Le roman The Falls de Ian Rankin2 s’ouvre sur les paragraphes suivants :
“You think I killed her. Don’t you?”[…]
“You on anything, David?” Rebus asked.
The young man looked up. His eyes were bloodshot, dark-rimmed. A lean, angular face, bristles on the unshaved chin. His name was David Costello. Not Dave or Davy: David, he’d made that clear. Names, labels, classification: all very important. The media had varied its descriptions of him. He was “the boyfriend”, “the tragic boyfriend”, “the missing student’s boyfriend”. He was “David Costello, 22” or “fellow student David Costello, in his early twenties”. He “shared a flat with Ms Balfour”, or was “a frequent visitor” to the “disappearance riddle flat.”
Le jeune homme doit répondre aux questions de l’inspecteur Rebus. En choisissant d’ouvrir son roman par ces paragraphes, Rankin montre à quel point le nom, l’appellation, les détours périphrastiques, les étiquettes et modes de classifications sont importants pour chacun et en particulier pour le lecteur aussitôt plongé dans l’énigme sans avoir à raconter les événements. Les media jouent un grand rôle dans la détermination de chacun. Les commentaires, les titres des journaux sont même évoqués avec une ambiance inquiétante et énigmatique. Par leur entremise, le roman policier désigne son genre et programme la suite de l’enquête.
Tout le roman va en effet consister à trouver quel rôle convient à David Costello, quelle est son identité propre en tant que personnage, à lui accoler autre chose que « the fellow student » ou « the frequent visitor » et à justifier le titre du roman qui joue des effets de cascade et de chutes. Finalement, c’est bien le langage qui se taille ici la part belle et montre comment la fiction s’attache à la dénomination des personnages liée à leur étiquette sociale et à leur image.
Je propose de voir le lien entre image et langage dans un autre domaine, celui de la peinture, où ce lien se joue dans le rapport entre image et titre.
Les titres : lien entre image et texte ou « flêchage » visuel
Si le langage est largement métaphorique et intègre ainsi sa dimension d’image, l’image, elle, quoiqu’en ait pensé Napoléon, ne fournit souvent qu’un savoir incomplet et limité, ouvert à toutes les interprétations, et une glose peut s’avérer nécessaire, voire tout changer lorsque image et texte s’entreglosent. La question du titre d’un tableau est une question passionnante que j’illustrerai avec le diptyque de Broodthaers de 1924 – Gedicht/Poem/Poème-Change-Exchange-Wechsel – qui met en regard un tableau de change et les variations d’une disposition poétique sur les lettres MB, initiales du nom du plasticien3. Les titres disent bien le change, la transposition d’une valeur dans l’autre permettant l’échange, l’action. Le dispositif montre le change des signes (le champ du cygne, en hommage à Duchamp), le passage entre chiffres, lettres, monnaies, correspondant à la conversion visuel/langage, change, poésie/« peinture », le visuel ici n’étant pas rendu par un système de signes, mais « signifié » par l’évidence visuelle. Car ce que le spectateur a d’abord à faire avant de lire, c’est de regarder les deux panneaux et de rester en arrêt. Deux cadres noirs, simples baguettes, et deux planches de signes se font face.
L’ouvrage de Bernard Bosredon peut fournir un bon point de départ car il repose sur une analyse linguistique des titres de tableaux.4 Sa lecture minutieuse permet de repérer les modes de manifestation et les choix grammaticaux de ce type de discours. Il s’agit alors d’une description linguistique du phénomène auquel on voudra bien se reporter car il ne s’agit pas ici de refaire ce travail fort utile. Au-delà, d’autres questions se posent comme celles de la fonction du titre, de son lien avec l’image et avec le texte, de son histoire aussi.
Pour Régis Durand, « le texte fonctionne souvent comme un programme plus ou moins explicite de l’image : programme narratif ou iconographique, ou programme interprétatif. »5 Deux positions extrêmes peuvent alors être discernées : au-delà de l’image, un excès discursif produit un récit supplémentaire. En-deçà de l’image, un manque de langage déclenche des associations libres et sans rênes. Car une image peut fonctionner comme une machine à déclencher des associations, c’est-à-dire des formes discursives. Le titre peut servir de régulateur à tout cela.
La notion de texte (voire de titre) générant un programme (qu’il soit interprétatif, narratif ou iconographique ; qu’il soit explicite ou implicite) et ses conséquences – d’une part, jouant le rôle de camisole de force virtuelle pour l’image, d’autre part provoquant « follement » l’ouverture de l’image – reflète avec assez de vérité la relation entre texte et image. Cette notion fournit une manière de penser et d’analyser les deux termes, tout en lançant un avertissement contre les dérives possibles. La structure texte/image, si c’en est une (mais pourquoi pas ?), nous permet de penser la structure des procédés qu’elle engendre. Elle est au cœur de la pensée conceptuelle des artistes et des théoriciens contemporains.
Quelques exemples pour commencer
En ce qui concerne l’en-deçà de l’image – le cas où le langage faisant défaut à l’image, il devient nécessaire de le lui adjoindre –, la question du rapport entre titre et image fournit un bon exemple de dispositif qui peut articuler le texte et l’image.
Martin Heusser emprunte à Mark Twain un exemple savoureux d’intitulation folle d’un tableau lorsque, justement, le titre vient à manquer :
If we do not know what a given image depicts, the image has no way of conveying the knowledge to us. There is thus more than mere facetiousness in mark Twain’s saucy remarks about the oil painting representing “Stonewall”, Jackson’s last interview with General Lee, which he saw in the Washington Artillery building in New Orleans:
“Both men are on horseback. Jackson has just ridden up, and is accosting Lee. The picture is very valuable, on account of the portraits, which are authentic. But, like many another historical picture, it means nothing without its label. And one label will fit it as well as another:—
First interview between Lee and Jackson.
Last interview between Lee and Jackson.
Jackson Introducing Himself to Lee.
Jackson Accepting Lee’s Invitation to Dinner.
Jackson Declining Lee’s Invitation to Dinner—with Thanks.
Jackson Apologizing for a Heavy Defeat.
Jackson Reporting a Great Victory.
Jackson Asking Lee for a Match.
It tells one story, and a sufficient one; for it says quite plainly and satisfactorily, “Here are Lee and Jackson together.” The artist would have made it tell that this is Lee and Jackson’s last interview if he could have done it. But he coul n’t, (sic) for there was n’t (sic) any way to do it. A good legible label is usually worth, for information, a tone of significant attitude and expression in a historical picture.”6
La multiplicité des titres qui se superposent en déclinant les verbes reliant les deux noms des protagonistes Jackson et Lee, conduit évidemment à l’hilarité. Elle montre également à quel point le sens erre lorsque seule l’image s’offre dépouillée des béquilles du langage. Evidemment, c’est le cas pour une image offrant une représentation référentielle et figurative. Il en va tout autrement de l’art dit abstrait.
Le rapport texte/image est donc exacerbé dans la correspondance entre ce qui peut sembler parfois superflu (le titre) mais est souvent nécessaire. L’art « contemporain » l’a d’abord fait disparaître après l’avoir assimilé à de simples chiffres d’inventaires, pour mieux le faire revenir sous une autre forme, celle de commentaires, comme dans l’art conceptuel, et dans certaines installations, à la manière de véritables excroissances verbales greffées sur du visuel. C’est le cas, par exemple, du petit livret de 14 pages en deux langues distribué à chaque visiteur de Phora, l’exposition d’Ann Hamilton à la Maison Rouge en 20057. Le début du texte suffit à montrer le lien entre texte et image, entre silence et son, dans ce qui est une installation visuelle mais fait le lien avec le corps, la parole, la métaphore. Le titre ici est commenté, déployé, dans le livret qui sert de guide à ce qui autrement resterait opaque puisque l’installation consistait en une série d’écrans sur lesquels une bouche proférait des sons :
Pour son exposition à la Maison Rouge, Ann Hamilton crée phora-titre qui renvoie par son étymologie grecque pherein, « porter », à la métaphore, et par sa sonorité, au latin fora, forum, la place où se tenaient les assemblées du peuple.
L’installation se déploie dans tout l’espace de la fondation en un parcours : du silence au son, du son à la voix, de la voix à la parole, de la parole à la prise de parole. Comment les mots deviennent-ils des choses, comment la parole se transforme-t-elle en acte ? 8
En excès, le langage en vient presque à se substituer à l’œuvre. Plus classiquement, on retrouve ce même phénomène pour l’une des œuvres d’Andy Warhol datée de 1967, exposée au Musée de Lyon et intitulée Ten-Foot Flowers. À ce titre descriptif et dénominatif s’ajoute avec un effet de redondance ou de miroir, la production d’une énoncé teinté d’une sorte de (fausse?) modestie : « Ceci ce sont de (très grandes) fleurs (peintes) et non pas…une pipe ? » Exemple de peinture auto-référentielle qui boucle sur elle-même, titre déictique s’il en est et indice de mégalomanie narcissique. Autre exemple dans le même musée lyonnais : Nature morte avec un paon, un singe et un perroquet, XVIIIème siècle français. Outre les signes ainsi répertoriés, dûment constatés qui semblent aussi clore le tableau sur lui-même, comme dans le cas de l’œuvre de Warhol, ici, le titre et le tableau font allusion à autre chose et d’abord au genre de la peinture, « une nature morte » avec sujets « animés ». Ils « valent pour », ont une dimension qui relève de ce que l’on nomme le « discours interpictural » énoncé par le peintre, « discours » articulé sur sa formation et sa culture. Le paon, symbole de la vanité, tout comme le singe et le perroquet, symboles de la peinture servile et imitative, semblent constituer le tableau en avertissement contre les dangers de la vanité et des facilités qui guettent le peintre trop vite rassasié des compliments de cour. Mais, on le voit ici aussi, même si le spectateur possède les référents symboliques visuels, il doit en passer par le discours pour les transmettre, énoncer le discours sur le tableau. La re-connaissance des symboles, de l’allégorie, le mouvement de la pensée, transite des yeux à une formulation. Il en va de même pour la pratique citationnelle de la peinture comme l’on en trouve des exemples chez Vermeer, Vélasquez, Manet, Picasso, Matisse etc. Le langage doit énoncer l’interpicturalité qui, sinon reste de l’ordre du va-et-vient de l’œil entre le tableau représentant et le(s) tableau(x) représenté(s).
Le rapport complexe entre le titre et l’œuvre, peut aussi être de nature jubilatoire. C’est le cas de L’objet dard de Duchamp. Pour Catherine Perret :
L’intensité de l’objet-dard est tout entière dans son titre, dans ce rendez-vous qui ne comble pas l’attente d’objet mais la relance seulement, la re-projette. […] Ce titre est non seulement ce par quoi arrive l’objet-dard, mais ce en quoi il consiste, à tel point qu’il puisse suffire à le faire exister. Ce titre définit l’opération artistique par la mise en place d’un moteur temporel, dont la première fonction est simplement d’engager la répétition. […] Le titre Duchampien prend [l’objet] pour hypothèse [et par le titre les objets sont] littéralement, supposés, mis sous condition ; […] ces objets sont d’emblée des noms, des mots, des représentations. Ils font partie du flux représentatif, ils sont sonores, concrets, matière à empreinte, à titre, […] des trouvailles verbales. […] La logique que [Duchamp] met en œuvre est une logique de l’événement et non une logique du concept. […] Ce qui arrive est une « image », ce qu’avec Walter Benjamin on aimerait nommer « image-pensée » (Denkbild) pour le démarquer à la fois du signe trop vite récupérable par le symbolique, et de cette apparition spéculaire reproductible qu’est la simple image. 9
Opération, événement, performance, « installation » (voir Le musée qui n'existe pas de Buren au Centre Georges Pompidou durant l’été 2002), objet auquel on décerne le statut « dard », le statut d’« image-pensée ». Il y a là de quoi susciter et interloquer le discours de l’image, le discours sur l’image qui est de l’ordre de la nécessité, de l’événement surtout. Témoins les effets d’humour et d’ironie suscités par certaines créations.
Fonctions du titre
Leo H. Hoek décline quelques-unes des fonctions des titres qui s’avèrent fort utiles. On distingue ainsi la fonction d’identification, de désignation, la construction de la référence, la présentation d’une directive10. Bernard Vouilloux, travaillant sur la différence entre allusion et référence, aborde aussi la question des titres, qui, au sein d’une communauté, ont été « fondés à [désigner contractuellement tel individu ou telle œuvre], inaugurés en quelque sorte »11. Le nom propre de Rembrandt n’est même plus nécessaire à l’identification de La leçon d’anatomie tant le titre en est venu à se suffire à lui-même. Il en irait de même pour Bouvard et Pécuchet. Vouilloux remarque aussi que le titre est susceptible d’être traduit à la différence du nom propre. Il a cependant les mêmes caractéristiques que le nom, linguistiquement parlant ; il occupe les mêmes positions syntaxiques comme celles de sujet ou du complément.
Par ailleurs, le titre a une valeur descriptive, il appartient à un code et le délimite. Il est souvent figé dans la référence, à la différence de l’allusion, plus fluide. Il donne les noms et titres des personnages représentés longtemps après leur disparition et poursuit, le cas échéant, la fonction dévotionnelle du tableau : il en va ainsi de la Vierge au chanoine Van der Paele de Van Eyck. Selon Butor, « le titre est là pour combler une lacune »12. Il contribue à représenter le sujet, à « l’identifier à coup sûr ». Il en veut pour exemple le nom du chien représenté par Oudry dont le nom est inscrit en lettres capitales sur le tableau : « BLANCHE »13. Le titre complète l’œuvre vue dans ce qui manque ou pourrait échapper à l’œil. L’exemple célèbre en serait La chute d’Icare de Brueghel où le titre attire l’œil vers les deux jambes minuscules qui s’agitent à la surface de l’eau. Le regard ainsi orienté, le trajet de l’œil est conditionné : « c’est comme s’il y avait une grosse flèche, une poigne, nous contraignant d’aller par-là », remarque Butor14. Ces flèches, Jean-Michel Basquiat à la suite d’autres, les inclut graphiquement dans son travail. Louis Marin en repérait la manifestation dans les œuvres classiques et la nommait deixis, se fondant sur le modèle linguistique. Le titre peut encore jouer le rôle d’amorce, voire d’accroche, renvoyant le lecteur de nouveau au tableau ou à l’image qu’il aurait pu autrement négliger. C’est le cas de certaines photographies de Weegee, qui présentent un ensemble sombre de scènes nocturnes que l’on pourrait aisément assimiler les unes aux autres. Le titre forcera le regard à les différencier en repérant les détails singuliers. Une toute petite huile de Nicolas de Staël, composée de rayures bleues et blanches, s’organise aussitôt en scène de bord de mer avec sable et tentes de plage une fois le titre lu : Le lavandou.
Bien entendu, l’image peut jouer avec le titre, tenter de lui échapper, ruser. C’est le cas du leurre de La trahison des images de Magritte, plus souvent connu sous le titre Ceci n’est pas une pipe. Faux titre qui, depuis l’intérieur du tableau, introduit un jeu de dupes ainsi qu’un jeu de mots un peu salace, comme l’avait relevé Jean Clair15. A l’époque du cubisme, les grandes déformations entre le sujet et le tableau rendent nécessaires le titre « pour conserver la trace de cet itinéraire » selon Butor16. C’est la dissemblance qui est proposée ; le titre devient le témoin de l’apparence perdue. On le constate avec Nu descendant un escalier de Duchamp ou la « mariée » de 1912. Chez Picabia, la distance est grande entre le titre et le tableau, comme dans Voilà la femme de 1915 qui présente une série de tubulures et de cadres évoquant un chevalet, mais aussi une guillotine ou une machine industrielle. La femme en question est celle d’autres tableaux canoniques ; elle revient sous forme de fantôme hanter l’œuvre de Picabia. Quant à la légende du tableau de Magritte La clé des songes (1930) – qui représente un verre, un œuf, une chaussure, etc. sous lesquels sont inscrits « l’orage », « l’acacia », « la lune » – elle désigne bien ce qui manque à ces figures pour « être » un verre véritable, un œuf-objet du monde17. Il s’agit de représentations et de codes arbitraires qui ne coïncident pas avec l’usage, d’où les disjonctions, effets d’humour et la référence à la science des rêves de Freud. Une image peut signifier tout autre chose.
Il y aurait même de mauvais titres qui empêcheraient de voir :
Mais si le titre a une si grande importance pour l’organisation plastique elle-même, il est évident que des œuvres d’art peuvent être dangereusement mal nommées. Le peintre qui n’y prend garde peut par un titre inconsidéré nous empêcher de voir son tableau qu’il faudra alors débarrasser de cette pièce étrangère, ce qui ne sera possible qu’en la remplaçant par une autre mieux adaptée. Et de même que l’on peut restaurer les images en décapant les couches de peinture ou vernis parasites, on peut aussi restaurer les titres, éliminant des malentendus accumulés souvent depuis des siècles18.
Titres trop « pleins » dont les mots prennent le tableau, l’image ou la photographie, sous leur emprise, dans leurs filets ; titres trop neutres aussi parfois, par peur des mots peut-être ou volonté de laisser l’œuvre seule face à son spectateur, qui virent au tautologique, thématique ou générique : « paysage », « nature morte », « portrait », « marine ». Francis Bacon avait l’art de renvoyer le titre comme une évidence un peu violente à la face du spectateur – ainsi avec Painting (1946), Head III (1946), Two Figures (1947), voire encore Triptych (ceux de 1974 et 1976 entre autres) – contraignant ce dernier à décrire et à dater la toile pour qu’il y ait communication possible de l’œuvre vue et partage de référence entre tiers. Le refuge dans le formalisme le plus strict désignera l’œuvre comme « composition » ou « deux points verts » chez Kandinsky, ou par un simple chiffre (« 41 »), voire une lettre ou encore « sans-titre ». Il y a là quasi-négation de la fonction d’identification au point qu’il est impossible d’en parler dans une conversation puisqu’ils semblent ne désigner au mieux qu’une abstraction, au pire qu’une image absente d’elle-même. Mais il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un titre et d’une œuvre qui, elle, présente sa picturalité.
Le lieu où le titre est inscrit compte également. Klee les inscrit à la main sur le cadre, voire sur le tableau lui-même, grâce à des graphismes déliés. Ils deviennent de véritables légendes. Dans le tableau Escargot, femme, fleur, étoile (1934) où l’on entend « et toile », Mirò inscrit le titre sur la toile elle-même. Le titre, le poème, la légende à même l’espace représentant du tableau en font de superbes exemples de texte/image. Les Préraphaélites sauront utiliser le cadre sur lequel ils inscriront, par exemple, le sonnet qui a donné naissance à sa représentation picturale. C’est le cas du Triptyque d’Arthur Hughes illustrant le sonnet de Keats The Eve of St Agnes. Dans sa thèse, Fanny Gillet étudie comment la disposition même du sonnet a été modifiée pour « cadrer » avec le tableau, comment les feuilles de lierre du cadre viennent désigner à l’œil les lignes des vers eux-mêmes19.
C’est ainsi que le titre peut effectuer une mutation lorsqu’il quitte l’extérieur du tableau et gravite vers l’intérieur jusqu’à venir parfois le nier. La littérature se souviendra de ces jeux lorsqu’elle égrènera les faux titres, les allusions à des œuvres fictives et les vrais titres en référence à de fausses œuvres fictives, comme dans The Picture of Dorian Gray où aucune ekphrasis ne paraît à proprement parler, sinon sous la forme minimale de la couleur de la bouche, des yeux et des cheveux. Mais que la littérature soit faussaire ne nous étonne pas.
Ainsi elle doit souvent inventer un tableau lorsque, pour des raisons techniques, le narrateur a besoin d’un type d’œuvre qui n’existe pas dans notre monde. À l’instar de la statue de l’antique Beauté, ce dernier peut créer le tableau à partir d’éléments empruntés à telle ou telle œuvre existante : le sujet, la couleur, la lumière, la composition, le genre, le clair-obscur, etc. Nous sommes alors en présence de ce que Heffernan nomme « notional ekphrasis », c’est-à-dire l’ekphrasis d’une œuvre imaginaire complète avec un titre nécessaire. C’est le cas par exemple du portrait de Harry Peake dans Martha Peake de Patrick McGrath qui offre une image idéale du sujet en en faisant une allégorie du peuple américain. Alors que Harry était affligé d’une bosse, le héros/narrateur réalise que la bosse ne figure pas sur ce portrait-là :
The man in the picture had a straight back […]. This was how Harry saw himself; […] Still there was a certain poetic beauty in the depiction of that tragic figure in his self-made identity with the American people. So much of what they suffered, he suffered. So much of what they aspired to, he aspired to. And his broad back, with its ridge of peaks down the spine was it not the very image, in miniature, of the land itself? Was he not himself a living map of America?20
Or le tableau est intitulé The American Within, soulignant de quelle manière se voyait Harry en s’identifiant au pays. Cependant, plus secrètement, le titre du tableau révèle aussi comment Martha, sa fille, a dû échapper à son emprise et émigrer vers l’Amérique en portant en elle l’enfant de son père (à l’insu de ce dernier), enfant qui naîtra américain. Cette seconde ekphrasis arrive 200 pages après la première, assez longue, lorsque le narrateur découvre le portrait chez son oncle (portrait alors dépourvu de titre) avant d’avoir vu l’original : « It was the portrait of a robust, broad-shouldered man of between thirty and forty years. He stood against a wild moorland scene, a pine flattening in the gale […] he wore neither hat nor wig, and his long hair was tied at the back with a blue ribbon… »21. Nous comprenons alors la nécessité pour l’écrivain d’inventer un tel portrait, celui d’un homme sévère au visage mélancolique (en accord avec les règles de la peinture de portrait : couleur, fond, éléments atmosphériques, style, attitude, regard), portrait dont le sens ne peut être compris qu’une fois l’histoire révélée.
Le titre et l’histoire de l’art
En ce qui concerne l’histoire de l’art, Leo Hoek montre que les titres avaient bien traditionnellement pour tâche de fonctionner comme indices du sujet ou du thème. Ils en facilitaient la classification, indiquaient et légitimaient le sujet représenté, proposaient une équivalence, soit une transposition réussie, entre histoire et représentation. Cependant, ils ne devaient pas être indispensables : le sujet devait être reconnaissable en lui-même par ses seuls moyens. « Pour les critiques d’art du XIXème siècle, les mots de ‘sujet’, ‘thème’ ou ‘titre’, étaient des équivalents parfaits : en reflétant le sujet, le titre constituerait pour un tableau une qualité aussi indispensable qu’un sujet bien choisi, comme le savait aussi Fromentin »22.
Le titre devenait alors un instrument de consécration dans la critique d’art car il était la forme sous laquelle le tableau apparaissait : « Le discours contextuel où le titre fonctionne est appelé critique d’art, comprise au sens large comme tout commentaire sur l’art contemporain ou ancien »23. La critique d’art est donc le lieu naturel du titre d’image, son contexte au premier chef. Les Salons ont contribué à institutionnaliser les titres qui servaient de références, ainsi qu’à évaluer et à interpréter les œuvres. Ces processus de progressive « industrialisation et de professionnalisation », pour suivre Hoek, ont provoqué des changements profonds et instauré des pratiques nouvelles au moment même où de nouvelles techniques de reproduction d’images, l’estampe puis la photographie, ont permis la plus grande diffusion des œuvres.
C’est bien cette fonction du titre dans le domaine de l’histoire de l’art, celle de l’intitulation académique, qui fut remise en cause par le modernisme. Manet en particulier, a su déjouer les attentes de ses contemporains selon une attitude de « déviance typiquement moderniste »24. En cela on voit que la question de l’intitulation n’est pas négligeable et qu’elle peut être porteuse d’un changement de paradigme, d’une brusque mutation des choix et enjeux esthétiques. Manet, en effet, a dérobé ses tableaux à la lecture d’un sens tout prêt et a refusé la narrativité comme projet. C’est la visualité, le pictural qui, pour lui, devaient d’abord être au premier plan :
La peinture de Manet défie un lecteur réaliste et impose une lecture moderniste par son imprévisibilité narrative, par la réflexion du medium pictural, par l’autoréflexion de l’artiste, et par des réflexions discursives, comme la citation de prédécesseurs et de l’histoire du champ, la parodie, l’ironie et la mise en abyme.25
Hoek donne l’exemple du Déjeuner sur l’herbe, d’Olympia, et de Mlle V. en costume d’Espagnole, et montre comment ces trois tableaux déjouaient l’interprétation immédiate et déstabilisaient la critique d’art. Pour Hoek, avec Déjeuner sur l’herbe, qui ne correspondait à aucun « genre » répertorié, il s’agissait vraiment d’un bain, « d’un nettoyage » auquel il soumettait la peinture académique. Cela constituait une provocation et une transgression insupportable pour la critique institutionnalisée. Mais c’est bien à elle, et contre elle, que Manet souhaitait réagir en peignant à sa manière qui était novatrice.
Pour finir ce petit tour d’horizon des titres qui mériterait un travail à part entière afin de compléter les travaux d’historiens de l’art tels Leo Hoek ou de linguistes Bernard Bosredon, je propose un passage par une œuvre célèbre d’un peintre américain du dix-neuvième siècle : Raphaelle Peale. Venus Rising from the Sea – After the Bath (A Deception) / Vénus naissant de la mer—Après le bain (tromperie), titre métapictural qui « annonce la couleur », celle de la parodie, de la déviance, du jeu sur l’anachronie, celle du bain, genre de peinture plus moderne que l’allégorie de la Naissance de Vénus.
L’obscurité du titre comme voile : La Vénus de R. Peale26
Le titre du tableau de Raphaelle Peale – Venus Rising from the Sea – After the Bath (A Deception)27 datant de 1822 – pose l’obscur de l’illusion, au sens de ce qui ne se voit pas bien mais est quand même deviné ; de ce qui se laisse voir à demi ; de ce qui est donc situé dans un entre-deux du visible et un entre-deux du sens. Le sujet est rejeté dans l’obscurité. Ce qui est porté en avant, dans la lumière, est un voile vierge de toute trace qui connote l’énigme, le sens obscur. Ce tableau est d’abord le repeint d’une œuvre de James Barry de 1772, intitulée Venus Rising from the Sea. Raphaelle Peale, peintre américain, prénommé d’après son célèbre prédecesseur par son peintre de père Charles Willson Peale, est donc l’auteur d’une Venus anadyomène. Venus Rising from the Sea – After the Bath (A Deception) resitue le tableau dans l’histoire de la peinture occidentale, en particulier celle de la Renaissance italienne, dont le paradigme est la Naissance de Venus de Botticelli, après « la mythique [et] l’inexistante Aphrodite anadyomène du peintre grec Apelle »28.
Ici, l’on voit un linge épinglé en deux endroits sur un ruban brillant qui pend en son milieu et laisse apparaître un bras nu saisissant une chevelure retombant en cascade ; ce bras prend la forme d’une main semblant rejoindre la première au-dessus de la tête, formant ce que Barthes nomme l’idéogramme des « bras levés du Désir »29. En bas, un pied écrase des fleurs en couronne. Un fond obscur laisse deviner la nature derrière le sujet féminin et sert d’arrière-plan. Les plis du linge sont fortement sculptés par la lumière, en trompe-l’œil. Question de proportions, de dimensions, oscillation entre deux moments du voir : si l’on considère que le linge, comme la musca depicta30, « témoin » de trompe-l’œil, est posé sur l’espace du tableau il est alors grand comme un mouchoir. Inscrit dans l’espace représenté, il serait de la taille d’un drap. Problème d’échelle, de ce que Louis Marin à propos du vase de Filippo Lippi appelle le lieu de « l’échange invisible entre le regard du spectateur et le tableau » et qui, justement ici, scelle l’entrée « de ce regard dans le tableau »31.
L’œuvre de Peale laisse dans l’ombre le tableau éponyme de James Barry, dans lequel Vénus coiffe ses cheveux, le corps entouré de volutes de nuées. De Vénus sortant de la mer ne reste qu’un substitut domestique : la serviette de bain qui a servi à essuyer son corps32. Ce linge qui sert à dissimuler Vénus-en-tableau joue le rôle de rideau blanc. Or, les tableaux, autrefois, étaient souvent protégés d’une étoffe, coutume dont Lacan lui-même usera pour L’origine du monde.
La femme de Peale, jalouse, aurait voulu, comme Zeuxis devant le tableau de son rival Parrhasios33, soulever le voile pour voir ce qui se cachait derrière34. D’où l’un des sens de « A Deception », une duperie, un tour joué à une épouse. La nudité doit être voilée, on l’aura compris, même s’il s’agit d’un tableau. Surtout s’il s’agit d’un tableau qui montre qu’il en cache un autre sous une toile, s’il s’agit d’une re-peinture de sujets en palimpseste, de couches de tableaux. Bien sûr, ce n’est pas l’œuvre de Barry que le voile recouvre mais de la toile vierge. L’original est en sûreté dans un musée. Mais le tableau de Barry réapparaît obscurément sous le voile peint en trompe-l’œil, oubliant que « ceci n’est pas une toile » justement.
Après le tiret qui suit la référence mythologique, « A Deception » annonce donc un leurre entre « refuser à voir » et « donner à voir ». On songe au « on n’y voit rien » de Daniel Arasse35. Et l’on se souvient aussi de la phrase de St Augustin : « Et voici la grande énigme : que nous ne voyons pas ce que nous ne pouvons pas ne pas voir »36. « (After the Bath) », cadré entre-parenthèses, semble quant à lui poser un joker dans l’énonciation du prosaïque. Troisième titre, mais titre premier si l’on considère qu’il est le juste titre, celui qui fut donné par Peale pour seconder celui de l’œuvre de Barry, lui-même citation ad infinitum, « (After the Bath) » est aussitôt recouvert du voile de la duperie, et de la déflation énigmatique du bathos du bain/bath.
C’est qu’il s’agit ici de « détruire (et célébrer) la peinture » en la dérobant au regard sous le linge fraîchement déplié, avec rayures rouges à l’ourlet comme il se doit et dans le coin inférieur droit le nom du peintre, un nom en forme d’écho, comme une broderie, noire sur blanc qui rajoute au nom la date 1822(23) et pinxit, affirmation de la paternité de l’œuvre, déclaration orgueilleuse et obscure du peintre…sur un coin de torchon.
Mais encore, si l’on poursuit, la « femme au bain » est un genre de peinture. Titillé par le montrer-cacher, le spectateur, ici, voudrait voir ce que les plis du linge maintiennent dans l’obscurité. Le titre nous prévient : « After the Bath », la femme n’est plus au bain mais se rhabille, Venus pudica ; elle est dissimulée aux yeux des autres. Jeu avec le genre pictural, citation et refus devant l’obstacle, on est dans l’après/l’apprêt du linge, celui du bain, celui du tableau de Barry. Le corps de la femme reste à « inventer » sous l’opacité. Il y a de la monstration dans ce tableau et de la monstruosité, celle qui dans le même mouvement consiste à montrer tout en cachant, contrairement au voile de Phryné qui sert à dévoiler la vérité lorsqu’elle est l’au-delà du langage, lorsque l’éloquence est en panne37. Histoire aussi de dénoncer le puritanisme des contemporains.
La Naissance de Vénus est l’histoire d’une double incarnation, incarnation de celle qui ne naît pas du corps d’une mortelle mais de l’aphros, incarnation de la peinture, par la peinture, du désir comme jaillissement. Mais cette double incarnation est finalement suggérée et refusée par le déni du voile.
Petit détour par la signature, variations et modes de présence de soi
Je propose enfin une petite excursion ludique par une ultime manifestation scripturale incluse dans l’espace du tableau, sur son espace représenté ou représentant, selon les divers cas étudiés par Michel Butor et plus récemment, entre autres, Daniel Arasse38, ont posé les jalons d’une étude de la signature du peintre. Il ne s’agit pas d’entrer dans ces questions relevant à proprement parler de l’histoire de l’art. Ce qui est pertinent plutôt en ce qui concerne notre propos, c’est de constater que par le biais de ce signe se transmet une singularité hétérogène aux moyens proprement picturaux du tableau qui, par les mutations, variations, changements de place, de mode (signature « figurée » ou écrite), de graphisme, en vient à inscrire la présence de la singularité d’un nom. Ainsi, en ce qui concerne les variations de dénominations, Mantegna ne signe pas toujours son nom de la même manière, non seulement graphiquement, mais également linguistiquement. Il le décline sous différentes formes : « Andreas Mantignia », « Mantegna », le traduit en latin, adopte les caractères grecs, en présente une représentation figurée sous forme d’autoportraits ou de personnages-relais lui ressemblant39. La couleur peut aussi servir l’appel de la signature. Courbet choisit de signer certains de ses tableaux en rouge. La signature peut également devenir signe lorsqu’elle est reconnaissable comme telle. Whistler signait ses tableaux d’un délicat papillon. La signature de Picasso a servi à estampiller des objets tout autres que des tableaux, en leur conférant une dimension esthétique, faisant aussi par là-même de ce nom propre un nom commun, un véhicule donc. Mystères de l’antonomase et des migrations du nom du peintre. L’utilisation mercantile du graphisme de la signature de Matisse en fait également un motif de décoration pur lorsqu’elle est apposée sur certains objets dits « muséaux ». On peut noter aussi, ce qui corrobore les développements précédents sur la tentative d’inféodation de l’image au langage, l’intitulé du paragraphe 29 du livre de Butor : « La grammaire des signatures ».
En outre, la signature et ses variations pourraient être vues comme l’un des modes de réalisation de la voix du peintre qui la module, la change de place, lui donne des accents et des caractères différents, en fait une manifestation singulière. Le choix d’adapter et d’intégrer la signature (ou non) au plan représenté ou au plan représentant, en fait l’un des éléments de la scène ou au contraire un commentaire, une déclaration hors diégèse. La sign-ature est un signe qui fait signe depuis l’intérieur du tableau ; il identifie, authentifie les tableaux de la même main, en est une constante malgré ses modulations, un peu comme une note tenue, un filet de voix sans voix. Car nous ne sommes encore, bien sûr, que dans la métaphore puisqu’il n’y a pas d’organes de cette voix-là, pas de chaleur, pas de souffle, même si Butor parle du « chant des voyelles »40. Cependant, si nous acceptons l’équivalence, ce serait peut-être l’écriture cursive qui rapprocherait le plus la signature de la voix, car le geste de la main est trace du corps qui en atteste la présence. S’il ne s’agit pas évidemment d’une émission comme la voix, la trace est quand même bien celle d’une projection, d’un « contact vers ». Ce qui se voit dans la signature, c’est le « j’ai peint » cela, « voici mon œuvre », sous diverses formes comme « OPUS ANDREAE MANTEGNA » dans le Christ aux Oliviers de Mantegna, ou encore « ALBERTUS DÜRER NORICUS FACIEBAT ANNO A VIRGINIS PARTU 1511 » dans L’Adoration de la Sainte Trinité de Dürer41. La signature est aussi attestation de présence sur laquelle Butor et Arasse reviennent, et d’abord celle de Van Eyck témoin du mariage des Arnolfini : « Johannes de Eyck fuit Hic » au-dessus de la date « 1434 ». Tâche classique d’ailleurs assignée au peintre qui jouait le rôle d’ambassadeur lors de l’arrangement d’un mariage, envoyé spécial chargé de faire le premier portrait de la future épouse. Ce fut le cas lorsque Van Eyck fut envoyé au Portugal pour préparer le mariage de Philippe le Bon avec Isabelle de Portugal en 1429 à Bruges. D’une taille disproportionnée par rapport à celle du miroir, la phrase peinte du plus beau pinceau offre le spectacle superbe d’une écriture cursive avec moult jambages et volutes, et initiale du prénom en forme de corne d’abondance inversée d’où s’échappent d’autres volutes et prouesses calligraphiques.
Une dernière curiosité plus « moderne » est la signature de Marcel Duchamp apposée sur le fameux urinoir renversé/renversant. Je n’ai pas encore vu ou lu de réactions à celle-ci mais elles doivent exister. Si vous vous en souvenez, on peut lire comme au feutre, dirait-on de nos jours, la signature « R. Mutt 1917 » sur le côté de l’urinoir. Or nous savons, nous anglicistes, que « mutt » signifie « idiot », « poor mutt » « pauvre mec », et que « mutt » désigne aussi un chien « bâtard ». On comprend l’humour et aussi l’auto-ironie de cette désignation, tout en voyant que cette « œuvre » constituée par son geste (et qui constitue tout un pan de l’art en art conceptuel) est en fait aussi une œuvre bâtarde. Tout Duchamp est là. L’urinoir de Duchamp est « idiote » au sens philosophique du terme, de « qui appartient à », c’est-à-dire une œuvre revendiquée et « particulière »42.
Il faut noter également le cas de la photographie, vierge de toute signature à l’origine qui, dans le cas de certains photographes, a vite acquis cette marque d’appropriation esthétique. Elle en faisait l’équivalent de la peinture. En même temps, elle lui conférait une valeur marchande clairement lisible. Cependant, la plupart du temps cette marque reste encore absente tant elle semble abolir ce qui fait l’un des attraits de la fenêtre photographique: sa valeur de témoignage, celle du « ça a été » de Barthes. La dédicace toutefois permet au photographe d’attribuer la photographie à un amateur et de ce fait d’affirmer sa propriété initiale cédée au nouveau possesseur de l’œuvre, dûment signée, qui peut alors acquérir une valeur marchande. La signature est en l’occurrence superposée à l’épreuve sur papier comme une valeur ajoutée.
On l’a vu, le titre peut donc assumer une valeur critique voire métaréflexive, tout comme la signature, grâce à leur statut hybride voire périphérique par rapport à l’œuvre qu’ils commentent ou signent. En tout cas, ces détours de l’appellation fournissent de beaux sujets de réflexion à l’intermédialité ou plus simplement au rapport texte/image.