Modéliser l’affectivité : la constitution d’un « corps » dans L’Astrée

DOI : 10.58335/intime.118

Résumés

Cet article aborde la question de l'intime à partir d'une réflexion sur la modélisation des passions dans l'espace du roman pastoral, L'Astrée d'Honoré d'Urfé, et sur la façon dont cet espace constitue un "intérieur" pour une communauté affective et morale. Il interroge ainsi le rapport entre le corps passionnel des bergers et la constitution pastorale d'un "corps" collectif, qui prend sens dans les questions politico-religieuses au tournant des XVIe-XVIIe siècles.

This article tackles the question of the 'intime' by thinking about the modelling of the passions in the space of pastoral novel, Honore d'Urfe's L'Astrée. It studies the ways by which this space forms both an inner and an interior space for an affective and moral community. Thus it questions the relationship between the shepherd's body of passions and the pastorale setting-up of a collective corporate "body". This relationship must be understood in the context of the politico-religious issues from the end of the sixteenth to the beginning of the seventeenth century.

Index

Mots-clés

Astrée, corps, rhétorique, lieu, sommeil, affects

Plan

Texte

Tenter de comprendre le moment où parut L’Astrée d’Honoré d’Urfé est essentiel à une réflexion sur la question de « l’intime » dans le roman : roman d’une « histoire des passions » (pour reprendre la citation de Théodore Zeldin mise en exergue dans le propos introducteur de ce volume sur l’intime1), il fut publié entre 1606 et 1628, pendant les années de construction de la paix d’Henri IV, puis du retour des troubles religieux à partie de 1617, et du premier ministériat de Richelieu (1624). Ce qui se joue alors d’une recomposition religieuse complexe et instable, ce qui concerne la construction théologico-politique nouvelle – tout cela intéresse fortement la place des lettres, comme le montre notamment le procès de Théophile de Viau vers 1623-1625. À cet égard, on peut lire L’Astrée comme le roman qui accompagne la réintégration des dévots dans le royaume et la recomposition catholique, au moins pour ses trois premières parties parues du vivant de l’auteur, en 1607, 1610, 16172 : les transformations sensibles de la narration et des questions politiques traitées dans les histoire enchâssées témoignent d’ailleurs de la façon dont le roman in progress travaille sa propre réception dans des temps de trouble.

Avec la réflexion d’un sociologue et historien, Norbert Elias, le contexte d’analyse de L’Astrée se modifie et s’élargit : le roman d’Urfé occupe en effet une place décisive dans son étude de la curialisation des nobles d’Ancien Régime. Le contexte devient celui de la longue durée d’un processus socio-politique (et non plus religieux) et d’une formation bien particulière qu’Urfé n’a cependant pas connue comme telle : la Cour3. La réflexion d’Elias est au demeurant importante pour la question de l’intime à la fois parce que celui-ci ne pense pas l’individu en dehors du collectif qui le détermine, et parce qu’il envisage le roman d’Urfé comme l’expression d’un état intermédiaire dans un processus d’autocontrainte long et complexe, état de trouble qui se situe donc pour lui au niveau de l’individu, mais se comprend à une échelle plus large (celle du Prozess). Le trouble n’est pas en effet pour Elias l’objet d’une réflexion sur le seul individu, ni sur quelque chose comme le niveau intime d’une expérience collective, il est le point de saisie, l’interface en quelque sorte, de la constitution d’un autre lien social, d’une intériorisation non entièrement accomplie et d’une intégration d’un particulier « contraint » en ses mœurs dans un groupe – une société nouvelle. En outre, il est saisi à travers la notion de « distanciation », souvent reprise par Elias, et qui ne se laisse pas exactement rapporter à l’émergence d’une conscience de soi, mais est la forme spécifique à ses yeux de la conscience historique4.

La lecture qu’Elias fait de L’Astrée a donc mis en relief, d’une manière surprenante et originale, une question qui n’avait pas été aperçue jusqu’alors – celle du trouble de la perception. Pour ma part, j’ai été amenée à donner un autre sens à cette même question. Sans contester la proposition d’Elias, j’ai contextualisé ce qu’il avait aperçu et si fortement analysé dans une autre histoire que celle de la curialisation : dans l’histoire de la paix du premier XVIIe siècle et de la contribution des lettres à cette paix, dans l’histoire du règlement politique des questions religieuses, et surtout dans une histoire politico-religieuse du corps, appréhendée à la fois à travers la question de la « bergerie » en tant que genre et comme la question centrale des guerres de Religion : cela voulait dire penser le roman d’Urfé dans une réflexion sur le corps mystique du catholicisme, le corps de passions des bergers, le corps comme mode de pensée du politique et du social propre à l’Ancien Régime5.

Cette réflexion initiale sur les contextes de lecture de L’Astrée vise à mettre en évidence le cadre dans lequel il me semble possible de poser la question, largement anachronique au demeurant, de l’intime, et de la discuter : celui de la place de l’écrit pastoral dans des histoires complexes qui incluent les lettres (histoire politique et religieuse, histoire sociale et psychologique), non pas seulement au niveau des représentations que produit le roman, mais au niveau de l’action qu’il est en tant qu’énonciation, voire mode d’intervention écrit dans un moment spécifique qui se laisse saisir à plusieurs niveaux, mais qui n’est assurément pas d’emblée celui de la « littérature ». La question de l’intime présuppose une pensée des rapports de l’individu et du collectif, certes, mais cela vaut aujourd’hui pour un certain individu, pour une certaine pensée de l’individu6 – celui qui, parce qu’il est égal aux autres, parce qu’il est défini comme foncièrement égal, dispose aussi de la profondeur de quelque chose comme son intimité ou subit le manque de cette intimité comme ce qui serait dû à tous et donc à chacun. Or, l’individu (même l’individu que pense Elias pour l’Ancien Régime) n’est évidemment jamais conçu au XVIIe siècle en vertu d’un principe d’égalité : cela signifie non seulement qu’il ne peut être envisagé dans les mêmes termes (par exemple, avec une « intimité », même plus ou moins développée et consciente), mais aussi qu’il n’entre pas dans le « tout » du collectif suivant les mêmes déterminations que ce que nous appelons aujourd’hui « individu ». La société de l’Ancien Régime est hiérarchique, cela implique un ordre des positions qui doit être pris en charge aussi bien au plan de la façon dont chacun pouvait s’envisager (et donc pas en référence à un « intimus ») qu’au plan de sa dimension sociale en tant que telle7.

1. Le Forez comme un for intérieur

Singulièrement, Norbert Elias ne cherche pas dans le roman d’Urfé ce qu’il analyse ailleurs, à travers des manuels et des arts, du point de vue des comportements dans le processus de civilisation : le sommeil, notamment, qu’il renvoie à l’intime … avec des guillemets qui montrent la difficulté qu’il y a à utiliser cette notion pour la Renaissance8. Il y a pourtant de nombreux sommeils dans L’Astrée, qui sont une des pistes par où aborder la question du corps, mais qui ne participent pas du grand récit sur le processus de civilisation suivant les modalités proposées par Norbert Elias. Ces sommeils ont en effet une fonction de ponctuation dans le récit, et une fonction d’organisation et de redistribution des affects9 : d’une part, le sommeil des personnages apparaît dans les transitions narratives (passage d’un « livre » à l’autre par exemple, il y a douze livres dans chacune des « parties » publiées entre 1607 et 1619) ; d’autre part, il participe d’une redistribution des affects dans le récit, en fonction de la répartition des affectus aigus et modérés, classement des sentiments décrit par Quintilien, et bien connu des traités de rhétorique de la Renaissance. Ce partage se manifeste à la fois comme une constante réarticulation entre affections pathétiques et affections éthiques d’un même berger, et comme une relation entre bergers en tant qu’ils sont sujets d’affections différentes, contraires ou complémentaires. L’organisation des passions à travers les images de corps qui ponctuent le récit-cadre me paraît ainsi orienté dans le sens d’une conservation des passions à l’intérieur du processus même d’amuïssement de la violence pathétique, mais aussi d’un déploiement de ces passions dans des pratiques « poétiques » (lettres, chants).

Cette analyse ne permet pas de considérer le sommeil comme un « lieu » narratif de l’intime. Le sommeil astréen n’est jamais en outre une profondeur, sauf peut-être le premier sommeil du berger Céladon, narrativement associé à la profondeur du jardin où descend son hôte Galathée, qui va alors déclarer sa passion (première partie, liv. 2). Mais l’espace est ici la métaphore d’une affectivité qui a une histoire. Le sommeil apparaît soit comme une transition entre des moments d’affects, soit comme une surface réfléchissante (pour celui qui est ébloui par l’image du sommeil de l’autre, et parce qu’il projette quelque chose du pathos amoureux vers un regard), un relais entre deux personnages. Il n’a pas de contenu, il est pure enveloppe. Il n’est donc pas conçu, dans le roman, comme un lieu de « l’intime » au sens moderne du terme – un lieu du privé, séparé du public, pour un individu –, mais plutôt comme un suspens, une pause marquée par la mise au premier plan d’un corps (plus ou moins décrit). Significativement, les bergers dorment dehors, dans la nature, sur les chemins de leurs transhumances affectives. Et les images de corps endormi (Astrée, Céladon, Silvandre) sont observées par d’autres bergers : le sommeil s’observe, comme s’observe un tableau, ce qui fait qu’il n’est pas le lieu d’une intimité en soi (d’une réserve), mais le moment narratif d’une interface entre les affections particulières de l’endormi, suspendues à l’état de traces, et la relation à autrui que le corps abandonné, les passions amuïes, autorisent. Ainsi participe-t-il de l’intimité comme élaboration d’une affectivité.

On peut donc réfléchir à la question de l’intimité dans le roman à partir d’une lecture des scénarios corporels et des dispositifs passionnels qui travaillent une vaste modélisation de l’affectivité et participent du discours du roman sur la transformation des passions – un discours auquel il convient de donner sens dans le contexte politique et religieux que l’on a rappelé en introduction. Il s’agit à la fois de proposer une image corporelle des passions, de tempérer celles-ci (tout en présentant des récits secondaires dans lesquels la violence passionnelle se déploie10) et il s’agit aussi de constituer un corps, pourrait-on dire : un corps de passions, d’émotions, modélisé par tout un ensemble de pratiques de lecture et de déchiffrement d’images et de signes, pratiques individuelles et collectives, un corps qui est, à côté des cas proposés à l’écoute de la troupe des bergers, un lieu d’élaboration du caractère « civil » des sentiments.

Mais pour qu’une telle analyse soit possible, il faut que la ponctuation dans le récit des images de corps (endormi, picturaux) et des pratiques affectives soit cadrée, bordée par une délimitation de quelque chose comme une retraite. C’est donc l’espace pastoral décrit aux premières pages du roman qui porte la signification et l’enjeu de cette modélisation des affections. Il définit le lieu du retrait où les bergers sont venus pour vivre « plus librement et sans contrainte »11 :

[…] Au cœur du pays est le plus beau de la plaine, ceinte comme d'une forte muraille des monts assez voisins, & arrousée du fleuve de Loyre, qui prenant sa source assez prés de là, passe presque par le milieu, non point encore trop enflé ny orgueilleux, mais doux & paisible. Plusieurs autres ruisseaux en divers lieux la vont baignant de leurs claires ondes : mais l'un des plus beaux est Lignon, qui vagabond en son cours, aussi bien que douteux en sa source, va serpentant par ceste plaine depuis les hautes montaignes de Cervieres & de Chalmasel, jusques à Feurs, où Loyre le recevant, & luy faisant perdre son nom propre, l'emporte pour tribut à l'Ocean. […]12.

Ce giron du Forez délimite quelque chose comme un for intérieur pour la collectivité des bergers, un for marqué par la clôture, les affections et le sens de la vie pastorale comme vie « morale »13. La question de l’étymologie du Forez est naturellement abordée dans le récit :

le nom de Foretz vient de Forum qui est Feurs, petite ville que les Romains firent bastir, & qu'ils nommerent Forum Segusianorum, comme s'ils eussent voulu dire la place ou le marché des Segusiens, qui proprement n'estoit que le lieu où ils tenoient leurs armées durant le temps qu'ils mirent ordre aux contrées voisines14.

Le pays du Forez et la ville de Feurs ont donc la même étymologie, qui garde la trace de l’occupation romaine, soit d’une histoire qui va être déclinée par les histoires enchâssées et le récit du druide Adamas qui en a principalement la mémoire. Ces histoires approfondissent la temporalité de l’histoire-cadre, elles en creusent le temps. Mais la structure à plusieurs niveaux narratifs du roman pastoral confère aussi par là même à l’espace pastoral ce sens juridique de « tribunal », ou « juridiction » qui permet au récit-cadre de faire apparaître une série de « cas » de conscience, et de jugements sur l’histoire et le passé. Le for est ainsi à la fois un « intérieur » et l’espace d’un jugement collectif.

Ce qui délimite un bord, un intérieur, ce n’est donc pas tant le corps de tel ou tel berger mais le pays célébré par le roman, et jusque dans l’adresse à la rivière Lignon, en ouverture de la IIIe partie. À l’intérieur de cette limite, toute la pastorale peut se lire comme un espace des affects, un intérieur bordé, parfois menacé, par d’autres espaces : celui des nymphes, celui de l’épopée et de la guerre. La question de la limite entre intérieur et extérieur qui est un des traits de « l’intime » me semble devoir être posée au niveau de l’espace pastoral. C’est en effet l’espace qui définit le cadre de la vie pastorale comme vie morale, l’espace qui marque les contours d’une intériorisation de la vie morale. C’est aussi l’espace qui délimite le sens d’une conservation de la religion originaire des bergers. Sans doute peut-on faire l’hypothèse que l’organisation des affections dans ce cadre pastoral, à travers notamment la disposition des corps et la façon dont ils signifient pour le tout de la « bergerie » (bergerie qui est ici, on l’a compris, définie par le sens moral de l’amour), fait passer une limite à l’intérieur des bergers, procède d’une expérience du contrôle des passions, c’est-à-dire aussi d’une intériorisation de la contrainte – une telle observation rejoint alors les observations de Norbert Elias sur « l’autocontrainte ». Mais il n’en reste pas moins que l’espace pastoral lui-même apparaît dans le même temps comme le cadre de la constitution d’une unité du tout, une unité qui est celle d’un « corps » socio-politique.

2. Religion de l’amour et forme perspective du collectif

Ce partage, ce jeu avec la limite qui fonde d’emblée le sens moral de la pastorale comme retrait, comme séparation, trouve des relais au plan narratif, qui permettent d’en préciser le sens. Ainsi, la retraite mélancolique du berger Céladon, à la fin de la première partie du roman, peut-elle être lue comme un redoublement de la retraite pastorale, mais une retraite qui implique une séparation du corps de Céladon d’avec les autres bergers, qui marque donc une coupure dans la « bergerie ». La mélancolie, si elle implique une rhétorique du corps dans les lettres, une altération des humeurs, fait passer d’abord la coupure entre l’individu particulier et le collectif : elle est en cela une figure de ce qui se joue au niveau de l’ensemble du roman. Car la pastorale est à la fois donnée comme un bord et comme le lieu d’une perte, qui se répète dans la distance entre les amants. La séparation du berger Céladon d’avec Astrée est l’occasion des jeux d’observation et de dissimulation que l’on a mentionnés à propos du sommeil : Céladon apparaît comme un fantôme dans la pastorale où il est « désastré » et rêve de rester à l’état de souvenir dans la mémoire de sa bergère. Il écrit ainsi dans une lettre laissée au pied du portrait d’Astrée comme une bouteille à la mer :

Si ne laisseray-je de vous remercier autant que peut faire l’ombre vaine de ce que j’ay esté (car veritablement je ne suis plus autre chose) si vous estes venue voir combien vous pouvez sur moy, car comme que ce soit, c’est un de mes plus grands desirs d’estre en vostre memoire. [II, 8, 335]

L’intériorité du sentiment se constitue dans un rapport avec autrui, modélisé par l’écrit. Mais on le voit, pour Astrée, pas de possibilité de co-existence des corps, et l’écriture est la modélisation d’une relation à distance, d’une présence intériorisée.

Il faut observer ici que la forme intériorisée de la relation amoureuse dans la distance est homologue de l’intimité de la relation mystique avec Dieu. S’il est vrai que l’on peut contextualiser L’Astrée dans les questions politiques et religieuses de la fin du XVIe siècle, l’objet perdu du catholicisme ne prend pas, dans le roman, la forme d’une relation intime avec Dieu – de ce mysticisme qui va être, au XVIIe siècle, une voix forte de résistance aux cadres familiaux et au contrôle de l’Église, le lieu d’une expérience de la profondeur et de l’intimité de la chair15. La question d’une perte des origines ne débouche pas dans le roman pastoral sur un engagement dans une relation verticale avec le divin. La question religieuse est en revanche déplacée dans le registre amoureux. Ainsi le druide Adamas, quand il rapporte au berger les origines de la religion gauloise et leur altération par le mélange avec les cultes romains, suggère-t-il au berger ce déplacement du religieux dans l’amour :

[…] depuis que ces usurpateurs de l'autruy, je veux dire ces peuples que l'on appelle Romains, apporterent avec leurs armes leurs Dieux estrangers dans les Gaules, & que perdant nostre ancienne franchise, nous fusmes contraints de sacrifier en partie à leur façon, nous avons eu des temples où nostre Dieu a esté adoré parmy les leurs, & parce que la coustume est passée enfin en loy, il vous sera permis, Celadon, de dedier une partie de ce Boccage, non pas comme à une premiere divinité, mais comme à un tres parfait ouvrage de ceste divinité à vostre belle Astrée, ce que nostre Dieu ne trouvera point plus mauvais que les Temples dediez par ces estrangers à la Déesse Fortune, à la Déesse Maladie, ou à la Déesse Crainte : principalement si vostre ouvrage luy estant directement consacré, vous n'adorez pas sur leurs Gazons ceste Déesse Astrée, mais luy en eslevant d'autres à costé de leurs chesnes vous adressez vos vœux à ceste belle, comme à l'œuvre le plus parfait qui soit sorti de ses mains. [II, 8]

Il n’y a pas, dans L’Astrée, de place pour la question religieuse autre qu’un discours sur la religion originaire des Gaulois et ce curieux déplacement de la dévotion dans le registre amoureux. Ainsi Céladon construit-il un temple à Astrée, qui permet une superposition de la divinité de l’âge d’or et de sa bergère. Un temple où la « dévote troupe » (II, 5) des bergers viendra plus tard se recueillir :

Ce fut en ce lieu qu’Astrée et sa troupe entrerent et virent tant de vers et d’escritures de Celadon, car depuis le berger s’y plaisoit de sorte qu’il estoit tousjours ordinairement devant l’image de sa bergere, et l’adoroit de tout son cœur, et selon que les diverses imaginations luy venoient, il les escrivoit et les mettoit comme pour offrande sur l’autel de la déesse Astrée. [II, 8]

Entrée au temple en compagnie de la troupe des bergers, Astrée fait la découverte de l’amour, qu’elle croyait faux, de Céladon : « Astrée estant retirée à part, lisoit & consideroit ces vers, & plus elle regardoit l'escriture : & plus il luy sembloit que c'estoit de celle de Celadon : de sorte qu'apres un long combat en elle mesme, il luy fut impossible de retenir les larmes ; & pour les cacher elle fut contrainte de tourner le visage vers l'autre autel. ». Dans les larmes, endeuillée, elle reconnaît la main de son berger à travers les écritures, et se reconnaît elle-même à travers le portrait qui la confond avec la divinité de l’âge d’or :

Au milieu l'on voyoit un tableau, par dessus lequel les deux Mirtes pliant les branches, sembloient luy faire une couronne ; & cela estoit bien recogneu pour n'estre pas naturel : mais entortillé de cette sorte par artifice. Le tableau representoit une Bergere de sa hauteur, & au plus haut du tableau il y avoit, C'est la Déesse Astrée, & au bas on voyoit ce vers,

Plus digne de nos vœux que nos vœux ne sont d'elle.

Si tost que Diane jetta les yeux dessus, elle se tourna vers Philis. N'avez vous jamais veu (luy dit-elle) mon serviteur, personne à qui ce pourtrait ressemble ? Philis le considerant d'avantage, Voila, luy respondit-elle, le pourtrait d'Astrée. Je n'en vis jamais un mieux fait ni qui lui ressemblast d'avantage : mais, continua-t'elle, vous sembloit-il qu'on ne l'ait pas voulu rendre reconnoissable ? n'a-t'elle pas en la main la mesme houlette qu'elle porte : & lors prenant celle qu'Astrée tenoit. Voyez ma Maistresse ces doubles C. & ces doubles A. entrelassez de mesme sorte tout à l'entour ; & comme l'endroit où elle la prend quand elle la porte est garny de mesme façon, & les fers d'en bas de cuivre, avec les mesmes chiffres : Et le sifflet qui est en haut, representant la moitié d'un serpent, comme il se tourne de mesme. Vous avez raison, dit Diane, mesme que je vois icy Melampe couché à ses pieds. Il est bien reconnoissable aux marques qu'il porte. Voyez la moitié de la teste comme il l'a blanche, & l'autre noire, & sur l'aureille noire la marque blanche. Si l'autre aureille n'estoit cachée, il y a apparence que nous y verrions la marque noire : car le peu qui s'en voit au haut de la teste, & au dessus paroist estre blanc. Voyez aussi céte marque blanche tout au tour du col en façon de colier, & l'eschancrure du poil noir qui se tournant en demy lune dessus les espaules, finit de mesme sur la crouppe où le blanc recommence. On n'y a pas mesme oublié cette bande noire & blanche tout le long des jambes. [II, 5]

Astrée se reconnaît, donc, dans le portrait de la divinité Astrée. Celui-ci apparaît dès lors comme un lieu de construction du « soi », doublement fondé sur la ressemblance avec l’image mentale de Céladon et sur une conformité symbolique avec la divinité. De même que les poètes de la Renaissance célébraient le nom de Diane de Poitiers comme celui-là même de la divinité lunaire, Honoré d’Urfé motive la sacralisation amoureuse d’Astrée par l’homonymie avec la divinité de l’âge d’or inscrite dans la tradition pastorale depuis les Bucoliques de Virgile16.

Ce rapport du roman à la mythologie et au sens religieux de l’amour est sans doute un des éléments les plus difficiles à comprendre dans l’Astrée, parce que le souffle spirituel du néo-platonisme – c’est bien une rencontre entre deux âmes que, par l’intermédiaire du portrait, l’imagination de Céladon autorise – mène à un travail sur l’affect, par où la conversion de l’imagination mélancolique contribue à une forme de constitution de l’intériorité amoureuse. Au passage, on voit la complexité qu’il y a à évaluer le sens politique du « retour d’Astrée »17 sans prendre en charge la dimension amoureuse, et érotique, que permet le fait d’avoir donné à l’héroïne le nom d’une divinité. Sans doute le néo-platonisme renaissant autorise-t-il à adorer la créature pour accéder à la divinité. Mais faire cette observation, motivée par tout le substrat néo-platonicien du roman, ne fait qu’accentuer le problème que pose cette « solution » philosophique et morale à la question religieuse dans le roman : celle de l’unité et de la pureté perdues du catholicisme originaire.

La « solution » néo-platonicienne permet donc un repli de la dévotion sur l’amour et par là même la forme d’une modélisation de l’intériorité. Devant son portrait « mythologique », Astrée se reconnaît, c’est-à-dire qu’elle se connaît. Dans ce passage fameux, la peinture apparaît comme un mode de constitution d’une intimité ou d’un « intérieur » ; sans être en soi un lieu de l’intime (quoiqu’on puisse éventuellement aller dans ce sens), elle est un des lieux d’articulation entre intériorité et collectif. Ce n’est pas le cas de toutes les peintures dans le roman, la galerie des portraits historiques du druide Adamas (Troisième partie, liv. 3) fonctionne différemment : elle donne une place, dans le roman, à une « visibilité » de l’histoire. Dans le cas du portrait d’Astrée, ou du modèle pictural qui informe la description d’Astrée endormie, la peinture « perspective », si l’on m’autorise ce néologisme, la relation entre les bergers : elle organise la compossibilité des corps (regardé / regardant) selon un point de vue. Elle organise donc la « perception », au sens étymologique du verbe perspicere (« voir distinctement »), qui est un corollaire, au niveau de l’expérience sensible, de la constitution d’une intériorité.

J’ai fait l’hypothèse, à propos du sommeil mais cela peut être étendu aux autres « lieux » du corps dans le roman, que cette modélisation de l’intériorité, ce travail de « subjectivation » dans des lieux narratif passe plus globalement par la constitution de l’espace pastoral en structure collective. Cette fabrication qui passe par une cartographie très précise de l’espace défini au début du roman, on peut peut-être la rapporter à l’objet de la pratique théorique que constitue la construction des tableaux suivant la perspective légitime, une « forme symbolique » qu’Erwin Panofsky résume ainsi :

un complexe spatial univoque et cohérent d’extension infinie (dans le cadre de la “direction du regard”) à l’intérieur duquel les corps et les intervalles d’espace libre, reliés entre eux selon une loi parfaitement connue, constituent un corpus generaliter sumptum18.

Le lieu de peinture organise la possibilité pour Astrée d’être à la fois devant et dans le tableau, dans la mémoire de Céladon et dans la pastorale. Une compossibilité structurée par le « lieu » pastoral comme forme perspective. La pastorale comme espace perspectif pouvant être alors la forme symbolique d’une structuration des affects historiques. C’est en ce sens qu’on serait fondé à voir dans le « procès » du corps passionnel qui ordonne une redistribution narrative des affects une participation de L’Astrée au règlement des troubles de religion, à la construction d’une intelligibilité des passions politiques et à une représentation du corps socio-politique. L’Astrée propose en effet en certains moments du texte des dispositifs d’intégration des passions dans des pratiques sociales exemplaires, appropriables par tous, des pratiques lettrées notamment, et une conversion par là de l’énergie du corps passionnel en une énergie sociale19 susceptible de participer à la construction d’un ordre socio-politique nouveau.

Poser ainsi la question du Dieu absent de L’Astrée, quand la question du corps et de la dévotion nous y paraît si fortement posée, et déplacée, est encore une façon de souligner que ce roman si traversé d’émotions, de passions, ne construit pas de solution individuelle à la crise qu’il rapporte. Ce qui nous paraît donc en jeu est la constitution d’un « corps » socio-politique, dans une articulation entre la dévotion adressée à ce qui prend amoureusement la place du corps mystique du catholicisme et la constitution d’un corps propre, « tempéré », pour les bergers. Nouvelle fonction de la littérature du point de vue de l’expression des passions politiques.

La distanciation mise en évidence par Elias comme une donnée du processus historique me paraît ainsi, un peu différemment de ce que le sociologue allemand propose, structurée dans le roman d’Honoré d’Urfé par une forme spécifique, moderne, du lieu qui récrit le « lieu » pastoral et lui permet d’être l’espace d’une expérience. Dans l’épître de l’auteur à la bergère Astrée, celui-ci se met en scène dans le retrait d’un « secret », d’une réserve, que l’on peut et doit relier à la constitution, dans le roman, d’un espace collectif de l’affectivité :

Si tu te trouves parmy ceux qui font profession d'interpreter les songes, & découvrir les pensées plus secrettes d'autruy, & qu'ils asseurent que Celadon est un tel homme, & Astrée une telle femme, ne leur responds rien, car ils sçavent assez qu'ils ne sçavent pas ce qu'ils disent : mais supplie ceux qui pourroient estre abusez de leurs fictions, de considerer que si ces choses ne m'importent point, je n'eusse pas pris la peine de les cacher si diligemment, & si elles m'importent, j'aurois eu bien peu d'esprit de les avoir voulu dessimuler & ne l'avoir sceu faire. Que si en ce qu'ils diront il n'y a guere d'apparence, il ne les faut pas croire, & s'il y en a beaucoup, il faut penser que pour couvrir la chose que je voulois tenir cachée & ensevelie, je l'eusse autrement déguisée.

Il y a là assurément mise en scène, mais l’expressivité lyrique de l’énonciation permet bien d’articuler le travail d’une publication et celui d’une division de l’auteur : il y a bien là en effet co-publication d’un livre, une proposition, et d’un secret, une réserve, autrement dit, mise en scène d’un clivage, peut-être la forme de constitution d’un espace réservé à la mélancolie, à un « quant-à-soi » qui entend échapper à l’interprétation, au public, mais qui n’est peut-être pas non plus homologue de ce que nous appelons une « intimité ». Dans l’épître de la deuxième partie du roman, cette réserve est figurée par la retraite de Céladon, désigné par l’auteur comme gardien de « l’amour à la vieille gauloise », figure d’un passé que le roman mobilise et dont il se sépare.

Cette observation me conduit à une dernière remarque, un dernier questionnement. Qu’est-ce que le monde pastoral, l’espace structuré collectivement proposé par Urfé à l’échelle de l’histoire, qu’est-ce que cet espace formalise du point de vue religieux et social ? Que signifie sa « proposition » (et son utilisation des lettres dans cette perspective) dans le monde où il publie en 1607, 1610, 1619 ? Il me semble que, toute tissée qu’elle est d’idéologie nobiliaire (valeurs de générosité, modèle de la courtoisie, privilège des liens de personne à personne), la pastorale d’Urfé ne propose pas un « modèle social », ni même une « société » (Gesellschaft en allemand), mais plutôt quelque chose comme une communauté (Gemeinschaft) – et que la « réserve » de l’auteur (ou de son personnage) est un élément constitutif de celle-ci. La « sixième » partie du roman mettra en scène d’ailleurs, cette communauté, en publiant une lettre fictive de l’auteur à l’académie allemande des « Parfaits amants »20. Encore une fois, cela ne signifie pas que cette « communauté » n’est pas traversée d’idéologie, mais qu’elle est constituée d’abord à partir de l’affect et de la vie morale. Ce à quoi le roman donne forme ainsi, c’est à une sorte d’intériorité « commune », partagée, en tant qu’elle est marquée par le deuil, la perte. Autrement dit, le roman propose une échelle d’analyse intermédiaire entre l’individu et le social pensés par Norbert Elias, qui les « projette » sur la fiction urféenne : l’échelle de la communauté choisie, voulue, fondée sur la tradition et les émotions, une communauté « affective »21 dont il reste à savoir quelle place elle va occuper dans le nouvel ordre socio-politique, quel public elle constitue ou contribue à constituer (volontairement, ou malgré Urfé), et ce qu’elle prend en charge, ou peut-être invente, d’une fonction nouvelle des lettres dans la politique du premier XVIIe siècle.

Références bibliographiques 

Certeau, Michel de (1987). La Fable mystique - XVIe-XVIIe. (=Tel Gallimard). Paris : Gallimard.

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Notes

1 Zeldin 1980. Retour au texte

2 Giavarini 2010 : chaps 4 et 5. Retour au texte

3 Élias 1986a : chap. VI. Retour au texte

4 Elias 1986a : 285-286 : « Le mouvement vers une conscience plus vive de l’autonomie de l’expérience par rapport à l’expérimentateur, vers une plus grande autonomie des « objets » dans la conscience des « sujets » est étroitement lié au développement de la cuirasse qui s’intercale sous forme d’autocontrôles plus ou moins profonds entre les impulsions affectives et les objets qu’elles visent ». Voir aussi Elias 1986b. Retour au texte

5 Giavarini 2010 : 123-126. Retour au texte

6 Voir les remarques de Jean-Claude Schmitt (2001 : chap.. 10). Retour au texte

7 Sur ces questions, voir le livre dirigé par Fanny Cosandey, notamment de la même « L’insoutenable légèreté du rang » (2005 : 169-189). Retour au texte

8 Elias 1991 : 232 : « La chambre à coucher est devenue une des enceintes les plus “privées”, les plus “intimes” de la vie humaine. […] Ses cloisons visibles et invisibles [il s’agit de la “famille restreinte”] soustraient aux yeux des autres hommes les aspects les plus “privés”, les plus “intimes”, les plus “animaux” de l’existence humaine. » Et p. 233 : « Un changement se fait sentir quand la montée sociale de larges couches moyennes confère au lever et au coucher des particuliers un cachet “intimiste” […] ». Ainsi que p. 237 : « Ce qui caractérise précisément la société du XIXe siècle et dans une large mesure encore la nôtre, c’est ce curieux mélange de sensibilité aux expériences “pénibles” ou de “moralité” fortement intériorisées et devenues “autocontrainte” d’une part et d’absence d’un style propre aux “domaines intimes” de l’autre. » Le domaine de « l’intime » est donc, on le voit, celui du corps, le « privé » des « particuliers ». Retour au texte

9 Sur les sommeils dans L’Astrée, je me permets de renvoyer à un article antérieur qui développe ce qui est ici résumé : Giavarini 2008. Retour au texte

10 Par exemple pour l’histoire de Célidée (IIe partie, liv. 1), ou celle d’Ursace et Olymbre (IIe partie, liv. 12). Retour au texte

11 L’Astrée. Première partie, « L’Autheur à la bergère Astrée » (Urfé 2011 : 112). Retour au texte

12 Ibid, liv. 1, 117-118. Retour au texte

13 Ibid., « L’Autheur à la bergere Astrée », 111 : « Que si quelqu’un me blême de t’avoir choisi un Theatre si peu renommé en l’Europe, t’aytant esleu le Forests, petite contrée & peu connuë parmy les Gaules, responds leur, ma Bergere, que c’est le lieu de ta naissance. Que ce nom de Forests sonne je ne sçay quoy de champestre, & que le pays est tellement composé [configuré], & mesme le long de la riviere de Lignon, qu’il semble qu’il convie chacun à y vouloir passer une vie semblable. »  Retour au texte

14 Ibid., 173. Retour au texte

15 De Certeau 1987 et Houdard 2008 : chap. 2 notamment, et surtout p. 102-106. Retour au texte

16 Voir le livre de Frances A. Yates (1989). Retour au texte

17 Comme l’analyse Kathleen Wine (2000). Retour au texte

18 Panofsky 1975 : 156. Je remercie M.-P. Gaviano de m’avoir suggéré ce rapprochement, à l’occasion d’un séminaire commun où je faisais l’hypothèse d’une déambulation pastorale de « corps en corps », et de la constitution par là même de l’espace comme « corps ». Retour au texte

19 Sur cette notion, voir Stephen Greenblatt (1988). Retour au texte

20 « Aux princes et aux seigneurs de l’académie des parfaits amants », l’Astrée de messire Honoré d’Urfé […], sixième partie dediée par l’Autheur à quelques-uns des Princes de l’Empire, Paris, Robert Fouet, 1626. Ce titre de « sixième partie » s’explique par l’affaire de la « quatrième partie » de l’Astrée, que je rappelle dans la Giavarini 2010 : chap. 4, 139-141. Retour au texte

21 Je distingue cette formulation de ce que les sociologues appellent « communauté émotionnelle » en référence à Weber. Sur ce point, et pour éviter toute confusion, voir l’analyse de Favret-Saada, 1994. Retour au texte

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Référence électronique

Laurence Giavarini, « Modéliser l’affectivité : la constitution d’un « corps » dans L’Astrée », L'intime [En ligne], 3 | 2012, publié le 25 septembre 2012 et consulté le 28 mars 2024. DOI : 10.58335/intime.118. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/intime/index.php?id=118

Auteur

Laurence Giavarini

Maître de Conférences à l'université de Bourgogne, membre du Centre Chevrier (uB) et co-responsable du Grihl (Paris 3/EHESS-CRH), 2 bld. Gabriel, 21000 Dijon – laurence-giavarini [at] orange.fr