Les textes, inédits ou difficilement accessibles en français, rassemblés ici constituent une lecture « orientée » (page 9) par le concept de romantisme, à partir des recherches personnelles de Michael Löwy, l'un des meilleurs interprètes francophones de l'œuvre de Benjamin. Parmi des articles assez inégaux, le lecteur trouvera quelques perles, comme l'étonnant texte d'un discours sur le romantisme jamais prononcé, l'écrit de 1925 sur le nihilisme international, au titre si ironique - « Les armes de demain. Batailles au chloracétophénol, au chlorure de diphénylarsine et au sulfure d'éthyle dichloré » (pages 107-111) - ou la présentation de l' école de Francfort. De manière générale, ces pages aident à mieux saisir toute la richesse et la complexité des analyses benjaminiennes sur l'art - « l'art pour l'art est l'ultime barrière qui protège l'art du philistin. Sans lui n'importe quel notable pourrait discuter de la légitimité de l'art comme du prix de la viande » (page 26) -, le temps historique, la politisation de l'intelligentsia, la critique de la conscience bourgeoise « de l'intérieure » (page 214), et surtout le romantisme. Ainsi, il souligne la différence, l'antagonisme entre la constellation historique du romantisme dont nous sommes encore tous tributaires, d'un « faux romantisme », décontextualisé et coupé de son devenir, qui n'est que « l'habit crasseux dont la bourgeoisie anxieuse nous [les jeunes étudiants] a revêtus pour nous rendre méconnaissables à nous-mêmes » (page 53).
Un livre donc qui vient compléter les trois volumes publiés en poche par Gallimard (Paris, 2000). Mais, outre la préface de Löwy, les textes auraient mérités un appareil critique (notes, contextualisation, références biographiques, etc.).