Déjà auteur de plusieurs ouvrages sur l'écologie, Jean Jacob se propose de démontrer que le mouvement alter-mondialiste, loin d'être seulement ancré à l'extrême gauche, possède en son sein des groupes et/ou des personnalités qui véhiculent des idées conservatrices, voire réactionnaires. Au passage, il égratigne les auteurs de la somme collective sur L'altermondialisme en France, coupables selon lui de n'avoir pas repéré ces tendances. La première, selon lui, prend source dans l'IGF (Forum international sur la globalisation) et certaines de ses figures, comme Jeremy Rifkin, Edward Goldsmith ou Vandana Shiva, qui, défendant un retour au développement local et aux communautés traditionnelles, et un respect de la diversité culturelle au même titre que la biodiversité, en viennent à remettre en cause les présupposés de la philosophie des Lumières1. Il qualifie cette tendance de chantre de l'antimondialisation et l'oppose ainsi au mouvement alter-mondialiste, incarné en France par une association comme ATTAC. Surtout, il explore ses origines, qui se trouvent dans le courant étatsunien de « l'écologie profonde », conçevant la Terre comme une totalité à respecter, la flore et la faune ayant la même importance que l'humanité.
Dans un second temps, il s'intéresse au cas spécifiquement français, en centrant son propos sur l'association ECOROPA, particulièrement active contre la mondialisation libérale tout au long des années 90, et à la revue carrefour L'écologiste , avec tous les réseaux qui lui sont liés. Au passage, il rappelle les collaborations répétées de Edward Goldsmith, une des figures tutélaires de l'écologie, avec des publications de la Nouvelle Droite, et critique en douceur les remises en cause de la modernité occidentale et du développement, souvent liées à l'idée de décroissance et parfois nimbées de spiritualité, voire de mysticisme. Même le milieu des anti-pub n'échappe pas à ses investigations, puisqu'il met le doigt sur la tendance qu'ont certains à défendre l'initiative individuelle et la « simplicité volontaire » au détriment d'un changement collectif du monde. Très descriptif et solidement documenté, l'ouvrage ne convainc pas totalement, ses arguments n'étant pas toujours suffisamment solides. Pour un Pierre Rabhi, combien de cas plus ambigus ? A l'image sans doute du mouvement alter-mondialiste dans sa diversité. Une telle analyse s'avère en tous les cas, malgré ses faiblesses, plutôt stimulante.