La grenouille et le puits - Les aventures de la dialectique maoïste au sein des textes de l’UCFML

Index

Mots-clés

Idéologie, Maoïsme, Marxisme

Plan

Texte

« En examinant une question, le marxiste doit voir le tout aussi bien que les parties. Une grenouille, dans un puits, disait que «le ciel n'est pas plus grand que la bouche du puits». Cela est inexact, puisque le ciel n'est pas limité aux dimensions de la bouche du puits. Si elle avait dit «une partie du ciel est de la dimension de la bouche du puits», elle aurait dit vrai, parce que cela est conforme à la réalité ».
« La Tactique de la lutte contre l'impérialisme japonais » (27 décembre I935),
Œuvres choisies de Mao Zedong, tome I.

Est-ce que Mao doit rester éternellement cette figure figée de Tienanmen, ce mythique initiateur d’une pensée « Mao Tse Toung », l’instigateur contraint du Petit Livre Rouge ? Faut-il ânonner les citations du PLR comme certains celles des Evangiles ? La question est intéressante et les groupes maoïstes français des années soixante-dix se sont parfois passionnés pour cette question, surtout avec la disparition de la Gauche Prolétarienne. Ainsi les militants de la Nouvelle Cause du Peuple écrivent en 1976 :

« La pratique concrète pose des problèmes toujours nouveaux, dont la solution n'est pas dans les classiques du marxisme léninisme. Ceux-ci aident seulement à trouver cette solution et à se garder de certaines erreurs si l'on sait s'en servir sans dogmatisme. Il faut partir de la réalité, recueillir les idées justes des masses, en participant à leurs luttes qui transforment cette réalité, pour enrichir la théorie de nouveaux concepts qui à leur tour éclairent la pratique. Croire que les théoriciens peuvent élaborer en chambre des analyses guidant l'action révolutionnaire, c'est du DOGMATISME. Compter sur la spontanéité des masses pour faire l'économie du moment de la systématisation par les communistes, c'est de l'EMPIRISME. L'assimilation de la théorie "déjà faite" est la condition nécessaire (mais non suffisante) pour élaborer la théorie de notre pratique actuelle. ».

Tout est synthétisé dans ce paragraphe : Mao Zedong est un penseur dialectique, en mouvement, sa pensée ne peut se contenter de devenir une récitation coranique, c’est une philosophie en action, parfois même des invariants bordiguistes y voient un simple pragmatisme à la James Delthey, mais cela est méconnaître l’essence même des textes de Mao. C’est particulièrement à cette question de la dialectique que nous nous consacrerons ici.

Pour un dialecticien, il est hors de question de rester figé dans un schème passé en dissertant sur la Révolution de 1917 en adaptant aux forceps celle-ci à une autre époque et un autre pays, voilà finalement la logique maoïste, une logique dialectique s’il en est. En cela la philosophie maoïste suppose une forme de Realpolitik : débuter ses réflexions dans les classiques du marxisme, mais ne pas y trouver la réponse systématiquement. Après tout on ne demande pas à un dictionnaire de latin de traduire des termes antérieurs à sa disparition, il est faux et vain de penser que les classiques du marxisme ont traité de l’ensemble des problématiques nouvelles. Si Marx et Engels ont tracé des pistes extraordinaires dans leur correspondance notamment sur les sciences surtout Engels (moins verrouillé à une œuvre d’une vie comme Le Capital), aucun des deux n’a connu le stade de développement impérialiste du capitalisme et on imagine assez mal aujourd’hui Marx poser sa plume pour regarder un programme télévisé.

Que faire donc de toutes ces questions nouvelles : de la théorie de la relativité, de la théorie des quantas qui sont apparues antérieurement aux grands textes marxistes sur la science ou plus récemment de l’écocide que l’homme prépare avec force conviction ? Comme le soulignent les militants de la Nouvelle Cause du Peuple deux écueils doivent être évités, soit tel un bernard lhermitte rentrer dans sa coquille et voir le monde changer autour de soi sans y participer, soit penser que finalement on a le temps et qu’il faut bien s’adapter au monde avant de le penser, démarche sociale-démocrate s’il en est. Tout peut tenir donc dans ce vieil adage latin pour un maoïste : « Tempora mutantur et nos mutamur in illis », Le temps bouge, nous bougeons avec lui.

Bien sûr cet article ne peut donner la pleine mesure aux intentions philosophiques de Mao. Dans le cadre de ce numéro sur le maoïsme, il serait tout de même étonnant de ne pas voir un article s’aventurer dans les arcanes de la dialectique maoïste et sa méthodologie philosophique et surtout de ne pas ramener cette problématique à celles des groupes maoïstes français qui ont fait de la discussion philosophique leur point de rupture avec les marxistes-léninistes révisionnistes. L’Union des Communistes de France Marxistes-léninistes (UFCML) est à ce titre une véritable locomotive idéologique et derrière ce groupe, un homme se dégage.

Dans ces groupes une figure emblématique paraît, le rare maoïste encore maoïsant quarante ans après 1968 : Alain Badiou. Cet homme est rare, bien que devenu une figure médiatique. Rare dans ses apparitions, rare dans la compréhension de son œuvre philosophique qui est, disons-le, méconnue entre toute en France, rare dans cet engament intensif autour de la figure de Mao. Badiou n’a pas fini rabbin intégriste (Benny Levy), Haut-fonctionnaire (Alain Geismar), muet (Lihnardt), Badiou se bat encore pour l’idée du communisme ce qui est, pour le moins, peu commun dans ce monde largement anticommuniste1.

Cela demande un point de départ sur l’objet même de ce qu’est la philosophie ; Nous ne prétendons pas répondre en trois lignes là où deux mille années d’histoire de cette discipline peinent parfois à rendre compte de cette question. Travaillons une définition minimale : La philosophie n’est plus cette science de la science que voulait Aristote, cette recherche de la métaphysique (littéralement méta-physis ; qui vient après la physique), de l’ousià (l’essence des choses), de l’être en tant qu’être2.

Cette définition classique trahit un manque de connaissance, bien normal à l’époque entre la science et la philosophie, entre la connaissance des phénomènes du monde et leurs explications. Aujourd’hui la philosophie présente une question fondamentale, celle des rapports entre l'être et la pensée, de la question de la transformation révolutionnaire du monde.

La philosophie et la politique sont-elles des notions disjointes ? Absolument pas, si la philosophie doit désormais changer le monde, comme l’indique la onzième thèse sur Feuerbach de Marx et Engels, la politique est en somme la philosophie continuée par un autre moyen : l’action pratique.

Mais comment tout cela s’agence ? C’est la question de la dialectique3. Qu’apporte Mao de significatif et de nouveau à ce propos, voilà un point de départ intéressant.

I/. « C’EST DE LA TERRE AU CIEL QUE L’ON MONTE ICI »4: LA PHILOSOPHIE DE MAO ZEDONG

Mao s’inscrit dans une tradition philosophique pour ainsi dire taoïste en opposition au confucianisme, étrangère au concept de la « philo-sophein », l’amour de la sagesse propre à l’occident. La plupart du temps parler de philosophie en Chine, comme en Asie, est une absurdité ethnocentriste.

Il nous faut ici faire un détour. L’Asie possède une variété de « philosophies » assez conséquentes, dont Hegel traitait notamment dans son Histoire de la Philosophie et dans sa Philosophie de l’Histoire.

Y a-t-il une philosophie avant Mao en Chine ? Il suffit pour s’en convaincre de lire les ouvrages classiques de Granet et Maspero5 et comprendre deux choses :

  • Il existe bien une forte tradition millénaire de réflexion philosophique autour de deux écoles majeures et deux maîtres Confucius et Lao Zi (Lao Tseu), mais cette pensée est à mi-chemin entre la métaphysique, le religieux et l’éthique.
  • La philosophie au sens occidental du terme n’est pas développée réellement au moment où Mao rédige ses deux principaux opuscules philosophiques De la Pratique et De la contradiction (1937).

Il y aurait beaucoup à faire pour étudier plus profondément cet aspect, mais on peut considérer que la philosophie au sens occidental arrive en force en Chine avec Mao, bien que des professeurs de philosophie chinois s’intéressaient déjà à l’occident et de l’aveu même de Mao : « à l’époque je croyais au dualisme de Kant »6. Exposons donc en quelques principes la philosophie maoïste en ayant à l’esprit cette définition du principe « meilleur point de départ possible pour chaque chose »7.

1.1/ Principe n° 1 : La vie humaine est avant-tout une pratique totale

« Nous sommes marxistes, et le marxisme nous enseigne que, pour aborder un problème, il faut partir non des définitions abstraites, mais des faits objectifs (…) »8. Voilà le point de départ non seulement de la gnoséologie de Mao, mais également de sa philosophie. Le texte est de 1937. L’attitude de Mao face à la philosophie n’est donc pas celle d’un professeur (qu’il fut en tant qu’instituteur), mais celle d’un pragmatiste n’ayant pas peur des mots. « Au départ tout le monde est ignorant. Les hommes capables de connaître l’avenir n’ont jamais existé. Toute réalisation s’obtient par la pratique »9.

Pour Mao, la pratique a un caractère de classe, en ce sens que si le marxisme part de l’étude d’une situation concrète, d’une situation pratique et que le marxisme est la philosophie du prolétariat, la pratique possède aussi un caractère de classe, car la philosophie bourgeoise, elle, ne part pas de la pratique, mais bien plutôt d’une étude que Mao qualifiera de « métaphysique » du monde, en opposition à la dialectique prolétarienne. En somme le monde est une immense praxis en mouvement : « De toutes ces connaissances, aucune ne saurait s'acquérir en dehors de l'activité de production »10.

Mao n’a jamais été aussi proche de Marx et d’Engels. On croirait presque lire Engels d’ailleurs lorsque celui-ci écrit dans son Ludwig Feuerbach ou la fin de la philosophie classique allemande : «Le monde matériel, perceptible par les sens, auquel nous appartenons nous-mêmes, est la seule réalité (…)». Nous verrons ce que ce principe apporte à la gnoséologie (science de la connaissance) du quotidien, c’est-à-dire du processus de connaissance dans son ensemble (Principe n°3).

Mao indique très clairement que si l’on ne part pas de cette pratique pour acquérir la connaissance, la vision du monde est alors idéaliste tout simplement : « Toute personne qui considère que la connaissance rationnelle peut ne pas provenir de la connaissance sensible est un idéaliste ». C’est finalement cela l’attitude métaphysique : « La métaphysique, ou l'évolutionnisme vulgaire, considère toutes les choses dans le monde comme isolées, en état de repos; elle les considère unilatéralement. Une telle conception du monde fait regarder toutes les choses, tous les phénomènes du monde, leurs formes et leurs catégories comme éternellement isolés les uns des autres, comme éternellement immuables »11.

L’expérience est donc primordiale pour appréhender le monde, et cette appréhension du monde nous permet de comprendre la loi fondamentale de l’univers entier, car « la pratique concrète pose toujours des problèmes nouveaux » de l’aveu même de la Nouvelle Cause du Peuple, phrase déjà citée en introduction.

1.2/ Principe n° 2 : En toute chose existe la contradiction (Un se divise en deux)

Le monde pour Mao est donc une unité dialectique des contraires. « La conception dialectique du monde apparaît en Chine et en Europe dès l'antiquité. Toutefois, la dialectique des temps anciens avait quelque chose de spontané, de primitif ». En effet, On commence à connaître le monde par la perception sensible : « Pour un homme qui se serait bouché les yeux et les oreilles, qui se couperait complètement du monde extérieur objectif, il ne pourrait être question de connaissance »12. Mao nous invite donc à être « ouvert » au monde, le monde ne doit pas être celui du philosophe qui professe du haut de sa chaire. Que voit-on si l’on ouvre les yeux ? Que le monde est en développement constant, qu’il permute, qu’il bouge, qu’il change. Tout cela va à l’encontre de presque toute la philosophie depuis Parménide qui affirmait : « [que le monde] …échappant à la génération est en même temps exempt de destruction : Car il est justement formé tout d'une pièce, Exempt de tremblement et dépourvu de fin. Et jamais il ne fut, et jamais ne sera, Puisqu'au présent il est, tout entier à la fois, Un et un continu.»13. En effet, même la dialectique était présente dans certaines philosophies, celle-ci était fragile et assez peu répandue par rapport à la conception idéaliste.

Interrogeons-nous un instant : si le monde est pétri de contradictions, toutes les contradictions se valent-elles ? Certes non, et c’est là le grand apport de Mao à cette question essentielle de la philosophie marxiste. Cette conception est une véritable méthode d’analyse du monde : « La méthode analytique, c'est la méthode dialectique. Par analyse, on entend l'analyse des contradictions inhérentes aux choses et aux phénomènes. Sans bien connaître la réalité de la vie, sans comprendre véritablement les contradictions dont il s'agit, il est impossible de faire une analyse judicieuse »14. Etudions cette loi en détail :

1.2.1/ Loi de l’unité des contraires (Un se divise en Deux)

C’est ici la loi fondamentale de l’univers et de la compréhension matérialiste dialectique du monde. Toutes les catégories de la dialectique matérialiste sont l’expression dans tous les domaines de cette loi universelle, mais complexe dans sa déclinaison : « L'existence des contradictions est universelle, mais elles revêtent un caractère différent selon le caractère des choses et des phénomènes »15. Cette loi est l’essence et le noyau de la dialectique matérialiste. « La philosophie marxiste considère la loi de l’unité des contraires est la loi fondamentale de l’univers. Cette loi agit universellement aussi bien dans la nature que dans la société humaine et dans la pensée des hommes. Entre les aspects opposés de la contradiction, il y a à la fois unité et lutte, c’est cela même qui pousse les choses et les phénomènes à se mouvoir et à changer »16. Ainsi il y a d’abord scission de l’unité et une nouvelle unité apparaît à force de lutte et de conversion, il y a ensuite scission de la nouvelle identité. La meilleure image pour exprimer cette loi est la division cellulaire, une cellule, se divise en deux etc. En somme un ne cesse de se diviser en deux. Pour autant cela ne signifie pas que Un devient deux. « Dans le corps humain, les cellules se divisent sans cesse »17.Avec l’image de la cellule que nous avons prise, à la suite de Mao, la cellule 1 devient la cellule 2, mais une cellule que nous appellerons 1’ demeure18 parfois, et ne cesserait-ce que pour disparaître à son tour. Les cellules issues de 1 (1’ et 2) se subdiviseront à leur tour en 1’’ et 1’’’ et en 2’ et 2’’etc.

Dans la vie sociale, chaque organisme présente deux contradictions fondamentales, l’une qui est la contradiction entre forces productives et rapports de productions19 (ex : capitalisme vs socialisme) et l’autre entre la base économique et la superstructure (ex : bourgeoisie vs prolétariat) Cette loi démontre que le monde n’est pas pétrifié une fois pour toute, le monde est en mouvement dynamique et cinétique constant et qu’il est une totalité inclusive complète car rien ne peut empêcher cette loi.

Cette vision permet de dégager une vision du monde (nous y reviendrons au principe 6) comme une totalité soumise en tout lieu et à toute heure à cette même règle fondamentale20. Ainsi le système terre autorégulé, en somme comme l’hypothèse Gaïa21 trouve largement crédit lorsque l’on se penche sur la dialectique, ce que Vernadsky avait déjà compris dès les années 2022.

1.2.2/ Contradiction antagoniste et Contradiction non antagoniste

« Une chose n’existe et ne se définit que par son contraire »23, certes, mais il y a une contradiction antagoniste et non-antagoniste. Elle est antagoniste quand les deux termes de la contradiction sont de nature oppositionnelle (bourgeoisie vs prolétariat)24 et que la contradiction apparaîtra sous forme de conflit d’intérêts fondamentaux, non-antagoniste quand cette lutte des contraires n’est pas une forme de conflit d’intérêts fondamentaux (au sein du prolétariat par exemple). Les contradictions ville-campagne, travail manuel-intellectuel sont antagonistes sous le capitalisme mais tendraient à être non-antagonistes sous le socialisme (création de communes populaires et d’un travail selon ses capacités).

1.2.3/ Aspect principal et secondaire de la contradiction

La contradiction qui joue le rôle dominant est la principale, la secondaire est subordonnée à la première. Ici aussi tout est dialectique : « Mais cette situation n'est pas statique; l'aspect principal et l'aspect secondaire de la contradiction se convertissent l'un en l'autre et le caractère des phénomènes change en conséquence. Si, dans un processus déterminé ou à une étape déterminée du développement de la contradiction, l'aspect principal est A et l'aspect secondaire B, à une autre étape ou dans un autre processus du développement, les rôles sont renversés »25. Au sein de la lutte de production, lutte de classe et l’expérimentation scientifique (cf. principes n°3), les problèmes étant complexes, il faut saisir la contradiction principale pour les résoudre.

A cause d’une lutte incessante entre les deux aspects contradictoires, le nouveau grandit se renforce et devient progressivement la position dominante, l’ancien dépérit, s’affaiblit, dépérit. « Nous parlons souvent du "remplacement de l'ancien par le nouveau". Telle est la loi générale et imprescriptible de l'univers »26.

1.3/ Principe n° 3 : Partir du réel pour comprendre le réel : Gnoséologie du quotidien via l’enquête

« En agissant sur les organes des sens des membres du groupe d'enquête, ces différents phénomènes rencontrés à Yenan ont provoqué des sensations et fait surgir dans leur cerveau toute une série de représentations, entre lesquelles s'est établi un lien approximatif, une liaison externe : tel est le premier degré de la connaissance. A ce degré, les hommes ne peuvent encore élaborer des concepts, qui se situent à un niveau plus profond, ni tirer des conclusions logiques 27». C’est par cette affirmation presque cinglante que Mao rejette l’accusation tardive qui sera faite sur sa théorie en l’affirmant tout simplement comme un simple pragmatisme. Un pragmatisme s’arrêtait à la prise d’informations sur le terrain. Un vrai rationalisme dialectique sait faire de ce matériau, par un bond, un ensemble de concepts, c’est cela Mao philosophant. Il répond ainsi à l’interrogation engelsienne : « Notre pensée est-elle en état de connaître le monde réel ? » 28.

Mao adopte un point de vue spinoziste, à savoir qu’il y a différents degrés de connaissance du monde, de la moins parfaite à la plus optimale. Ainsi écrit-il dans De la Pratique : « La pratique sociale des hommes ne se limite pas à la seule activité de production ; elle revêt encore beaucoup d'autres formes : lutte des classes, vie politique, activités scientifiques et artistiques ; bref, en tant qu'être social, l'homme participe à tous les domaines de la vie pratique de la société ».

1.3.1/ Lutte de production

C’est ici une lutte assez quotidienne. Le travail agricole ou industriel permet de résoudre des problèmes matériels actuels et courants. Tous les hommes n’ont pas la même place dans le processus de production hors du communisme. Cette lutte de production recouvre les contradictions travail manuel-intellectuel et ville-campagne notamment, voir Principe n° 2.

1.3.2/ Lutte de classe

Dans une société issue de la lutte de classe (capitalisme ou socialisme), chaque homme vit en tant que membre d’une classe déterminée. Il n’existe rien qui ne porte «l’empreinte » de la lutte de classe écrira Mao. La vraie innovation de Mao vient de la conception qu’il envisage de la lutte de classe au sein d’un régime socialiste post-révolutionnaire.

Les bourgeois gardent-ils leurs empreintes de classe ? Quid des bourgeois qui servent la cause de la révolution ? Une chose est certaine dans l’esprit de Mao (contrairement aux trotskystes qui véhiculent des conceptions venteuses sur la révolution, oubliant ainsi le Terrorisme et Communisme d’un certain Trotsky), la révolution est inéluctable : « En fin de compte, le régime socialiste se substituera au régime capitaliste; c'est une loi objective, indépendante de la volonté humaine. Quels que soient les efforts des réactionnaires pour freiner la roue de l'histoire dans son mouvement en avant, la révolution éclatera tôt ou tard et sera nécessairement victorieuse »29, et c’est un processus violent : « La révolution n'est pas un dîner de gala; elle ne se fait pas comme une œuvre littéraire, un dessin ou une broderie; elle ne peut s'accomplir avec autant d'élégance, de tranquillité et de délicatesse, ou avec autant de douceur, d'amabilité, de courtoisie, de retenue et de générosité d'âme. La révolution, c'est un soulèvement, un acte de violence par lequel une classe en renverse une autre »30. Bien plus encore avec la révolution, et même sous le communisme, la lutte de classe perdurera. Les Noyaux Armés pour l’Autonomie populaire dans les années 1970, en retenant la leçon de Mao, écriront : « Parce qu'en dépit des bavardages philosophiques de salon marginal, la lutte des classes et la dynamique des couches révoltées du prolétariat restent la clé stratégique majeure pour foutre en l'air ce système social ».

1.3.3/ Expérimentation scientifique

Ce moment du troisième principe trouvera tout son écho dans le principe 6. L’homme doit conquérir sa liberté en dominant et transformant la nature et le monde, ce qui renvoie au principe n° 1 (la pratique) et au principe n° 4 (le principe de l’enquête). Comme l’écrit Mao : « Si l'on veut acquérir des connaissances, il faut prendre part à la pratique qui transforme la réalité. Si l'on veut connaître le goût d'une poire, il faut la transformer : en la goûtant »31. C’est l’expérience qui a une particulière incidence, qui « décide de tout », sur la connaissance du monde et sa version scientifique l’expérimentation, et le monde nous l’avons dit ne cesse de changer : « après même un million d’années, il y aura toujours du travail pour les savants »32.

1.4/ Principe n° 4 : « Toute erreur est à critiquer, toute herbe vénéneuse est à combattre » : L’erreur dans le monde

1.4.1/ Eviter l’erreur : l’enquête

Le seul moyen selon Mao de penser correctement le monde, c’est de comprendre le monde comme une unité dialectique des contraires inscrite dans un processus de production déterminé : rien n’échappe à ce déterminisme.

En ce sens appréhender le monde c’est partir du simple, du concret : « Dans la majorité des cas, on peut ainsi considérer les problèmes du point de vue de la province, mais on peut également parler pour le pays tout entier, pour le monde, l’univers, le soleil et la voie lactée »33. Partir du plus simple, de ce que l’expérience nous offre et tenter de comprendre à partir de cela est le plus important. Dès lors l’enquête sera le fer de lance de l’investigation maoïste du monde.

« Vous ne pouvez résoudre un problème ? Eh bien ! Allez-vous informer ». Il ne s’agit pas de se cacher derrière les rayonnages des bibliothèques où les livres sont figés de toute éternité, d’où l’importance de la brochure rédigée par Mao Contre le culte du livre. (1930) Un marxiste doit descendre dans la rue se confronter aux problèmes et non les éviter ou les résoudre à distance avec ses vade-mecum. Pour Mao toute la réalité, tout le monde est le lieu d’investigation de la réalité. Marx n’est pas un prophète répétera a satiété Mao, la dialectique ne s’arrête pas à Le Capital. Le principe même de la dialectique est de continuer d’évoluer une fois que l’on a circonscrit un processus par une enquête.

1.4.2/ La rectification « Unité-critique-unité » « Si tu as des défauts, corriges-toi ! »34 :

« L’homme est un animal étrange. Dès qu’il se trouve dans une situation privilégié, il se montre arrogant »35. Ceci explique une grande possibilité d’erreur. Si l’erreur est possible que celle-ci se découvre au fur et à mesure de l’enquête, une rectification s’impose de la part de l’enquêteur. « Il sera toujours prêt à corriger ses fautes, car toute faute va à l'encontre des intérêts du peuple »36.En effet, le marxisme n’est pas figé, tout étant dialectique, un point de vue peut évoluer, voire même est le fruit d’une erreur. Que faire dans ce cas ? Il faut par-dessus tout maintenir l’unité : « C’est justement cette expérience qui nous a conduits à la formule « unité-critique-unité ». En d’autres termes, « tirer les leçons des erreurs passées pour en éviter le retour et guérir la maladie pour sauver l’homme » »37. C’est par la critique et l’autocritique notamment que l’on rectifie ses points de vue erronés, car de toute façon l’homme qui ne s’est jamais trompé n’existe pas selon l’adage maoïste.

« Se mettre soi-même à l’épreuve n’est pas une chose facile (…) laissons pousser les mauvaises herbes, laissons sortir les génies malfaisants »38, car seule une mauvaise herbe qui se développe croîtra suffisamment pour être coupée.

1.5/Principe n°5 : «la vérité est de notre côté »39 : la véracité maoïste

Alors qu’une grande partie de la philosophie anglo-saxonne a cédé aux sirènes de Wittgenstein, anti-philosophe par excellence, depuis son Tractatus logico-philosophicus de 1918 qui enjoignait le philosophe à s’interroger sur le langage non comme vecteur de la philosophie mais comme seule question philosophique de valeur, principe retenu et développé presque à rebours dans les Investigations philosophiques (1954), Mao aussi se pose la question du critère de vérité du concept.

Mao avait déjà auparavant exposé son critère de vérité notamment au travers De la pratique et De la Contradiction. Pour Mao, comme pour les marxistes, la vérité est le reflet correct de l’objectif par le subjectif. Ce concept désigne les connaissances scientifiques obtenues grâce au reflet correct du monde objectif et de ses lois par les idées humaines. Mao considère qu’il n’y a pas de vérité abstraite et qu’elle est toujours concrète. Les particularités des choses objectives se reflètent par le cerveau humain et deviennent le caractère concret de la vérité. C’est en comprenant l’essence particulière des choses à partir d’un temps, d’un lieu, d’une condition donnée que l’on peut atteindre l’exigence de vérité. Pour Mao il n’y a pas d’universaux, il n’y a que des objets singuliers. De la sorte il rend justice aux nominalistes.

« La source de toutes les connaissances réside dans les sensations reçues du monde extérieur objectif par les organes des sens de l'homme ; celui qui nie la sensation, qui nie l'expérience directe, qui nie la participation personnelle à la pratique destinée à transformer la réalité n'est pas un matérialiste. C'est la raison pour laquelle les " je-sais-tout " sont si ridicules. Il y a un vieux proverbe chinois : " Si l'on ne pénètre pas dans la tanière du tigre, comment peut-on capturer ses petits ? »40. Mao s’oppose ainsi dès ses premiers textes à une opinion qui va être de plus en plus présente avant la révolution culturelle à savoir que « tous les hommes sont égaux devant la vérité » opinion soutenue par Liuo Chao-Chi en février 196641. La vérité a bien un critère de classe. La vérité ne peut se développer que sur la lutte contre l’erreur (ce qui renvoie au principe 4). Mao souligne : « En passant par le creuset de la pratique, la connaissance humaine fait donc un autre bond, d'une plus grande signification encore que le précédent. Seul, en effet, ce bond permet d'éprouver la valeur du premier, c'est-à-dire de s'assurer si les idées, théories, politique, plans, moyens d'action, etc. élaborés au cours du processus de réflexion du monde objectif sont justes ou faux; il n'y a pas d'autre moyen de faire l'épreuve de la vérité »42.

Ce n’est qu’au travers de ce « creuset » que l’homme peut se faire une conception réellement scientifique du monde. En effet, la connaissance scientifique est composée de vérités relatives car si le but de l’homme est d’avoir une connaissance pleine et entière du monde, ce dernier comme unité dialectique est un processus en développement, ce qui suppose la découverte de vérités relatives : « Au moment même où l'humanité rejette quelque chose de faux et accepte une vérité, une nouvelle vérité entre à son tour en lutte contre de nouvelles opinions erronées. Cette lutte ne cessera jamais. C'est la loi du développement de la vérité, et c'est évidemment aussi la loi du développement du marxisme »43.

Il est donc impossible de connaître en une fois la complexité systémique de notre monde sur chaque aspect de l’ensemble du processus du monde objectif. Donc toute vérité est à la fois relative et absolue, le processus de connaissance infini qui part de la vérité relative (immédiate) à la vérité absolue. Chaque vérité relative est ainsi un grain de la vérité absolue du monde et celle-ci ne s’acquiert pas la tête dans les livres : « Les marxistes estiment que les hommes n'ont d'autre critère de la vérité de leur connaissance du monde extérieur que leur pratique sociale »44.

1.6/ Principe n°6 : « Nous devons vaincre ce globe terrestre »45 : Dialectique de la nature (de la réalité comme processus)

Il s’agit sans doute ici du point le plus méconnu de la philosophie de Mao, car ce point intervient de manière plus tardive dans la dialectique maoïste elle-même, bien que déjà en germe dans De la Contradiction. Mao ne cesse de revisiter les problématiques des auteurs majeurs du marxisme et notamment de Engels, qui loin d’être uniquement le souteneur financier d’un Marx, a été très innovant sur un grand nombre de points, notamment concernant les thématiques scientifiques, comme en témoigne sa correspondance.

Mao propose une véritable conception du monde, c’est-à-dire un point de vue fondamental et global sur le monde, en somme un système systémique et holistique, un processus réel, mouvant et total au sein duquel seul peut s’inscrire la société, du reste « la capacité des hommes à connaître et à transformer la nature est sans limite »46. Pour Mao, le prolétariat cherche à transformer le monde selon sa conception du monde47, la conception d’un monde dialectique (en perpétuel changement) et matérialisme (dont l’être prime sur la pensée). Le monde est le résultat de cette lutte de ligne entre la bourgeoisie qui pense le monde de manière téléologique et fixiste, donc métaphysique et le prolétariat qui voit que le monde est un bouleversement de tous les instants48. « Le changement de conception du monde et un changement radical » prévient Mao49. De fait, à l’aube de la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne qui va débuter mi 196650, le texte fondateur de ce mouvement de masse va d’emblée souligner que : « La grande révolution culturelle prolétarienne est une lutte politique et idéologique qui touche l'homme dans ce qu'il a de plus profond»51.

Pour toucher l’homme dans ce qu’il a de plus profond, il faut non seulement tenter de comprendre le monde, mais surtout par la pratique s’intéresser aux problèmes du quotidien : « Nous devons accorder une attention sérieuse aux problèmes relatifs à la vie des masses, depuis les questions de la terre et du travail jusqu'à celles de l'approvisionnement en combustible, en riz, en huile et en sel... Toutes ces questions relatives aux conditions de vie des masses doivent être mises à l'ordre du jour. Il faut en discuter, prendre des décisions, les appliquer et en contrôler l'exécution »52.

Le marxisme doit pour Mao toucher tous les domaines : rien de ce qui existe ne doit être étranger notamment au philosophe, il n’y a pas de monde des idées ici, tout est inclusif, rien ne doit être étranger au monde et au philosophe, car tout est un processus dialectique réel. « Le combat qui nous attend est un combat nouveau, c’est un combat contre la nature »53, car c’est ainsi selon Mao que l’homme pourra passer du règne de la nécessité à celui de la liberté. Mais ce chemin est pavé d’embauches, c’est ce que Mao nomme une route longue et sinueuse. La philosophie doit désormais transformer le monde, mais il faut avoir ceci à l’esprit : « Je trace deux signes dont voici la signification : il faut que tu souffres pour te transformer »54. La transformation ne se fait pas de fait, en douceur, mais aussi par une dialectique du changement de la destruction-reconstruction : « dans l’univers et sur terre, toute chose naît se développe et meurt »55. Et n’oublions que pour Mao, « c’est l’homme qui fait les choses »56 , inutile de se tourner vers un principe supérieur.

En somme Mao complète la dialectique d’Engels. Engels pense la dialectique en trois mouvements57. Lénine constatera que cela est bien indigent, et qu’il faut repenser à partir d’Engels58. Mao posera, lui, définitivement pour notre état de connaissance scientifique actuel, les jalons d’une dialectique contemporaine59, dialectique qui sera détaillée dans un texte majeur de l’UCFML, que nous allons éplucher.

Voilà un tour d’horizon rapide de la philosophie de Mao Zedong. Il est temps désormais de voir comment l’UCFML a intégré l’ensemble de ces principes dans ces grands textes philosophiques rédigés par Alain Badiou.

Notes

1 L’anticommunisme le plus primaire s’exprime de deux manières différentes : aux Etats-Unis l’élection d’ Obama, pourtant largement arme de distraction massive du capitalisme, donne lieu, à un déchainement anticommuniste primaire si ce n’est absurde où l’on voit Obama s’afficher aux cotés des profils de Marx, Engels, Lénine et Staline et parfois Adolf Hitler (sic !) et en Europe, l’intelligentsia bourgeoise pétrie de ses certitudes et de ses représentants élus, tentent de démontrer que les dérives prétendument staliniennes étaient bien ce que l’on nomme le communisme et que cette idéologie est un danger aussi grand que le nazisme. C’est la thèse classique du fascisme rouge. Autant dire que les temps sont durs pour toute tentative de politique bolchévique. Dès lors les partis marxistes européens rompent avec les idéologies révolutionnaires, dès les années 70 pour les partis communistes et plus récemment pour les parties classés « à l’extrême-gauche », dont le dernier avatar en date le Nouveau Parti Anticapitaliste qui s’ouvrant à l’altermondialiste s’est fermé à toute forme marxisante de politique, renforçant ainsi involontairement la propagande anticommuniste. Sur une analyse assez fine du révisionnisme contemporain on pourra se reporter à l’article de la revue « Turning Point » de la Communist League (USA) d’Août 1956 concernant le discours de Khroutchev où il est question du culte de Staline (disponible sur contre-informations.fr). Retour au texte

2 Aristote : Métaphysique, Z (zétha). Pour une lecture critique : Pierre Aubenque : Le problème de l’être chez Aristote, Paris, quadrige, P.U.F. Retour au texte

3 Nous ne pouvons nous consacrer à l’étude du matérialisme dans le cadre de cet article. Résumons rapidement le point de vue maoïste sur cette question : M0 : Le monde est matériel, la matière est unique et la matière est en mouvement. D’où il suit que : M01 : Le monde est en mouvement M02 : Le mouvement est le monde. M03 : Le mouvement est la totalité concrète. M04 : Le monde est moniste, un « tout uni » M05 : La matière est infinie. M06 : La matière existe indépendamment de sa représentation M07 : La matière dépasse nos sens et ne se limite pas aux objets massifs. M08 : La matière est un composé, il peut donc être dans deux états différents. M09 : La réalité est identique à la matière. M010 : La réalité objective est la totalité du monde. Retour au texte

4 Marx-Engels : L’idéologie allemande, Paris, Editions Sociales, p. 51. Retour au texte

5 Maspero :Le Taoïsme (1950) Granet : La pensée chinoise (1934). Retour au texte

6 Mao : « entretiens sur la philosophie », 1966 in De la pratique et de la contradiction, Paris, 2008 La Fabrique, p. 277. Retour au texte

7 Métaphysique : Δ 1103 a. Retour au texte

8 Citations, chapitre XXII, p. 293. Retour au texte

9 Mao Tsétoung et la construction du socialisme, Paris, Seuil, 1975, § 33, p. 111. Retour au texte

10 Mao : De la Pratique, 1937. Retour au texte

11 Mao : De la Contradiction, 1937. Retour au texte

12 Mao : De la pratique, 1937. Retour au texte

13 Parménide : Poème, Fragment VII. Retour au texte

14 Mao : « Intervention à la Conférence nationale du Parti communiste chinois sur le Travail de Propagande » (12 mars 1957). Retour au texte

15 Mao : De la juste solution des contradictions au sein du peuple, 1957. Retour au texte

16 Ibid. Retour au texte

17 Mao Tsetoung et la construction du socialisme, Paris, Seuil, 1975, § 21, p. 89. Retour au texte

18 Sur les questions des organismes primitifs et de leur importance de la définition de la vie on pourra consulter Margülis-Sagan : L’univers bactériel, Paris, Points-seuil, 2002 et consulter aussi Robert Schapiro : L’origine de la Vie, Paris, Champs-Flammarion, 1994. Retour au texte

19 Rapport de production : système de propriété des moyens de production, rapports humains dans le travail, système de distribution. Cf. Mao Tse Toung et la construction du socialisme, Paris, Seuil, 1975, p. 103. Retour au texte

20 Au niveau politique, le monde est ainsi construit : La contradiction entre capitalisme et socialisme :. Cette contradiction pour nous n’existe plus à l’heure actuelle. Le mode de production capitaliste est devenu omnipotent. La contradiction entre bourgeoisie et prolétariat, bien entendu qui subsiste encore et qui fait toute l’actualité du marxisme : cette contradiction est inhérente au système capitaliste qui suppose que la bourgeoisie exploite une frange importante d’individus qui se doivent dès lors de vendre leur force de travail afin de pouvoir subsister dans un système capitaliste. C’est contre cette bourgeoisie que se dresse le prolétariat. La contradiction inter-impérialiste :les pays impérialistes défendent un même système de production : le capitalisme, mais leur intérêts nationaux peuvent souvent diverger. Dès lors s’engage une lutte pour l’hégémonie des superpuissances. La contradiction pays semi-féodaux, semi-coloniaux et pays capitalistes : C’est la thèse du troisième monde : des pays semi-féodaux n’ayant pas connu ou à peine leur révolution démocratique, ou semi-coloniaux c’est-à-dire ayant connu une lutte de libération nationale sont en contradiction avec les puissances impérialistes qui cherchent encore à les dominer en exploitant notamment leurs richesses humaines et de matières brutes. Retour au texte

21 Bien que parfaitement étranger au marxisme, de conviction utilitariste et que très réactionnaire sur un grand nombre de point on pourra s’intéresser aux conclusions de J.E Lovelock sur l’hypothèse Gaïa, in La terre est un être vivant, Paris, Champs-Flammarion, 1993. Lovelock voit en son hypothèse : une totalité dont il est impossible de déduire la somme de ses parties (p. 31). Ceci va à l’opposé d’une partie de la philosophie analytique contemporaine et de son principe de la méréologie. Retour au texte

22 Wladimir Vernadsky : La biosphère, Paris, Points-Seuil,2002. Retour au texte

23 Interventions à la conférence de Chengdu in Mao Textes 1949-1959, Paris, Cerf, 1975, p.496. Retour au texte

24 « Dans l'usine, on sent concrètement qu'il y a un fossé entre l'ouvrier et le patron », Vive la révolution !, Socialisation des luttes, 1969. Retour au texte

25 Mao : De la contradiction. Retour au texte

26 Ibid. Retour au texte

27 Mao : De la Pratique. Retour au texte

28 Friedrich Engels : Ludwig Feuerbach ou la fin de la philosophie classique allemande, 1. Retour au texte

29 Mao : « Intervention à la réunion du Soviet suprême de l'U.R.S.S. pour la célébration du 40e anniversaire de la Grande Révolution socialiste d'Octobre » (6 novembre 1957). Retour au texte

30 Mao : Rapport sur l'enquête menée dans le Hounan à propos du mouvement paysan» (Mars 1927). Retour au texte

31 Mao : De la pratique. Retour au texte

32 Mao : « entretiens sur la philosophie », 1966 in De la pratique et de la contradiction, Paris, 2008 La Fabrique, p. 282. Retour au texte

33 Mao : Le Grand Livre rouge, Paris, Flammarion, texte XXXIII, p.288. Retour au texte

34 Mao : Textes 1949-1959, Paris, le Cerf, 1975, p. 403 Retour au texte

35 Mao Tsetoung et la construction du socialisme, Paris, Le seuil, 1975, § 25 p. 98 Retour au texte

36 Mao : Œuvres choisies Tome 3 : « Du gouvernement de coalition » (24 avril 1945) Retour au texte

37 Mao : De la juste solution des contradictions au sein du peuple, 1. Retour au texte

38 Mao : Discours prononcé lors de la réunion des représentants de différents secteurs d’activités de Shangaï, in Mao Textes 1949-1959, Paris, Cerf, 1975, p. 379. Retour au texte

39 Mao : «Intervention à la Conférence nationale du Parti communiste chinois sur le Travail de Propagande» (12 mars 1957). Retour au texte

40 Mao De la Pratique, 1937. Retour au texte

41 Chao-Chi est le défenseur de la théorie de l’instrument docile (Muli Zheyi Nulizhuyi). Retour au texte

42 Mao D’où viennent les idées justes ?, 1963. Retour au texte

43 Mao : De la juste solution des contradictions au sein du peuple, 1957. Retour au texte

44 Mao De la Pratique, 1937. Retour au texte

45 Mao : Le Grand Livre rouge, Paris, Flammarion, texte XXXIII, p.304. Retour au texte

46 Mao Tsétoung et la construction du socialisme, Paris, Seuil, 1975, §p. 45. Retour au texte

47 Mao : De la juste solution des contradictions au sein du peuple. Retour au texte

48 On sera surpris de voir la proximité de Mao quant à son rapport au monde avec la définition même que donne Spinoza de la nature et surtout sa critique du finalisme (Appendice du Livre I de l’Ethique). On pourra consulter aussi sur la définition de la nature Nicolaï Boukharine : La théorie du matérialisme historique, §§ 30 et 31. Retour au texte

49 Mao: De la juste solution des contradictions au sein du peuple. Retour au texte

50 La GRCP a connu ses prémisses dès 1965. Retour au texte

51 Voir notamment Décision du comité central du Parti Communiste chinois sur la Grande Révolution Culturelle prolétarienne, 8 août 1966, dont Mao est réputé être le rédacteur. Cf aussi « Etudions les 16 points, assimilons-les, mettons les en pratique », éditorial du Remnin Ribao, 13 Août 1966. Texte disponible sur le site contreinformations.fr, section « Chine ». Sur la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne, on pourra lire l’analyse de Badiou dans Circonstances 5, « L’hypothèse communiste », Paris, Editions Lignes, Avril 2009, pp. 127 et suiv. Retour au texte

52 Mao : « Soucions-nous davantage des conditions de vie des masses et portons plus d'attention à nos méthodes de travail » (27 janvier 1934), Œuvres Choisies, tome 1. Retour au texte

53 Mao : Textes 1949-1959, Paris, Le Cerf, 1975, p. 450. Retour au texte

54 Ibid., texte XIX, p. 191. Retour au texte

55 Mao Tse Toung et la construction du socialisme, Paris, Seuil, 1975, p. 143. Retour au texte

56 Mao Tse Toung et la construction du socialisme, Paris, Seuil, 1975, p. 144. Retour au texte

57 Le « triplisme » comme dira Mao : 1./Loi passage quantité-qualité et inv. 2./ Loi interpénétration des contraires 3./ Loi négation de la négation (cf. Antidühring et Dialectique de la Nature). Retour au texte

58 Lénine posera les 16 principes de la dialectique indiquant qu’il faille encore les ordonnés pour éviter les redites et les similarités. Retour au texte

59 Nous anticipons ce qui sera dit en seconde partie de cet article avec le texte de l’UCFML « De la contradiction », mais en résumé la dialectique après le passage dans le tourbillon maoïste est alors définissable en ces termes : D1: Tout objet est une unité contradictoire (Un se divise en deux). D11 : Tout objet est dialectique D12 : Toute unité contradictoire n’est pas un objet. D2: Tout unité contradictoire est une lutte. D3: Tout objet n’a pas de développement égal. D31 : L’équilibre est provisoire et relatif. D32 : Le déséquilibre et permanent et absolu. D4: Le développement de tout objet est hélicoïdal (en spirale, à savoir progression par vague) et d’aspect antagonistes ou non antagoniste. D41 : Les contradictions antagonistes peuvent se résorber en un dépassement (Aufhebung) et non un simple sublation. D42 : Les contradictions non-antagonistes peuvent aussi se résorber en un dépassement (Aufhebung) et non un simple sublation. D43 : En tout objet existe une contradiction principale et une contradiction secondaire. D5: Tout changement quantitatif (par cinétique et/ou dynamique) peut impliquer un changement qualificatif. D51 : Le mouvement est cinétique s’il est principalement changement quant au temps. D52 : Le mouvement est dynamique s’il est principalement changement quant à l’espace. D53 : L’espace et le temps sont des propriétés d’existence de la matière. D531 : Le temps désigne la continuité du processus où l’altération est possible, il est perçu comme une durée par l’être conscient. D532 : L’espace désigne le lieu de la matière. D54 : Le mouvement est unité de continuité ou de discontinuité. Bien entendu cette définition complexe de la dialectique s’oppose en tout point de vue à la conception de Mario Bunge (Matérialisme scientifique, Paris, Syllepse, 2008) qui pense créer un nouveau matérialisme scientifique en évitant la dialectique qu’il pense « vieillie». Bunge ne comprend pas la dialectique marxiste et se figure expliquer la dialectique marxiste comme conception du monde à partir d’une lecture parcellaire de Hegel. De plus, il utilise de manière complètement inutile la formalisation mathématique pour systématiser son système idéaliste. Cet article s’inscrit en faux par rapport à Bunge, et l’œuvre de Badiou est finalement une réponse à celle-ci, ou plutôt à toute tentative idéaliste de faire comprendre le monde sous les oripeaux d’un prétendu matérialisme. Bunge raille la « négation de la négation » que le marxisme a évacuée grâce à Mao. Bunge est en retard d’un siècle dans sa conception du matérialisme dialectique. Dans son livre il indique : « quiconque serait mécontent de cette version [la sienne] est invité à proposer une formulation plus satisfaisante. En fait il est temps que quelqu’un le fasse » p. 46. Voilà qui est fait à notre sens ici même, professeur Bunge ! Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Florent Schoumacher, « La grenouille et le puits - Les aventures de la dialectique maoïste au sein des textes de l’UCFML », Dissidences [En ligne], 3 | 2012, publié le 14 mai 2012 et consulté le 19 mars 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=211

Auteur

Florent Schoumacher

Articles du même auteur