S'il n'avait été publié par la maison d'édition proche de Lutte ouvrière, sans doute ce roman aurait-il échappé à la sagacité du rédacteur de Dissidences. Pourtant, lors de sa publication en 1956, il a été immédiatement interdit par le gouvernement sud-africain. Ce qui ne l'empêcha pas, l'année suivante, d'obtenir le prix du meilleur roman décerné par le club des auteurs britanniques. Notons, au passage, le beau travail d'édition réalisé à l'occasion de la publication de ce livre car non content d'avoir déniché l'ouvrage, l'éditeur en a assuré la première traduction en français. A partir de l'arrivée d'un militant nationaliste dans une réserve où sont parqués les Noirs, l'auteur décrit la manière dont l'affrontement entre la population noire et les forces de répression va se mettre en place. La trame du récit, la construction comme le style, en font un livre plaisant à lire. Suite à une série de glissements infimes dans les rapports entre l'administration blanche et la population noire, le lecteur assiste au surgissement chaotique et largement spontané du refoulé. Comme dans une cocotte minute, arrive un moment où l'ébullition sociale se transforme en énergie et en soulèvement. L'intérêt principal du livre réside justement dans la fine description de la contradiction entre la volonté d'organisation de la réserve, portée par le responsable, et l'impatience désordonnée de la foule, impatience que Mabaso paiera du prix de sa vie. L'explosion autodestructrice de la réserve va fournir l'occasion à la police blanche d'étaler son racisme et son mépris pour la population noire. La répression permettra de ramener le calme, au prix de multiples morts et de destructions massives. Ecrit bien avant la fin du système d'apartheid, cette belle évocation des conditions de vie de la population noire ne se conclut pas par un happy end. L'oppression, le racisme, les conditions de vie dégradées, les humiliations, les contrôles se poursuivront encore de nombreuses décennies. Mais la leçon que le lecteur tire de ce récit est qu'une telle situation d'oppression ne peut se maintenir définitivement.
Harry Bloom, Émeute au Transvaal , Paris, Les bons caractères, 2008, 377 p.
06 December 2012.
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Georges Ubbiali, « Harry Bloom, Émeute au Transvaal , Paris, Les bons caractères, 2008, 377 p. », Dissidences [Online], Culture, littérature (romans, BD), 06 December 2012 and connection on 21 November 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=505