Quand les villes n’enchantent plus les oiseaux : nouvelles orientations énergétiques et biodiversité urbaine

Résumés

Favoriser la nature en ville est un des axes des politiques publiques vers les villes durables. Cependant, ces orientations s’opposent à une réalité assez différente : les populations de la plupart des espèces urbaines se sont effondrées au cours des dernières décennies. Ce constat est particulièrement vrai pour les oiseaux, taxon le plus visible et le mieux étudié. La suppression des lieux de reproduction potentiels suite à une rénovation thermique, et le caractère hermétique des constructions nouvelles à haute performance énergétique sont des causes fréquemment évoquées pour expliquer ce déclin.
Dans le cadre du présent article, nous tentons d’évaluer le lien qui existe entre la qualité du bâti et la faune sauvage. Au travers d’une enquête menée auprès des habitants de la région de Perpignan, d’entretiens avec des professionnels du bâtiment ainsi que de l’analyse de leurs sites Internet, nous cherchons à comprendre l’effet de ces nouvelles orientations de construction sur la présence de la faune urbaine, mais aussi et surtout dans quelles mesures ces nouvelles normes peuvent avoir des conséquences sur notre perception des ‘sauvages’ qui nous entourent. Enfin, nous tentons d’étudier des possibles solutions, en croisant les données de l’enquête avec les pratiques et des observations de terrain.
Les acteurs sont-ils conscients des liens qui peuvent exister entre nos choix de construction et la biodiversité urbaine ? Le fait d’avoir une maison neuve ou rénovée et donc « propre » a-t-il une influence sur nos représentations, et notamment sur notre volonté à accepter des espèces sauvages ? Une compensation technique des pertes d’habitats peut-elle être opérationnelle ? Et in fine, quelle peut être réellement la place de la faune sauvage en ville aujourd’hui ? Nous tentons de donner quelques éléments de réponse à ces questions, en confrontant les représentations aux pratiques et réalités de terrain.

Promoting nature in cities is one of the main issues of public policies towards sustainability in urban environments. However, these orientations are opposed to a rather different reality: populations of most urban species, i.e. birds and bats, have declined in recent decades. The suppression of potential breeding sites following thermal renovation, and the hermetic nature of new energy-efficient buildings are among the reasons given to explain the urban decline.
In this paper, we attempt to assess the link between the quality of the buildings and wildlife. A survey conducted among the inhabitants of the region of Perpignan has been combined with interviews with thermal renovation companies and an analysis of their websites. The aim of the study is to investigate the effect of energy-efficient buildings on the presence of urban fauna, but also and especially to what extent these new standards may have an impact on our perception of wildlife. Finally, we try to evaluate possible solutions, by crossing the survey data with field observations.
Are the stakeholders aware of the links that may exist between our construction choices and urban biodiversity? Does the fact of having a new or renovated house have an influence on our perception of wildlife, and in particular on our willingness to accept the urban fauna?
Can technical solutions compensate the habitat loss for birds and bats? Finally, what can be the role of wildlife in cities today? We try to provide answers to these questions, by confronting the perceptions to reality.

Plan

Texte

Favoriser la nature en ville est un des axes des politiques publiques vers les villes durables. Les outils de planification visent même à renforcer la biodiversité urbaine avec par exemple la préservation de corridors écologiques. Cependant, ces orientations s’opposent à une réalité assez différente : l’urbanisation conduit à un appauvrissement de la richesse spécifique (Batáry et al. 2018, Isaksson 2018), et les populations de la plupart des espèces « anthropophiles » (Godet 2017) se sont effondrées au cours des dernières décennies (Robinson et al. 2005, Summers-Smith 2003, Berigan et al. 2020, Sharma et Binner 2020. Ce constat est particulièrement vrai pour les oiseaux, taxon le plus visible et le mieux étudié. Entre 1989 et 2019, d’après les données STOC1, l’abondance des espèces des milieux bâtis a régressé de 29 %, alors que le nombre de logements a progressé dans la même période d’environ 30 % (données INSEE). L’extension des surfaces urbanisées a donc été accompagnée par une diminution des espèces urbaines. Le recul des espèces des milieux bâtis est moins important que celui des milieux agricoles (-38%), mais elle est bien plus marquée que la moyenne des oiseaux en France (- 15 % pour l’ensemble des espèces).

Une multitude de raisons est évoquée dans les articles scientifiques pour expliquer le déclin des oiseaux en ville. Certains chercheurs mettent en avant une pénurie de nourriture (Hole et al. 2002 ; Liker et al. 2008, Seress & Liker 2015, Boutaud 2015), l’impact des pesticides et de la pollution (Müller et Sokoliuk 2011, Janssens et al. 2003, Mitschke et al. 2000, Crick et al. 2002), ou encore des maladies (Altizer et al. 2004). D’autres soulignent l’importance de la prédation (Beckerman et al. 2007 ; Baker et al. 2005, De Coster et al. 2015), les perturbations fréquentes ainsi que le stress permanent par le bruit et la lumière (Møller 2008 ; Beaugeard et al. 2018, Meillère et al. 2015). La présence et densité d’arbustes dans les jardins (Wilkinson 2006) et les structures défavorables des jardins et des villes modernes denses (Summers-Smith 2003, Müller et Sokoliuk 2011 ; Thorington et Bowman 2003), le recours plus fréquent à des substrats minéraux (Bernet-Ponce 2020), et les modifications des habitats urbains suite aux changements socio-économiques (Shaw et al. 2008) sont cités comme causes additionnelles. L’appauvrissement de l’avifaune à l’extérieur des villes ne produit plus d’excédent susceptible à migrer en ville (Prowse 2002). Le déclin est aggravé par des effets dynamiques (effondrement de colonies : Summers-Smith 2003). Enfin, la suppression des lieux de reproduction potentiels semble constituer une des causes majeures du déclin (Cellier et al. 2018 ; Maurer-Wohlatz et al. 2011 ; Stahr et Hinz 2011), d’autant plus que beaucoup d’espèces possèdent une très grande fidélité à leurs sites de reproduction (Weiserbs 2012).

L’évolution des populations de moineaux est emblématique de la crise des espèces urbaines : leur population a dramatiquement diminué au cours du dernier siècle dans presque toutes les villes européennes (Summers‐Smith 1999, 2003 ; Robinson et al. 2005 ; Cellier et al. 2018 ; Weiserbs 2010 ; Engler et Bauer 2002 ; Shaw et al. 2008). Mais, comme pour les autres espèces, les causes de cet effondrement ne sont pas très claires : “The urban decline has been the subject of much speculation, but the reason(s) is/are not properly understood” constatent De Laet et Summers-Smith (2007 : 275). Le déclin a sans doute des causes multiples, avec une importance variable des facteurs en fonction des espèces et des lieux.

Dans le cadre du présent article, nous allons nous intéresser aux liens qui existent entre la qualité du bâti et la faune sauvage, et plus précisément à l’impact des nouvelles orientations énergétiques sur les lieux de reproduction potentiels des espèces cavicoles2 et semi-cavicoles. En effet, l’efficacité de la rénovation thermique des bâtiments anciens comme des nouvelles constructions à haute performance énergétique est basée sur le caractère hermétique du bâti : il faut éliminer les ponts thermiques pour réduire les pertes de chaleur. Ainsi, les ouvertures, aérations volontaires ou imperfections du bâtiment sont systématiquement supprimées, détruisant ainsi une multitude de sites de reproduction potentiels, notamment pour les oiseaux et pour les chauve-souris. De ce fait, l’impact sur la faune sauvage est souvent plus important que lors de la rénovation d’une façade pour des raisons esthétiques.

Les acteurs, privés et professionnels, sont-ils conscients des liens qui peuvent exister entre nos choix de construction et la biodiversité urbaine ? Le fait d’avoir une maison neuve ou rénovée et donc « propre » a-t-il une influence sur nos représentations, et notamment sur notre capacité à accepter des espèces sauvages ?

Une compensation technique des pertes d’habitats peut-elle être opérationnelle et acceptable ? Et in fine, quelle peut être réellement la place de la faune sauvage en ville aujourd’hui ? Nous tentons de donner quelques éléments de réponse à ces questions, en confrontant les représentations aux pratiques et réalités de terrain.

1. Méthodologie de la recherche

Plusieurs outils ont été mobilisés pour répondre à ces questions.

Une enquête par questionnaire a été menée auprès des habitants de la région périurbaine de Perpignan, visant plus particulièrement des propriétaires de maisons individuelles. Le secteur étudié est un exemple typique de la forte péri-urbanisation du pourtour méditerranéen, caractérisée par une progression de la démographie et de la construction de maisons individuelles depuis les années 1960, et la multiplication de lotissements en bordure des agglomérations. Le questionnaire a été diffusé en s’appuyant sur un réseau d’associations sportives et culturelles, et rempli en autonomie par les personnes enquêtées ; par la suite, afin d’évaluer la représentativité des réponses, des entretiens ont été menés avec quelques personnes sélectionnées selon le principe du hasard. Au total, nous avons pu récolter 84 questionnaires3.

Par ailleurs, nous avons réalisé des entretiens téléphoniques auprès de 15 professionnels du bâtiment, en visant des entreprises intervenant dans le domaine de la rénovation thermique. Pour augmenter nos chances d’obtenir des informations et pour éviter des réponses ‘politiquement correctes’, nous avons mené ces entretiens en nous faisant passer pour un client potentiel souhaitant isoler ses combles « actuellement utilisés par quelques chauve-souris ». L’étude de l’approche des professionnels a été complétée par une analyse de sites Internet affichés en utilisant les mots de recherche « chauves-souris » et « isolation combles ». Cette étude, réalisée en avril 2019 à l’aide du moteur de recherche google, a été limitée aux premières 20 réponses des sites des professionnels du bâtiment sans tenir compte de leur localisation4. Pour évaluer une éventuelle influence culturelle, la même étude a été effectuée pour des sites allemands en utilisant les mots clé « Fledermaus » et « Dachisolierung ». La comparaison avec l’Allemagne se prêtait particulièrement bien car le discours en faveur de l’environnement et les mouvements écologiques sont traditionnellement plus fortement implantés dans ce pays, laissant envisager une approche différente de la question.

Enfin, nous avons réalisé des entretiens auprès des vendeurs des cinq grandes jardineries de l’agglomération de Perpignan5 possédant un rayon « nichoirs et alimentation pour animaux sauvages », ce qui nous a permis d’évaluer la qualité et les quantités des produits vendus.

2. Présence des espèces sauvages et niveau d’acceptation

Dans un premier temps, nous avons cherché à savoir combien de personnes sont potentiellement concernées par la présence d’animaux sauvages dans la structure de leur maison, en limitant l’enquête sur les oiseaux, les chauves-souris et les geckos/lézards6 . Les réponses récoltées sont intéressantes : 85 % des personnes interrogées déclarent avoir des geckos ou lézards, chiffres assez fiables à cause de la faible mobilité de ces espèces. 51% déclarent que des oiseaux nichent, au moins occasionnellement, dans la structure de leur maison, et 13% pensent la même chose des chauves-souris. Ces chiffres obtenus par le biais de l’enquête posent quelques questions. D’une part, il n’est pas toujours évident, même pour un spécialiste, de détecter la présence des ‘sauvages’7 : parmi les animaux sauvages en ville, il y a le « visible et l’invisible » (Arnould et al. 2011). Les espèces les plus discrètes, p.ex. les chauves-souris, peuvent alors être sous-estimées. D’autre part, dans les chiffres très élevés se cache certainement une partie non négligeable de surestimations, basées sur des déductions non fondées : « j’ai des moineaux dans mon jardin, donc j’imagine qu’ils nichent bien chez moi quelque part », déclare une personne interrogée. On peut supposer que de telles déductions se cachent derrière un nombre conséquent de réponses positives. La fiabilité des chiffres est donc sans doute assez faible, et l’enquête ne semble pas être le moyen le plus approprié pour estimer l’abondance réelle des animaux sauvages dans la structure des maisons.

Cependant, malgré ces limites, les résultats de l’enquête démontrent un lien entre l’ancienneté du bâti et la présence d’animaux : 59 % des propriétaires des bâtiments anciens déclarent qu’ils abritent des oiseaux, contre seulement 30 % pour les maisons les plus récentes. Le lien entre la date de construction et la présence des animaux sauvages est particulièrement évident pour les oiseux très visible (cf. figure 1) ; pour les chauves-souris, plus discrètes et rares, l’échantillon est trop restreint pour dégager une tendance nette.

Figure 1 : Présence (en %) de la faune sauvage dans la structure des bâtiments selon l'ancienneté du bâti, d'après l'enquête auprès des propriétaires (n=84)

Figure 1 : Présence (en %) de la faune sauvage dans la structure des bâtiments selon l'ancienneté du bâti, d'après l'enquête auprès des propriétaires (n=84)

Ce résultat correspond bien aux constats affirmés par d’autres études : l’abondance de moineaux est supérieure dans les quartiers plus anciens, moins entretenus, que dans les quartiers plus récents et « propres » (Tully 2001 ; Wotton et al. 2002 ; Summers-Smith 2003). Bien évidemment, il faut nuancer ce propos : le constat est vrai surtout pour les espèces cavicoles mais pas forcément pour les espèces qui construisent leur nid dans les haies ou sur les arbres ; aussi, l’état du jardin, souvent trop bien entretenu et sans nourriture dans le cas des maisons récentes, joue un rôle certain.

Il est intéressant de noter que la présence des animaux est plutôt perçue positivement. Interrogés sur leur ressenti dans le cas où des animaux sauvages viendraient à nicher dans la structure de leur maison, 46 % des personnes déclarent être ravi pour les oiseaux, 37% pour les chauves-souris et même 67% pour les lézards ou geckos (cf. figure 2). 29 % (19% pour les chauves-souris) affirment être content, malgré le fait que ces animaux représentent tout de même une gêne. Environ 10 % déclarent être mécontent mais ne pas intervenir. Enfin, pour les oiseaux et chauve-souris, une proportion équivalente (10 %) les laisse achever leur reproduction mais déclare reboucher le trou par la suite afin d’empêcher une nouvelle nidification, tandis que 12 % admettent déloger immédiatement les animaux s’il s’agit de chauve-souris (6 % dans le cas d’oiseaux). Pour 90 % des personnes exprimant une gêne, les saletés / déjections constituent l’inconvénient principal ; les autres causes (gêne sonore, pont thermique potentiel, risques sanitaires) ne sont citées que rarement. Il est à noter que la présence de lézards et/ou de geckos semble plus facilement acceptée que celle des oiseaux et chauves-souris.

Figure 2 : La perception des animaux sauvages dans la structure de votre maison, d’après l’enquête effectuée auprès des propriétaires (n=84)

Figure 2 : La perception des animaux sauvages dans la structure de votre maison, d’après l’enquête effectuée auprès des propriétaires (n=84)

3. Perception et capital sympathie

Les espèces potentiellement présentes en milieu urbain possèdent un capital sympathie très différent (cf figure 3). Pour les oiseaux, les rouges-gorges devancent avec plus de trois quarts d’opinions positives les moineaux et hirondelles8 (deux tiers positives). L’image très positive des rouges-gorges et rouges-queues s’explique sans doute en grande partie par le fait que ces espèces sont peu sociales et souvent présentes sous forme d’un seul individu : c’est un ‘petit oiseau mignon’ (« lovable » dans la classification de Driscoll 19959) qui ne présente aucune gêne, alors que les moineaux et hirondelles vivant en colonie peuvent s’avérer bruyants et salissants. L’image très positive des moineaux pourrait s’expliquer par le fait qu’ils répondent bien à une alimentation artificielle, ce qui les rend plus visibles et par conséquent plus attachants (Driscoll 1995).

Les tourterelles et pigeons affichent moins de 50 % d’opinions positives, et les pies et étourneaux pas plus d’un tiers. Les réponses sont clairement influencées par des réalités vécues, et donc des expériences personnelles : les étourneaux, présents dans notre région surtout en hiver, créent des problèmes de déjection ; leur capital sympathie assez faible correspond bien aux résultats de Clergeau (2020). Il faut souligner aussi que l’abondance des espèces joue un rôle non négligeable dans notre perception : les pigeons, par exemple, ne sont jamais représentés dans notre inconscient par un seul individu. « C’est leur prolifération qui génère un sentiment d’insécurité et de mise en danger » explique Harpet et Cresci (2015 : 57).

D’un autre côté, les préférences sont aussi influencées par nos représentations : les tourterelles et pigeons sont moins ‘mignons’ que les oiseaux plus petits, et ils sont soupçonnés de transmettre des maladies (Harpet et Cresci 2015). Plus le vécu est absent, plus les représentations deviennent importantes. Une hirondelle fait le printemps et élimine les moustiques. Peu ou pas présente dans les quartiers pavillonnaires, les inconvénients potentiels (déjections importantes autour des lieux de nidification) ne font pas partie du référentiel de la très grande majorité des personnes interrogées. De la même façon, le faible capital sympathie de la pie résulte certainement en partie de son image négative (la ‘pie voleuse’), et moins par des problèmes réels posés par l’espèce10.

Enfin, il faut noter aussi que le capital sympathie est susceptible d’évoluer dans le temps, en fonction de l’abondance, de l’utilité ou l’utilisation d’une espèce (Duffaut 2019), ou encore à cause des expériences personnelles. « House Sparrows were so common they were regarded as a pest species during the eighteenth and nineteenth centuries », constate Crick (2002, in Shaw et al. 2008 : 293). L’appréciation semble inversement corrélée à l’abondance : l’espèce rare est souvent aussi une espèce appréciée. A l’inverse, les tourterelles, pigeons et étourneaux ont dû perdre un peu de leur capital sympathie avec l’abandon de la pratique de consommation des oisillons, répandue dans les villes européennes encore il y a un siècle11 (Stresemann 1948).

Figure 3 : Le capital sympathie de quelques ‘sauvages’ présents en ville, d’après l’enquête réalisée auprès des propriétaires (n=84)

Figure 3 : Le capital sympathie de quelques ‘sauvages’ présents en ville, d’après l’enquête réalisée auprès des propriétaires (n=84)

Pour les chauves-souris, les opinions positives dépassent les 50%, valeur assez élevée si on considère les émotions fortes évoquées par beaucoup face à ce taxon. Un petit quart seulement déclare ressentir une aversion contre les chauves-souris, tandis que pour une majorité leur utilité potentielle (consommation d’insectes) semble déterminante. Les problèmes sanitaires et de saleté, qui peuvent être liés à la présence d’une colonie dans les combles, sont rarement évoquées et ne font pas partie des expériences personnelles.

Enfin, les lézards et geckos, pourtant moins « mignons », affichent des valeurs proches des rouges-gorges : plus des trois quarts d’opinions positives. Pour ce dernier groupe, le capital sympathie s’explique sans doute par l’absence de contraintes (pas de bruit, peu de saleté produite) ainsi que par leur utilité potentielle (consommation d’insectes). 

4. Influence des rénovations sur la place des espèces sauvages

Nous pouvons donc conclure que beaucoup de propriétaires de maisons individuelles constatent la présence d’animaux sauvages autour de leurs maisons, même si la reproduction au sein de leur structure peut être surestimée ; la majorité des espèces présentes est perçue de façon positive. A partir de ce constat, la question d’un impact potentiel d’une rénovation se pose, non seulement en terme d’impact réel sur les animaux sauvages (suppression de sites de reproduction potentiels) mais aussi et surtout en terme de représentation : est-ce que la rénovation d’une maison (ou par extension le fait d’être propriétaire d’une maison neuve) possède une influence sur notre capacité à tolérer la faune sauvage dans notre environnement immédiat ?

La question est intéressante, et elle peut être abordée sous plusieurs angles.

D’un point de vue technique, les travaux de rénovation thermique peuvent être multiples : on peut améliorer l’isolation intérieure, ou remplacer des fenêtres à simple vitrage par le double vitrage. Des rénovations de ce type ne sont pas considérées ici car elles n’ont à priori pas d’impact sur la faune sauvage, à part la gêne occasionnée par les travaux s’ils se déroulent en période de reproduction. Dans le cas des rénovations extérieures (application d’une isolation sur les façades) ou de l’isolation des combles, la situation n’est pas la même : ici, l’amélioration repose en grande partie sur la suppression des ponts thermiques. Or, ce sont justement ces « imperfections » du bâti, les trous, ouvertures, aérations excessives des combles, qui permettent à une faune sauvage de tirer profit de nos maisons et de les utiliser comme des sites de reproduction (Richarz 1994, Cellier et al. 2018, Stahr et Hinz 2011). Des combles parfaitement isolés et fermés sont perdus pour la reproduction des chauves-souris, et les caissons étanches de rouleaux modernes ne leur permettent plus d’y nicher : les constructions hermétiques visant à éviter les ponts thermiques rendent l’accès des ‘sauvages’ impossible. Le rebouchage de la jonction entre les murs et le toit détruit les cavités qui avaient permis aux moineaux de s’y reproduire. Une façade parfaitement rénovée qui ne présente plus aucune fissure ni ouverture ne permet même plus aux geckos de s’y installer. Bref, la maison parfaite au niveau de l’isolation thermique est aussi un bâtiment « stérile », car il n’offre plus aucune possibilité aux espèces cavicoles de s’y installer.

Figure 4 : Les imperfections du bâti : les fenêtres mal posées et les piliers mal scellés constituent des ponts thermiques mais offrent un abri pour la faune sauvage

Figure 4 : Les imperfections du bâti : les fenêtres mal posées et les piliers mal scellés constituent des ponts thermiques mais offrent un abri pour la faune sauvage

Il n’est pas l’objet du présent article de démontrer la gravité de cet impact qui est décrit dans des nombreuses publications (Agnelli et al. 2010 ; Reiter et Zahn 2006 ; Klar et al. 2018 ; Mauer-Wohlatz et al. 2011). La question qui se pose est si les acteurs des rénovations ont conscience de ces effets et s’interrogent sur l’influence potentielle de leurs travaux sur les animaux sauvages.

Côté propriétaires, 45 % seulement des personnes interrogées ont déjà effectué des travaux susceptibles de modifier les habitats des cavicoles, ou prévoient de le faire dans un avenir plus ou moins proche. La base statistique est donc faible, mais la tendance assez nette : 37% ne se sont jamais posés la question de l’impact potentiel de leurs travaux sur les animaux sauvages. 4 % déclarent y avoir pensé, mais qu’ils ne voulaient plus d’animaux dans la structure de leur maison après les travaux. Seulement 4 % affirment qu’ils étaient conscients du problème et qu’ils ont fait un effort pour minimiser l’impact (cf. figure 5).

Figure 5 : La prise en compte de l’influence potentielle des travaux sur la faune sauvage, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Figure 5 : La prise en compte de l’influence potentielle des travaux sur la faune sauvage, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Au niveau des professionnels du bâtiment, la question des ‘sauvages’ dans la structure des bâtiments n’est visiblement pas une priorité non plus. Sur les sites Internet français de la profession, la question n’est que très rarement abordée, et les quelques sites qui parlent des ‘sauvages’ le font très majoritairement sous l’aspect de ‘nuisibles’, et sans aucune graduation. « Des combles mal isolés attirent de nombreux nuisibles. » écrit un site (https://www.hellowatt.fr/isolation-des-combles/), en précisant « Oiseaux, rats, souris, insectes, fouines et autres chauves-souris élisent facilement domicile dans la toiture… ». Un autre affirme «[…] les risques de santé sont importants et la présence d’une seule chauve-souris peut se transformer en une infestation rapide et ingérable » (https://www.vos-combles.fr/comment-debarrasser-nuisibles/chauves-souris/). Notamment les chauves-souris sont désignées comme un taxon à problème : « Autant que possible, visitez les combles pour […] détecter des problèmes de nuisibles (chauves-souris, capricornes et termites) » (https://www.tendance-travaux.fr/renovation/les-points-techniques-a-verifier-avant-dacheter-une-maison).

Ce discours des professionnels a sans doute une incidence sur la représentation que les populations se font des ‘sauvages’, mais il est difficile de dénouer causes et conséquences : dans une optique commerciale, les arguments mis en avant reprennent aussi les craintes exprimées par les clients potentiels.

Une petite moitié des sites qui évoquent des animaux sauvages rappelle tout de même la législation12, mais les informations données ne sont souvent pas correctes et les éléments en leur faveur peu élaborés par rapport au discours sur leur caractère nuisible. Enfin, il est à noter qu’un quart des sites qui traite le sujet suggère l’intervention de spécialistes et/ou la mise en place de nichoirs ou d’autres solutions pour minimiser l’impact potentiel des travaux.

On peut bien entendu argumenter que la question des ‘sauvages’ et de leur protection n’est pas au cœur du métier des professionnels du bâtiment, et qu’il est tout à fait normal que les sites de sociétés de construction ou de rénovation mettent l’accent sur la qualité de leurs produits et de leur travail plutôt que sur des aspects de protection de la faune sauvage. Cependant, l’orientation des sites est aussi à l’image d’une sensibilité plus générale envers des questions environnementales. En effet, les résultats varient fortement en fonction des pays. Si on analyse les sites français des professionnels du bâtiment pour les mots de recherche « chauves-souris » et « combles », presque les trois quarts mettent l’accent sur la protection contre les chauves-souris et seulement un grand quart thématise leur rôle écologique positif (cf figure 6). Le résultat est très différent si on analyse des sites allemands pour ces mêmes mots-clés : 90 % des sites mettent en avant des produits pour les chauves-souris (nichoirs, tuiles permettant l’entrée dans les combles), thématisent leur rôle écologique positif ou donnent des conseils pratiques favorables (réalisation d’une isolation thermique en préservant les chauves-souris) ; seulement 10% mettent l’accent sur la protection contre les chauves-souris. Il faut considérer ces chiffres avec une certaine prudence, car l’analyse s’est limitée aux premières 20 réponses affichées, mais la tendance est nette. La conscience écologique plus développée en Allemagne ne permet plus de considérer les chauves-souris comme des nuisibles. Qu’il s’agisse d’une conviction réelle ou d’un effort de s’adapter à une attente sociétale, pour la majorité des professionnels allemands du bâtiment un discours axé sur la thématique ‘chauves-souris = nuisibles’ ne semble plus possible à ce jour.

Figure 6 : Orientation des sites Internet français (n=20) et allemands (n=20) des professionnels du bâtiment sur la question des chauves-souris présents dans les combles

Figure 6 : Orientation des sites Internet français (n=20) et allemands (n=20) des professionnels du bâtiment sur la question des chauves-souris présents dans les combles

Bien évidemment, il n’est pas évident de déduire des priorités affichées sur Internet une pratique réelle de terrain. Cependant, l’entretien téléphonique auprès des entreprises locales du bâtiment confirme les tendances mises en évidence. La protection des animaux sauvages présents dans les combles n’est pas un sujet pour la majorité des artisans : « ça fait 10 ans que je travaille dans ce métier, et vous êtes la première à me poser cette question », s’exclame un spécialiste pour la rénovation des combles. Aucun artisan contacté se dit avoir être confronté à la thématique, et par conséquence la législation est peu connue : « vous êtes chez vous, vous pouvez faire ce que vous voulez », est la réponse la plus fréquente. D’ailleurs, au niveau des petites entreprises et pour les chantiers privés, la situation n’est pas si différente en Allemagne : malgré une conscience écologique plus développée, Bühler (in : Bundesamt für Naturschutz éd. 2016) note que l’artisan de base est peu informé et motivé, et Krebs (in : Bundesamt für Naturschutz éd. 2016) affirme qu’en absence de contrôles, les règlementations en faveur des espèces cavicoles ne sont respectées que dans un tiers des cas à Hambourg. Les différences culturelles sont plus importantes dans le discours officiel que dans la pratique.

Dans nos entretiens, face à l’inquiétude du ‘client’, les discours des artisans locaux visent clairement à rassurer : « personne ne viendra vérifier [si vos travaux ont chassé les chauves-souris] », promet un chef d’entreprise, et un autre minimise l’impact potentiel : « ne vous inquiétez pas, ils iront nicher ailleurs ». A noter tout de même, à défaut de connaître le sujet et de posséder de réelles compétences, deux artisans suggèrent le décalage du chantier pour ne pas gêner la reproduction, et promettent de se renseigner sur la question.  

Il n’est bien sûr pas question ici de porter un jugement de valeur : le rôle d’un professionnel du bâtiment est d’abord de réaliser des chantiers afin d’assurer la rentabilité économique de son entreprise. Il n’est pas obligé d’être un naturaliste préoccupé par l’avenir des espèces cavicoles. Cependant, le constat général est plutôt inquiétant : dans leur majorité, les propriétaires ne se posent pas la question de l’impact éventuel de leurs travaux. Les professionnels du bâti sont peu sensibilisés et peu au courant de la réglementation, et, de toute façon, il n’y a aucun contrôle d’instances tiers. L’impact potentiel des travaux sur la faune sauvage n’est pas un problème dont les acteurs sont conscients.

5. Influence des rénovations sur la perception des espèces sauvages

Non seulement, les rénovations réduisent la place des ‘sauvages’ dans les constructions, mais elles risquent aussi de modifier nos perceptions. L’enquête a en effet démontré que la ‘saleté’ liée à la présence de la faune sauvage aux abords des maisons est considérée comme la gêne majeure. Il se pose alors la question de savoir s’il y a un lien entre la qualité du bâti et notre volonté à accepter les ‘sauvages’.

Une première approche de la question est possible en croisant les déclarations des propriétaires au sujet de leur ressenti en cas de la présence de ‘sauvages’, avec l’ancienneté de leurs bâtiments. L’analyse des données suggère un lien évident entre les deux paramètres : en effet, 77 % des propriétaires des maisons construites avant 1950 se déclarent ravis de la présence d’animaux sauvages dans la structure de leur maison, et 18 % additionnels affirment être ravis malgré une certaine gêne, soit 95 % d’avis favorables. Dans les cas des maisons plus récentes, la proportion des avis positifs ne s’élève qu’à 62 % pour les maisons construites entre 2000 et 2010, et à 50 % pour les maisons neuves (cf. figure 7). En même temps, les avis négatifs, absents pour les maisons anciennes, atteignent 30 à 40 %. Ce résultat semble indiquer que plus une maison est neuve (et sans doute considérée comme ‘propre’ par le propriétaire), plus les inconvénients potentiels liés à la présence des espèces sauvages posent problèmes.

Figure 7 : Ressenti des propriétaires en cas de présence de la faune sauvage dans la structure de leur maison, en fonction de l'ancienneté du bâti (n=84)

Figure 7 : Ressenti des propriétaires en cas de présence de la faune sauvage dans la structure de leur maison, en fonction de l'ancienneté du bâti (n=84)

Bien évidemment, il est difficile de distinguer les causes des conséquences : une partie non négligeable des propriétaires de maisons anciennes a fait ce choix volontairement, et accepte ainsi plus facilement les inconvénients qui vont avec, y compris une certaine saleté liée à la présence de la faune sauvage. « C’est le charme de l’ancien’ qui se situe justement dans les imperfections » précise un propriétaire concerné, issus des catégories sociales aisées et bien sensibilisé aux questions environnementales. A l’inverse, lorsque l’on fait le choix d’une maison neuve, on a peut-être une sensibilité qui nous porte vers le propre, le net, la perfection. Notre perception conditionne en grande partie le choix de la maison que l’on achète. D’un autre côté, il y a sans doute aussi une influence de la qualité du bâti sur nos perceptions : quand on habite une maison neuve (ou fraîchement rénovée), on accorde plus d’importance à ce qu’elle reste impeccable. A l’inverse, les résidents de maisons anciennes, par choix délibéré ou pour des raisons de contrainte financière, sont confrontés au quotidien aux imperfections du bâti qui empêchent un hygiénisme excessif ; ils acceptent alors plus facilement un peu de saleté additionnelle apportée par la faune sauvage.

Pour évaluer l’impact de la qualité du bâti sur la perception de la faune sauvage, nous avons demandé aux propriétaires de préciser leur ressenti après des travaux de rénovation passés, ou, à défaut, dans l’hypothèse de rénovations futures. Seulement 37 % des répondants affirment toujours vouloir accepter la présence de ‘sauvages’ autour de leur maison après des travaux de rénovation, 7% des interrogés ne les ont jamais acceptés et 11 % n’affichent pas d’opinion sur le sujet. 35 % déclarent ne plus vouloir les accepter partout, et 11% mentionnent ne plus vouloir admettre la présence d’animaux après la rénovation (cf. figure 8).

Figure 8 : Perception des animaux sauvages dans la structure de la maison après une rénovation (passée ou future), selon l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Figure 8 : Perception des animaux sauvages dans la structure de la maison après une rénovation (passée ou future), selon l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Bien évidemment, la question a dû être posée comme une hypothèse pour la majorité des personnes interrogées, ce qui a nécessité de se projeter dans une situation non vécue. Les résultats ne sont pas moins intéressants : une moitié environ des personnes interrogées pense que des rénovations vont modifier leur perception des ‘sauvages’ et les amener à les accepter moins. De nouveau, il n’est pas question de porter un jugement de valeur suite à ce résultat : vouloir garder propre une maison fraîchement rénovée conduit nécessairement à l’élimination de toute source de saleté potentielle. Il est plutôt surprenant de constater que plus d’un tiers des personnes interrogées affirment toujours accepter des espèces sauvages, même si on peut supposer une certaine surévaluation, à cause de réponses ‘politiquement correctes’13 et des difficultés à se projeter dans la situation. Peut-être aussi ce sont les espèces les ‘plus hygiéniques’, geckos ou lézards par exemple, qui ont été imaginées dans la réponse.

Néanmoins, le constat est plutôt inquiétant. Les nouvelles normes et orientations thermiques aboutissent à la construction de maisons hermétiques qui n’offrent plus de refuges pour la faune sauvage, et les rénovations thermiques tendent à détruire les sites de reproduction existants. Par ailleurs, notre capacité à accepter les ‘sauvages’, potentiellement salissants, diminue avec la qualité du bâti. Dans ces conditions, « accueillir une nature sauvage bouleverse les critères d’ordre et de propreté des espaces urbains […] » Scapino (2016 : 1). La maison parfaitement isolée constitue ainsi une évolution vers un « néo-hygiénisme » (Tozzi 2013).

Il y a donc à la fois une évolution objective et subjective qui tend à réduire la place de la faune sauvage en ville, sans que les acteurs soient conscients du problème. Bien évidemment, toutes les espèces urbaines n’utilisent pas les bâtiments pour se reproduire : les oiseaux qui construisent leurs nids sur des arbres ou dans les haies sont moins concernés. Cependant, notamment dans les centres-villes très minéralisés, la proportion d’espèces dépendantes des constructions est élevée, et même dans les lotissements composés de maisons individuelles avec jardins elles constituent une partie non négligeable des espèces qui nous entourent.

6. Solutions techniques versus appréciations esthétiques

L’abondance des espèces urbaines a déjà fortement diminué au cours des dernières décennies, et les nouvelles orientations thermiques risquent de conforter cette évolution. On peut alors observer une contradiction claire dans les orientations des politiques publiques : d’un côté, dans un contexte de développement durable, le renforcement de la biodiversité est affiché comme un objectif majeur, et il y a une volonté d’y faire participer les villes par la protection de trames vertes et bleues. D’un autre côté, les orientations énergétiques (comme la densification des villes) ont des conséquences négatives sur l’abondance des espèces sauvages et sur la biodiversité urbaine. La question qui se pose alors est : comment pourrait-on réduire les effets négatifs des rénovations thermiques et conforter la présence d’espèces sauvages en ville ?

Des solutions techniques existent : il est en effet possible d’intégrer des cavités dans les panneaux de rénovation thermique extérieure, ou alors d’accrocher des aides à la reproduction sur la façade des maisons. Pour une grande majorité des espèces, des nichoirs artificiels peuvent compenser les pertes causées par les rénovations, et des produits adaptés sont décrits dans de nombreuses publications et disponibles dans le commerce (Beck et Schelbert 1999 ; Richarz et Hormann 2008 ; Peterlein et Sievert 2015 ; Voigt et al. 2016 ; Hechenbichler 2017) : il y a des nids artificiels pour les hirondelles, des nichoirs pour martinets, des ‘hôtels’ pour moineaux, et une variété de solutions pour les chauves-souris, adaptées aux besoins spécifiques des espèces14.

Il se pose alors la question de l’acceptation de ces solutions par les propriétaires des logements. Les résultats de notre enquête sont mitigés : 33% des personnes interrogées déclarent de ne pas vouloir des aides à la reproduction pour oiseaux sur la façade de leur maison, et 44% disent la même chose pour les chauves-souris (cf. figure 9). 5% affirment disposer déjà d’un tel équipement. 17% (oiseaux) et 8% (chauves-souris) disent avoir déjà pensé à accrocher des nichoirs, mais de ne pas l’avoir encore fait. Enfin, un tiers environ (36% pour les oiseaux et 31 % pour les chauves-souris) déclarent n’y jamais avoir pensé, mais trouvent l’idée bonne. A noter, 6-8% additionnels seraient prêts à installer des nichoirs dans le jardin mais pas trop proche de leur maison.

Figure 9 : Acceptation d’une aide à la reproduction pour oiseaux ou chauves-souris sur la façade de sa maison, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Figure 9 : Acceptation d’une aide à la reproduction pour oiseaux ou chauves-souris sur la façade de sa maison, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

On peut donc conclure qu’actuellement le nombre de maisons équipées d’aides à la reproduction pour la faune sauvage est faible, mais qu’il existe un potentiel non négligeable pour améliorer la situation. Des freins multiples empêchent les perceptions positives théoriques de se traduire en une réalité : d’un côté, on constate un manque d’information et d’incitation. « Je n’y avais jamais pensé, mais c’est une bonne idée » est une remarque assez fréquemment entendue dans les discussions autour du questionnaire.

De l’autre côté, le choix et la mise en place d’un nichoir nécessitent des connaissances spécifiques : quelles espèces existent dans le quartier ? Quelle espèce est susceptible de nicher sur la façade de ma maison, compte tenu sa hauteur, son orientation, les perturbations à proximité (bruit, passage, lumière, prédateurs…) ? Quel produit choisir, comment et où le fixer ? Les réponses à ces questions ne sont pas simples, et il est fréquent que des bonnes intentions ne se concrétisent pas parce que le propriétaire « ne sait pas quel type de nichoir choisir » (41% des freins évoqués) ou parce qu’il « ne sait pas où le fixer » (34%). D’autres raisons sont évoquées pour expliquer l’absence de nichoirs sur la façade alors même que le propriétaire y est à priori favorable, mais elles sont bien moins fréquentes : « ne pas savoir où acheter un bon nichoir », « ne pas savoir le fixer soi-même », des « problèmes de voisinage », le « coût des bons nichoirs », ou encore la « présence d’un chat très chasseur ».

Pour avoir une vision plus claire de l’offre et de la demande, des entretiens ont été menés auprès des responsables de rayons des grandes jardineries proposant des nichoirs. Côté offres, il faut constater que des différences considérables existent entre les magasins. On y trouve des ‘vrais’ nichoirs, mais aussi et surtout des objets de décoration : nichoirs trop petits, aux couleurs agressives, et dans des formes fantaisistes. Un seul magasin s’est spécialisé sur des produits de qualité et propose exclusivement des nichoirs conçus pour être utiles ; l’approche naturaliste correspond ici clairement à la stratégie commerciale mise en avant. Dans les autres enseignes, la qualité décorative d’un nichoir semble plus importante, à des degrés variés.

Figure 10 : L’offre des jardineries : des vrais nichoirs, mais aussi des objets de décoration

Figure 10 : L’offre des jardineries : des vrais nichoirs, mais aussi des objets de décoration

En grande partie, on peut expliquer ce choix par le principe de l’offre et la demande. « Les gens […] cherchent des nichoirs jolis, pour des ‘petits oiseaux’ » précise un vendeur. Un responsable de rayon d’un autre magasin confirme : « ce qu’on vend le plus, ce sont les nichoirs décorés ». L’intérêt écologique, l’aide supposée pour la faune sauvage devient alors un prétexte pour l’achat d’un objet de décoration. Les magasins s’adaptent à la demande, et les vendeurs et responsables de rayon des magasins paraissent désemparés face à l’ignorance de la majorité de leurs clients. « Les gens ne connaissent rien », lance un. « Comment voulez-vous qu’on les conseille ? Moi je ne sais pas quels oiseaux ils ont chez eux ! ».

Il est difficile de chiffrer la part des ‘vrais’ et des ‘faux’ nichoirs, d’autant plus qu’une multitude de produits intermédiaires existent. D’après les renseignements récoltés auprès les responsables de rayon, on peut estimer la quantité totale des nichoirs vendus par les cinq plus grandes jardineries de l’agglomération de Perpignan à plusieurs centaines par an, mais très majoritairement il s’agit d’objets de décoration peu utiles, de nichoirs non adaptés aux oiseaux locaux, et d’abris pour les jardins. Trois magasins proposent également des abris pour chauves-souris, mais les quantités vendues sont faibles (quelques unités vendues par magasin et par an).

7. Les ‘sauvages’, sont-ils encore sauvage ?

Si l’efficacité écologique de certains nichoirs vendus peut être limitée, les entretiens démontrent le fort intérêt porté par beaucoup de clients à la faune sauvage, et en particulier aux oiseaux. Les efforts pour les soutenir ne se limitent pas à la vente d’aides à la reproduction, bien au contraire. « Les nichoirs, on n’en vend pas beaucoup », s’exclame un vendeur, « mais la nourriture pour oiseaux sauvages, elle part aussi vite que pour les chiens et les chats ». Un autre précise : « la vente de nourriture pour oiseaux sauvages a explosé ces dernières années ». Ce constat confirme d’ailleurs bien l’observation de Million (2019) pour la boutique de la LPO qui a enregistré un dédoublement des ventes entre 2014 et 2018.

Les résultats de notre enquête auprès des propriétaires soulignent cet engouement pour l’alimentation. Interrogés sur leurs actions en faveur de la faune sauvage, le nombre de personnes qui pratiquent l’alimentation des oiseaux est environ deux fois plus important que ceux qui installent des aides à la reproduction (nichoirs pour oiseaux, abris à chauve-souris et hôtels à insectes confondus). Si l’utilité écologique de la pratique est discutée (Fair 2006 ; Berthold et Mohr 2017, Wilcoxen 2015, Jones et Howard 2006, Million 2019, Jones 2011), elle facilite le contact avec la faune sauvage et présente un intérêt pédagogique non négligeable. Ainsi, l’observation des oiseaux autour des sites d’alimentation peut être un point de départ pour éveiller un intérêt plus général sur la nature qui nous entoure, et elle facilite l’acquisition de quelques connaissances de base sur les espèces présentes. Fuller (2012 : 249) va même plus loin, notant un intérêt psychologique de l’alimentation des oiseaux : “It has been suggested that interactions with nature, such as feeding birds, could have beneficial consequences for human health”.

L’avantage de l’alimentation réside dans le fait que l’abondance de quelques espèces très communes augmente (Fuller et al. 2008) ; par ailleurs, les oiseaux, attirés par la nourriture, deviennent plus visibles, alors que l’effet est bien moins évident dans le cas des nichoirs : les oiseaux sont invisibles à l’intérieur et très discrets autour de leur site de reproduction. Cependant, la pratique pose une question plus générale sur notre perception de la nature et le caractère du ‘sauvage’. Des espèces maintenues ou même attirées par des mesures artificielles sont-elles encore des ‘sauvages’ ? Ou deviennent-elles, par leur forte visibilité et par la régularité de leur présence aux sites d’alimentation permanents, des nouveaux animaux de compagnie, plus faciles à entretenir qu’un animal domestique, et avec bien moins de contraintes ? En voulant apporter notre aide, ne cherche-t-on pas à contrôler les ‘sauvages’, à les domestiquer, pour « donner à l'homme l'assurance de sa maîtrise sur le vivant » (Dominguez 2008 : 94) ?

Si la forte proportion de personnes impliquées notamment dans l’alimentation des oiseaux sauvages peut laisser supposer une telle tendance, il faut noter qu’un nombre comparable de propriétaires adopte une position fondamentalement opposée, en déclarant de vouloir « laisser faire la nature », ou de « réduire l’entretien et de laisser un bout du jardin sauvage ». « Les ‘sauvages’, ils doivent rester sauvage », explique une personne interrogée.

Un troisième groupe, un peu moins nombreux, adopte une stratégie intermédiaire, en voulant améliorer les conditions de survie pour la faune sauvage par des mesures moins artificielles, en renonçant par exemple aux pesticides, ou en plantant des espèces qui apportent une nourriture pour la faune (espèces mellifères ou arbustes à baie).

8. L’éducation, une clé pour la reconsidération du sauvage ?

La perception du sauvage est d’abord une question culturelle (Berque 2010). Les visions diffèrent entre les pays, mais l’acceptabilité sociale de la nature sauvage dépend aussi du groupe socioculturel considérée (Partoune 2018). L’éducation est ainsi un facteur clé qui détermine notre perception. Dans cette optique, il faut clairement distinguer deux aspects qui peuvent être complémentaires.

D’un côté, il y a la compétence du ‘naturaliste’, ce qui implique par exemple de connaitre les espèces d’oiseaux de son jardin et de savoir quel abri choisir. La proportion de naturalistes parmi la population générale est faible : les réponses à l’enquête suggèrent que moins de 5 % des personnes interrogées appartiennent à cette catégorie, constat confirmé d’ailleurs par d’autres études (Marco et al. 2014). Les compétences naturalistes n’étant pas ou peu enseignées à l’école (Gerl et al. 2018, 2019), l’appartenance à un groupe socioculturel n’est pas déterminante : on peut très bien posséder un niveau bac+8 sans être capable de reconnaitre une seule espèce d’oiseau, et connaître l’avifaune de son jardin alors qu’on ne possède qu’une formation scolaire de base. Dans l’enquête, il n’y avait pas de lien évident entre le niveau scolaire des personnes interrogées et le nombre d’espèces citées.

De l’autre côté, notre éducation détermine aussi notre perception du sauvage. Cette perception peut dériver de nos connaissances. Par exemple, l’écologue, quand il regarde une friche, ne voit pas une parcelle mal entretenue et une végétation anarchique qu’il faut maîtriser. Il la regarde sous l’aspect des habitats potentiels qu’elle offre, et se réjouit du ‘désordre’ à cause des bienfaits en terme de biodiversité. Cependant, notre perception peut aussi être déconnectée des connaissances écologiques : une meilleure éducation peut par exemple nous amener à mieux considérer le sauvage pour des raisons éthiques ou philosophiques. L’analyse des réponses du questionnaire semble soutenir cette hypothèse : le ressenti des propriétaires en cas de présence de ‘sauvages’ dans la structure de leur maison est plus positive pour les personnes possédant un bac+5 (>80% d’avis positifs) que pour ceux avec une formation scolaire moindre (58-67%, cf. figure 11). En même temps, pour les personnes avec une formation académique affinée, l’option « dénicher les ‘sauvages’ » ne semble plus être une solution acceptable.

Figure 11 : Ressenti en cas de présence de faune sauvage dans la structure de la maison en fonction de l’éduction, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Figure 11 : Ressenti en cas de présence de faune sauvage dans la structure de la maison en fonction de l’éduction, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

9. Conclusions

Si l’échantillonnage de notre étude ne nous permet pas de démontrer une incidence directe entre efficacité thermique et les conséquences négatives pour une partie de la faune sauvage en ville, ce travail identifie les liens qui existent entre la qualité des bâtiments et la présence et la perception de la faune sauvage. Ainsi, l’hypothèse que les efforts actuels vers une meilleure isolation des bâtiments, qu’il s’agisse de nouvelles constructions ou de rénovations, vont fragiliser la place des ‘sauvages ‘ en ville, semble se confirmer : non seulement les bâtiments performants au niveau thermique n’offrent plus de sites de reproduction, mais en plus il y a un lien évident entre la qualité de nos maisons et notre capacité à accepter le sauvage autour de nous. Il y a ici un parallèle intéressant avec l’agriculture, où la tendance vers une plus grande efficacité de production a conduit à effondrement dramatique de la biodiversité et de l’abondance des populations. La parcelle agricole ‘parfaite’, comme la maison ‘parfaite’, n’offre plus de niches aux espèces sauvages. La performance et l’intensification s’opposent par nature à la biodiversité.

Comment peut-on alors inverser la tendance ? L’enquête auprès des particuliers ainsi que les entretiens avec les professionnels pointent d’abord sur un déficit important de sensibilisation à la question. Les acteurs privés autant que les acteurs professionnels sont en effet rarement conscients des conséquences potentielles de leurs actions sur la faune sauvage. Dans les villes allemandes, on observe depuis une dizaine d’années l’apparition de guides visant à réconcilier la rénovation thermique et la biodiversité, ou plus largement la conservation des espèces cavicoles ; certains sont édités par les collectivités (Tauchert 2015 : Worms, Klar et al. 2018 : Hambourg), d’autres par des associations de protection de l’environnement (Maurer-Wohlatz, 2011 : Hannovre, Peterlein et Sievert 2015 : Leipzig). En France, la prise de conscience était un peu plus tardive, mais des premières études (Nowicki 2018) et des fiches techniques à destination des professionnels et/ou des particuliers commencent à être disponibles depuis quelques années (CAUE et LPO Isère éd., n.d. ; EGF-BTP éd 2019). Cependant, les entretiens effectués dans le cadre de la présente étude montrent clairement que beaucoup de travail de sensibilisation et d’information reste à faire. Sans doute, les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer à cet égard : peut-être il sera possible de modifier les pratiques professionnelles et organisationnelles peu ou pas favorables à la biodiversité par la mise en place de guides et de formations, pour changer le regard sur le sauvage en ville (De Baer et al. 2013).

Il est intéressant de noter qu’une forte majorité des personnes interrogées se déclare très favorable à la présence des espèces sauvages autour de leurs maisons, et une moitié environ accepterait la mise en place d’aide à la reproduction. Il faut bien-entendu être prudent quand on analyse les affirmations des personnes interrogées : il peut exister une grande différence entre le plaisir d’une présence virtuelle de ‘sauvages’ (« je serais favorable ») et la réalité vécue (déjections). Aussi, il faut souligner que l’acceptation de la faune sauvage augmente avec la distance de sa propre maison : le taux de réponses positives pour les aides à la reproduction, se situe autour de 58 % pour la façade de sa maison, mais augmente à 75 % si on inclut le jardin et dépasse même les 85 % pour les bâtiments publics. Le soutien de principe est clairement plus fort que l’envie d’accepter des sauvages trop près de son lieu de vie.

Malgré ces réserves, l’acceptation théorique des sauvages semble bien supérieure à la mise en place de mesures concrètes pour les favoriser. Ce fait s’explique d’abord par un manque de sensibilisation et de connaissances. Une campagne d’information bien menée, par exemple dans les périodiques municipaux pour mieux s’adapter à la situation locale, pourrait apporter les éléments techniques nécessaires et permettre aux bonnes intentions de se concrétiser. Par ailleurs, on pourrait aussi imaginer une mise à disposition gratuite de nichoirs par les collectivités. La démarche, qui représente certes un coût, s’est avérée très efficace dans le cas des composteurs.

Peut-on modifier la règlementation et imposer la mise en place de mesures en faveur de la biodiversité pour les nouvelles constructions et les rénovations thermiques ?

La préservation des espèces protégées est un principe d’intérêt général, et la modification de leurs habitats (et notamment la destruction de leurs sites de reproduction) est déjà interdite. Les articles de la loi protègent non seulement les espèces menacées mais aussi la nature ordinaire, y compris des espèces communes comme les moineaux par exemple. Cependant, « aucune disposition particulière n’impose aux projets de construction et aux bâtiments existants, qui doivent répondre à l’objectif d’amélioration des performances énergétiques, de prendre en compte la biodiversité », précise la fiche Biodiversité & bâti n°18 (CAUE et LPO Isère éd, n.d.). S’il semble difficile d’imposer par la loi une place pour la faune sauvage, on pourrait imaginer de rendre obligatoire la mise en place de nichoirs, d’abris en excroissance ou d’inclusion de gîtes dans les murs, pour obtenir des subventions dans le cas des rénovations thermiques. Un tel dispositif est actuellement en discussion en Allemagne (Bundesamt für Naturschutz (éd.) 2016).

Enfin, pour donner plus de place à la nature en ville, il va falloir repenser notre perception des ‘sauvages’. La nature ne peut pas être maîtrisée et aseptisée (Blanc 2000 ; Lapp 2005). La nature est aussi incertaine (Arnould 2011). Accepter le sauvage, c’est aussi accepter le désordre, le manque de contrôle, et parfois même la ‘saleté’. C’est accepter non seulement les « ‘bons’ mais aussi les ‘mauvais’ représentants de la diversité » (Tozzi 2013). Peut-être une telle vision s’oppose à nos habitudes et à notre culture. Peut-être aussi un changement de notre perception n’est pas possible sans l’acquisition de connaissances : compléter la reconnaissance théorique de la place des ‘sauvages’ en ville par des compétences ‘naturalistes’ et écologiques aurait sans doute une influence positive. Peut-être faudrait-il donner une place bien plus importante à ce savoir dans les programmes scolaires, pour former des futurs citoyens responsables. Dans une époque où la conservation de la biodiversité devient un objectif important des orientations politiques, la connaissance (et la reconnaissance) des espèces semble en effet être une compétence incontournable dans l’aménagement du territoire.

Redonner la place aux ‘sauvages’ dans les villes, c’est non seulement une réconciliation avec la « nature ordinaire » (Godet 2010) qui présente un atout pédagogique et psychologique. C’est aussi une participation à la conservation de cette biodiversité que nous voulons préserver. Les espèces potentiellement favorisées sont bien plus nombreuses que l’on imagine, incluant p.ex. des oiseaux autrefois menacés comme le faucon pèlerin qui est en train de devenir une espèce anthropophile (Cugnasse 2004). Ainsi, une stratégie de type « win-win ecology » (Rosenzweig, 2003) est possible même dans les villes, malgré leur degré important d’artificialisation.

Finalement, il est important de souligner que les nouvelles orientations énergétiques ne sont en toute évidence pas le seul responsable pour le déclin des espèces urbaines. Des jardins trop propres, trop minéralisés, n’offrant plus d’alimentation ni d’abris pour la faune sauvage, fragilisent également les populations. Les efforts actuels de densifier les villes constituent une autre menace, car ils réduisent mécaniquement la place et la nourriture potentielles pour les espèces urbanophiles. La crise de la nature sauvage en ville s’explique par une multitude de facteurs. Ainsi, les relations qui existent entre la qualité du bâti et la faune urbaine doivent nous amener à une réflexion plus large sur la place de la faune sauvage en ville.

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Sitographie

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Notes

1 Le Suivi temporel des oiseaux communs (STOC), un programme de science citoyenne coordonnée par le Muséum national d’Histoire naturelle et la LPO, évalue les variations spatiales et temporelles de l’abondance des populations nicheuses d’oiseaux communs en France depuis 1989. L’indice « espèces des milieux bâtis » est construit en utilisant 13 espèces : Tourterelle turque, Martinet noir, Hirondelle de fenêtre, Hirondelle rustique, Rougequeue noir, Rougequeue à front blanc, Choucas des tours, Pie bavarde, Chardonneret élégant, Verdier d’Europe, Serin cini, Moineau domestique, Moineau friquet. Retour au texte

2 Le terme cavicole est utilisé ici pour désigner les espèces qui s’abritent ou se reproduisent dans des cavités : fissures, trou dans les murs et autres imperfections du bâti, mais aussi caissons de volets roulants, ou combles… Il peut s’agir d’oiseaux, de chauves-souris ou de lézards / geckos. Les semi-cavicoles nichent dans des cavités plus ouvertes. Nous avons écarté de la présente étude les mammifères, trop discrets pour certains et considérés comme nuisibles pour d’autres (rats...). Retour au texte

3 Pour éviter la distorsion des réponses, les questionnaires seulement partiellement remplis ont été écartés de l’analyse. Retour au texte

4 La grande majorité des sites était constituée par des entreprises de rénovation ; quelques rares sites étaient spécialisés à la vente de matériaux de construction. Retour au texte

5 Botanic, Jardiland, Les jardins de Gabiani (Perpignan), Villaverde (Pia), Nature Innov (Toulouges) Retour au texte

6 Une seule espèce, Tarentola mauritanica (L.) est présente dans le secteur d’étude, connue par le grand public sous l’intitulé ‘gecko’. Pour les ‘lézards’, l’espèce potentiellement présente est Podarcis muralis (Laurenti). Retour au texte

7 Le terme ‘sauvages’ est utilisé dans le cadre du présent article pour désigner des espèces spontanément présentes en ville, sans préjuger de leur comportement qui peut être plus ou moins étroitement lié à l’homme. Dans ce sens, un moineau ou même un pigeon est une espèce sauvage », contrairement à un chat ou un chien. Si le terme ‘sauvage’ peut prêter à confusion, il s’est imposé au cours de ces dernières années dans la littérature dédiée aux espèces présentes en ville sans être implantées par l’homme – d’où le titre du colloque « le sauvage urbain ». Retour au texte

8 L’enquête s’est volontairement limitée à des espèces très connues. Dans cette optique, il a été préféré de proposer des ‘hirondelles’ plutôt que des martinets pourtant plus présents en milieu urbain, par crainte que cette dernière espèce ne soit pas assez connue par le grand public. De la même façon, nous avons préféré associer les rouges-gorges aux rougesqueues moins connus. Retour au texte

9 Driskoll propose une classification des animaux basée sur six dimensions : utile, intelligent (« smart-stupid »), répondant, attachant (« lovable »), dangereux, important. D’après son étude, les espèces jugées « attachantes « et « répondantes » (p.ex. à la mise en place d’un nichoir ou d’une alimentation) sont parmi les plus appréciées. Retour au texte

10 L’image négative de la pie a été véhiculée notamment par l’opéra de Rossini (La gazza ladra La pie voleuse), inspiré du mélodrame de Palaiseau (La pie voleuse ou la servante), et plus récemment par le 21ème album de Hergé (Les bijoux de la Castafiore). Par ailleurs, la pie est classée nuisible en France, à cause de son impact potentiel sur les passereaux. Retour au texte

11 La consommation des jeunes pigeons sauvages, ‘récoltés’ juste avant leur envol, était une pratique localement encore courante dans la deuxième partie du XXème siècle (obs. pers. à Vienne en 1975)  Retour au texte

12 L’article 3-II de l’Arrêté ministériel du 29/10/2009 interdit la destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction sous peine de se voir sanctionné de 15000 € d’amende et/ou 1 an d’emprisonnement. Il fixe aussi la liste des espèces protégées sur l'ensemble du territoire qui inclut les oiseaux ‘ordinaires’ présents en ville (martinets, hirondelles, moineaux, rougesqueues…). Retour au texte

13 Le ‘politiquement correct’ désigne une attitude qui consiste à utiliser des formulations ou à modifier une réponse pour ne pas heurter certaines catégories de personnes. Dans le cas présent, l’étude sur la place de la faune sauvage en ville pouvait certainement être perçue comme un travail en faveur des ‘sauvages’, ce qui a pu entraîner une orientation des réponses. Retour au texte

14 Les solutions techniques peuvent en effet être efficaces pour la majorité des espèces cavicoles. Les oiseaux acceptent assez facilement les nichoirs mis à leur disposition. Les espèces de chauves-souris qui s’abritent dernière un volet, dans l’encadrement d’une fenêtre mal réalisé ou dans le caisson d’un volet roulant ancien peuvent très bien s’installer dans un nichoir artificiel appliqué au mur. Pour d’autres espèces cependant, la seule solution consiste à maintenir un accès aux combles, car ils nécessitant des volumes plus importants. Retour au texte

Illustrations

  • Figure 1 : Présence (en %) de la faune sauvage dans la structure des bâtiments selon l'ancienneté du bâti, d'après l'enquête auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 1 : Présence (en %) de la faune sauvage dans la structure des bâtiments selon l'ancienneté du bâti, d'après l'enquête auprès des propriétaires (n=84)

  • Figure 2 : La perception des animaux sauvages dans la structure de votre maison, d’après l’enquête effectuée auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 2 : La perception des animaux sauvages dans la structure de votre maison, d’après l’enquête effectuée auprès des propriétaires (n=84)

  • Figure 3 : Le capital sympathie de quelques ‘sauvages’ présents en ville, d’après l’enquête réalisée auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 3 : Le capital sympathie de quelques ‘sauvages’ présents en ville, d’après l’enquête réalisée auprès des propriétaires (n=84)

  • Figure 4 : Les imperfections du bâti : les fenêtres mal posées et les piliers mal scellés constituent des ponts thermiques mais offrent un abri pour la faune sauvage

    Figure 4 : Les imperfections du bâti : les fenêtres mal posées et les piliers mal scellés constituent des ponts thermiques mais offrent un abri pour la faune sauvage

  • Figure 5 : La prise en compte de l’influence potentielle des travaux sur la faune sauvage, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 5 : La prise en compte de l’influence potentielle des travaux sur la faune sauvage, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

  • Figure 6 : Orientation des sites Internet français (n=20) et allemands (n=20) des professionnels du bâtiment sur la question des chauves-souris présents dans les combles

    Figure 6 : Orientation des sites Internet français (n=20) et allemands (n=20) des professionnels du bâtiment sur la question des chauves-souris présents dans les combles

  • Figure 7 : Ressenti des propriétaires en cas de présence de la faune sauvage dans la structure de leur maison, en fonction de l'ancienneté du bâti (n=84)

    Figure 7 : Ressenti des propriétaires en cas de présence de la faune sauvage dans la structure de leur maison, en fonction de l'ancienneté du bâti (n=84)

  • Figure 8 : Perception des animaux sauvages dans la structure de la maison après une rénovation (passée ou future), selon l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 8 : Perception des animaux sauvages dans la structure de la maison après une rénovation (passée ou future), selon l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

  • Figure 9 : Acceptation d’une aide à la reproduction pour oiseaux ou chauves-souris sur la façade de sa maison, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 9 : Acceptation d’une aide à la reproduction pour oiseaux ou chauves-souris sur la façade de sa maison, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

  • Figure 10 : L’offre des jardineries : des vrais nichoirs, mais aussi des objets de décoration

    Figure 10 : L’offre des jardineries : des vrais nichoirs, mais aussi des objets de décoration

  • Figure 11 : Ressenti en cas de présence de faune sauvage dans la structure de la maison en fonction de l’éduction, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

    Figure 11 : Ressenti en cas de présence de faune sauvage dans la structure de la maison en fonction de l’éduction, d’après l’enquête auprès des propriétaires (n=84)

Citer cet article

Référence électronique

Johanna Faerber, « Quand les villes n’enchantent plus les oiseaux : nouvelles orientations énergétiques et biodiversité urbaine », Textes et contextes [En ligne], 16-2 | 2021, publié le 10 décembre 2021 et consulté le 21 novembre 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/textesetcontextes/index.php?id=3271

Auteur

Johanna Faerber

Maître de conférences au Département de Géographie-Aménagement, biogéographe, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Université de Perpignan – Via Domitia, 52 av. Paul Alduy, 66100 Perpignan

Droits d'auteur

Licence CC BY 4.0