Andrée Viollis, Indochine SOS, Pantin, Les Bons caractères, 2008, 283 p.

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Décolonisation

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Maison d'édition spécialisée dans la réédition, Les Bons caractères a exhumé ce texte remontant à la période coloniale de la France , publié originalement en 1935 chez Gallimard, puis réédité une première fois en 1949. L'auteure en est une journaliste accompagnant Paul Reynaud, Ministre des colonies de l'époque, lors d'un de ses déplacements dans l'Union indochinoise. En marge de cette couverture du voyage officiel, elle rencontre un certain nombre d'acteurs de la vie politique et sociale locale, recueillant des témoignages sur la réalité de l'oppression coloniale.

Son propos n'est d'ailleurs pas particulièrement révolutionnaire, voire même anticolonial. Elle montre simplement la béance qui existe entre les proclamations d'amélioration de la situation des populations indochinoises et la réalité du processus colonial. Sur le fond, et le titre de son ouvrage va dans ce sens, elle montre que si la France ne se préoccupe pas de jouer son rôle, elle risque fort de voir les populations se tourner vers les indépendantistes ou les communistes. Peuplé de milles anecdotes, récoltées au fil de ses déplacements, son récit montre la face cachée du colonialisme français : répression terrible contre les populations, famine généralisée dans certaines régions, rôle oppressif de la religion, mépris pour la population autochtone, y compris pour les élites francisées. Elle raconte par exemple qu'il n'y a pas eu besoin d'attendre la présence des Américains pour que des massacres de population civile par les bombardements de l'armée et de la légion aient lieu. Le fameux massacre de My lai, qui avait vu l'exécution systématique d'un village par les Marines en 1968, apparaît ainsi bien limité par rapport aux exactions de la soldatesque française. Elle en appelle à une réforme de l'administration coloniale, dont la plupart des fonctionnaires, ne parlant pas la langue autochtone, s'appuie sur le de sp otisme et la prévarication des notables locaux. S'appuyant sur le témoignage d'un fonctionnaire un peu plus éclairé que la moyenne, son récit se conclut par la per sp ective d'une perte de l'Indochine par la France.

Il faudra encore une vingtaine d'années, des souffrances sans nom pour les populations, avant que la France connaisse, enfin, la défaite militaire de Dien Bien Phu et soit obligée de mettre fin à son emprise, immédiatement remplacée par celle de l'impérialisme américain. Sans être d'un apport décisif par rapport à de nombreuses analyses produites à l'époque (que l'on relise Daniel Guérin ou Félicien Challaye, en particulier), ce livre rappelle une période sombre de l'histoire du capitalisme français.

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Georges Ubbiali, « Andrée Viollis, Indochine SOS, Pantin, Les Bons caractères, 2008, 283 p. », Dissidences [En ligne], Mars 2012, Nos archives du mois : anticolonialisme, publié le 04 novembre 2011 et consulté le 18 avril 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=721

Auteur

Georges Ubbiali

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