Après sa mise en lumière à l'occasion de l'affaire Jospin en 2001, Boris Fraenkel a été invité à rédiger ses souvenirs, souvenirs d'une vie bien remplie et mouvementée. Il fut aidé dans cette entreprise par Sonia Combe, collaboratrice de la BDIC, une des auteures du documentaire réalisé sur lui en 20001. On y découvre l'enfance et l'adolescence d'un apatride juif, dont le père meurt quelques jours à peine avant sa naissance. Contraint de vivre à Dantzig avec une mère extrêmement possessive, il n'en construit pas moins sa personnalité à travers diverses rencontres, et un premier engagement politique au sein du mouvement sioniste de gauche. Il raconte également avec retenue la découverte progressive de sa bisexualité. Ballotté de Tallin en Suisse en passant par Nancy et Grenoble, il échappe durant la seconde guerre mondiale aux rafles, et devient trotskyste à Bâle. Finalement exclu du groupe suisse et également expulsé du pays, il retourne en France en 1949 et se rapproche des trotskystes français du PCI. Il finit par adhérer au " groupe Lambert " au lendemain de l'arrivée au pouvoir de De Gaulle, et y acquiert un rôle important, effectuant de nombreux recrutements au sein des écoles normales d'instituteurs de la région parisienne, et particulièrement de l'école normale supérieure d'éducation physique. Mais outre cet engagement proprement militant, Boris Fraenkel est également connu pour avoir contribué à diffuser les écrits de Reich et de Marcuse, avec qui il avait étroitement sympathisé. C'est d'ailleurs la raison invoquée par l'OCI pour le sanctionner en 1966, ce qui provoque sa démission de l'organisation. Son jugement sur Lambert, Bloch ou Just est d'ailleurs aujourd'hui très négatif. Par la suite, il connut le harcèlement de l'administration française qui voulut l'expulser à la suite des événements de 68, et finit par l'assigner à résidence pendant environ un an… Son témoignage est passionnant, son parcours croisant celui de nombreuses figures intellectuelles variées, et témoignant d'une grande variété d'activités. Cependant, il y manque bien des aspects " quotidiens " du militantisme, et il est entaché de plusieurs erreurs dues à des approximations naturelles de la mémoire (Just exclu en 1986 au lieu de 1984 ou plusieurs notices du glossaire) et à des hypothèses fort discutables (Pablo est ainsi accusé par Fraenkel d'être un pur agent stalinien !). De même, comme souvent au crépuscule d'une vie, Boris Fraenkel tend à souligner l'importance de son existence, se proclamant ainsi (non sans une certaine ironie ?) " le père " de Mai 68, du fait de la conférence qu'il avait donné à Nanterre début 1967 sur la sexualité… La lecture de cet ouvrage profondément humain n'en est pas moins vivement conseillée.
Boris Fraenkel, Profession : révolutionnaire, Latresne, Éditions Le bord de l'eau, 2004, 204 p.
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Notes
1 "Boris Fraenkel, parcours d'un militant engagé dans son temps". Return to text
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Boris FRAENKEL, Profession : révolutionnaire
References
Electronic reference
Jean-Guillaume Lanuque, « Boris Fraenkel, Profession : révolutionnaire, Latresne, Éditions Le bord de l'eau, 2004, 204 p. », Dissidences [Online], 2 | 2011, . URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=170