Les collocations arabes intensives N+Adj dans deux romans Les Filles de Ryad et l’Immeuble Yacoubian

Résumés

Il est nécessaire que l’arabe moderne se dote d’outils d’encodage unilingues et bilingues de plus en plus performants en matière de collocations afin de faciliter l’apprentissage de la langue arabe (notamment comme langue étrangère) ainsi que toute activité d’expression (rédaction, traduction, etc.). D’où la nécessité de multiplier les études approfondies sur les collocations arabes. Dans cet article nous avons tenté d’aborder un type de collocations en contexte : les collocations Nom + Adjectif. Une approche qui s’appuie sur la terminologie de Hausmann (‘base’/’collocatif’) et la fonction intensive ‘Magn’ de Mel’čuk. La démarche est mixte : repérer intuitivement les collocations intensives à la lecture de deux romans contemporains, saoudien Les Filles de Riyad et égyptien l’Immeuble Yacoubian, les confronter ensuite à un corpus électronique littéraire et journalistique. L’étude permet de mettre en lumière quelques caractéristiques lexicales, sémantiques et syntaxiques de la collocation intensive N+Adj. tout en dégageant certaines particularités liées à la langue arabe, notamment sur le plan syntaxique.

It is necessary that modern Arabic acquires more and more competitive unilingual and bilingual tools of encoding concerning the collocations, to facilitate the Arabic language learning (in particular as foreign language) as well as any activity of expression (writing, translation, etc.). Where from the necessity of multiplying studies deepened on modern Arab collocations. In this article we tried to approach a type of collocations in context : the collocations Name + Adjective. An approach which leans on the terminology of Hausmann ('base' / ' collocatif ') and the intensive function ' Magn ' of Mel’čuk. The approach is mixed : first locate intuitively the collocations in the reading of two contemporary novels, Saudi Girls of Riyadh and Egyptian The Yacoubian Building, then confront them with a literary and journalistic electronic corpus. Study allows to give in some lexical, semantic and syntactic characteristics of the intensive collocation N+Adj., while releasing some peculiarities related to the Arabic language, including syntactic level.

Plan

Texte

1. Introduction

Il est certain que les corpus informatisés ont largement facilité l’épanouissement de ce que Béjoint (2001 : 83, 2007: 18) appelle une « lexicographie de l’encodage ». Dans ce contexte, les collocations ont connu un intérêt grandissant dans la langue générale et puis dans la langue de spécialité. Pour la langue française, des progrès ont été faits dans la langue générale, notamment dans une optique d’apprentissage axée sur l’encodage (production, expression) (vs décodage, compréhension) des collocations. Citons le LAF (Mel’čuk & Polguère : 2007) ainsi que le dictionnaire électronique DAFLES (Verlinde, Selva, Binon & al. : 2006). En arabe moderne, les collocations sont restées longtemps soit largement absentes des dictionnaires unilingues et bilingues papiers soit leur repérage s’avérait difficile ou incohérent, et la nécessité de bons outils lexicographiques adaptés notamment aux apprenants de l’arabe langue étrangère se faisait sentir (al-Qâsimî (1979 : 21), Heliel (1994 : 43-49), Hoogland (1993), Hafiz (2004 : 10), Hobeika-Chakroun (2007 : 49-53).1

Si aucun dictionnaire unilingue de collocations de l’arabe moderne, ni bilingue français/arabe arabe/français n’existe encore à ce jour à notre connaissance, et si l’optique de l’encodage n’est pas encore assez prise en compte dans les dictionnaires généraux bilingues arabe/français, toutefois quelques réalisations et projets ont vu le jour ces toutes dernières années : deux dictionnaires bilingues dans le couple arabe/anglais (Hafiz : 2004) et anglais/arabe (Ghazala (2007) ainsi qu’un troisième, bilingue arabe/anglais, à paraître (Abu-Ssaydeh).2 D’autre part, un projet d’une base de données lexicographiques bilingue français-arabe, le Dico-FRAR aurait pour objectif d’aboutir à un dictionnaire informatisé français-arabe d’encodage destiné notamment à l’apprenant francophone de la langue arabe et comprendrait les collocations selon les fonctions lexicales de Mel’čuk (Bouchaddakh : 2010, à paraître). (Cf. les travaux de traitement automatique de l’arabe menés au LDI, Méjri : 2007). Le désir de doter l’arabe moderne d’outils lexicographiques pédagogiques et l’intérêt porté aux collocations arabes va donc grandissant.

Nous avons déjà exposé deux types syntaxiques courants de collocations arabes (V+N et N+Adj.) (2007). Dans le travail présent, nous souhaitons approcher le second type de collocations et précisément les intensives parmi elles. Dans l’optique de l’apprentissage de l’arabe langue étrangère qui nous intéresse particulièrement, nous adoptons la terminologie de Hausmann (1979, 2006 : 4) selon laquelle les collocations sont des affinités qui lient ‘bases’ et ‘collocatifs’ selon une hiérarchie base-collocatif (dite « orientation de la collocation »), « hiérarchie qui fait qu’en formulant le locuteur progresse en partant de la base pour arriver au collocatif et non inversement ». Ce dernier est restreint et imposé par la base « la contrainte lexicale ». Examinons les deux exemples suivants (tous les exemples arabes sont suivis de la traduction adoptée dans les traductions françaises publiées en 2006 (Aswany) et 2007 (Alsanea), sauf quelques rares exceptions signalées en note de bas de page. Par ailleurs, dans cette étude nous ne traiterons pas de la traduction des collocations de l’arabe vers le français, ceci pourrait faire l’objet d’une recherche ultérieure).3

(1) فاستأذنت منصرفة بسرعة بعد أن منحته ابتسامة عريضة ومنحها ابتسامة أعرض ، (...)(Alsanea 2005 : 37)

Elle prit congé rapidement, non sans adresser à Walid un large sourire auquel il répondit par un sourire plus large encore, (…) (Alsanea 2007 : 37)4

(2) ويحادثهم ويعابثهم كـأصدقاء حميمين (...). (Aswany 2002 : 31)5

(…) et il leur parlait et plaisantait avec eux comme avec des amis intimes.

ابتسامة (sourire) et صديق (ami) sont les ‘bases’, que le locuteur choisit librement en fonction de ce qu’il veut exprimer, et عريضة (large) et حميم (intime), les ‘collocatifs’, qu’il sélectionne en fonction des ‘bases’ selon des contraintes bien particulières en vue d’encoder un sens donné, en l’occurrence le concept d’un sourire qui est tout le contraire d’un léger sourire, et d’un type d’amitié plus forte qu’à l’ordinaire.

Nous constatons que les ‘collocatifs’ عريضة et حميم sont intensificateurs selon la fonction lexicale ‘MAGN’ développée par Mel’čuk et al. (DEC : 1984-1999). Ainsi, la fonction Magn (ابتسامة) = عريضة, Magn (صديق) = حميم.

Notre approche des collocations intensives N+Adj. se veut en contexte. Pour répertorier ces collocations, nous avons procédé à un travail manuel, secondé par l’aide indéniable qu’apporte l’avancée de l’informatique en la matière. Notre choix s’est porté sur deux romans arabes contemporains, saoudien et égyptien, à savoir Les filles de Riyâd de Rajâ’ ‘Abdallah al-Sâni‘ (désormais abrégé : Alsanea) (2005) et l’Immeuble Yacoubian de ‘Alâ’ al-’Aswânî (Aswany) (2002). Les collocations intensives N+Adj. que nous avons relevées par intuition à la lecture de ces deux romans, sont ensuite vérifiées ou affinées (pour corroborer une intuition, lever certains doutes ou donner une idée du rang de fréquence 1er, 2ème ou 3ème d’un ‘collocatif’ ou d’une ‘base’) à l’aide d’un corpus électronique proposé par CORPORA ArabiCorpus, constitué d’une vingtaine de romans arabes modernes et contemporains (abrégé désormais par : Arabicorpus novels) ainsi qu’au besoin, d’un corpus de presse varié sur plusieurs années.6 Mais notre démarche ne se veut pas ‘statistique’, ayant comme but de chiffrer le rang des collocations selon des indices, comme l’ont fait, par exemple, François & Manguin (2006). A la lecture des deux romans, nous avons répertorié plusieurs dizaines de collocations intensives N+Adj., dont nous avons relevé ci-après la majeure partie, à savoir 37 collocations. Nous les avons regroupées en trois parties selon des critères d’ordre lexical, sémantique ou syntaxique, tout en observant les particularités de la langue arabe. Vu notre intérêt pour l’enseignement, une première exploitation pédagogique nous tenterait : présenter la liste des ‘bases’ et des ‘collocatifs’ séparément et demander aux apprenants de l’arabe, voire à des locuteurs natifs, d’associer les deux listes.

Liste des bases :

ابتسامة ، صديق ، رقم ، حاجة ، العجب ، حملة ، عدوّ ، حبّ ، برودة ، خسارة ، ثروة ، ثراء ، سعر ، حزن ، حرص ، حرج ، ندم ، فرصة ، إيمان ، رغبة ، فرح ، بكاء ، قبلة ، ترحاب ، ثقافة ، نقد ، فرق ، رفض ، حساب ، التفاصيل ، المناصب ، الحاجة ، الحريّة ، الدقّة ، الجمال ، الاحترام ، الذكاء.

Liste des collocatifs :

عارم (ة) ، حميم ، شعواء ، ذهبيّة ، عريضة ، لاذع ، العجاب ، أمسّ ، طائلة ، فاحش ، فائق(ة)/الفائق ، لدود ، راسخ ، قياسيّ ، حارّ(ة) ، فادحة ، أدقّ/الدقيقة ، باهظ ، منتهى/المتناهية ، قارصة/(قارس) ، ماسّة ، عسير ، واسعة ، أرفع/الرفيعة ، جمّ ، شديد ، شاسع ، قاطع. مطلق/المطلقة ، ((في) غاية) ،

2. Approche lexicale

L’approche de Hausmann du rapport entre ‘base’ et ‘collocatif’, favorisant l’encodage, a un intérêt didactique indéniable pour les apprenants de langue étrangère. D’ailleurs, ce n’est pas étonnant que Bally « métacollocationniste avant la lettre », comme le décrit Hausmann (2006 : 8-10), avait une solide expérience de l’enseignement du français langue étrangère et que cette vue contrastive sur la langue lui a fait découvrir les collocations qu’il appelle ‘séries phraséologiques’ ou ‘groupements usuels’. Sa fameuse « série d’intensité » : gravement malade/grièvement blessé (1951, 1 [1909] : 68-70), met clairement en exergue la ‘contrainte lexicale’. S’il est vrai, qu’un locuteur non natif (niveau intermédiaire) pourrait décoder la collocation ‘grièvement blessé’, il lui est en revanche difficile (s’il ne l’a pas déjà vue et mémorisée) de l’encoder, c’est-à-dire en partant de la base ‘blessé’, sélectionner le collocatif approprié, à savoir, ‘grièvement’. Cette contrainte lexicale concerne le ‘collocatif’, puisque selon Hausmann (2006 : 4)

le locuteur (étranger) progresse en partant de la base pour arriver au collocatif et non inversement (…), (et que) l’étranger même très avancé dans la maîtrise de la langue peut se retrouver dans une véritable situation de détresse d’encodage, où, connaissant la base, il cherche désespérément le collocatif, l’inverse étant improbable : on ne cherche pas désespérément la base ‘célibataire’ à partir du collocatif ‘endurci’.7

Cette « hiérarchie » base-collocatif, ou « orientation de la collocation », distingue la collocation d’un autre type de combinaisons phraséologiques, à savoir l’expression idiomatique. L’expression idiomatique ضرب به عرض الحائط , par exemple, (dont la traduction mot à mot est : « lancer qqch. en plein mur »), et qui signifie globalement « ignorer avec mépris, dédaigner », n’a pas de ‘base’ ni par conséquent de ‘collocatif’. Szende (2010 : 196) formule autrement le même constat : dans une séquence intensive stéréotypée (autrement dit, une collocation intensive), « l’élément porteur de l’intensité est une expansion facultative ; celle-ci peut donc être supprimée : refus catégorique → refus ; accent à couper au couteau → accent », ce qui la distingue des « locutions parfaitement idiomatiques » (« séquences figées »).8 Si l’on revient à la liste des ‘bases’ et des ‘collocatifs’ arabes donnée à la fin de l’introduction, l’apprenant qui veut intensifier les ‘bases’ ثروة tharwa (fortune) ou ثراء tharâ’ (richesse), n’est pas libre du choix du collocatif approprié. Celui-ci est restreint par l’usage qui voudrait que l’apprenant associe طائلة tâ’ila (considérable, colossale) à ثروة tharwa, et فاحش fâhish (énorme, démesurée) à ثراء tharâ’ (*ثراء طائل Tharâ’ tâ’il). La collocation est de ce point de vue une « cooccurrence lexicale restreinte ». D’où, la nécessité d’avoir des outils pédagogiques d’encodage performants.

Dans l’approche lexicale ci-dessous, nous avons voulu examiner le lien lexical entre ‘collocatif’ et ‘base’. Nous avons donc observé le profil combinatoire du ‘collocatif’ (tout en donnant le plus souvent celui de la ‘base’ également). S’associe-t-il à une seule ou bien à de nombreuses ‘bases’ ? Pour sa part, Szende (2010 : 197) observe que

le spectre de certains mots de base est si étroit qu’il fonctionne avec un seul complément d’intensité. Ainsi, ‘comme un trou’ est la seule expansion typique du mot ‘boire’ (…). Certains intensificateurs sont strictement liés à un seul mot de base : ‘de loup’ → ‘faim de loup’ (…). D’autres expansions d’intensification gravitent autour de plusieurs mots de base : ‘en bloc’ → nier, refuser, rejeter.

Dans les deux romans, nous avons observé l’existence de deux types de ‘collocatifs’, ceux dont le paradigme des ‘bases’ avec lesquelles ils ont des affinités est quasiment fermé ou largement réduit, et qui ont été désignés comme ‘limités’, et ceux qui s’associent à un paradigme de ‘bases’ relativement large, et qui ont été désignés comme ‘génériques’.

2.1. Les collocations à collocatifs ‘limités’

Les collocatifs ‘limités’ s’associent donc à un paradigme de bases quasiment fermé ou largement réduit. Nous donnerons, en premier, les exemples dans lesquels le paradigme des bases avec lesquelles les collocatifs ont des affinités est quasiment fermé.9 C’est le cas des exemples (3) et (4). Dans les exemples suivants, le paradigme des bases est largement réduit. Il est alors souvent constitué de bases synonymes ou du moins sémantiquement apparentées, comme dans les exemples de (9) à (13) et comme dans l’exemple donné ci-dessus par Szende, dans lequel ‘en bloc’ intensifie des ‘bases’ plutôt synonymes : nier, refuser et rejeter).

(3) العجب العجاب

كل هذه المهارات العالية لملاك تضاف إلى حكمة أبسخرون ودهائه فيعمل الاثنان معا بتناسق تامّ ويأتيان بالعجب العجاب (...) (Aswany 2002 : 42)

Ces talents de premier ordre de Malak s’ajoutaient à la sagesse et à la débrouillardise d’Abaskharoun. Tous les deux travaillaient en parfaite coordination et l’on peut dire qu’ils faisaient des merveilles. (Aswany 2006 : 42)

Les deux corpus informatiques confirment que le collocatif العُجاب (le plus souvent défini) s’associe quasi exclusivement à la base العجب et vice-versa, العجب à العجاب.

(4) حاجة ماسّة

لم يمض على انقطاعها عنه سوى أيّام وها هي تشعر منذ الآن بحاجة ماسّة
إليه. (Alsanea 2005 : 237)

Quelques jours seulement s’étaient écoulés depuis qu’ils étaient séparés, et déjà elle avait terriblement besoin de lui. (Alsanea 2007 : 225)

Nous avons deux autres occurrences de cette collocation dans (Alsanea 2005 : 41 et 107 (cf. أمسّ الحاجة 4.1.). Le collocatif intensif ماسّة est exclusivement associé à حاجة dans Arabicorpus novels. Il en va de même dans le corpus journalistique, où de plus, pour la base حاجة, il est l’accompagnon privilégié, loin devant le collocatif ملحّة .

(5) رقم قياسيّ

وها هي ذي قمرة تحطّم الرقم القياسي ببلوغها الليلة السابعة بعد زاجها من دون أن يمسّها راشد (...) .

(Alsanea 2005 : 20)

Mais Gamra battait tous les records : ils étaient mariés depuis une semaine et Rachid ne l’avait pas encore touchée (…). (Alsanea 2007 : 21)

Dans Arabicorpus novels, قياسيّ ne forme une collocation qu’avec رقم . Cette exclusivité est quasiment confirmée dans le corpus journalistique (outre زمن قياسيّ de loin moins fréquente).

(6) حبّ جمّ

حتّى أمها التي ليس لها سوى أخ وحيد هو والد ماتي ، الذي تحبّه حبّا جمّا (...).
(Alsanea 2005 : 207)

Même sa mère, qui aimait énormément son seul frère, le père de Mathy, (…). (Alsanea 2007 : 196)

Dans les deux corpus informatiques, le collocatif جمّ s’associe à la base حبّ au 1er rang de fréquence. Cette base est suivie en rang de fréquence par celle de أدب dans Arabicorpus novels et respectivement par celles deصعوبات (جمّة) ,فوائد (جمّة) et أدب (جمّ) dans le corpus journalistique. Si l’on considère la base حبّ, celle-ci s’associe exclusivement à جمّ dans le corpus littéraire. Dans celui de presse, elle arrive au 1er rang de fréquence au même titre qu’un autre collocatif plus générique, à savoir شديد (حبّ شديد).

(7) حملة شعواء

(…) مثال ذلكالحملةالشعواءالتي قادها من سنوات ضد الدكتور الغمراوي (...).
(Aswany 2002 : 116)

Tel fut le cas, lors de la campagne dévastatrice conduite, il y a quelques années (…) contre le docteur El-Ghamraoui (…). (Aswany 2006 : 109)

Cette occurrence figurant chez Aswany est la seule attestée dans Arabicorpus novels. Pour confirmer notre intuition, nous avons donc consulté le corpus de presse qui a montré clairement que les deux bases qui s’associent le plus largement au collocatif شعواء sont حملة (حملة شعواء) au 1er rang de fréquence, suivi de حرب (حرب شعواء) au 2ème rang.

(8) خسارة فادحة

(...) وقد تعمّد الفولي أن تكون خسارته فادحة مدوية (...) (Aswany 2002 : 172)

(…) El-Fawli avait eu à cœur que cela soit une défaite accablante et retentissante (…). (Aswany 2006 : 164)

Dans Arabicorpus novels, le collocatif فادح, s’associe au 1er premier rang de fréquence à deux bases, à savoir خسارة ou son pluriel (خسارة/خسائر فادحة) خسائر et خطأ (خطأ فادح). Par ailleurs, c’est le seul collocatif intensif associé à خسارة devant l’adjectif générique كبيرة (خسارة كبيرة) qui arrive au 2ème rang. Le corpus journalistique confirme ce constat : la base خسارة et surtout son pluriel est le plus fréquemment associée au collocatif فادحة . Le collocatif lui, est associé au 1er rang de fréquence à la base خسارة/خسائر, suivie par خطأ/ أخطاء .

(9) عدوّ لدود

لم يتوقف العجوزان عن التشاحن والعراك وكأنّهما عدوّان لدودان. (Aswany 2002 : 95)

Dès le premier jour, les deux vieillards ne cessèrent de se chamailler et de se quereller comme s’ils étaient les pires ennemis. (Aswany 2006 : 90)

Dans Arabicorpus novels, on trouve le collocatif لدود associé exclusivement à la base عدوّ. Dans le corpus de presse, il est associé au 1er rang de fréquence à la base عدوّ, au 2ème rang à celle de خصم , suivies de loin par les bases منافس et غريم. Un constat s’impose, ces quelques bases sont sinon des synonymes, du moins sémantiquement apparentées.

(10) برودة قارصة

أحسّ فجأة ببرودة في كتفه وصدره ، برودة قارصة كالثلج (...). (Aswany 2002 : 343)

(…) il éprouva soudain une sensation de froid mordant comme la glace (…). (Aswany 2006 : 321)

Le collocatif قارص ou encore celui de قارس s’associent dans les deux corpus électroniques au 1er rang de fréquence à برد et dans une moindre mesure à شتاء , جو et برودة (bases sémantiquement apparentées). Quant à la base برد, elle s’associe dans Arabicorpus novels, aux deux collocatifs قارص et قارس avec la priorité à قارس (برد قارس).

(11) ثروة طائلة

ولقد رأى في حياته الممّتدة رجالاً أثرياء يستسلمون لشهواتهم فيضيّعون ثروات طائلة. (Aswany 2002 : 73)

Au cours de sa longue vie, il avait vu des hommes riches s’abandonner à la luxure et y perdre de grandes fortunes. (Aswany 2006 : 70)

Dans Arabicorpus novels, la base ثروة/ثروات est associée exclusivement à طائلة . ِQuant au collocatif طائل , il entre en collocation au 1er rang avec ثروة/ثروات (cinq occurrences) suivi de مبالغ (مبالغ طائلة) et أرباح (أرباح طائلة) (une occurrence pour chaque : respectivement dans Alsanea 2005 : 254 et Aswany : 52). Mais comme les cinq occurrences de ثروة/ثروات طائلة sont de Aswany, relevés dans ses deux romans l’Immeuble Yacoubian et Chicago, il fallait recourir au corpus journalistique pour vérifier dans quelle mesure l’usage de cette collocation est lié à l’auteur. Réponse : pour la base ثروة/ثروات , طائلة est son collocatif privilégié. Quant au colllocatif طائلة, il s’associe à ثروة/ثروات de manière évidente mais en quatrième position, après مبالغ , أموال et أرباح, des bases sémantiquement apparentées et dont la présence s’explique dans un corpus de presse.

(12) ثراء فاحش

ويؤكد بعضهم أنّه لازال يعمل في المخدّرات حتى الآن ويدلّلون على ذلك بثرائه الفاحش المتزايد الذي لا يتناسب بحال مع حجم مبيعات محلاته وأرباح شركاته (...).
(Aswany 2002 : 72)

(…) et certains assurent qu’il continue à œuvrer dans le secteur des stupéfiants. Ils en donnent pour preuve sa richesse choquante et outrancière (…). (Aswany 2006 : 68)

L’occurrence ثراء فاحش relevée chez Aswany (2002) est la seule rencontrée dans Arabicorpus novels. D’où la nécessité de lancer la recherche également sur le corpus journalistique. Résultat : le collocatif فاحش s’associe au 1er rang de fréquence aussi bien avec la base ثراء (ثراء فاحش) qu’avec celle de غلاء (غلاء فاحش), toutes deux suivies au 2ème rang d’une base, synonyme de ثراء , à savoir غنى (غنى فاحش). Si l’on examine la collocation sous l’angle de la base ثراء , il est incontestable que c’est au collocatif intensif فاحش qu’elle s’associe de manière privilégiée.

(13) سعر باهظ

ولم تتخيّل أخرى يوما وهي تتذوّق ما مع لميس من شيكولاتة فاخرة ، أنّها بهذا السعر الباهظ. (Alsanea 2005 : 54)

Lorsqu’un jour l’une d’elles avait goûté du chocolat surfin avec Lamis, elle n’avait pas un instant imaginé qu’il puisse coûter aussi cher. (Alsanea 2007 : 53)

Dans Arabicorpus novels, la base سعر a exclusivement comme adjectif intensif, le collocatif باهظ , et ce dernier s’associe au 1er rang à la base سعر (سعر باهظ)suivie de ثمن (ثمن باهظ) et تكاليف (تكاليف باهظة) . Le corpus de presse lui, donne la base ثمن (et non son pluriel) au 1er rang, suivie des bases تكاليف et أسعار , plus ou moins synonymes.

2.2. Les collocations à collocatifs ‘génériques’10

Nous venons d’examiner des collocatifs dont l’étendue du paradigme de bases avec lesquels ils ont des affinités est fermé ou limité. D’autres collocatifs comme par exemple l’adjectif intensif شديد qui est un adjectif courant dans la langue, s’associent à un paradigme de bases relativement large et entrent donc dans un grand nombre de collocations. Nous les appelons par opposition aux premiers, collocatifs ‘génériques’.

Le collocatif شديد :

Dans les deux romans, nous avons répertorié cet adjectif dans les combinaisons suivantes :

(14) حزن شديد ، حرص شديد ، حرج شديد ، ندم شديد

كانت سديم تشعر بحزن شديد (...). (Alsanea 2005 : 257)

Sadim était profondément triste.11

على الرغم من ضيقها وحزنها الشديدين إلاّ أنّها كانت مستعدّة لعمل المستحيل لإنجاح هذا الزواج ، (...)

(Alsanea 2005 : 61)

Mais la jeune femme, malgré sa détresse et sa tristesse profondes, était prête à faire n’importe quoi pour faire que ce mariage réussisse (…). (Alsanea 2007 : 60)

كانت لميس تحرص حرصا شديدا على إرضاء أسرة زوجها (...). (Alsanea 2005 : 277)

Lamis veillait (ardemment) à satisfaire la famille de son mari, (…).12 (Alsanea 2007 : 261)

(...) لكنها كانت تشعر بحرج شديد ، (...) (Alsanea 2005 : 48)

Elle se sentait malgré tout très embarassée (…). (Alsanea 2007 : 48)

(…) لم تشعر بحزن في تلك الليلة لفراقها فراس ، وإنمابندم شديدعلى سنين أربع ضيعتها من عمرها (...) (Alsanea 2005 : 285)

Elle n’était pas triste d’avoir quitté Firas, elle était même étreinte par un vif regret d’avoir gâché quatre ans de sa vie à (…). (Alsanea 2007 : 269)

Pour savoir lesquelles de ces combinaisons peuvent être considérées comme collocations, nous avons consulté Arabicorpus novels. Résultat, l’adjectif intensif شديد s’associe en priorité à غضب , زحام etحزن , ensuite à أسف et اهتمام et enfin, dans une moindre mesure, àحرج ، حذر et ذكاء .

Si l’on consulte le corpus journalistique, alors la liste des concordances de ce type de collocatif est bien longue, et par conséquent, le firtlage plus laborieux. La sélection des ‘bonnes’ collocations nécessite au préalable l’élimination des ‘combinaisons libres’ comme (جفاف/ركود/توازن/حملة/ قيود ... شديد/شديدة).

En première position, arrive l’occurrence (للـ)أسف الشديد , suivie de منافسة شديدة et انتقادات شديدة (corpus journalistique oblige, et où la baseانتقادات est prioritairement associée à l’adjectif حادة et en 3ème position à لاذعة) , ensuite de ، (بـ)حذر شديد (بـ)بطء شديد et puis de toute une longue liste de bases dans laquelle nous reconnaissons un certain nombre d’affinités évidentes comme (بـ)اختصار شديد, (بـ)بساطة شديدة , إقبال شديد , حرص شديد , اهتمام شديد , إعجاب شديد , نقص شديد , etc.

Le point commun entre les collocations à collocatif ‘générique’ et celles où le collocatif s’associe à un paradigme de bases fermé ou réduit, c’est la « contrainte lexicale », le collocatif approprié étant dans les deux cas restreint et imposé par la base. Même si certains collocatifs ‘génériques’, sémantiquement apparentés comme شديد et بالغ sont souvent interchangeables avec une primauté de l’un sur l’autre, l’usage impose son choix : dans le corpus journalistique, la base اهتمام par exemple, est associée au 1er rang de fréquence àكبير (اهتمام كبير), au 2ème rang à بالغ (اهتمام بالغ)et au 3ème rang à شديد (اهتمام شديد). La base حرص elle, est associée au 1er rang à شديد (حرص شديد), de loin devant بالغ (حرص بالغ) , au second rang de fréquence. La base حزنqui est associée à شديد (حزن شديد) au 1er rang, est associée àعميق (حزن عميق) au second rang et non àبالغ auquel elle s’associe très rarement. La base زحام , n’admet elle que le collocatif شديد : زحام شديد (*(زحام بالغ. De même pour exprimer un fort regret : للأسف الشديد (*للأسف البالغ/ للأسف الكبير/للأسف العميق).

Concernant le comportement des bases associées à un même collocatif ‘générique’, elles semblent (si l’on prend l’exemple deشديد ) ne pas être synonymes ou sémantiquement apparentées اهتمام ، حزن ، حرص ... (شديد) ,13 comme cela était le cas souvent dans celles associées à un collocatif à paradigme réduit : ثراء ، غنى ، غلاء فاحش / برد ، برودة ، شتاء قارص (أو قارس) .

3. Approche sémantique

L’expression idiomatique est considérée par les sémanticiens comme étant ‘non-compositionnelle’ vu que sa signification globale n’est pas la somme de la signification de ses composantes. Elle est tout autre. On l’a vu dans la section 2., l’expression idiomatique arabe ضرب به عرض الحائط (lancer qqch. en plein mur) signifie ignorer avec mépris ou dédaigner. Qu’en est-il de la collocation ? Pour la décoder, le locuteur non natif identifie la ‘base’ qui conserve son sens habituel et est autonome et essaie ensuite de décrypter la signification du collocatif, ce qui ne lui pose généralement pas beaucoup de difficultés.14 Il peut s’agir de collocatifs qui conservent leurs significations habituelles dans la langue et sont donc très facilement interprétables, commeحميم (intime) dans صديق حميم (un ami intime) ou عريضة (large) dans ابتسامة عريضة (un large sourire). Ou alors de collocatifs moins courants dans la langue et qui apparaissent surtout dans les collocations (voir 2.1.). Citons العجاب (العجب العجاب) ou لدود (عدو لدود), ou encore شعواء (حملة/حرب شعواء) et فادحة (خسارة فادحة). Dans ce deuxième cas, le locuteur non natif finit généralement par deviner le sens intensif des collocatifs même s’ils ne sont pas immédiatement interprétables. On invoque parfois contre la compositionalité des collocations le caractère opaque de certains collocatifs. En effet, quand le collocatif a une valeur métaphorique, celle-ci peut être transparente (comme ‘de loup’ → faim de loup) ou alors opaque en synchronie. C’est le cas, par exemple, du collocatif ‘comme Artaban’ → fier comme Artaban (cf. Méjri : 1994 : 115), ou ‘bleue’ → peur bleue (cf. Tutin, & Grossmann : 2002). Bien qu’opaque, l’information apportée par les noms propres de ‘Artaban’ ou encore de ‘Crésus’ dans ‘riche comme Crésus’ n’est pas nécessaire pour comprendre ce type de structures, comme le fait remarquer Méjri (1994 : 120). On déduit sa fonction intensive grâce au comparatif ‘comme’ qui entre dans de très nombreuses collocations et a comme équivalent en arabe la structure syntaxique أفعلُ من (‘af‘al min) (Misri 1986 : 18).15 De même, sans connaître qui est عرقوب (‘Urqûb), le locuteur non natif peut deviner qu’il s’agit d’un grand menteur dans la collocation arabe أكذب/أخلف من عُرقوب (menteur/manquant à sa promesse plus que ‘Urqûb’). Dans le deuxième exemple de collocatif opaque, à savoir bleue → peur bleue (ou encore ‘de canard’ → ‘froid de canard’), on peut supposer (du fait que la base garde son autonomie et son sens premier et habituel de ‘peur’), que le sens intensif de ‘bleue’, bien qu’opaque en synchronie, n’est pas totalement imprévisible.

Nous n’avons pas trouvé dans les deux romans des collocatifs opaques. Mais nous avons constaté qu’un bon nombre d’entre eux, bien que transparents présentent une caractéristique sémantique commune que nous avons choisi d’illustrer ci-dessous.

3.1. Les collocations à collocatifs ‘au figuré’

En regardant de près les collocations répertoriées dans les deux romans, nous avons constaté qu’une bonne partie des collocatifs intensifs associés aux bases sont des adjectifs pris au sens figuré. C’est le cas par exemple des collocatifs suivants :

ذهبيّة ، راسخ ، عارمة ، حارّ، واسعة ، لاذع ، شاسع ، قاطع ، عسير

(15) فرصة ذهبيّة

عندئذ تحين فرصتهم الذهبيّة لكي يعلنوا له الحقيقة : انه هنا مجرد بوّاب لا أكثر ولا أقلّ (...). (Aswany 2002 : 30)

Cela leur aurait donné une occasion en or de lui dire tout haut son fait : ici, il était un simple concierge, ni plus ni moins (…). (Aswany 2006 : 27)

Ce collocatif ذهبيّة (en or) concernant un métal noble et très précieux exprime au sens figuré une valeur d’évaluation positive intensive. Il forme la collocation bien courante citée ci-dessus, comme l’attestent nos deux corpus électroniques.

(16) إيمان راسخ

كان لديه إيمان راسخ بأن الله سيحقّق أحلامه جميعا (...). (Aswany 2002 : 32)

Il croyait fermement que Dieu allait exaucer tous ses rêves, (…). (Aswany 2006 : 29)

Cette collocation qui fait appel à l’adjectif راسخ (ferme, établi ou planté solidement) pris au sens figuré, et qui possède un synonyme très fréquent, à savoir إيمان عميق comme l’atteste le corpus journalistique, apparaît deux fois chez Aswany (2002 : 32, 161).

(17) رغبة عارمة ، فرح عارم

كانت كثيرا ما تشعر برغبة عارمة في محادثته ولكنها كانت تعدل عن ذلك (...).
(Alsanea 2005 : 196)

Souvent elle éprouvait une forte envie de lui parler, mais elle se ravisait (…). (Alsanea 2007 : 185)

(...) ورغبتها العارمة في المال (...) (Aswany 2002 : 227)

(…) et d’autre part son ardent désir d’avoir de l’argent (…). (Aswany 2006 : 213)

صرختُ بفرح عارم وأنا أسمع صوتك الحبيب يغسل قلبي من كلّ ضيق : فراس حبيبي ما سافرت ؟

(Alsanea 2005 : 261)

J’avais hurlé de joie en entendant le son de ta voix qui lavait mon cœur de toute tristesse : « Firas, mon amour ! Tu n’es pas parti ? » (Alsanea 2007 : 245)

La collocation رغبة عارمةtrès fréquente, comme l’attestent nos deux corpus électroniques, faisant appel à un adjectif attribué au torrent impétueux et pris ci-dessus au sens figuré est attestée deux fois dans l’Immeuble Yacoubian (2002 : 19, 227) et une fois dans Les Filles de Riyad (2005 : 261). On retrouve le collocatif عارم dans l’Immeuble Yacoubian associé également à d’autres bases relevant du champ du désir : شهوة (عارمة) (Aswany 2002 : 13, 73, 109),لذة (عارمة) (Aswany 2002 : 88) , شوق (عارم) (Aswany 2002 : 318) ou à la joie فرح (عارم) dans (Alsanea 2005 : 261). Cette dernière collocation est bien présente dans le corpus de presse, même si elle est beaucoup moins fréquente que رغبة عارمة .

(18) بكاء حارّ ، قبلة حارّة ، ترحاب حارّ (...) فانخرطت (سعاد) في بكاء حارّ وهي تحتضنه. (Aswany 2002 : 274)

(…) et elle éclata en sanglots en le serrant dans ses bras. (Aswany 2006 : 258)

(...) ثم استسلملبكاء متّصل حارّ (...).(Aswany 2002 : 215)

(…) puis il s’abandonna à un flot de larmes brûlantes. (Aswany 2006 : 202)

(...) وانقطع بينما زكي يلتهم شفتي بثينة في قبلة حارّة. (Aswany 2002 : 284)

Tandis que Zaki, dans un brûlant baiser, dévorait les lèvres de Boussaïna. (Aswany 2006 : 266)

الترحاب الحارّ من صاحب العمل ، ذلك الاهتمام البالغ المضطرم ثم الملاطفات والهدايا (...). (Aswany 2002 : 61)

(…) l’accueil chaleureux du patron, son intérêt excessivement enthousiaste puis les cajoleries, les cadeaux (…). (Aswany 2006 : 57)

Le collocatif حارّ qui signifie ‘chaud’ au sens propre s’associe dans les deux romans à trois bases, à savoir بكاء (pleurs), قبلة (baiser) et ترحاب (accueil (cordial)) dont la dernière est attestée dans les corpus électroniques avec d’autres bases apparentées comme ترحيب ou استقبا ل .

(19) ثقافة واسعة

(...) بشخصيته الجذابة وثقافته الواسعة. (Alsanea 2005 : 276)

Grâce à sa personnalité attachante et à sa vaste culture, (…). (Alsanea 2007 : 260)

La collocation ثقافة واسعة attestée dans les deux corpus électroniques fait appel à l’adjectif واسع (spacieux, ample, vaste) utilisé au sens figuré.

(20) نقد لاذع

شاركته سديم ، مولودة برج العذراء صاحبة النقد اللاذع (...).(Alsanea 2005 : 125)

Sadim y prit part, en bonne native de la Vierge, adepte de la critique acerbe, (…).

(Alsanea 2007 : 121)

L’adjectif لاذع (brûlant) qui est utilisé au sens propre pour parler du feu est très couramment associé à la base نقد ou انتقاد /انتقادات (critique), comme l’atteste le corpus journalistique.

Nous pouvons ajouter d’autres collocations répertoriées dans nos deux romans qui font appel à un collocatif pris au sens figuré. C’est le cas, par exemple, de la collocation فرق شاسع (Alsanea 2005 : 197) qui signifie « grande, profonde différence » et où le collocatif شاسع signifie au sens propre « être éloigné, situé à une grande distance »; ou encore de la collocation رفض قاطع (Alsanea 2005 : 275) signifiant « un refus catégorique, définitif » et dans laquelle le collocatif قاطع signifie au sens propre « tranchant », ou enfin de la collocation حساب عسير (Aswany 2002 : 335) où le collocatif عسير signifie au sens propre « difficile » et est utilisé là dans un emploi métaphorique (reproches acerbes).16

4. Approche syntaxique

Contrairement au français où l’adjectif épithète est antéposé et/ou postposé suivant certaines règles (une défaite cinglante, une cinglante défaite, un grand écrivain), en arabe, il est postposé عدو لدود (*(لدود عدو . Néanmoins, nous avons constaté que certains adjectifs intensifs répertoriés dans les deux romans étaient antéposés. Dans notre approche syntaxique, nous nous limiterons donc à cet aspect syntaxique des collocations arabes, à savoir l’antéposition de certains collocatifs. Cette particularité nous l’avons observée dans trois cas que nous allons détailler ci-dessous : les adjectifs au superlatif, les collocatifs exprimant le ‘plus haut degré’ ainsi que l’annexion de qualification الإضافة اللفظيّة .

4.1. Les adjectifs au superlatif

Pour intensifier la base تفاصيل (détails), le collcoatif approprié est دقيقة (précis, infime). On dit donc : تفاصيل دقيقة(détails précis, infimes). Si l’on veut utiliser le superlatif, on aura recours à l’adjectif sous la forme de l’élatif أَفْعَلُ suivi du pluriel et on dira :أدقّ التفاصيل (les détails les plus précis, infimes). Cette forme superlative de la collocation تفاصيل دقيقة (détails précis, infimes) est tellement courante dans la langue qu’on peut la considérer comme une collocation au même titre que la collocation avec l’adjectif postposé, ce que confirme notre corpus journalistique : les occurrences des deux formes sont quasiment identiques (105 pour التفاصيل الدقيقة, 109 pourأدقّ التفاصيل ). Cette fréquence élevée des deux formes de collocations (avec adjectif postposé et adjectif antéposé en ’af‘al) conforte notre intuition selon laquelle ces deux formes sont souvent utilisées indifféremment dans le discours. Dans notre corpus, nous avons répertorié deux autres collocations qui ont le même comportement syntaxique (voir les exemples 22 et 23).

(21) أدق التفاصيل

هذا الرجل لا يتحرّج فى مجلس الرجال من ذكر أدقّ تفاصيل علاقته الخاصّة مع زوجته (...). (Aswany 2002 : 25)

Le même homme ne se retient pas, lorsqu’il est avec ses semblables, de mentionner les détails les plus précis de ses relations intimes avec sa femme (…). (Aswany 2006 : 22)

وكانت للشيخ قدرة على الحديث في أدقّ التفاصيل الجنسية بطريقة جادّة محترمة لا تخدش الحياء (...) (Aswany 2002 : 312)

Le cheikh avait la capacité de parler des détails les plus précis des relations sexuelles avec sérieux et dignité sans offenser la pudeur. (Aswany 2006 : 292)

Dans l’Immeuble Yacoubian, nous avons relevé une autre collocation obéissant au même fonctionnement. Il s’agit de أرفع المناصب (les fonctions les plus élevées) qui comme dans l’exemple précédent (21), est aussi courante que la collocation avec adjectif postposé, en l’occurrence,مناصب رفيعة (les fonctions élevées), comme l’atteste le corpus journalistique.

(22) أرفع المناصب

لكن صحيح أيضًا أنّ الفولي يتمتّع بموهبة سياسيّة حقيقيّة كانت ستمكّنه حتمًا في مجتمع ديمقراطي من تولّي أرفع مناصب الدولة (...). (Aswany 2002 : 115)

(…) il est également vrai qu’El Fawli possède un véritable don politique qui lui aurait à coup sûr permis de parvenir aux fonctions les plus élevées de l’Etat dans une société démocratique (…). (Aswany 2006 : 109)

وقد عرف شخصيات في أرفع المناصب : أطباء ومستشارين وأساتذة جامعة ، مولعين بالخمر أو الحشيش أو النساء أو القمار (...). (Aswany 2002 : 255)

Il connaissait des personnalités de premier plan, des médecins, des magistrats, des professeurs d’université portés sur l’alcool, le haschich, les femmes, ou le jeu. (Aswany 2006 : 240)

Pour que la collocation revête cette forme superlative, il faudrait d’abord que le collocatif admette la forme أَفْعَلُ , ce qui n’est pas le cas, par exemple dans les collocationsفرصة ذهبيّة ou رغبة عارمة (*أذهب , أعرم) ; de même, il faudrait que la base de la collocation soit au pluriel comme المناصب dans أرفع المناصب ou التفاصيل dans أدقّ التفاصيل. Et cela ne suffit pas. Il est nécessaire que l’usage fréquent de cette forme soit attesté : أبهظ الأسعار (les prix les plus élevés) par exemple, n’est pas courante. La collocation qui répondrait à tous ces critères (outre les exemples (21) et (22)) serait ألدّ الأعداء (les pires ennemis) dont la forme non superlative, à savoir عدوّ لدود , figure dans l’Immeuble Yacoubian. Là encore, notre intuition nous dit que les deux collocations sont souvent utilisées quasiment indifféremment (ex. هو عدوّه اللدود ، هو ألدّ أعدائه).17 Une autre collocation avec adjectif antéposé en أفعل(’af‘al) se trouve dans le même cas, sauf que la base de la collocation n’est pas au pluriel et reste définie (fait grammatical particulier ?). Il s’agit de أمسّ الحاجة dont on rencontre trois occurrences dans les Filles de Riyad (Alsanea 2005 : 113, 199 et 219) qui sont a priori interchangeables avec la forme non superlative حاجة ماسّة (voir exemple (4) en 2.1.).18

(23) أمسّ الحاجة

ومات أبوها وهي في أمس الحاجة إليه. (Alsanea 2005 : 219)

(…) et son père mourait au moment où elle avait le plus besoin de lui. (Alsanea 2007 : 208)

4.2. Les collocatifs exprimant le ‘plus haut degré’

Nous avons constaté aussi que certains collocatifs exprimant ‘le plus haut degré’ sont antéposés, comme pour le participe passif de la IVème forme verbale مطلق (absolu, total) dans مطلق الحريّة que l’on rencontre également avec l’adjectif postposé dans la collocationحريّة مطلقة (liberté absolue).

(24) مطلق الحريّة

القرار في يدك ولك مطلق الحريّة في الاختيار. (Alsanea 2005 : 292)

La décision est entre tes mains, tu es totalement libre de choisir. (Alsanea 2007 : 275)

(...) ثم تتخذ قرارك بمطلق الحريّة. (Aswany 2002 : 294)

(…) puis tu prendras ta décision en toute liberté. (Aswany 2006 : 275)

Il en va de même pour le participe passif de la VIIIe forme verbale منتهى (extrême) qui s’associe à un grand nombre de bases telles que الدقّة (la précision) dans (بـ)منتهى الدقّة (avec une extrême précision) (Aswany 2002 : 41, 2006 : 38). Mais contrairement à l’exemple (24) (بمطلق الحريّة/بحريّة مطلقة), le collocatif منتهى ne se retrouve pas tel quel en postposition (* بدقّة منتهاة ). Lorsqu’il est postposé, l’adjectif revêt la forme d’un participe actif de la VIème forme دقّة متناهية (une précision extrême). Par ailleurs, le collocatif postposé مطلق (absolu) ne peut pas toujours se retrouver également antéposé. On dit (بمطلق الحريّة/بحريّة مطلقة ) mais مطلقة(absolue) dans غالبيّة مطلقة (majorité absolue) ne peut être antéposé (* مطلق الغالبيّة).

Enfin, nous avons rencontré un autre collocatif exprimant le ‘plus haut degré’, bien qu’il ne fonctionne pas comme un adjectif. C’est le cas de غاية(extrême) suivi de (في) antéposé à de nombreuses bases comme : وكان (...) في غاية الذكاء (il était (…) d’une grande intelligence) (Aswany 2002 : 114, 2006 : 108) que l’on rencontre également avec une variante syntaxique غاية في ــ comme غاية في الرقّة والأدب وخفّة الدم (extrêmement doux, polis et sympathiques) (Alsanea 2005 : 242/230), et dont l’occurrence la plus fréquente selon le corpus de presse est في غاية الأهمّية (extrêmement important).

4.3. L’annexion de qualification الإضافة اللفظيّة

Dans Grammaire de l’arabe d’aujourd’hui, Kouloughli (1994 : 113) explique l’idâfa lafziyya comme suit :

Si l’on dit ولد جميل (un bel enfant) : litt. « enfant beau », on exprime que l’adjectif « beau » s’applique à l’enfant dans sa globalité. Si l’on veut restreindre la portée de l’adjectif et dire, par exemple, que la beauté se limite au visage de l’enfant, on dispose en arabe de deux constructions (…). La seconde construction, très usitée, consiste à doter l’adjectif d’un complément de nom qui spécifie son domaine d’application. On dira donc ولد جميل الوجه (un enfant beau de visage) : litt. « enfant beau-[de]-le-visage. On pourra de même dire بنت جميلة العينين (une fille aux beaux yeux) : litt. « fille belle-[des]-deux-yeux ». Dans cette construction, le complément de nom est toujours à l’état déterminé (…).

D’un autre côté, Wright (1996 [1890] ii. : 221, 198), tout comme al-Ghalâyînî (1996 [1912] 3 : 207) opposent الإضافة المعنويّة (al-’idâfa l-ma‘nawiyya), commeمفتاح الدار (la clé de la maison), à الإضافة اللفظيّة (al-’idâfa l-lafziyya).19 Dans celle-ci, l’annexion est de qualification et non de dépendance (termes français que l’on retrouve chez Blachère & Gaudefroy-Demombynes (1975 : 324). Le premier terme de cette annexion peut être un adjectif ou un participe qui qualifie le mot qui suit. Wright donne pour الإضافة اللفظيّة entre autres les exemples suivants شديدُ الحرارةِ (very warm) , طاهرُ القلبِ (pure of heart), حسنُ الوجهِ (handsome of face).

Observant maintenant l’exemple suivant répertorié dans les romans :

(25) فائقة الجمال

فهو يرى مثلاً أنّ المرأة الفائقة الجمال تكون عادة عاشقة باردة في الفراش (...).
(Aswany 2002 : 14)

(…) il estime par exemple que les femmes supérieurement belles sont généralement au lit des amantes froides (…). (Aswany 2006 : 11)

L’occurrence فائقة الجمال (extrêmement belle) dont le premier termeفائق (suprême, extrême, considérable) peut aussi se produire en adjectif postposé (جمال فائق) est donc une ‘annexion de qualification’ إضافة لفظيّة. Bien que les deux combinaisonsجمال فائق et فائق الجمال ne remplissent pas la même fonction syntaxique (la première = N+Adj., ce qui n’est pas le cas de la seconde), il nous a paru important de signaler cette forme syntaxique de إضافة لفظيّة fréquente dans le discours et dans laquelle on retrouve souvent le collocatif intensif par ailleurs postposé : si l’on fait une recherche électronique sous فائق , on rencontrera aussi bien (بـ)سرعة فائقة que فائقـ(ة) السرعة. C’est le cas aussi, par exemple, de بالغ (بالغ(ة) الأهميّة)/(أهميّة بالغة) et de شديد (شديد(ة) الذكاء)/(ذكاء شديد).

Nous avons repéré une autre occurrence avec فائق , qui semble être toujours antéposée avec la base احترام , précisément dans les formules de correspondance.

(26) فائق الاحترام

وتفضلوا بقبول فائق الاحترام (Aswany 2002 : 112)

(…) Veuillez accepter l’expression de notre haute considération.20

Santillán Grimm (2009 : 29-30) qui a fait une classification syntaxique des collocations de l’arabe moderne (« MSA =Modern standard arabic »), inclut le cas de l’idâfa lafziyya qu’elle appelle (« false idâfa » : adj. + DEF noun) et note que la structure grammaticale des « collocations (…) of the so-called false ’idâfa (…) is similar to that of real ’idâfas », mais que leur valeur sémantique est à comparer « to that of noun + adjective collocations (…) » et ajoute qu’elles sont en effet parfois interchangeables comme ناصع البياض « nâsi‘ al-bayâd » et بياضـ(ه) ناصع « bayâdu(hu) nâsi‘». Il serait donc intéressant de vérifier sur des corpus plus élargis quand cette interchangeabilité est possible et quand cela ne l’est pas. Dans l’exemple شديد الملاحظة qu’elle donne d’une ’idâfa lafziyya (2009 : 35), شديد peut-il être exprimé en adjectif épithète, voire adjectif attribut : ملاحظة شديدة ,ملاحظتـ(ـه) شديدة ? Apparemment non.

5. Conclusion

Afin d’approcher au mieux la collocation intensive N+Adj en arabe, nous l’avons analysée en contexte. Le choix de deux romans contemporains ainsi que l’aide apportée par les corpus informatiques nous ont permis de rendre compte de l’usage réel et actuel de ce type de collocations.

Excepté quelques collocations commeرغبة عارمة et ابتسامة عريضة, les collocations répertoriées n’étaient pas les mêmes dans les deux romans. Des traits lexicaux, sémantiques et syntaxiques se sont dégagés, sans qu’ils soient tous applicables sur l’ensemble répertorié. D’un point de vue lexical, nous avons pu constater deux types de collocations. Celui où les collocatifs intensifs s’associent à un paradigme de bases quasiment fermé, comme dans les collocations حاجة ماسّة العجب العجاب ، ou largement réduit comme dans les collocations ثراء/غلاء/غنى فاحش ، برودة/برد/شتاء قارص(ة)/قارس ، عدوّ/خصم/غريم/منافس لدود ، ثروة/مبالغ/أرباح طائلة , et dans lequel les bases sont souvent synonymes ou sémantiquement apparentées. Et puis celui où le collocatif intensif est ‘générique’ commeشديد s’associant à de nombreuses bases, sans que ces ensembles ne perdent pour autant leur statut de ‘collocations’. Nous avons constaté que même si le collocatifشديد peut être parfois interchangeable avec بالغ (اهتمام بالغ/شديد), il ne l’est pas systématiquement. Il est très marginalement associé à la base حزن par exemple. Là, c’est plutôt le collocatif intensif عميق qui tient le 2ème rang de fréquence après شديد (حزن شديد/عميق). Et avec أسف , شديد est le collocatif exclusif (*للأسف البالغ). Il serait utile de dresser la liste de ces collocatifs ‘génériques’ à partir de corpus élargis.

D’un point de vue sémantique, nous avons constaté que de nombreux collocatifs intensifs sont pris au sens figuré comme dans les collocations رغبة عارمة ، نقد لاذع ، قبلة حارّة ، إيمان راسخ ، ثقافة واسعة … . Dans tous nos exemples, la motivation était transparente. Un corpus plus élargi permettrait de vérifier la présence de collocatifs ‘opaques’ en synchronie, comme ceux que l’on trouve en français : (peur) ‘bleue’ ou (froid) ‘de canard’, ou ceux présents dans les structures d’intensité (أفعلُ من (’af ‘al min) en arabe).21 C’est au niveau syntaxique, que nous avons retrouvé quelques particularités concernant l’arabe. Bien que l’adjectif en arabe soit postposé, le collocatif intensif est apparu antéposé dans certains cas. D’abord, lorsqu’il s’agit d’un superlatif en أفعل (’af‘al) suivi d’une base au pluriel et que l’emploi de la collocation est aussi courant que celui où l’adjectif est postposé à cette même base : أدقّ التفاصيل/ التفاصيل الدقيقة ، أرفع المناصب/ المناصب الرفيعة. Dans ce cadre, une collocation s’est avérée avoir une syntaxe de superlatif un peu particulière, à savoir (في) أمسّ الحاجة . Ensuite, lorsque l’adjectif فائق est associé à احترام dans les formules de correspondance : (فائق الاحترام). Aussi, avons-nous constaté que le collocatif postposé dans certaines collocations pouvait se retrouver dans le discours comme premier terme d’une annexion de qualification (الإضافة اللفظيّة) comme(جمال) فائق et فائق (الجمال) . Par ailleurs, certains collocatifs sous forme de participe passif exprimant le ‘très haut degré’ comme مطلق sont apparus dans le discours antéposés (مطلق الحريّة). Sur le plan syntaxique, d’autres études seraient utiles : la recherche, par exemple, de collocatifs sous forme de locution, autrement dit constitués de plus d’un mot comme en français (un brouillard) à couper au couteau(voir note 21) et dont nous n’avons rencontré aucune occurrence. Ou encore l’examen de la fonction épithète/attribut du collocatif :

ثراء فاحش ، الثراء/ ثراؤه فاحش (*، حبّه جمّ ) العجب عجاب.

Notre analyse n’aurait pas été la même sans l’aide des corpus électroniques qui, en quelques secondes, nous apportaient des éléments de réponse. Comme le note à juste titre Hausmann (2006 : 11), « il ne paraît pas exagéré d’affirmer que l’avant et l’après (des corpus numérisés) s’opposent autant que l’œil nu s’oppose aux jumelles, télescope et microscope réunis ». Mais d’un autre côté, notre travail n’aurait pas eu lieu sans l’examen manuel des deux romans arabes. Nous ne disposons pas à l’heure actuelle d’un dictionnaire d’encodage qui rassemble toutes les collocations et qui rend compte de l’usage actuel et réel de l’arabe moderne. L’identification des critères permettant de distinguer ces combinaisons omniprésentes dans le discours, outre que par l’intuition du « déjà vu » (du locuteur natif) nous paraît donc une mission délicate.22 De toutes les façons, l’intervention complémentaire du lexicographe pour interpréter une nomenclature rassemblée par un corpus électronique restera toujours indispensable comme le fait remarquer Béjoint (2007 : 20).

Plus que jamais le ‘discours’ peut être au service de la ‘langue’. Espérons que tous les efforts seront déployés afin de doter la langue arabe d’outils d’encodage plus performants.

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Notes

1 Pour ce qui est des dictionnaires unilingues, Al-Qâsimî, depuis 1979, voulait établir un dictionnaire arabe moderne d’expressions idiomatiques et de collocations à destination principalement de l’apprenant de l’arabe langue étrangère (1979 : 21). Son projet de dictionnaire s‘est vu d’une certaine façon réaliser dans le dictionnaire unilingue arabe Al-Mu‘jam al-’Asâsî (1989) qui intègre ‘en gras’ toutes les combinaisons phraséologiques qu’il aurait réunies durant des années. Même si ce travail reste à enrichir, il a le mérite d’attirer l’attention sur la nécessité de prendre en compte la phraséologie dans la description lexicographique et de tenter de la présenter de façon didactique. Retour au texte

2 Nous nous félicitons de l’intérêt grandissant porté aux dictionnaires de collocations. L’examen des deux dictionnaires concernant le couple anglais/arabe nécessite une étude à part. Ils contiennent a priori une somme très appréciable de collocations bien qu’il ne s’agisse pas que de collocations au sens strict du terme mais d’un ensemble phraséologique plus vaste. Nous apprécions chez Ghazala (2007), un grand et très riche volume, le fait de classer les combinaisons selon leurs structures syntaxiques (ex. N+adj. sous le chiffre 2. de chaque entrée). Mais son dictionnaire de l’anglais vers l’arabe ne permet pas de distinguer les collocations des combinaisons libres en arabe (trop nombreuses), sauf pour un arabophone. De même, il permet difficilement l’encodage des collocations arabes du fait qu’il est dans le sens anglais-arabe. Dans le dictionnaire de Hafez (2004) qui est de l’arabe vers l’anglais, on repère plus facilement les collocations courantes en arabe, mais le dictionnaire gagnerait à notre avis à être davantage axé sur une optique de l’encodage, à l’instar par exemple de ce que proposent Verlinde, Selva & Binon (2006 : 84-98) qui s’inspirent des fonctions lexicales de Mel’čuk. Retour au texte

3 Pour des études contrastives concernant le couple de langues arabe/anglais, voir entre autres Ghazala (1993), Heliel (1994, 1995), Bahumaid (2006). Retour au texte

4 Un élément de la collocation, en l’occurrence le ‘collocatif’ عريضة (large) est repris plus loin أعرض (plus large encore). Appliqué à l’expression idiomatique, ce procédé la défige. Pour le défigement des expressions idiomatiques en arabe égyptien, voir Hobeika-Chakroun (2010 : 67-77). Par ailleurs, on retrouve trois occurrences de la collocation (large sourire) chez Aswany (2002 : 41, 211, 229). Retour au texte

5 On repère une autre occurrence chez Aswany (2002 : 124) sous la forme de صداقة حميمة . La traduction qui suit est de nous. Retour au texte

6 Consulter la liste des romans et des journaux sur http://arabicorpus.byu.edu/search.php, puis searching arabiCorpus/Detailes searching instructions/ Choose Corpus. Retour au texte

7 Il ajoute que « c’est une détresse dont même le locuteur natif n’est pas toujours à l’abri, notamment quand il s’agit de variation synonymique du ‘collocatif’. Tout le monde n’a pas toujours à sa disposition les différentes façons d’exprimer la réussite ou l’échec à l’examen : réussir, réussir à, être reçu à, être admis à/échouer à, être refusé à, recalé à, collé à, blackboulé à, manquer, rater, etc. » (2006 : 4) Retour au texte

8 Szende analyse surtout des collocatifs polylexicaux métaphoriques. Si la collocation selon l’approche de Hausmann et de Mel'čuk est binaire, bipartite, cela ne veut pas dire qu’elle est constitué de deux mots. Le collocatif peut être polylexical, c’est-à-dire peut être une locution. Polguère & Mel’čuk (2006 : 70) donnent des exemples comme « à couper au couteau » (brouillard), « comme une teigne » (méchant), (voir aussi les exemples donnés section 3). Retour au texte

9 Pour ce qui est du paradigme ‘fermé’ des bases des collocations N+Adj., cf. Fakhour (1998 : 66). Retour au texte

10 Cf. le terme ‘générique’ utilisé par Fakhour (1998 : 67) pour les adjectifs et par Ouerhani (2006 : 67) pour les ‘verbes supports’ arabes. Retour au texte

11 La traduction est de nous. Retour au texte

12 Nous avons rajouté ‘ardemment’ à la traduction pour rendre mieux l’intensité de l’arabe. Retour au texte

13 Il serait intéressant d’affiner l’analyse de toutes les ‘bases’ qui s’associent à un collocatif ‘générique’, pour vérifier si ces bases n’ont pas de traits sémantiques communs. Cf. Tutin & al. (2006). Retour au texte

14 La base est ‘autonome’, ce qui veut dire ici que par rapport à elle, le collocatif est une expansion facultative et peut donc être supprimé (comme l’a noté Szende (2010 : 196) dans la section 2.: refus catégorique → refus). Retour au texte

15 Misri note que le « modèle adjectif + comme + (article) + nom exprime l’intensité en français et sert à produire des figements comme ‘amer comme chicotin’, ‘connu comme le loup blanc’ ; (…) en arabe classique, le modèle d’intensité correspondant ne comporte pas le comparatif d’égalité comme, mais le comparatif de supériorité correspondant à ‘plus … que’ en français. Ainsi (…) أمرّ من العلقم (plus amer que le chicotin) et أشهر من نار على علم (plus connu qu’un feu sur une montagne). » Retour au texte

16 لن يغفر لها أبدًا لو أنها فعلت ذلك سيكون حسابها معه عسيرا ، (si elle avait fait cela, elle le lui paierait cher/ou elle aurait affaire à lui. Il ne le lui pardonnerait jamais). Retour au texte

17 Dans ce cas, le collocatif postposé لدود tout comme la base عدوّ de la collocation عدوّ لدود sont au singulier et non au pluriel comme pour تفاصيل دقيقة . Retour au texte

18 Pour respecter les règles de grammaire, on aurait dû dire au superlatif : أمسّ الحاجات ou أمسّ حاجة et non أمسّ الحاجة. Dans le corpus journalistique, nous avons retrouvé quelques occurrences de أمسّ حاجة sans article et qui respecte la règle grammaticale du superlatif, mais les occurrences sont très rares (moins d’une dizaine) pour plus de 500 de la forme أمسّ الحاجة. Retour au texte

19 Al-Ghalâyînî (1996 [1912] 3 : 208 ) définit l’idâfa lafziyya comme suit : Retour au texte

20 La traduction est de nous. Retour au texte

21 Chez Santillán Grimm (2009 : 28), on peut relever le collocatif عن ظهر قلب , qui figure dans la collocation verbale حفظ عن ظهر قلب (apprendre par cœur) qui est une ‘locution’ (‘an zahri qalb), idiomatique et opaque. (Comme on l’a vu dans la note 8, la collocation est bipartite : base/collocatif mais le collocatif peut être polylexical). Retour au texte

22 Bahumaid (2006 : 135) va dans la même sens en notant « Deciding whether or not a collocation is ‘acceptable’ constitutes part of the intuitive knowledge of the native speakers of the language ». Retour au texte

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Référence électronique

Faten Hobeika-Chakroun, « Les collocations arabes intensives N+Adj dans deux romans Les Filles de Ryad et l’Immeuble Yacoubian », Textes et contextes [En ligne], 5 | 2010, publié le 21 novembre 2017 et consulté le 18 avril 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/textesetcontextes/index.php?id=231

Auteur

Faten Hobeika-Chakroun

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