Universitaire, en cours de rédaction d’un doctorat sur le régime d’auto-entrepreneur, l’auteure se penche sur l’apparition d’une nouvelle figure du prolétaire. Sa thèse, démontrée à l’aide d’une documentation très contemporaine, mais exclusivement francophone, est la suivante : il n’y a pas superposition de la condition ouvrière et de la condition prolétarienne. En d’autres termes, il ne suffit pas d’être ouvrier pour être prolétaire. D’autres couches salariales peuvent donc être inclues dans le prolétariat. Évidemment, pour pouvoir conduire une telle démonstration, il ne faut pas avoir peur d’enfoncer les portes ouvertes d’une pensée toute faite. Ainsi, écrire que « Marx et Engels définissent fondamentalement les prolétaires comme les ouvriers de l’industrie », p. 49, sans prendre même la peine d’assortir cette assertion d’une citation, permet tous les raccourcis possibles. Car bien entendu, on trouve de nombreux exemples chez ces derniers allant à l’encontre d'une telle réduction ouvriériste du prolétariat. Pourtant, l’idée, selon laquelle la précarité inscrit un nouveau rapport à la classe est loin d’être inintéressante. Le fait qu’il y ait dilution des sentiments d’appartenance de classe constitue une question tout à fait intéressante, à laquelle d’ailleurs l’auteure a déjà fourni des éléments de réponse dans d’autres travaux. Mais il y a quelque tromperie sur la marchandise de présenter une série de questions préalables à une thèse comme un travail abouti et convaincant sur la question. De ce point de vue, le lecteur attend la maturation de la réflexion théorique, permise sans aucun doute par un terrain empirique des plus intéressants, en regrettant une publication hâtive.