1 Introduction
L’entreprise se définit à la fois comme un système organisationnel (son rôle dans la détermination d’un marché) et comme un ensemble composite de discours relayés par des acteurs. Cet ensemble constitue une communauté linguistique qui se caractérise par l’utilisation de termes qui lui sont propres. L’entreprise (ou l’organisation) est un système sémiotique complexe dont les métiers font partie.
La multiplicité des désignations des métiers commerciaux (assistant, attaché commercial, technico-commercial, responsable de comptes, etc.) est source de confusion pour tous ceux qui de près ou de loin ont à voir avec ceux-ci : entreprises, agences d’emploi ou sites de recrutement, étudiants ou personnes en recherche d’emploi ou même encore salariés en veille sur les réseaux.
Le présent travail propose une étude socioterminologique et ethnoterminologique appliquée à un Groupe international (Michelin) et tend à dégager la terminologie employée pour désigner les métiers. Celle-ci met en relation la terminologie recueillie sur différents supports (organigrammes, documents, site internet etc.), par des enquêtes de terrain, et l’histoire de l’entreprise, sa culture, ses valeurs, une vision donc à la fois synchronique et diachronique. Elle souligne les difficultés que peut rencontrer un groupe international avec une organisation complexe, où certaines différences conceptuelles sont remarquables entre pays. Enfin, cette étude met à jour les relations des salariés avec leur propre image (Bourdieu parlerait de « distinction ») ou celle qu’ils veulent donner sur les réseaux sociaux professionnels par l’utilisation d’une terminologie plus ou moins équivalente à celle de l’entreprise.
Après avoir précisé le cadre conceptuel qui détermine la recherche et en fait l’originalité, nous développerons la méthodologie employée ainsi que les résultats obtenus qui conduisent à une socioterminologie et une ethnoterminologie en actes. Les résultats soulignent les difficultés à désigner de façon globale ces métiers mais amènent aussi à réfléchir sur l’importance du Sens transmis par ces désignations et convoquent la notion de terminologie raisonnée au sein d’une entreprise.
Compte-tenu de l’ampleur de la recherche menée, nous ne donnerons dans les limites de cet article que quelques exemples tant dans la constitution du corpus des termes et fiches terminologiques que dans l’approche conceptuelle des métiers commerciaux. L’intégralité du corpus des termes se trouve en annexe sous forme d’index.
2 Le cadre conceptuel
Il convient de préciser les contours de l’analyse en ayant recours aux concepts essentiels qui la guident.
2.1 Socioterminologie
L. Guilbert avait noté la relation de la terminologie et de la sociolinguistique et indiqué que la signification du terme « relève et de la rhétorique et de la grammaire et de la sociolinguistique » (1973 : 21). Les premiers auteurs en socioterminologie sont apparus vers 1970 notamment avec l’école de Rouen avec L. Guespin et son développement s’est amplifié dans les années 1980. Au Québec, une approche ethnographique et sociolinguistique de M. Heller et alii (1982) aborde les relations et interactions linguistiques des enquêtes sociolinguistiques consacrées au fonctionnement des termes.
En France, se développe une attitude descriptive mais ce lieu d’observation particulier vise à lui donner aussi une valeur d’utilité sociale, qui conduit à des interrogations sur les aménagements et équipements linguistiques. En 1993 déjà, les aspects terminologiques des pratiques langagières au travail étaient l’objet d’une journée d’études et posaient les questions relatives à la régulation des usages langagiers au travail malgré la diversité des postes, à la présence de langages de services face à la terminologie maison, au rôle de certaines terminologies d’entreprises comme modèle. Correspondant à l’étude de vocables véhiculant des significations réglées socialement, elle intègre la dimension synchronique et diachronique comme le souligne F. Gaudin (2003 : 7).
La socioterminologie se fixe comme objet l’étude de la circulation des termes en synchronie et en diachronie, ce qui inclut l’analyse et la modélisation des significations et des conceptualisations. […]. Elle relie la production de sens des termes avec les conditions de leur apparition. La circulation des termes est envisagée sous l’angle de la diversité de leurs usages sociaux, ce qui englobe à la fois l’étude des conditions de circulation et d’appropriation des termes envisagés comme des signes linguistiques et non comme des étiquettes de concepts (Gaudin 2005 : 81).
P. Lerat (1995 : 21) nous renvoie au caractère social des langues, qui s’appuie sur le caractère conventionnel et donc consensuel. Ce processus d’individuation par lequel une communauté tend à systématiser ses différences, à les sacraliser, à en faire un élément de référence, pouvant mener au concept d’identité se retrouve chez P. Bourdieu (1979), lorsqu’il analyse le concept de « distinction » et le besoin de reconnaissance, d’identité sociale.
L’élargissement de la terminologie à la socioterminologie permet de rendre compte des mécanismes d’usage, de la dynamique des termes et de leur circulation, sans faire abstraction des descriptions linguistiques (et sans pour autant s’y cantonner). Aussi la dimension diachronique est-elle investie permettant ainsi d’étudier les variations (Desmet 2007) et les phénomènes de mobilité, entre langue générale et langue de spécialité et inversement, (Dury et Picton 2009).
L’étude du parler d’entreprise a donné lieu, par exemple, à l’apparition de la pragmaterminologie.
2.2 Pragmaterminologie
La pragmaterminologie est l’observation et l’analyse des comportements langagiers d’une communauté permettant d’aboutir à l’identification d’un « sociolecte », sorte de jargon propre à cette communauté. L’entreprise est un lieu de production langagière tout à fait intéressant. En effet, D. de Vecchi (2007) s’étonne d’ailleurs qu’on puisse parler de culture d’entreprise ou même accepter cette notion de culture d’entreprise sans faire état des langages qui en font partie. L’entreprise parle une langue à part qui peut s’étendre à tout type de mot et dans tous les domaines. C’est une façon d’exprimer son identité et son savoir. Dès 1999, l’étude de ces parlers d’entreprise le mène à analyser l’oral, rarement pris en compte jusqu’alors. Dans la sphère professionnelle, il y a un dialecte social et chaque entreprise a son propre sociolecte (celui qui parle Renault n’emploiera pas le même vocabulaire que celui qui parle Peugeot). L’entreprise traduit avec ses propres mots, son propre vocabulaire, la façon dont elle fonctionne et dont elle est organisée.
Mais la pragmaterminologie diffère de la terminologie en ce qu’elle est tournée vers l’acteur. L’approche pragmaterminologie s’occupe de comprendre pourquoi ces signes sont là, qui les utilise, quand et de quelle manière ils sont employés et pour construire quoi. Les réponses à ces questionnements coïncident avec les besoins des utilisateurs. Ils forment un groupe cohérent dans sa constitution qui utilise les signes-termes à un moment de son histoire et d’une certaine manière pour rendre compte de ce que le groupe sait pour effectuer son activité. Autrement dit, c’est parce qu’une communauté conçoit sa place dans un environnement qu’elle utilise tels signes, de telle manière (de Vecchi 2011 : 8).
2.3 La terminologie en évolutions
L’analyse terminologique a donc fortement évolué depuis E. Wüster, ce qui justifie le pluriel du mot évolution. Cette terminologie classique dont l’objectif de normalisation était essentiel, excluait de fait de son champ l’approche diachronique, laissant ainsi de côté toute variation temporelle. De plus, la théorie générale de la terminologie systématisée par Wüster et soutenue par l’école de Vienne dans les années 1930 soulève un certain nombre de difficultés, comme le fait de concevoir un concept unique du lexique. Elle a donné lieu notamment à une approche systémique fondée sur les relations entre concepts et les systèmes de désignations qui les représentent.
Cependant nous retiendrons le caractère interdisciplinaire de la terminologie (retenu par Wüster), la positionnant entre logique, ontologie, linguistique, communication et documentation. Cette interdisciplinarité s’est enrichie de nouvelles approches comme la pragmatique, la sociolinguistique, déjà évoquées, l’informatique, la terminologie culturelle, l’ethnoterminologie.
Depuis 1990, de nouvelles théories tiennent compte de l’évolution du domaine, poussées entre autres par les applications liées à la gestion des connaissances et la mise à jour de ressources termino-ontologiques. C. Roche (2004, 2007 (a et b)) souligne la nécessité de concilier les approches linguistiques et ontologiques, car la société actuelle se fonde sur la communication et le partage de l’information. Il situe la terminologie en relation avec le réel et la considère comme une science des choses. Le paradigme d’ « ontoterminologie » rend compte de la modélisation des concepts en prenant en compte logique, linguistique et épistémologie.
Actuellement la terminologie intègre les approches sociologiques, sociolinguistiques, culturelles, voire interculturelles, car les termes ne peuvent être décontextualisés. La socioterminologie avec F. Gaudin (2003, 2005) atteste de cet intérêt grandissant donné à l’évolution et aux variations terminologiques. Il évoque à ce sujet plusieurs facteurs d’évolution de la socioterminologie (2005) : la sociolinguistique théorique réactualise les conceptions en matière de discours où covariance et interactions verbales sont significatives. La sociolinguistique de terrain a développé de nouvelles pratiques en matière de politique linguistique, la linguistique générale revisite le statut du terme comme signe, la linguistique de corpus, grâce aux techniques informatiques, réorganise les méthodes d’analyse. Prenant en compte les situations de communication, le travail terminologique s’effectue de préférence sur le terrain.
Associant fonction cognitive, fonction communicationnelle et fonction linguistique, T. Cabré (1998) propose une approche communicationnelle de la terminologie, considérant les technolectes comme des langues naturelles. Les termes sont les unités du lexique (Rousseau 2010 : 7). Celui-ci d’ailleurs propose un point de vue communicationnel (et de l’efficacité communicationnelle) en tenant compte de la « médiation linguistique », visant à définir, selon un public et une situation donnée, les activités nécessaires pour qu’un message soit intelligible.
M. Diki-Kidiri (2000), à partir de l’étude de l’aménagement terminologique de langue africaine, évoque l’héritage culturel spécifique en parlant de « terminologie culturelle » qui place au centre l’étude la communauté humaine. Il étudie la façon dont les locuteurs prennent en considération les termes techniques (acceptation, utilisation, rejet) et s’intéresse plus particulièrement à la culture managériale.
2.4 L’ethnoterminologie et ethnolinguistique
Dans la droite ligne de la socioterminologie, l’ethnoterminologie prend en compte les dimensions sociologiques, culturelles, psychologiques en étudiant les groupes humains déterminés et en recueillant sur le terrain, en mettant en forme les activités de celui-ci en cherchant à déterminer les mécanismes visibles et invisibles (Depecker 2007, 2013 (a et b)).
On a souvent tendance à associer ethnologie et étude de sociétés ou peuplades lointaines sans doute en référence aux études de M. Mauss. Cependant ce qui est valable pour une société humaine lointaine peut s’appliquer à toute société humaine.
L’apport de l’ethnoterminologie prolonge la dimension socioterminologique en intégrant une vision pragmaterminologique. Par ethnoterminologie, nous entendons à la lumière de L. Depecker (2007, 2013(a)) une discipline proche du terrain et de la réalité. En effet, elle permet d’analyser les terminologies d’un groupe ou d’une société, ses usages, et d’expliquer les observations qui en résultent, comme le font les ethnologues. Il s’agit d’aborder la terminologie avec une vision culturelle essentielle dépassant le cadre strict de la description des concepts, et de l’inscrire dans le champ de la conceptualisation. Les processus engagés déterminent des objets répondant à un ensemble de conditions (géographiques, historiques, politiques, sociales, affectives, etc.).
Comprendre la terminologie de l’entreprise nécessite de pouvoir définir l’environnement dans lequel elle évolue. Par environnement, il ne faut pas entendre uniquement secteur d’activité mais il faut l’étendre au sens plus large de domaine. Celui-ci se définit comme « le champ conceptuel dans lequel s’inscrit un ensemble de termes (par exemple le domaine de l’automobile), le secteur ou secteur d’activité est l’ensemble constitué par les activités d’une pratique, d’une industrie, d’un métier, d’un art » (Depecker 2002 : 145).
L’ethnolinguistique se définit comme le discours de la société humaine qui se penche sur les variabilités linguistiques à travers des sociétés humaines. « La science ethnologique a pour fin l’observation des sociétés, pour but la connaissance des faits sociaux. Elle enregistre ces faits (…) » M. Mauss (2008 : 20) et elle le fait avec un souci d’exactitude. Elle rend compte des particularités propres aux communautés linguistiques, et se situe dans le prolongement de la socioterminologie.
Ayant défini le cadre conceptuel de la recherche et insisté sur l’aspect communicationnel de la terminologie, nous abordons la méthodologie de la recherche.
3 Méthodologie de recherche
La recherche sur la terminologie des métiers commerciaux s’est déroulée sur une longue période (plus de dix ans).
3.1 Un contexte préalable
S’intéresser aux métiers commerciaux mais surtout à la façon dont ils sont présents dans une communauté linguistique est particulièrement instructif pour qui étudie le fonctionnement de l’entreprise et plus globalement pour qui porte un regard attentif à l’évolution de la société. À notre connaissance, pas ou peu d’études y sont consacrées.
Le métier (ou la profession) est une composante essentielle de la société. Indépendamment d’être un élément qui assure une existence économique, il confère à l’homme une place dans la société, en lui donnant un statut et une identité professionnelle. Ainsi, l’homme peut s’inscrire (et donc se construire) dans un groupe par lequel il sera reconnu et qu’il reconnaît comme tel. Ce groupe est lui-même structuré en sous-ensembles.
Nous avons, en préliminaire à la recherche appliquée à l’entreprise Michelin, étudié les manifestations des termes auprès de diverses sources. Des analyses spécifiques reprenant ces enquêtes ont fait l’objet de plusieurs communications et publications (Parizot 2009, 2010). Nous en rappelons ici globalement la démarche.
Nous avons ainsi constitué un corpus en nous appuyant sur des organismes tels l’AFNOR (Association française de normalisation), l’ANPE (Pôle Emploi), l’INSEE, l’APEC (Association pour l’Emploi des Cadres), sur des organismes de formation, etc. Nous avons ajouté des offres d’emploi émanant d’un dossier de l’Usine Nouvelle (2000 : 71-87), ainsi que des désignations d’entreprise récoltées par enquête sous forme de questionnaires. Cette collecte a fait état de termes différents, désignant parfois des réalités identiques. Ces différences tiennent aux sources elles-mêmes et à leur point de vue. Ainsi, l’AFNOR réunit les termes de l’excellence commerciale (2002) en fonction d’un objectif de normalisation. Cependant, cette norme a finalement été retirée et n’est pas remplacée. (On y trouvait par exemple le terme de « commercialisateur », terme qui s’est révélé le plus mal noté par les entreprises lors de nos enquêtes). Les classements de l’ANPE (désormais Pôle Emploi) proposés par le code ROME (Répertoire Opérationnel des Métiers et Emplois) sont différents de ceux de l’INSEE dont l’objectif est de définir les métiers en termes de catégories socio-professionnelles.
Les quelques exemples cités mettent en avant la complexité de la structuration des termes, les désignations qui les caractérisent ne correspondant pas forcément à celles qui circulent au sein des entreprises. Des chevauchements entre les concepts soulignent en fonction de ces classements des positions d’hyperonyme ou d’hyponyme. Les définitions sont souples, du fait des différents points de vue envisagés, ou même sont communes à plusieurs désignations. L’article de l’Usine Nouvelle (2000) signale à ce sujet que « les appellations peuvent en cacher une autre, véritable fourre-tout » et suggère quelques exemples comme :
Technico-commercial itinérant - Délégué commercial - Attaché commercial : il développe et entretient son portefeuille client dans une zone géographique précise. Il vend surtout sur catalogue.
Responsable de marché - Chef de marché - Responsable de secteur : il vend des produits sur mesure, il est spécialisé sur une zone géographique et/ou un secteur d’activité, il peut gérer une équipe de commerciaux terrain.
Chargé d’affaires - Chef de projet - Ingénieur commercial : coordonne le processus de vente de produits sur mesure de A à Z, il travaille en binôme avec un commercial de terrain, n’est pas toujours ingénieur.
Responsable technique clientèle – Conseiller technique clientèle : intervient sur le terrain en appui des commerciaux pour affiner les besoins du client, il porte la casquette d’expert technique.
Technico-commercial sédentaire - Assistant commercial : gère le côté administratif (chiffrage, prise de commande, etc.) à partir de son bureau, il répond à des questions très techniques des clients par téléphone, par e-mail, il suit les appels d’offres.
3. 2 Étude de cas
Nous avons choisi d’étudier en modèle une grande entreprise (Michelin) afin d’avoir une vision globale de la terminologie des métiers commerciaux. Ce choix a été motivé par la longévité de l’entreprise permettant d’aborder l’évolution des phénomènes langagiers et l’implantation du siège social en France qui nous a permis d’aller directement sur le terrain.
L’observation minutieuse des signes produits s’applique à établir et définir la relation entre ces signes, les termes, qui s’organisent en un système conceptuel. Celui-ci est à la fois le reflet de l’entreprise en tant que ce système organisationnel mais s’avère aussi déterminant dans la construction de l’identité ou de l’image identitaire qu’elle construit. L’identité de l’entreprise lui est propre, elle se « distingue », dans le sens donné par P. Bourdieu (1979) et caractérise aussi ses acteurs, les salariés. Ces derniers participent également à la construction de cette identité et y intègrent leur propre savoir et connaissances qui se dévoilent par les pratiques langagières.
Comprendre et analyser la terminologie de l’entreprise, son évolution, reposent sur la connaissance profonde de celle-ci, connaissance de son histoire, de sa structure organisationnelle, de ses valeurs, de sa culture. À ce niveau, l’entreprise est un groupe, une communauté unique qui se distingue des autres. Par l’intermédiaire des termes, l’entreprise et ses acteurs organisent les concepts qui sont le reflet du réseau conceptuel de l’organisation elle-même.
3.2.1 Connaissance de l’entreprise pour une approche communicationnelle
Pour expliquer la terminologie liée aux métiers commerciaux, nous nous sommes intéressée aux formes communicationnelles qui constituent l’identité de l’organisation. Elles permettent de nous interroger sur les formes sociales et symboliques, linguistiques et mentales sans oublier les formes matérielles et techniques (Lardellier 2014 : 15). C’est en replaçant la terminologie dans un contexte de dynamique sociale ou sociétale et humaine que nous pourrons parler de terminologie motivée en relation avec l’histoire et le contexte historique et économique, les valeurs et la culture, les représentations collectives.
Aussi l’analyse terminologique autour des métiers organise le savoir et la connaissance de ceux-ci mais elle est reliée au processus de communication qui sous-tend notre relation au monde, aux autres et à soi-même. La désignation telle que nous l’avons envisagée ne se réduit donc pas à une relation au réel par l’intermédiaire d’objets, mais elle nous fait entrer dans le monde des représentations, des lieux communs, des mythes et des imaginaires, imaginaires que le « Parler métier » met en scène (Depecker 2013a). Elle prend tout son sens, cesse d’être une approche « techniciste » des choses tout en structurant le monde qui nous entoure pour se fondre totalement dans la construction de l’humain et de ses rapports au monde.
C’est à ce stade que nous devons préciser ce que constitue la notion de « culture » et plus particulièrement « la culture d’entreprise » si chère à Michelin. La culture d’entreprise peut se définir comme un ensemble de règles, de valeurs partagées par l’entreprise. Propre à chaque entreprise, elle lui permet de se distinguer, d’affirmer son identité, ses valeurs. Pour définir la culture d’entreprise du groupe, nous citerons une interview de François Michelin qui s’appuie sur les notions de respect.
La culture Michelin est basée sur la recherche de la réalité des faits et non sur des idées, des idéologies ou des théories. Notre culture est faite de la compréhension commune d’un équilibre entre chaque client, chaque actionnaire et chaque membre du personnel qui sont de fait inséparables, chacun devant penser à ce qu’apportent les deux autres à la vie de l’entreprise et à leurs besoins réciproques ». - Le siège à Clermont ?- « Le siège à Clermont, nous sommes près de la matière, de l’usine et des hommes et ça sent le caoutchouc. Les idées viennent du terrain, de la réalité ». Entretien avec J.P. Rouger, (La Montagne, 16 mai 2002)1.
(De fait, signalons à titre d’exemple qu’il n’y a pas de direction des ressources humaines, car l’homme n’est pas une ressource. Il existe cependant un service du personnel).
3.2.2 La constitution du corpus
A partir des résultats de la première étude (cf. 2.1), la constitution du corpus s’est enrichie des éléments d’information présents dans l’ensemble des documents Michelin, par l’intermédiaire de documents papier (plaquettes, ouvrages - Charte, Code d’éthique, etc.), d’éléments d’information présents sur le net (site de recrutement, documents institutionnels, etc.) et de présentations orales des journées de recrutement. Nous nous sommes appuyée sur un document Formation métiers ventes-marketing-communication en novembre 20052. En effet, il présente les métiers et emplois dans ces domaines et les compétences requises.
Bien que distingués, les métiers ventes et marketing sont souvent présentés conjointement. De fait, les terminologies se côtoient. Le tableau abrégé souligne les désignations françaises et anglaises utilisant les termes ventes, commerce, comptes qui sont en concurrence pour ces métiers.
Tableau 1 Répartition des concepts Ventes, Commerce, Comptes, français/anglais
Terminologie française | Terminologie anglaise |
Métiers et emplois de seconde monte (RT) | Métiers et emplois de seconde monte |
Directeur commercial LP/UOT/zone | LP/UOT/Zone Commercial director |
Directeur commercial pays | Country commercial director |
Directeur commercial produit pays | Countries product commercial director |
Responsable de l’aide au pilotage commercial | Commercial operation Manager |
Directeur des ventes | Sales manager |
Responsable d’entité commerciale export | Export commercial entity manager |
Responsable régional des ventes Responsable de force de vente | Regional sales managerSales force manager |
Responsable de comptes clé | Key account manager |
Responsable de comptes secteur | Account manager |
La diversité des sources a permis de mettre en valeur les différences pouvant exister dans l’utilisation de la terminologie (entreprise discours institutionnel, entreprise discours salariés, sites de recrutement présentant les salariés, etc.). Au total environ cent soixante termes ont pu être repérés et analysés conformément au modèle de fiche terminologique.
De plus cette étude se place dans une dimension diachronique en analysant l’évolution du langage. Cette vision diachronique repère l’évolution des connaissances en corpus, ce qui semble avoir été ignoré jusqu’à ce que des chercheurs et plus particulièrement les informaticiens linguistes (Dury et Picton 2009).
Ainsi la recherche appliquée à l’entreprise Michelin est-elle significative, du fait de la longévité même de celle-ci. Nous avons pu retracer l’histoire de certains termes et avons cherché à comprendre cette évolution. Celle-ci est expliquée d’une part en relation à l’entreprise et au contexte discursif et d’autre part en relation avec le contexte élargi de l’histoire et de l’économie du pays (Parizot 2014).
Cependant, l’étude s’appuie également sur une étude synchronique à partir des termes en usage dans l’entreprise, par l’intermédiaire de documents ou d’informations émanant de l’entreprise et des enquêtes sur le terrain auprès des personnes interrogées. Elle fait aussi appel aux réseaux sociaux sur lesquels certains salariés expriment leur identité professionnelle. Nous pouvons même parler de synchronie dynamique, où peuvent coexister usages anciens et nouveaux pour saisir à nouveau l’évolution de la langue et des langages.
4 Les résultats
L’ensemble de la recherche a mis au jour un nombre assez important de termes relatifs aux métiers commerciaux.
4.1 Etude diachronique et synchronique
Citons à titre d’exemples :
Voyageur : les commerciaux sur la route se sont appelés jusque dans les années 1980 voyageurs. Ils étaient les représentants de l’entreprise auprès de la clientèle. Puis l’entreprise a utilisé responsable technico-commercial (RTC). Cependant pour des raisons de connotation négative liée au déterminant technico-commercial, celui-ci a été abandonné. Il s’est transformé pour devenir responsable de comptes secteur (RCS). Dans les parlers de l’entreprise, le terme représentant est encore employé comme synonyme, car il correspond au concept valorisant à ce titre de représentation de l’entreprise. Il est cependant moins courant que commercial terrain qui lui correspond.
On observe ainsi des couches de vocabulaire qui sont datables et ce, grâce aux entretiens menés auprès de cadres de l’entreprise ayant une expérience de plusieurs dizaines d’années.
Le concept de directeur est également intéressant dans la terminologie Michelin. Il était utilisé notamment pour désigner le Directeur d’usine. Il s’était imposé petit à petit dans le domaine commercial de l’entreprise. Pourtant dans les années 1990-2005 les dénominations contenant le terme de directeur ont été totalement bannies au profit de responsable. Seuls les postes à très haute responsabilité avec le terme de directeur ont été maintenus. Cette suppression n’a pas été bien vécue par les personnes qui pouvaient prétendre à être directeur de. Le directeur des ventes régionales est devenu responsable des ventes régionales (alors que dans d’autres entreprises le terme de directeur des ventes est une réalité). En 2004 pourtant la Réforme Tonus3 réhabilite la notion de directeur présente dans les organigrammes actuels. Nous trouvons les deux notions de directeur et de responsable. Le terme de responsable se situe en dessous du niveau hiérarchique de directeur.
Afin de mesurer l’évolution de la terminologie, nous avons pu mettre en place le tableau suivant signalant le terme d’origine et les ou les synonymes actuels.
Nous avons intégré également en termes vedettes quelques emplois anglais particulièrement significatifs, car ils sont souvent employés dans le discours français. Enfin, certains concepts ne désignent pas directement un emploi spécifique mais plutôt une catégorie de salariés comme par exemple force de vente qui regroupe les commerciaux.
Tableau 2 Terme vedette et équivalents
Les éléments présentant des astérisques sont des formes « non valides ».
4.2 Elaboration des fiches terminologiques
Chaque unité terminologique a donné lieu à une fiche terminologique. Celle-ci met en avant la définition du terme, la traduction anglaise, sa position dans l’ensemble conceptuel, son évolution (diachronie), la correspondance dans l’entreprise (rapport à la hiérarchie, compétences), les sources. Elle précise également les particularités des emplois avec des exemples. Les astérisques soulignent un emploi ou une forme particulière (obsolescence, etc.).
Tableau 2 Terme vedette et équivalents
Terme vedette | Assistant commercial export |
Définition | Personne chargée du traitement des demandes et des appels d’offres formulés par les clients, de la gestion des stocks avancés et du suivi de règlement à l’export à partir du bureau de vente. |
Equivalent anglais | Export commercial assistant |
Sigle | ACE |
Variantes | Assistant commercial à l’export*, commercial export* Export sales assistant* |
Synonymes | Attaché commercial export* |
Génériques | Assistant commercial* |
Spécifiques | Assistant commercial export OE |
Coordonnés | Assistant commercial logistique OE |
Associés | |
Evolution du terme | Remplace assistant commercial à l’export depuis 2006* |
Domaine d’activité | Administration commerciale des ventes |
Hiérarchie dans l’entreprise/domaine d’activité | > Responsable bureau de vente ACE |
Compétences demandées : | CM : supply chain, politique commerciale, gestion de compte, technique de vente et négociation CG : Communication, travail en équipe, orientation client, efficacité opérationnelle, portance de l’entreprise CMa : ouverture aux autres CS : pratique des langues étrangères |
Code Michelin | 1293 |
Sources | Descriptif d’emploi mars 2006, réseaux sociaux, discours Michelin (blogue recrutement), offres d’emploi |
Commentaires | Cette légère modification syntaxique (assistant commercial export/assistant commercial à l’export) est le résultat de l’influence de la structure syntaxique anglaise (remarquée dans bien des cas).Le concept générique d’assistant commercial* est ambigu car il renvoie également au poste d’assistant(e) commercial(e) correspondant à une fonction d’assistant du directeur commercial dans le sens de secrétaire. Présence d’une construction syntaxique identique à signifiés proches : export sales assistant/export commercial assistant. NB : sur le site Michelinrecrute, la terminologie employée est attaché commercial export*. Fiche M. C. (Viadeo) Assistante commerciale export de 2003 à 2008 Zone Moyen orient, Afrique Gestion des activités order to cash Traitements et expéditions des commandes Réponses aux demandes ou appels d’offreSpécificités export Captation, suivi et traitements des réclamations logistiques et commerciales des clients Fiche J. P. (Viadeo) Assistant commercial export branche moto depuis 2009 Responsable commercial secteur branche poids lourd 2008-2009 Assistant commercial sédentaire Poids lourd 2005-2008 Fiche S. C. (Linkedin) Export sales assistant 1996-1998 Fiche N. C. (Linkedin) OE export sales assistant On remarque ici l’utilisation de sales en place de commercial. Sur les sites d’offres d’emploi, assistant commercial export est repérable pour les offres Michelin ou d’autres entreprises (emploi.com). |
Les éléments présentant des astérisques sont des formes « non valides ».
La fiche suivante a été choisie pour signaler l’obsolescence d’une dénomination (diachronie), que nous avons cependant rencontrée lors de nos entretiens en face à face. L’évolution tient principalement au fait que chef a été banni du vocabulaire de l’entreprise, entreprise qui a du aussi se réorganiser.
Tableau 2b Exemples de fiches terminologiques
Terme vedette | Chef de la route* |
Définition | Voir Responsable régional des ventes (128) |
Equivalent anglais | - |
Sigle | - |
Variantes | - |
Synonymes | Chef des ventes*, responsable régional des ventes |
Génériques | - |
Spécifiques | - |
Coordonnés | - |
Associés | |
Evolution du terme | Chef a été banni du vocabulaire de l’entreprise et n’est plus utilisé |
Domaine d’activité | Ventes (RT/OE) |
Hiérarchie dans l’entreprise/domaine d’activité | > Directeur des ventes |
Compétences demandées | Voir Responsable régional des ventes (avec en plus certaines particularités liées à cet ancien emploi) |
Code Michelin | - |
Sources | Discours Michelin |
Commentaires | Chef de la route a été utilisé par métonymie pour désigner le responsable de l’ensemble des commerciaux itinérants, il a donc une fonction de responsable. Nous n’avons cependant pas trouvé de document faisant état de cette terminologie (Michelin ne possède pas d’archives en ce qui concerne les métiers), cette terminologie est assez ancienne, sans doute d’avant 1980, mais persiste dans le discours de certains salariés. Pas de fiche sur les réseaux sociaux. Pas de mention sur les sites d’offres d’emploi. |
Observations | - |
4.3 Stabilisation des désignations
Nous avons mesuré le degré de stabilisation des termes à partir d’un tableau exprimant les caractéristiques suivantes : terme relevé, usage par la Direction de la performance commerciale (Michelin), documents produits par l’entreprise, usage par les salariés sur les réseaux sociaux, correspondance avec la norme et le Journal Officiel. Certains termes font l’objet d’un usage stabilisé lorsque plusieurs sources l’utilisent. D’autres au contraire ne sont pas stabilisés : ils font état de créations néologiques dues en particulier à des proximités conceptuelles ou formelles tant dans les documents Michelin que dans la présentation des salariés eux-mêmes. Certains encore apparaissent uniquement dans le discours des salariés sur les réseaux sociaux. Enfin des termes sont obsolètes mais perdurent soit dans la terminologie Michelin, soit dans la présentation des salariés, car ils ont une forte représentation identitaire dans l’esprit des salariés.
Tableau 3 Extrait Stabilisation des désignations
Global Termes relevés | DPC | Michelin (documents, site, chat, blog, offres d’emploi) | Salariés via les réseaux professionnels (Viadeo, Linkedin) |
Equivaut à | Journal Officiel |
Administration des ventes Sales administration |
(Gestionnaire administration des ventes) (1294) Sales administration |
- - |
Administration des ventes Gestionnaire administration des ventes Sales administration |
Gestionnaire administration des ventes Gestionnaire administration des ventes - |
- |
Area sales manager | - | - | Area sales manager | Responsable régional des ventes Responsable comptes secteur |
Responsable de zone de vente |
Assistant commercial (à l’) export | Assistant commercial export (1293) - - ACEExport commercial assistant - - - |
Assistant commercial export - - - ACE Export commercial assistant - - - |
Assistant commercial export Assistant commercial à l’export Commercial export Attaché commercial export Assistant commercial et logistique - Export sales assistant Export sales and logistics assistant Export sales agent |
Assistant commercial export Assistant commercial export Assistant commercial export Assistant commercial export Assistant commercial logistique ou export Export commercial assistant Assistant commercial export Assistant commercial export Assistant commercial export |
- - |
Globalement, sur 161 termes recensés pour désigner les métiers commerciaux de l’entreprise, un tiers correspond à la terminologie de la DPC (Direction de la Performance Commerciale), moins d’un quart renvoie à une terminologie « obsolète ». Les créations terminologiques représentent près de la moitié des éléments et les trois quarts si on y intègre les éléments que nous n’avons pas pu traduire (et qui sont aussi des néologismes).
4.4 Des graphes conceptuels
L’analyse a également donné lieu à l’élaboration de graphes conceptuels pour comprendre l’organisation globale de l’entreprise ainsi que celle des métiers.
Le réseau conceptuel des lignes produits (qui caractérisent l’emploi de directeur LP) donne lieu à de nouvelles subdivisions qui caractérisent des métiers.
En décomposant une ligne produit (LP), on distingue trois domaines vente/vente-marketing/administration qui sont en relation avec des métiers spécifiques.
LP : Ligne produits, RAC : responsable administration commerciale.
5 Conclusion
L’analyse menée a donné lieu au recensement de plus de cent soixante termes désignant les métiers commerciaux. Elle a permis de souligner les écarts entre les discours des divers acteurs, des langues utilisées (français-anglais), de voir l’évolution des pratiques langagières au sein d’une entreprise.
Les enquêtes de terrain sont fondamentales et constituent des éléments riches de sens que ne peuvent rendre à eux-seuls les documents. L’observation participante s’affirme donc comme moyen privilégié de recueil d’informations.
Nous avons envisagé la terminologie comme un processus d’élaboration et de partage de sens, et l’analyse globale montre la complexité des interactions, interactions qui sous-tendent chaque organisation. En mettant en relation acteurs et désignations dans l’entreprise, nous avons cherché à définir le sens que les acteurs attribuent aux métiers et professions mais également à l’organisation, en mettant en avant les représentations qui se construisent autour des valeurs et des identités. Mais c’est aussi tenter de comprendre comment l’individu se construit lui-même dans ses relations avec les autres, comment il réagit face aux évolutions et changements de l’espace sociétal.
La connaissance de l’entreprise repose sur la connaissance de son histoire, son organisation et fonctionnement, de sa culture et de ses valeurs. Elle a nécessité le recours à un ensemble de documents de sources variés ainsi que des entretiens in situ avec les collaborateurs. Proposer une telle recherche signifie aussi être attentif à la culture, c’est-à-dire à l’ensemble des références passées et actuelles propres à une communauté linguistique, notamment dans le cadre d’une étude directe in situ, méthode adaptée aux enquêtes de terrain. Si on analyse le langage, qui véhicule termes et concepts, on doit s’intéresser plus largement au domaine dans lequel il se réalise.
Il n’est pas anodin de dire que le groupe Michelin a véritablement en lui cette notion de culture. Les références au passé, aux choix stratégiques antérieurs tenant à la personnalité des créateurs sont largement présentes à l’esprit de tous ceux qui y travaillent. Ainsi les différents acteurs du groupe véhiculent-ils les mêmes valeurs. La notion de territoire (tribal) est particulièrement ancrée chez les fameux Bib, forme abrégée du Bibendum (le nom du logo servant à caractériser par métonymie ses collaborateurs). L’extralinguistique renvoie à l’histoire même de l’entreprise, à sa création et à son évolution. L’entreprise Michelin est à ce titre un exemple particulièrement riche et significatif, dans un premier temps par sa longévité. Mais elle se caractérise également par un ancrage culturel dans la société (que nous avons déjà évoqué) et par une culture de l’entreprise très forte à l’intérieur même de l’entreprise qui rejaillit sur les relations qu’elle entretient avec ses clients et partenaires, ainsi que sur la société à qui elle dévoile une image singulière.
L’analyse du contexte social et culturel permet de comprendre la profonde motivation de création ou d’utilisation des termes en fonction d’un groupe donné, cette dimension extralinguistique difficilement appréhendable si ce n’est par la connaissance ou le partage de cette culture. Celle-ci constitue donc un support d’analyse tout à fait riche pour la compréhension de la terminologie employée pour désigner les métiers mais également pour en percevoir les évolutions.
En effet, les terminologies ne sont pas des éléments figés et elles ont « aussi une vie sémiologique. Elles portent trace des conceptions du monde qui restent souvent incluses dans la composition des termes » (Depecker 2007, 2013b).
Les informations collectées soulignent donc les variations désignationnelles des métiers commerciaux. Les fiches terminologiques constituées constituent des atouts à plusieurs niveaux. Outre le fait de servir à enrichir la recherche terminologique dans la constitution de bases de données utiles aux traducteurs par exemple, ces fiches constituent un support de communication intéressant pour l’entreprise, pour justifier un effort de normalisation interne entre le discours de l’organisation et celui des salariés. Le besoin de normalisation se fait sentir du fait de l’internationalisation du groupe et de la communication en treize langues différentes. Les fiches peuvent servir de modèles à la Direction de la performance commerciale qui redéfinit les métiers lors de commissions terminologiques internes qui ont lieu au minimum tous les trois ans.
Ces repères terminologiques permettent au service de la gestion des personnels d’avoir une vue d’ensemble et de faire le lien entre salariés et poste désigné.
L’entreprise a besoin de recruter : elle doit donc également se faire comprendre par le public. La terminologie peut dans certains cas être un obstacle à la compréhension et l’entreprise doit alors s’appuyer sur des termes génériques (le plus souvent) relayés par les sites d’offre d’emploi.
La comparaison avec d’autres entreprises du même secteur d’activité (comme Goodyear par exemple) n’a pas été proposée dans ce cadre d’analyse. En effet, l’étude s’est tournée vers une entreprise française, dont le siège social en France nous permettait de mener les enquêtes sur le terrain auprès des salariés et de la direction. Or, ni Goodyear ni même Continental n’ont de siège social en France.
L’évolution de la terminologie des métiers commerciaux est aussi le reflet de l’évolution de l’entreprise en même temps que celle de la société. Ainsi les termes font apparaître de nouveaux métiers poussés par l’apport des nouvelles technologies et chassent les plus anciens du discours entreprise sans toutefois s’effacer totalement dans la mémoire des salariés.