Pierrick Cariou, La Ligue communiste révolutionnaire en Charente-Maritime dans les années soixante-dix, Université de La Rochelle, mémoire de maîtrise, juin 2003, 222 p. et 71 p. d'entretiens (sous la direction de Jean-Paul Salles et de Laurent Vidal).

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Mots-clés

Trotskysme

Texte

Pierrick Cariou fait partie des audacieux à un double titre. D'abord parce qu'il s'est lancé dans l'histoire du très contemporain - avec la difficulté d'accéder à certaines sources écrites que cela implique - , ensuite parce qu'il a choisi un thème fort éloigné de ses préoccupations habituelles. Certes, d'autres apprentis historiens ont commencé à étudier l'histoire de la LCR, Yann Kindo pour la Lorraine, Thomas Saglio pour l'Alsace, Pauline Jarrige pour Bordeaux ou Karel Yon pour Paris. Mais ils sont en général très proches de cet univers militant. Pierrick Cariou a dû faire un effort important pour se familiariser avec les us et coutumes de ce milieu. Son mérite n'en est que plus grand. Il a cependant eu la chance d'obtenir une dérogation qui lui a permis d'accéder aux rapports des fonctionnaires des renseignements généraux, il a pu également utiliser les archives privées détenues par d'anciens militants, et surtout il a rencontré un certain nombre d'acteurs de cette histoire, dont il retranscrit les entretiens dans une annexe (pp. 217-289). Sa troisième partie sur " les militants " est la plus originale, nous apportant de nombreux renseignements sur la profession de ceux-ci, leur origine sociale, l'orientation idéologique de leurs parents. Egalement, l'auteur note bien le poids d'un engagement de type sacrificiel sur la vie personnelle des militant(e)s, mais en revanche il note aussi tout ce que le militantisme apporte en matière d'ouverture au monde. Bien sûr la LCR - en Charente-Maritime moins qu'ailleurs - n'a pas réussi à percer dans le milieu ouvrier, objectif habituel des trotskystes, mais elle a été une importante école de formation pour ceux qui l'ont approchée. Les gens qui passent par la Ligue ne se replient pas, en général, sur eux-mêmes. Ils y acquièrent un savoir-faire, investi ensuite dans la société, où nombre d'ancien(ne)s militant(e)s sont syndicalistes, écologistes ou élus municipaux. Par exemple, dans la municipalité d'Aytré, grosse ville ouvrière de la banlieue de La Rochelle où se trouve l'usine Alstom, figuraient dans les années 1980 pas moins de quatre anciens militants ou sympathisants de la LCR, dont le maire et une adjointe. Cette porosité entre la Ligue et la société civile s'explique d'ailleurs par les raisons qui ont poussé ces jeunes gens à adhérer à l'organisation. Ce mémoire montre que la plupart n'adhèrent pas à la LCR parce qu'elle serait le conservatoire du trotskysme, de la vraie doctrine marxiste révolutionnaire, mais plutôt par volonté d'œuvrer à l'amélioration de la condition de la femme, pour Angélica l'infirmière, ou par antimilitarisme, pour Patrick l'ouvrier. Bien sûr, on regrettera quelques maladresses de forme, quelques insuffisances aussi. Il aurait fallu développer sur les difficultés qui assaillirent l'ouvrier sympathisant de la LCR - le seul ! - à Simca-Périgny, quand la maîtrise s'est aperçue qu'il diffusait La Taupe rouge (le bulletin de la section locale) dans les vestiaires. Difficultés - persécution devrait-on dire - qui l'amenèrent à quitter l'entreprise et à changer de métier. Cette mutation professionnelle - il est devenu éducateur spécialisé - a été possible du fait de l'apport culturel procuré par la fréquentation de ce milieu. Grâce à ce travail, la vie des militant(e)s de base est éclairée.

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Référence électronique

Jean-Paul Salles, « Pierrick Cariou, La Ligue communiste révolutionnaire en Charente-Maritime dans les années soixante-dix, Université de La Rochelle, mémoire de maîtrise, juin 2003, 222 p. et 71 p. d'entretiens (sous la direction de Jean-Paul Salles et de Laurent Vidal). », Dissidences [En ligne], 2 | 2011, . URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=158

Auteur

Jean-Paul Salles

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