Sophie Kovalevskaia, Une nihiliste, Paris, Phébus, 2004, 175 p.

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Ce roman vaut nettement plus par la personnalité de son auteure que par ses qualités littéraires ou par son style, avouons-le. S. Kovaleskaïa fit partie de cette génération qui « alla au peuple » dans les années 1860 en Russie. Tourgueniev, dans son roman Pères et fils, fit passer à la postérité ce groupe de jeunes issus de la bourgeoisie, de l'Eglise ou de l'armée comme des « nihilistes ». Malgré le caractère non-violent de leur action, ils furent sévèrement réprimés. Ensuite, la partie la plus radicale, autour du groupe La volonté du peuple, versera dans les attentats et la pratique du terrorisme. Mais Kovaleskaïa fit partie de la première vague. Elle est également célèbre, car ce fut la première femme russe qui obtint un poste de professeur de mathématiques, en Suède, les femmes étant interdites d'entrée à l'Université en Russie. Dans ce récit, inachevé, elle s'inspire largement de sa propre histoire pour décrire le destin d'une jeune fille, Véra, issue de la petite noblesse terrienne russe, dont le destin bascule lors de l'abolition du servage à la fin des années 1850. Elle rencontre un exilé politique, libéral, beaucoup plus âgé qu'elle, qui devient son professeur, puis son amour. Amour hélas contrarié et tout platonique, car l'homme qu'elle aime est déporté à l'autre bout de la Russie. Elle se rend à St Petersbourg où elle se lie aux milieux réformateurs. Le procès public des « conspirateurs » est l'occasion pour elle de franchir le pas, en se mariant avec un des accusés, pour lui permettre, en tant qu'épouse, d'éviter le bagne et de partir en exil en Sibérie. Le livre se conclut sur son départ dans les steppes glacées. Le récit, inachevé, combinaison de deux manuscrits, est loin du chef d'œuvre littéraire. Mais l'introduction de Michel Niqueux lui restitue tout son intérêt. Avec une grande érudition (œuvres citées en russe, en français, en anglais, en allemand), le traducteur offre une synthèse parfaite des connaissances sur l'auteure et sur le courant du nihilisme russe. Il contextualise le texte de Kovaleskaïa dans la production littéraire de son époque, ainsi que la biographie tourmentée de cette femme d'exception.

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Georges Ubbiali, « Sophie Kovalevskaia, Une nihiliste, Paris, Phébus, 2004, 175 p. », Dissidences [En ligne], Culture, littérature (romans, BD), publié le 10 décembre 2012 et consulté le 20 avril 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=514

Auteur

Georges Ubbiali

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