuples indigènes du Guatemala qui apparaissent, sombre épiphanie, dans une présence spectrale. Les mentions de l’extermination et de l’exode des communautés reproduit étrangement la structure cyclique de la relation homme-nature et rappelle dans le même temps le déplacement forcé des espèces : jaguar, pajuil, tepescuintle

Nous l’avons dit, le texte lui même n’est pas exempt de conflits, de tensions : dans ce deuxième chapitre de l’essai, le mode narratif adopte une forme discursive différente en nommant les éléments du réel dans une langue non érudite, une taxinomie populaire, vernaculaire qui s’éloigne du même coup de l’influence des récits de voyages scientifiques mentionnés antérieurement. La voix elle-même s’est modifiée, ajoutant de l’instabilité au monde du texte : ce n’est plus ce « nous » déjà distancié qui marquait tout de même un lien affectif à l’espace national, mais une troisième personne cette fois totalement extérieure au récit qui énoncerait une vérité vécue par d’autres depuis un temps postérieur. La voix qui rend compte est celle d’un voyageur invisible dilué dans l’ambiguïté qui enveloppe l’identité même de l’auteur, protagoniste de la guérilla. La voix qui rend compte est celle de l’absence, une voix dès lors capable de dire l’exode, l’abandon ou bien la mort, une voix qui assume dans l’espace du texte la déroute militaire et politique de la guérilla, qui fait de l’expérience insurrectionnelle une autocritique.

Como la sierpe enroscada que en los glifos de la cuenta larga se muerde la propia cola, la clase social que consumió el ambiente y empobreció la realidad cierra su vuelta mortífera y emprende el aniquilamiento de los productores. […] Las cifras de los caídos no se conoce con exactitud, y es probable que nunca pueda ser establecida. Tras las campañas de exterminio de los indios de Ixcán, despoblada la franja de parcelamientos por la máquina de guerra, los grupos de guerrilla que pasaron por ahí en el curso de los meses vieron cómo el jaguar, el pajuil y el tepescuintle – ahuyentados hasta entonces por la colonización reciente –, habían vuelto a frecuentar la selva solitaria (Payeras 1988 : 59)7.

Enfin, la structure cyclique de l’œuvre apparaît à nouveau clairement dans le dernier chapitre intitulé Guatemala, las líneas de su mano8, un dernier chapitre qui met en scène la figure poétique et omnitemporelle de l’oranger. Avec l’arbre, dont la silhouette et la puissance symbolique peuplent nombre de récits (des chroniques coloniales de Bernal Díaz del Castillo à l’essai historico-littéraire publié en 1955 par le poète et essayiste guatémaltèque Luis Cardoza y Aragón), s’étend le temps du texte. Union des temps en réalité, incarnation du cycle, ancrage dessous l’histoire, dans le temps d’avant l’histoire. Propre à la tradition lettrée et poétique, la figure de cet oranger nuptial permet le déploiement du regard vers l’horizon de l’utopie, floraison et perspective, ramure enchevêtrée où s’incarne, sans doute, le corps même de l’énonciateur.

À l’ampleur de la perspective initiale, perspective planétaire rappelons-le, correspond maintenant une focalisation beaucoup plus précise, comme à portée de main et qui saisit un objet offert au regard : le Guatemala, où exploserait l’oranger et où chanterait enfin le cenzontle…

nosotros, por nuestra carne, nuestra sangre y nuestro cerebro, pertenecemos a la naturaleza, nos encontramos en su seno, y todo nuestro dominio sobre ella consiste en que, a diferencia de los demás seres, somos capaces de conocer sus leyes y de aplicarlas adecuadamente. Únicamente entonces, en el naranjo nupcial el cenzontle cantará la verdad de la vida, y Guatemala – el minúsculo espacio que por ahora nos toca transformar en la Tierra – será un fragmento del mundo sin azacuanes extintos, donde en cambio gobernemos los procesos de la flor y el ciclo del granizo (Payeras 1988 : 70)9.

Espace du dénouement, l’oranger condense dans son humilité et sa dimension poétique le désir du possible en termes éminemment politiques : la vérité qui libre peut s’énoncer, et le pouvoir politique s’exercer au rythme harmonieux de la nature. Le fragment est émaillé de références aux floraisons, aux pluies, à la lumière solaire, autant d’éléments associés aux actes d’autorité contenus dans les verbes « organizar », « conocer », « aplicar », « gobernar »… faisant de leur union les conditions de réalisation de l’utopie. Si l’homme dans sa condition appartient au monde naturel, et si sa condition lui permet de comprendre et de recevoir ce monde, il faut croire qu’un autre projet politique puisse naître de ces qualités. L’usage du futur fait sens comme possibilité de récupération dans un autre temps à venir, de l’équilibre du monde rythmé par le cycle de la fleur et celui de la grêle, un équilibre susceptible de garantir, à nouveau, l’intégration de l’homme à son milieu dans le temps de l’histoire. Ou bien, dans les mots d’Ernst Bloch :

L’homme est ce qui a encore beaucoup devant soi. […] Il se retrouve sans cesse devant, à des frontières nouvelles qui cessent d’en être tandis qu’il les perçoit ; car il les franchit. L’Essentiel (Eigentliches) est en souffrance dans l’homme tout comme dans le monde, cet Essentiel est dans l’attente, dans la crainte de l’échec, dans l’espérance de la réussite. Car ce qui est possible peut aussi bien sombrer dans le Rien qu’accéder à l’Être : le possible, en tant qu’il n’est pas encore pleinement conditionné, n’est pas arrêté (ausgemacht). […] Tout comme le Temps est, d’après Marx, l’espace de l’histoire, le mode du futur du temps est l’espace des possibilités réelles de l’histoire, espace qui ne se déploie qu’à l’horizon de la tendance de tout déroulement dans le monde. Et c’est bien là du théorique-pratique : au front du processus du monde, là où les décisions ont lieu et où se lèvent de nouveaux horizons (Bloch 1976 : 297-298).

Des mots qui sont un pont tendu entre re-fondation utopique et rayonnement d’autorité, des mots qui, disons-le, malgré eux dans nos lignes, constituent ce liant pour des proses aux confins l’une de l’autre, aux confins de temps différents pourtant inscrits dans la continuité de la violence d’État, aux confins d’espaces porteurs de rêve, d’horizons sans cesse refigurés.

La sève, la selva, le rayonnement de l’autorité

Évoquer maintenant la prose de l’EZLN10, c’est évoquer un ensemble diversifié de textes, de matières, de références. C’est évoquer une architecture qui bouscule, un ensemble de signes perpétuellement réorganisés dans de nouvelles combinaisons énonciatives et sémantiques qui imposent une cambrure poétique, qui érigent le poème en conscience utopique et la mémoire du monde en matrice d’autorité. Une architecture tour à tour marquée par la sève, c’est-à-dire, par la vigueur du cycle, par une pensée de l’héritage, mobile, dynamique, palpitante, et par la selva, espace incontournable depuis lequel toujours se repense le monde.

La sève d’abord…

Ahora se mueven los labios del pirata. Una larga letanía, que no es un rezo sino pagana plegaria, empieza a herir y desgarrar la noche. Retazos de esas feroces e irreverentes cuchilladas al olvido, quedan flotando sobre aire y olas…
Sucede que me canso de ser hombre…
Y cuando llegue el día del último viaje
y esté al partir la nave que nunca ha de tornar,
me encontraréis a bordo ligero de equipaje,
casi desnudo, como los hijos de la mar.
¿No ves la herida que tengo
desde el pecho a la garganta?
Trescientas rosas morenas
lleva tu pechera blanca.
La sangre rezuma y huele
alrededor de tu faja.
Pero yo ya no soy yo,
ni mi casa es ya mi casa…
Son rosas o geranios, claveles o palomas,
saludos de victoria y puños retadores.
Son las voces, los brazos, y los pies de fuego,
y la táctica en vilo de quienes hoy te odian
para amarte mañana cuando el alba sea alba
y no chorro de insultos, y no río de fatigas,
y no una puerta falsa para huir de rodillas
El mundo es una slot machine,
Marinero, tú tienes una moneda en el bolsillo.
Drop a star!
Sigue musitando el capitán, sigue navegando…
La luz lejana regresa, hecha remolino, caracol que se vuelve sobre sí mismo. Vuelve a llenar la montaña. De tanta luz se borra todo. Se apaga, verde en verde diluido.
[…]11

Trois lignes d’une prose poétisée annoncent les cinq fragments qui composent le poème, reconstruction inédite, délégation d’autorité12, étrange bricolage d’un tout puisé ailleurs : Pablo Neruda, Antonio Machado, Federico García Lorca, Efraín Huerta et León Felipe mêlent ici et malgré eux leurs mots. Dans une perspective odysséenne définie ailleurs (Galland : 2010), le guérillero rebelle est décrit par une voix poétique qui ne s’embarrasse pas d’une identité stable mais qui plante, en observatrice attentive, le décor nocturne propice à l’advenue du chant. Dans la précarité de l’oraison abandonnée des dieux, le murmure du guérillero pirate se fait prière païenne. Aussi, les saints convoqués appartiennent-ils à un autre panthéon, panthéon d’envergure où l’impression de l’encre soudain est impression de l’autre, concentré de terre promise de la poésie engagée : du Chili d’Antofagasta, du monstrueux et rayonnant México ou de l’Espagne républicaine, les mots de ces glorieux ancêtres de la littérature rendent compte d’une expérience du monde comme ils dessinent des chemins utopiques, entre présence mémorielle et instrument de résistance scarifiant le voile nocturne.

Le vers qui ouvre la composition poétique est aussi le premier du poème « Walking around » de Pablo Neruda. S’il amorce originellement un long texte de quarante-cinq vers dans lequel le poète chilien, entre délire verbal et désir de chaos, effectue un périple sordide dans un monde réifié, il manifeste ici l’incomplétude du sujet fatigué de sa condition : « me canso de ser hombre ». Les points de suspension, absents du poème original, taisent dans la pudeur du non-dit la difficile existence de l’insurgé, mais servent le désir d’un ailleurs emprunté à l’« Autorretrato » d’Antonio Machado. Avec lui, la lassitude initiale du je poétique se voit projetée au-delà (« último viaje », « al partir », « nunca ha de tornar ») : épuisé par l’expérience du monde, le sujet quitte la rive sans déchirement pour ainsi gagner l’espace du repos, s’embarquant pour le néant, dans la nudité de l’être face au temps et à la nature ; le retour à l’élément liquide fermant par ailleurs la boucle d’une vie humaine née de l’eau. Au cœur du « Romance sonámbulo » de Lorca, la strophe fait résonner l’expérience mortifère du réel par des métaphores convoquant les sens. Le guérillero rebelle endossant l’identité évanescente du « mocito » du poète andalou, la métaphore de la plaie béante ensanglantée changée en bouquet vermillon (« trescientas rosas morenas ») se fait autre métaphore pour sa douleur morale. Victimes tous deux de l’injustice des hommes qui défait l’identité, déshumanise et conduit à l’errance, chacun succombe physiquement ou symboliquement à une mort fleurie. On est au cœur du texte, à l’endroit du basculement. La voix de García Lorca, chérie par le guérillero, opère véritablement comme espace du rebond sémantique. Par delà la résignation mélancolique, la violence des images et le rythme du vers octosyllabique du « poème somnambule » conduisent à un nouveau saisissement, irrigation vitale à nouveau, sorte de jaillissement, de retour à la vie métaphorique, de retour à la voix, de retour, aussi, à la terre mexicaine d’Efraín Huerta. Dernière strophe de la « Declaración de odio », ces sept vers affirment la présence d’un horizon latent, en germe dans le réel. Le transport dans le texte d’éléments du réel hautement symboliques (« claveles o palomas »), la représentation de signes de victoire et de résistance (« saludos de victoria y puños retadores ») ainsi que la convocation de temps synonymes de renouveau (« mañana », « el alba ») se font augures d’un autre lendemain. Sur le mode de la liste poétique, se déclinent les conditions du bouleversement du monde, parcours du sens tendu vers l’utopie. L’épreuve du monde a conduit le sujet poétique au désir de transcendance et sa conscience utopique à l’éveil. À partir du postulat d’un monde semblable en sa nature à un jeu de hasard, (presque un coup de dés : « slot machine »), le poète invite enfin son interlocuteur à tenter sa chance hors de la matérialité ordinaire, hors de l’immédiateté du donné ; il l’invite à entreprendre cette ascension emblématique qui conduirait à changer le monde, quand il ne s’agit pas d’autre chose que de « décrocher la lune »13.

Car, comme sève de l’utopie, le chant poétique a fait des miracles : les voix des poètes, ces combattants et rêveurs de mots et de mondes, se sont transformées en source du sens (« la luz lejana », « de tanta luz »). Dernier élément qui parachève le cycle poétique, la montagne chiapanèque n’est plus que frondaison, vert absolu, et l’œil aveuglé de lumière dilate sa perception ; du vert, il revient au vert, dans un mouvement cyclique sinon spiralaire qui inclut cette encre verte avec laquelle écrivait Neruda, en même temps qu’il fait une nouvelle fois retour, métaphoriquement, à la magnifique obsession poétique de Lorca :

Verde que te quiero verde.
Verde viento. Verdes ramas.
El barco sobre la mar14

Par un processus de recomposition poétique, s’expose un panthéon de résistants placés en tension dialogique. Le poème devient ainsi le territoire mémoriel du collage où s’incarne une parole d’autorité, héritage multiple d’une autre totalité-monde, étrange constellation d’une résistance poétique, d’une cambrure, d’une révolution avant tout astronomique, c’est-à-dire liée au cycle de la lune, et qui comme la sève, fait bien retour ici, à la fin de la tresse des emprunts poétiques pour nourrir l’utopie. Si le poème s’approprie ces fragments du monde pour composer une mosaïque miroir du réel rêvé, c’est qu’il se place dans la filiation de cette autorité qui s’énonce parce qu’elle est juste et digne, qu’elle est un juste dire pour un juste monde… Aussi, le mouvement décrit est-il foncièrement politique : l’augmentation du poème, sa dilatation comme espace d’une possible réécriture du monde, marque son attachement, son intimité avec l’autorité même, partageant d’un point de vue graphique et symbolique avec elle, sa qualité et la condition de son advenue. L’étymologie du terme est porteuse de sens : renvoyant à l’auctor (l’acteur, l’agissant) et à l’idée d’« augmentation », ce qu’elle impose, renouvelle et amplifie, fait croître ramures et horizons…

Sève, selva, matrice d’autorité…

El viejo Antonio portaba su vieja chimba y caminaba atento, mirando hacia el suelo, escudriñando los rastros en la tierra y los sonidos de la selva. Según me explicaba, tratábamos de escuchar el ronroneo del faisán en celo, el latido de dientes del censo, el ronco bramido del saraguato o la estruendosa algarabía del mono araña. Si he de ser sincero (y debo serlo porque les hablo a ustedes que son mis hermanos), el que iba de cacería era el viejo Antonio. Yo apenas lo acompañaba con mis primeros y torpes pasos en las montañas del Sureste mexicano, así que para mi limitada experiencia, todos los ruidos eran iguales y no significaban nada. El único sonido que identificaba plenamente era el gruñido de mi panza y entendía muy bien su significado: hambre. “El buen cazador no es el buen tirador, sino el que es buen escuchador”, me dice el viejo Antonio. “Porque oír, todos oyen. Pero escuchar quiere decir descubrir lo que cada sonido significa”. Debo decir que esa vez el día estaba ya casi vencido por la tarde y el limitado horizonte de las lomas cercanas empezaba ya a ser cercenado por los duros mordiscos de la noche. Así que estábamos ya sentados al pie de una ceiba, “el árbol madre”, “la sostenedora del mundo”, según el viejo Antonio. Tal vez por eso, el fuego que encendió el cigarro de doblador y la palabra de viejo Antonio alumbró ayeres muy pasados. El viejo Antonio esperó a que encendiera yo mi pipa y, tomando el humo común la memoria necesaria, me contó:
La historia de la lengua primera de estas tierras
“Cuentan los viejos más viejos de nuestros pueblos, que los primeros dioses, no los más primeros, no los que nacieron el mundo, sino otros que ya no eran tan primeros pero sí algo, eran un poco holgazanes […] porque no tenían trabajo y puro jugar y bailar querían, o sea que sólo estaban vacilando y se la pasaban levantando las naguas de las mujeres con sus vientos y enredando los pies de la gente para que cayeran. […] Y los llamaron a la asamblea a esos dioses que ya no eran tan primeros pero algo sí, y como los hombres y mujeres de maíz ya estaban hallados con su pensamiento de que el que manda, manda obedeciendo, pues los llamaron a estos dioses. […]
Y es que sin la palabra primera, los hombres y mujeres de maíz podían quedar sordos a su historia y ciegos frente a su mañana. Porque la palabra más primera era eso, raíz del pasado y ventana al camino venidero. Comoquiera, la asamblea de los hombres y mujeres de maíz, los verdaderos, no tuvo miedo y empezaron a buscar pensamientos y los hacían palabras y con ellas nacían otros pensamientos y otras palabras. Por eso dicen que ‘las palabras producen palabras’ (diidxa’ribee diidxxa’, en zapoteco). Y así fue como llegaron al acuerdo de poner su memoria bien cuidada, y lengua hicieron su palabra. Pero pensaron que qué tal que olvidan su lengua o alguien les roba esa memoria, y entonces acordaron también grabarla en piedra y guardarla bien donde su pensamiento les dijera. Y unos guardaron en la montaña la piedra con la memoria grabada, y otros a la mar la dieron a cuidar.
Y así se resistieron a los ataques del falso dios del dinero y por eso los indígenas que somos, tenemos montaña o mar cerca nuestro. “Para que no nos falle la memoria, para no perdernos, para tener mañana.” Terminó el viejo Antonio su historia cuando aventaba el séptimo cigarro hecho de doblador al suelo. […]
La lucha por el reconocimiento de los derechos y la cultura indígenas es también la lucha por el respeto a nuestra lengua, por su cuidado, por su engrandecimiento. […] En ella hay palabras que hablan de la historia que somos, sí, pero también hablan del mañana. Y hay que saber escuchar estas palabras, hay que saber empuñar esas palabras para que nazcan otras que hablan de un tiempo que viene todavía. […] Y entonces ahí está lo que temen porque, si aprendemos a escuchar, en nuestra lengua encontraremos que para nosotros los indígenas el mañana significa ser como somos y con todos”15.

À l’occasion d’une scène de chasse dans la selva, espace merveilleux propice à l’affûtage du regard et à la rêverie, se livre un récit initiatique dans les mots du vieil Antonio, espèce de Socrate tropical, chaman maya initiateur d’un Marcos peu enclin aux choses de la cynégétique. Le regard saisit d’abord la silhouette du vieil homme, penchée vers le sol et attentive à la frondaison, lieux concrets et symboliques d’une double temporalité du présent et du futur, lieux de l’empreinte et de la projection. Car la selva, avant tout autre chose, s’expose comme le lieu du déchiffrement modélisant, où règne la trace, le fond archaïque de la matière et de la musique originelles. Dans leur cheminement, les deux compagnons sont tout à l’écoute de ce monde : résonance chthonienne du contours des pas sur la terre, cri sauvage et différemment rythmé des oiseaux et des mammifères. La diversité de la vie animale émerge depuis la profondeur végétale ; autant de voix qui se mêlent au grand dire de l’univers qu’essaient de décoder les deux compagnons. Gardienne du cœur de la terre, lieu magique au sommet duquel se découvre l’horizon, la montagne selvatique est aussi l’espace où naît la force et s’exercent les sens, parcours métaphorique d’une quête sémantique par-delà l’expérience immédiate. Dans ce cheminement toutefois, l’un est expert, l’autre novice : la confession de Marcos, sur le mode de la parrhésie, fait emphase sur son inexpérience de chasseur doublée de maladresse, le plaçant dans la position du disciple. Entremetteur avisé du monde sensible, le vieil Antonio va dispenser une première leçon dédiée à l’augmentation de la perception, élaborant simultanément une sorte de métatexte où le triptyque verbal « escuchar », « descubrir » et « significar » renvoie bien à l’élaboration du dire. Il s’agit d’entrer dans la matrice du sens, de déchiffrer le monde, d’éveiller à un autre régime de connaissance, de faire varier la communication entre le « je » et le monde. En réintroduisant la sensibilité perceptive dans le rapport au réel, le vieil Antonio et Marcos à sa suite ouvrent l’expérience à la dimension mythologique qui semble ne plus entrer en collision avec le réel mais l’inquiéter peut-être, par l’instauration d’une autre relation entre les membres de la communauté humaine. Sous la protection non fortuite de la ceiba et dans le déclin du jour, le savoir du vieil homme s’apprête à s’énoncer, comme contaminé par la sagesse de l’arbre et sa qualité mémorielle. L’entité matricielle désignée comme telle (« el árbol madre », « la sostenedora del mundo ») semble en effet irradier un numen merveilleux incarné par la poésie imaginative du mythe. Partenaire de l’arbre, le feu se prépare rituellement à raviver le souvenir, latent, lointain. Dans le voyage mémoriel vers le temps et l’espace de l’origine, c’est cette fois la langue que le récit transporte, spéculairement, « la lengua primera de estas tierras ».

La parole originelle est celle qui voit et fait voir le passé : elle produit des images dans les mots, impacts visuels d’un parcours historique, part active de la mémoire projetée dans la représentation où prennent corps les figures métaphoriques et paraboliques. On la voit, animée dans les mots, et on l’écoute comme parole, retentissement sonore des origines. Sans elle, les êtres ne peuvent plus franchir le seuil de l’extériorité, et risquent de demeurer « sordos a su historia y ciegos frente a su mañana » : la parole devient indécryptable, miroir opaque, ne produit plus ni de sons ni d’images. L’interchangeabilité des sens dans la structure linguistique manifeste leur équivalence quand « voir » et « écouter » participent d’une même appréhension des choses du monde et de soi. Amputés de cette capacité à faire partie de l’univers, dépossédés de leur capacité d’ex-istence, les êtres demeurent ainsi, sans repères, privés de perception, démunis et maladroits comme le novice entrant dans la selva et qui affirmait : « todos los ruidos eran iguales y no significaban nada ».

De manière spéculaire, cette parole originelle est celle qui s’incarne dans les mots du vieil Antonio, c’est-à-dire dans l’être de mémoire qui dispose du sens de l’origine et le transmet par l’initiation. Au couple sémantique que composent l’écouter et le voir, s’agrège la métaphore végétale de la racine : « raíz del pasado ». Tout comme la ceiba, la parole originelle est multi-directionnelle : ses racines courent dessous la terre, lieu de l’enfouissement de la mémoire, espace de ce qui, tout en étant révolu, se propage et nourrit la vie en germe dans le cycle de regénerescence de la nature. Plongeant dans l’humus, la parole originelle se tisse dans la même fibre que la terre mère, qui est et contient à la fois le savoir communautaire. Cette dimension féminine trouve aussi son complément dans la verticalité d’un axis mundi érigé vers l’avenir. La frondaison de l’arbre faite « ventana al camino venidero » dans l’espace du langage, place ce qui adviendra dans l’inférence des racines, de ce qui est advenu. Plus que lien de causalité, le discours manifeste un lien de nécessité : exister et se souvenir, c’est se souvenir d’un soi de l’origine, revitaliser ce soi collectif par une réminiscence fertilisante du mythe, c’est reconnaître que l’avenir ne peut être vécu indépendamment du passé. La vitalité de l’arbre, son essence et son énergie font que de l’ancrage chthonien, naît une ouverture au monde qui puise au plus profond son irrigation. Métaphore filée du mouvement végétal, la circulation de la parole originelle opère depuis un entre-deux exemplaire : l’homme doué de mémoire est celui qui se situe entre l’inframonde mystérieux des origines et l’espace de la frondaison, du devenir potentiel. De la même chair que la terre, il en est nourri et la nourrit en retour, étant et existant entre hier et demain, avant et après, profondeur et horizon. La quête du verbe originel passe par la production du verbe : « ‘las palabras producen palabras’ (diidxa’ribee diidxxa’, en zapoteco) », dans un mouvement qui enfle le sens par la circulation expansive de la parole où enfin le verbe communautaire devient langue mémorielle (« lengua hicieron su palabra »). La mise entre parenthèses du dire vernaculaire augmente en sus la portée symbolique de l’entreprise d’énonciation en produisant les mots de l’origine, de l’originalité : la spécularité essentielle du langage se redouble dans l’oralité et les sonorités zapotèques.

Le schéma linguistique en réalité est modèle pour un schéma politique en acte, qui fait qu’échanger, mettre en commun, incorporer, modeler la parole par l’autre et avec lui, c’est élaborer les conditions d’un vivre-ensemble, exister, perdurer, co-naître. L’emphase sur la concorde de la parole qui a valeur de langue mémorielle, pose l’ontologie d’une équivocité de l’être, d’un partage par la langue, la reconnaissance d’une universalité de la fonction discursive. Ainsi, contre tout enfermement dans une stricte oralité, le récit mythologique décrit le passage du verbe, de l’air à la pierre : « grabarla en piedra y guardarla bien »16. L’inscription dans la matière lithique devient concrétisation exemplaire d’une « pensée de la trace » (Glissant 1996 : 17), d’une conscience du pou(r)voir de la mémoire.

Dans un nouveau rappel de la diversité de l’espace mémoriel que déclinaient conjointement « tierra » et « ceiba », le vieil Antonio évoque à nouveau la montagne selvatique. Tour à tour refuge et berceau, lieu de l’origine cosmogonique et couche de l’humanité, lien irrévocable entre l’hier et l’aujourd’hui, elle est essentiellement saisie ici dans sa dimension d’antre protectrice : « guardaron en la montaña la piedra con la memoria grabada », maison de l’être, la maison de toujours, témoin immuable dont la qualité se condense dans la pierre, métonymie du massif tout entier mémoriel. Toutefois, la figure matricielle n’apparaît plus seule, c’est la mer qui l’accompagne, (« a la mar la dieron a cuidar »), complément liquide à la solidité de la roche, paradigme de la profondeur et de l’affleurement, envers du ciel où naviguent étoiles et coquillages, dimension selvatique du mouvant. L’espace sacré s’entend dans sa double acception d’enfouissement et d’engloutissement : ancrage terrien d’abord, infranchissable montagne interdite aux destructeurs du com-prendre, de l’être ensemble ; ancrage marin ensuite, endroit du mouvement, du retour perpétuel de l’irrigation. Au dedans de la montagne, correspond le dessous de la mer, symboliquement associés dans leur mission de conservation, et autorisant tous deux voyages et parcours initiatiques en quête de mémoire. Montagne et mer constituent la source et l’onguent du recordar et de l’identité, terre et eau faites territoires de transmission, lieux du ressourcement, selva où tout bouge et pourtant tout demeure. En aval, ils composent aussi les arguments d’une revendication politique de l’autodétermination qui passerait par une réappropriation de ces espaces concrets et symboliques.

La « piedra » se fait recueil poétique, gardienne de l’humanité parlante. Dans le secret de la trace, de la concrétion où est gravée l’identité d’un cheminement historique, opère une dialectique : la pétrification de la trace n’implique pas celle de la parole, de la vie, du mouvement. Dans la confrontation au réel, la mémoire s’impose comme moyen de lutte en même temps qu’elle en est l’objet. Sa seule existence est action, résistance à toute instrumentalisation ou folklorisation, irréductible aussi à une simple revendication identitaire ; le dernier mouvement textuel en témoignera.

Le respect et le droit, revendications politiques insurrectionnelles, émergent dans l’espace de la reconnaissance d’une singularité communautaire (« nuestra lengua »). Pour autant, ce patrimoine ethnolinguistique fonctionne à l’évidence comme tout matériau langagier : « en ella hay palabras que hablan de la historia que somos, sí, pero también hablan del mañana ». Marcos renverse le postulat de communautés indigènes inexorablement ancrées dans un passé nostalgique et rappelle la double essence des mots : témoignage d’un process historique et culturel, véhicule de valeurs ancestrales et orientation vers l’autre, vers l’avenir. Là encore réside l’éthique, là où pétrir les mots fait transpirer les valeurs du vivre ensemble et contribue à faire advenir un autre monde. En valorisant la puissance du langage, le guérillero invite à l’action ; en promouvant la différence linguistique, il dessine un monde pluriculturel, lieu du lien. Mais cette singularité n’équivaut précisément pas à un repli, elle est au contraire intimement associée à une volonté de co-naissance et de co-existence dans la compatibilité d’une fidélité à soi et d’une ouverture sur l’autre. Le récit mémoriel du vieil Antonio, synonyme d’une libération des valeurs éthiques contenues dans la langue des « hommes et femmes véritables », se trouve repris, politisé, po-éthisé par Marcos.

Exemplaire du processus d’une transmission-contagion, ce texte dessine dans les mots, une boucle ouverte et expansive qui se résout dans la rencontre du lecteur en qui se réunissent et s’absorbent les traces. La po-éthique passe ici par une expérience irradiante du mythe. Avec la réminiscence de l’avant, de la mémoire comme trace, comme double élément vivant d’interprétation du présent et d’invitation au vivre-ensemble, l’autre est placé face à une généalogie singulière supposée entrer avec lui en contagion. Si la société civile majoritairement métisse a la mémoire courte, elle trouvera dans le récit un partage de l’expérience culturelle et historique offert par les mots du vieil Antonio, figure emblématique d’une lignée d’ancêtres, mots fécondant l’imaginaire.

Mauvais chasseur sans doute, peu perméable à la chair du monde, Marcos est néanmoins bon braconnier : braconnier des mythes qu’il fournit par le truchement du dialogue d’initiation toujours réitéré, braconnier des textes antiques et des allégories lointaines de l’entrelacement desquels il fait naître quelque chose de neuf, qui n’est plus simple énonciation d’une ontologie mais chant pour une réunion de l’un et de l’autre. Liée à la justice, la po-éthique des langues indigènes s’offre comme fondement combiné de l’être et de l’action. La motivation du discours, double discours des origines et du monde contemporain, se cristallise dans la selva, espace « inter-humain fondateur » (Lévinas 1991 : 172) où le « nous » ne se réduit pas à une exaltation identitaire, mais inclut cet autre toujours désiré. En ce sens, nous dirons que la po-éthique manifeste un passage de l’être ontologique à l’étant dans le monde : de l’être ontologique, demeure la langue, matérialisation d’une mémoire singulière mais communicative ; de l’étant se dégage une ouverture de l’être à la co-existence, le mouvement, le changeant, le désir du lien ou, dans les termes du poète antillais, du « réseau » (Glissant 1990 : 135).

La mémoire convoquée dans les récits ne se limite pas à une mémoire béquille (hupomnesis) mais se fait bien mémoire vive, réactualisée dans une langue qui ensemence les textes et permet une réécriture de l’Histoire sous-tendue par la manifestation d’une autre perception du monde. En juxtaposant, depuis la selva Lacandone, racines et frondaison, la langue pose les termes d’une non contradiction entre la singularité, l’identité de l’être et l’ouverture de chacun sur l’imaginaire de l’autre. Si elle est émise depuis le lieu des origines nécessairement vécu comme un territoire ancestral, la parole po-éthique pourtant est essentiellement cheminement et dissémination, relation qui unit dialectiquement vocation à l’enracinement dans une terre-territoire et vocation au désancrage, à la rencontre pour une complétude de tous. Mémoire de la trace, elle dessine naturellement un transport dans l’espoir de la Relation.

Il y a le paysage de la lutte, l’espace des combats, des répressions, de la fuite. Ixcán ou Chiapas, ici un arbre, une clairière détrempée, ailleurs la boue… des éléments naturels comme défigurés, ensevelis sous les décombres de la violence militaire et sociale. Paysage alors qui résisterait à l’appréhension comme un espace clos, aveugle ou aveuglé, privé de projection, de possibilité d’extension du regard, d’orées, de rives, un paysage de l’absence. Mais il y a le choix de l’écriture. Alors dans Latitud de la flor y el granizo de Mario Payeras, ou dans les Documentos y Comunicados del EZLN signés par le subcomandante Marcos, naît un autre monde sensible, porté par l’élan poétique et la nécessité d’une persistance de l’utopie. Alors donc s’énoncent les traces de la nature ancestrale, cette selva remythifiée où la ceiba, la guacamaya, la fleur de tamborillo, la grêle ou l’oranger fondent, par des percées poétiques, un autre axis mundi, territoire des dieux, des ancêtres valeureux de la littérature, ancrages de l’espérance. Un monde selvatique du dessous qui tisse du lien intime avec l’avant, l’en-dedans, les mythes et la terre elle-même, l’identité, la survivance d’une cosmovision et qui projette à la fois un horizon, au-delà, hors de la temporalité du combat et hors du donné. Cet espace qui se refigure pour que tiennent en lui d’autres étendues, pour que s’enjoigne au loin un autre horizon politique, convoque l’autorité en même temps qu’il la redéfinit.

Avec la prose poétique de Payeras et le discours néo-zapatiste, la selva immémoriale – une selva tout à la fois foyer et point de fuite – se fait initium, refondation référentielle, retour d’un nouveau temps des origines dans l’espace circonstancié, renouveau de l’autorité quand le pouvoir est véritable « pouvoir des commencements ». Nous dirons alors avec Myriam Revault d’Allonnes :

Le temps est la matrice de l’autorité comme l’espace est la matrice du pouvoir. C’est le caractère temporel de l’autorité […] qui en fait une dimension incontournable du lien social : elle assure la continuité des générations, la transmission, la filiation, tout en rendant compte des crises, des discontinuités, des ruptures qui en déchirent le tissu, la trame. […] C’est par ce biais que nous approchons véritablement la force liante de l’autorité. Ainsi entendue, éprouvée dans la durée publique, elle est une dimension fondamentale du vivre ensemble des hommes : le principe même de la production et de la permanence du lien social. […] Car l’autorité, ce n’est pas seulement l’autorité du passé et de la tradition, c’est aussi l’autorité du futur. C’est en effet le projet qui nous autorise à agir, et l’autorité ne s’exerce que lorsqu’elle inscrit l’action dans un devenir (Revault d’Allonnes 2006 : 15).

Le sens de ces textes sans doute réside là : faire de la naissance des mots, une renaissance des valeurs du politique – autorité plutôt que pouvoir – et de cette renaissance la condition d’une reconnaissance. L’autorité stricto sensu entraîne une soumission mais qui ne doit rien « à l’usage de moyens de coercition. Si elle incline la volonté commune, c’est en gagnant son assentiment par un ascendant où n’entre pas la notion de contrainte» (Arendt 1972 : 123). C’est la fondation qui lie le politique à l’espace et l’autorité au temps, lui conférant la dimension de la profondeur. Aussi, ne faudra-t-il pas s’étonner de voir surgir du passé mythico-historique maya, de ces rives de l’Usumacinta, les figures d’autorité de la nature ancestrale devenues lest des innovations politiques mises en œuvre par l’action rebelle. La leçon d’autorité de la selva repose sur la réintégration de l’extériorité, de l’extranéité conjointe du monde et de l’autre.

Principe d’existence, constellation poétique embrassant tous les temps, racine et frondaison aux confins de l’ailleurs du dire et du faire, la selva participe, dans la lutte insurrectionnelle, de la construction d’un champ perceptif plus ample, foncièrement politique. Espace de sève et matrice d’utopie, elle est bel et bien augmentation de l’horizon.

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Notes

1 Et notamment la langue du Partido Revolucionario Institucional (PRI), véritable parti officiel au pouvoir au Mexique de 1929 (alors PNR, Partido Nacional Revolucionario, qui devient en 1938 le PRM, Partido de la Revolucion Mexicana, avant d’adopter en 1946 son appellation définitive) à 2000. Retour au texte

2 Fragilité des mots rebelles dans le contexte de la violence d’État : une fragilité d’ailleurs parfois même revendiquée par leurs auteurs (le Subcomandante Marcos notamment), mais une fragilité concrète tout autant que discursive, qui ne fait pas obstacle à l’autorité entendue comme principe de légitimité politique. Retour au texte

3 Fondée en 1972 par Mario Payeras, l’Ejército Guerrillero de los Pobres (Armée de Guérilla des Pauvres) d’obédience marxiste, infiltre les zones indigènes de l’altiplano guatémaltèque, la région Ixcán Quiché et Huehuetenango à la frontière mexicaine. Philosophe de formation, Mario Payeras (1940-1995) s’engage alors comme combattant et demeure sept ans dans la selva de l’Ixcán depuis laquelle il publie Los días de la selva (1998), le témoignage de son expérience révolutionnaire qui le fera lauréat du Prix Casa de las Américas ; s’ensuivent El mundo como flor y como invento (1987), Latitud de la flor y el granizo (1988), un essai poétique politico-écologique, Los fusiles de octubre (1991), Poemas de la Zona Reina (1997), et, à titre posthume, le roman lyrique et tellurique Tz’utz. Al este de la flora apacible (2010). En 1984, il quitte l’EGP et crée une nouvelle organisation qui renonce aux armes : Octubre Revolucionario. Retour au texte

4 S’il n’est à l’évidence pas le seul dirigeant de l’EZLN, loin s’en faut, le Subcomandante Marcos n’en demeure pas moins le plus médiatique. Philosophe de formation à l’image de Mario Payeras, il contribue très tôt à modifier la stratégie dogmatique de la guérilla pour adopter une posture fondamentalement littéraire et syncrétique. Sans renoncer à l’armature idéologique du mouvement, le discours produit présentera une véritable dimension poétique. C’est en forêt Lacandone et dans les zones proches de la frontière guatémaltèque que l’EZLN s’est formé en novembre 1983, recrutant ses combattants au sein des communautés indiennes quelquefois en contact avec les réfugiés du pays voisin. De part et d’autre de la frontière, il s’agit du même monde indigène, condamné pendant des siècles à la résistance passive, et à quelques décennies d’écart projeté en avant par les déplacements de population, la marginalisation et la désintégration socio-économique… Si l’insurrection chiapanèque s’alimente bien aux déchirures du tissu communautaire et aux répressions ethniques et religieuses, portant ainsi la marque de la Théologie de la libération et des mobilisations de 1992 contre la commémoration de la Conquête, il s’agit bien pourtant d’une révolte sociale (l’accès à la terre, à l’éducation, à la santé), révolte sociale et politique : à partir d’un socle idéologique d’origine marxiste guévariste, l’EZLN exige une réforme en profondeur du système de pouvoir, c’est-à-dire la mise en place d’un véritable processus de démocratisation, lié à l’abandon du néolibéralisme, à la reconnaissance de droits aux communautés indigènes et au-delà à celle d’une société mexicaine pluriethnique et culturelle. Retour au texte

5 Une dévastation ancrée de longue date dans la terre guatémaltèque, comme en atteste le bref rappel d’histoire contemporaine que nous livrons ci-après. Dans les années 1950, la nord-américaine United Fruit Company, rebaptisée el pulpo, emploie au Guatemala 10 000 personnes, contrôle le trafic ferroviaire et commercial, possède des centaines de milliers d’hectares (non exploités à hauteur de 85% et dont presque 200 000 ont été acquis par l’extorsion et l’assassinat). En juin 1954, la réforme agraire décidée deux ans plus tôt par le gouvernement de Jacobo Arbenz qui a engagé l’expropriation d’une partie des terres de la United Fruit, est fauchée en même temps que la démocratie guatémaltèque qui vient de subir le coup d’état de Castillo Armas politiquement soutenu et armé par la CIA. Par un tour de passe-passe politico-économique, le président de la United Fruit précisément devient directeur de la CIA ; le code du travail guatémaltèque est démantelé ; les terres déjà expropriées rendues à la UFCo et le parti communiste mis hors la loi. Depuis le renversement d’Arbenz et singulièrement depuis 1960, les régimes militaires (Ríos Montt, Mejía Victores. etc.) feront se succéder les coups d’état au Guatemala. Pour les adversaires des dictatures, la voie réformiste bloquée, seule la guérilla est susceptible d’infléchir le cours des choses. Naîtront alors de multiples mouvements d’insurrection – le MR-13 en 1960 (mouvement révolutionnaire du 13 novembre 60), l’Ejército Guerrillero de los Pobres (Armée de Guérilla des Pauvres), le Comité de Unión Campesina (Union Paysanne) fondé en 1978 et dont l’un des dirigeants fut Rigoberta Menchú, l’Organización Revolucionaria del Pueblo en Armas (du Peuple en Armes) de Rodrigo Asturias née en 1979, l’Unión Revolucionaria Guatemalteca (Union Révolutionnaire Guatémaltèque), etc. – mouvements qui devront donc désormais faire face à une contre-insurrection (« Escadrons de la mort » sous le gouvernement du colonel Enrique Peralta de 1963 à 1966 par exemple) qui liquide syndicats et militants démocrates et développe la pratique de la guerra sucia jusqu’en 1996, date de la fin de la « guerre civile » au Guatemala. Le bilan est édifiant : plus de 200 000 morts, pour la plupart des civils non engagés dans le conflit, pour la plupart indiens (considérés comme le soutien ou le bras armé de la guérilla), 40 000 disparus, 20 000 déplacés dans les deux seules zones de l’Ixcán et de la Sierra Ixil et regroupés dans des camps, enfin des milliers d’hommes recrutés de force pour les patrouilles d’autodéfense de triste mémoire. Retour au texte

6 « Prisonnier du règne du printemps sur la Terre, le Guatemala est un pays en fleur tout au long de l’année et où, à la fois, il grêle. En approchant de l’équinoxe, l’inclinaison de l’axe terrestre expose avec plus d’intensité notre latitude aux rayons du soleil, et sur les branches presque engourdies, éclate avec panache la floraison. La subversion de la fleur se révèle aux quatre points cardinaux à la fois : les calices des suquinayes, les tubéreuses et les fleurs de tamborillo colorent la traîne du relief, des plaines du Sud jusqu’aux selvas du Nord, dans une irruption feutrée qui en moins d’un mois a recouvert l’horizon. En haut, dans la région transparente, le processus atteint son apogée dans l’éclosion fugace des genêts et des pêchers. L’énergie mécanique du vent et le labeur des abeilles installent déjà, pour le cycle suivant, la nouvelle géographie du pollen. Les marées de lumière, la direction des vents et le régime des pluies poussent les selvas vers le Sud. Les trombes végétales font l’ascension des hautes terres depuis la close jungle tropicale (le milieu des lianes, des mousses aquatiques et des sapotiers où ne peut pénétrer la lumière) aux frondaisons baignées de brume. Empruntant des gorges anciennes cependant, des torrents de flore se déversent dans les plaines fluviales, explosent sur les versants humides des montagnes (fougères, pins, mousses, orchidées), se déposent dans les ciprès et les chênes verts des plateaux d’altitude, et comme les sapins et les lichens, remontent vers la lande ». (Toutes les traductions sont des auteurs de l’article). Retour au texte

7 « Comme le serpent des glyphes du calendrier antique enroulé sur lui-même et se mordant la queue, la classe sociale qui a réduit en cendres l’environnement et asséché le réel, referme son cycle mortifère sur l’anéantissement des producteurs. […] On ne connaît pas avec précision le nombre de ceux qui sont tombés, et il est probable que jamais on ne puisse l’établir. Après les campagnes d’extermination des Indiens de l’Ixcán et l’arasement des terres par la machine de guerre, les guérilleros qui au cours des mois passèrent par là, purent voir que le jaguar, le pénélope pajuil et l’agouti – jusqu’alors mis en fuite par la récente colonisation – avaient finalement fait retour à la selva solitaire ». Retour au texte

8 Titre emprunté à Luis Cardoza y Aragón, México, Fondo de Cultura Económica, 1955. Retour au texte

9 « Nous, avec notre chair, notre sang et notre cerveau, nous appartenons à la nature, nous nous trouvons en son sein, et toute notre emprise sur elle ne consiste qu’à être capables, à la différence des autres êtres, de connaître ses lois et de les appliquer de manière adéquate. Ainsi seulement, perché sur l’oranger nuptial, le cenzontle pourra chanter la vérité de la vie, et le Guatelama – ce minuscule espace que nous avons pour l’heure à transformer sur la Terre – sera alors un fragment du monde où vivent encore les éperviers, et où nous gouvernerons les cycles de la fleur et celui de la grêle ». Retour au texte

10 Le premier janvier 1994, dans une étrange transhumance de la guérilla guatémaltèque, alors que commence le mandat présidentiel d’Ernesto Zedillo au Mexique et qu’entre en vigueur l’Accord de Libre Échange (ALENA ou TLC), l’Ejército Zapatista de Liberación Nacional fait irruption sur la scène chiapanèque en prenant d’assaut plusieurs villes dont San Cristóbal de Las Casas, la capitale historique de l’État. Il suffit de remonter aux années 1980 pour saisir une réalité chiapanèque où s’exacerbe le pourrissement politique mexicain. Le massacre de Golonchán ouvrira alors une période d’intense crispation au Chiapas, crispation socio-économique d’abord mais aussi politique avec l’arrivée massive de centaines de milliers de réfugiés guatémaltèques (probablement plus de 200 000 même si les estimations officielles les évaluaient à 50 000). Par ailleurs, les décisions politiques et économiques prises par la république fédérale trouvent un écho tout à fait singulier au Chiapas : de 1982 à 1988, sous la présidence de Miguel de la Madrid et à la faveur d’un nouvel accord du FMI, des restrictions dans le domaine agricole (fin des subventions des cultures d’exportation notamment) viennent fissurer l’économie rurale et replacer les paysans en position de subordination. À la même période et en réponse aux tensions socio-économiques, le gouverneur du Chiapas, le général Absalón Castellanos Domínguez augmentera fortement l’implantation de l’armée (création de la base militaire de Rancho Nuevo), le contrôle des réfugiés guatémaltèques et de la route frontalière. De 1988 à 1994, cette fois sous la présidence – frauduleusement acquise – de Carlos Salinas de Gortari, l’État mexicain s’ouvre aux investissements étrangers et à une politique néolibérale, se désengageant donc de nombreux secteurs de la production, et gratifiant au passage et à chaque étage du pouvoir, administrateurs, politiciens et caciques. En 1991, il promulgue une nouvelle loi de réforme agraire qui amendera l’article 27 de la Constitution remettant en cause les garanties d’inaliénabilité des ejidos, mesure phare de la révolution mexicaine dont l’importance demeurait considérable au Chiapas. De grandes marches de protestation se succèderont dès 1992 (dont celle, symbolique, de San Cristóbal de Las Casas contre les commémorations du cinq-centenaire de la « Découverte »). Retour au texte

11 Dernier post-scriptum au communiqué du 14 mars 1995, adressé à la presse (EZLN 1995 : 273-274), traduit ci-après. Retour au texte

12 Sur cette question et celle, plus globale, de l’usage des épigraphes, voir Gérard Genette (1966). Retour au texte

13 Motif poétique qui n’est pas sans rappeler d’autres productions du xxe siècle, depuis les « dés » de Mallarmé, jusqu’au « mago » de Huidobro ou la « luna » de Lugones. Retour au texte

14 « Vert et je te veux vert. Retour au texte

15 Extrait du communiqué du 25 février 2001, adressé aux Oaxaqueños, aux premiers jours de « la marcha por la dignidad », in Documentos y comunicados del EZLN (2003). Retour au texte

16 Rappelant les glyphes des cités antiques des Altos et de la selva chiapanèque (Ocosingo, Palenque, Bonampak), celles des rives fluviales (Yaxchilán), ou marines, plus lointaines, de la péninsule yucatèque (Chichen Itza). Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Ana Lorena Carrillo et Nathalie Galland, « Le choix de l’écriture », Textes et contextes [En ligne], 6 | 2011, publié le 01 décembre 2011 et consulté le 19 mars 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/textesetcontextes/index.php?id=320

Auteurs

Ana Lorena Carrillo

Instituto de Ciencias Sociales y Humanidades/SNI, Benemérita Universidad Autónoma de Puebla (BUAP, Mexique)

Nathalie Galland

Département d'études hispaniques/Centre Interlangues EA 4182, Université de Bourgogne, Dijon

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