Les recherches dont j'ai eu l'honneur de rendre compte lors de ma soutenance de thèse portent sur les relations entre les cités de Lusitanie au Haut-Empire, sujet de doctorat d'Histoire ancienne sur lequel j'ai travaillé pendant cinq ans, et dont l'ampleur ne saurait être résumée en quelques succinctes lignes ou pages. C'est la raison pour laquelle je n'en évoquerai que les points essentiels et éclairerai certains aspects plus importants, notamment plus méthodologiques.
I/ La naissance d'un sujet : le parcours d'une réflexion
Mon choix s'explique d'abord par mon parcours. Dès la Licence, lors d'un cours intitulé alors "Romanisation de l'Empire romain" que donnait alors celle qui devint ma Directrice de thèse, Mme S. Lefebvre, mon intérêt s'est porté sur la partie la plus occidentale de cet espace : l'Hispanie (Fig. 1). C'est donc très naturellement que m'a été proposé un sujet sur la Lusitanie, cadre géographique qui, de par sa taille, s'adaptait parfaitement à mes premiers travaux de recherche, et que mon doctorat m'a permis d'approfondir. Fruit de cet intérêt particulier, et motivé par ma double formation de professeur en histoire et en géographie, mon travail s'inscrit dans la lignée des recherches ibériques récentes, qui s'intéressent aux cadres spatiaux dans la constitution des réalités humaines. C'est de cette volonté d'allier la vision de l'historien à l'œil du géographe qu'est né ce sujet sur les relations entre les cités lusitaniennes.
En effet, cette étude présente, la particularité d'adopter un point de vue global à l'échelle provinciale, ce qui est novateur pour la Lusitanie, car très rares sont les chercheurs qui ont choisi ce cadre d'analyse. Au contraire, les études sont souvent fragmentées : soit elles reprennent une tradition régionaliste caractéristique des études hispaniques, s'intéressant à l'une ou l'autre cité, soit elles se calquent sur un découpage administratif contemporain, créant une frontière anachronique pour l'époque considérée, notamment entre l'Espagne et le Portugal. Ce n'est qu'une partie de la Lusitanie qui est en général prise en compte, et laissant même parfois la capitale de la province, Augusta Emerita, de côté (Fig. 2).
Par ailleurs, mon thème de recherche m'est, dès le départ, apparu comme un sujet immensément vaste et fécond : de multiples questions pouvaient ainsi être envisagées, et leurs données croisées et comparées, dans ce cadre général encore jamais envisagé auparavant, à travers la somme des cartes personnelles qui ont été élaborées à diverses échelles. Aborder les relations entre les cités de Lusitanie à la lumière de notions géographiques est probablement l'une des originalités de mon travail. Ce prisme permet de mettre les outils conceptuels des géographes au service de l'analyse historique. À partir de la représentation cartographique de divers phénomènes, il s'agit de tout d'abord de déterminer les liens et les échanges qui existent, d'ailleurs ou non, entre les civitates, ou cités, de la province, en fonction de leur statut administratif, et d'en dégager les flux, c'est-à-dire la nature, le sens et l'importance de ces échanges ; et en parallèle, ce travail a pour objectif de caractériser ainsi les aires d'influence respectives et d'identifier leur impact dans la constitution d'éventuels réseaux de villes et de phénomènes de hiérarchisation.
La cité est le symbole par excellence de l'empreinte de Rome, tout comme la province celle de la réorganisation de l'Empire tout entier. Néanmoins, ce découpage ne correspond à aucune réalité préexistante. En effet, la province de Lusitanie est créée sous Auguste, vraisemblablement entre 16 et 13 av. J.-C., date à laquelle débute mon étude : c'est à ce moment-là qu'est mise en place la structure administrative et civique. L'ancienne province républicaine d'Hispania Ulterior est alors partagée en deux, entre la Bétique et la Lusitanie. De la même manière, c'est tout un maillage de nouvelles unités administratives qui se dessine sur l'ensemble de la province. Cette réorganisation est d'autant plus marquante qu'elle instaure une hiérarchie juridique nouvelle, en fonction de plusieurs statuts. Très succinctement, les colonies, cités fondées par Rome dont l'administration se calque sur celle de l'Urbs ; les municipes, à l'origine pérégrine mais dotées d'institutions romaines ; et enfin les cités stipendiaires, autochtones qui doivent le stipendium à Rome (Fig. 3). Or, dans quelle mesure cette différence de statut joue-t-elle sur les relations qu'elles entretiennent les unes avec les autres, et comment se dessine une nouvelle hiérarchie ? C'est donc ce processus évolutif de la mise en place de ces structures administratives qui organisent cet espace tout au long du Haut-Empire que j'ai voulu étudier de façon plus attentive.
II/ Une méthode de travail adaptée
Je dois avouer qu'un long temps a été consacré à identifier et définir les cités de Lusitanie au cœur de ce sujet. Car là aussi, le morcellement de l'information est préalablement induit par la fragmentation géographique. En parallèle, l'une de mes principales difficultés a été d'accéder à mes sources, et plus particulièrement à une bibliographie spécialisée sur la péninsule Ibérique. Ce n'est véritablement qu'avec mon installation en tant que membre de la Casa de Velázquez à Madrid pendant deux ans, puis un an à Séville, que mon travail a pris un véritable tournant, me permettant tout autant de fréquenter de multiples bibliothèques spécialisées en Espagne comme au Portugal, tout comme de connaître le terrain, de visiter divers musées et sites et d'assister à de nombreux colloques internationaux.
Trois temps principaux ont scandé la phase préparatoire et analytique de cette thèse. Contrairement à ce qui se passe généralement pour l'étude de l'antiquité, j'ai été personnellement confrontée tout d'abord à la masse documentaire induite par la diversité de mes sources, avant tout épigraphiques, c'est-à-dire fondée sur l'analyse des inscriptions de toutes natures, qu'elles soient privées, officielles, funéraires, religieuses ou administratives, mais aussi, même si dans une moindre mesure, à partir de sources littéraires et archéologiques. J'ai donc dans un premier temps adopté une démarche par dossier thématique, m'interrogeant plus particulièrement sur la nature et les types de relations et d'échanges. J'ai donc identifié quatre axes principaux : tout d'abord, les aspects territoriaux, fondés sur la notion de frontière et les questions de concurrence pour l'espace ; les relations politiques et administratives de gestion de la province tout comme des cités ; les questions sociales, qui impliquent tout autant les individus à titre personnel qu'au sein d'un groupe familial ou communautaire, créant ainsi des réseaux tout à fait intéressants à analyser ; et enfin les relations culturelles, qui permettent de s'interroger sur les influences venues de Rome, mais aussi d'une cité à l'autre, réflexion là encore essentielle pour les questions de hiérarchisation des relations et du territoire. Ne pouvant prétendre à l'exhaustivité du sujet, j'ai avant tout cherché à faire des choix et sélectionner les dossiers les plus révélateurs. Ce sont ceux-là qui ont été approfondis. Mais il est bien évident qu'ils ne se suffisent pas à eux-mêmes et n'apportent pas, en soi, de solution : ils se superposent les uns aux autres et s'entrecroisent. C'est la somme de ces réflexions qui constitue le premier volume de ma thèse, la partie analytique.
Si mon but n'était pas d'effectuer un travail d'édition, un corpus documentaire constitue néanmoins le second volume de cette thèse. Il propose une vue globale des ces multiples relations entre les civitates à travers des fiches par cité. Le classement se fait par ordre alphabétique, plus approprié, me semble-t-il, au thème traité, que le classement traditionnel par statut administratif, et plus apte à faciliter la lecture et le maniement du volume. En effet, de manière à pouvoir regrouper toute l'information disponible sur les cités lusitaniennes, j'ai synthétisé tous les éléments recueillis au cours de mon étude et de mes lectures (Fig. 4). J'ai voulu regrouper la somme des données connues pour chacune des communautés, depuis leur mention dans les différents types de sources et bibliographies, jusqu'aux caractéristiques principales : site, situation, statut administratif ; monuments et édifices connus ; notables et grandes familles ; aspects économiques, culturels, religieux, etc... bref, tout ce qui peut définir la vie de la cité. L'objectif est de donner au lecteur une vision rapide et efficace de chacune des cités. Ce fut un temps fort, et long, de mes recherches, qui m'occupa de longs mois. Mais qui, je l'avoue, a été utile lors de la rédaction. Surtout, il me semble que ces fiches complètent et éclairent l'information donnée par le corpus épigraphique documentaire.
En parallèle, j'ai engagé un travail minutieux et méthodique de dépouillement des inscriptions. À partir de là, j'ai élaboré une base de données de 271 entrées en fonction de critères qui me paraissent plus explicites et révélateurs, propres à chaque axe problématique choisie. Néanmoins, l'ambition de cette base est bien plus vaste que ce qui a strictement été utilisé dans mon analyse : elle prévoit, en effet, un élargissement et un approfondissement de l'étude, notamment pour les questions familiales et culturelles qui pouvaient éventuellement se faire ultérieurement. Ainsi, à chaque inscription correspond alors une fiche, présentée ici à titre illustratif (Fig. 5). Dans ce cas précis, il s'agit ici d'une fiche de travail pour l'étude de la mobilité des individus à travers la province. Comme vous pouvez le constater, ce cas est composé de plusieurs entrées principales comme les références bibliographiques, la cité concernée, le texte et la traduction de l'inscription... ; mais aussi déjà analytique, avec, par exemple, la mention de la cité d'origine de l'individu, ici Scallabis, mais également la cité de destination, Olisipo (l'actuelle Lisbonne). Certains cas permettent par ailleurs de déterminer le type de lien établi entre les deux communautés en question, grâce par exemple à la tribu dans laquelle sont inscrits les citoyens romains et qui divergent d'une cité à l'autre, ou bien encore les fonctions exercées dans de multiples cités. Ici, le défunt indique "Olisiponensis", c'est-à-dire "originaire d'Olisipo". L'origine est alors un clair indice de sa mobilité, d'autant plus intéressante dans ce cas qu'une autre pierre, au formulaire relativement similaire, a été retrouvée au même endroit : celle de son frère. Par des déplacements multiples, nous percevons ainsi des indices de réseaux de mobilité. Cette méthode a permis ainsi une classification, une analyse et comparaison plus rapide de chaque texte en fonction de la thématique choisie.
III/ Les filtres de l'analyse : quelques éxemples
Même si son passé a laissé des traces dans sa structuration politique et économique, la province de Lusitanie est une nouvelle entité administrative : tout est donc à construire, et c'est cet aspect qui en rend son étude d'autant plus intéressante. Afin d'étayer mes diverses hypothèses, je me suis efforcée dans mon analyse de considérer chacun des enjeux des relations et des échanges à la fois matériels, immatériels et humains, afin de mettre en avant à la fois des contacts, des flux et des pôles, mais surtout des aires d'influences qui puissent justifier cette hiérarchisation des relations. Cela est d'autant plus important que l'espace est le théâtre de la mise en scène du pouvoir.
J'ai alors organisé mon analyse en une structure tripartite, dont chaque ensemble est étudié à travers le filtre de concepts géographiques. Dans la première partie, "Contacts et territoires", je me suis attachée à étudier la mise en place et l'évolution du cadre civique et provincial, notamment à partir des sources épigraphiques. L'aspect chronologique est ici primordial. C'est également là qu'ont été considérées les questions du poids de l'héritage préromain et de concurrence pour l'espace. J'ai ainsi pu aboutir à dessiner la carte de ces cités lusitaniennes, tout comme à un tableau en fonction de leur statut administratif. La partie centrale de ma synthèse, intitulée "Flux et mobilité provinciale", adopte une vision plus classique de ces relations, fondée sur l'étude des données épigraphiques, qui sont confrontées aux sources archéologiques : la mobilité du personnel administratif, les déplacements de populations, les échanges de produits ou de monnaies. C'est plus particulièrement là qu'ont été utilisées les fiches épigraphiques de la base de données. La représentation cartographique de l'analyse de ces sources qui est tout à fait révélatrice. Pour reprendre l'exemple précédemment cité des déplacements de la population et de leur mobilité, voici la carte des attestations d'émigration depuis Olisipo. Nous pouvons en effet constater que les liens entre cette cité et sa voisine Scallabis sont étroits, à l'image de ce que nous indiquait notre exemple (Fig. 6). À travers cette carte, nous pouvons également nous rendre compte de façon plus claire vers quelles autres cités les habitants se dirigeaient et créaient ainsi du lien. Ce travail a été fait pour l'ensemble des civitates, celles d'accueil comme celles de départ. Les cartes de synthèse sont révélatrices de l'attraction exercée par chacune des cités et du rôle joué par les voies de communication. À mon avis, c'est la somme de ces représentations cartographiques qui nous met sur la voie de ce qu'étaient vraiment ces relations entre cités. Enfin, mon étude s'est terminée par une partie qui m'est chère : "Pôles, réseaux et aires d'influences". À partir des flux économiques, des flux culturels et des réseaux personnels et familiaux, analysés notamment grâce à l'anthroponymie, j'ai tenté de mettre en avant une hiérarchisation des cités et les réseaux sur lesquels se fonde cette dernière. Là, j'ai mis en valeur à quel point les relations personnelles et les liens familiaux sont le pivot de ces rapports entre les cités. J'ai là aussi tenté d'en trouver une traduction visuelle et cartographique efficace. Or, le plus souvent, on peut se rendre compte qu'il s'agit d'une mobilité avant tout locale, qui met en jeu des cités généralement proches, voire voisines. Ce comportement vise à maintenir l'assise de la famille dans la région. Plus précisément, à diverses reprises, certains réseaux, qui incluent des familles multiples, se forment à l'échelle locale. Généralement, il existe un lien bilatéral réel entre deux civitates voisines et géographiquement proches. Par ailleurs, ce réseau s'étend partiellement au-delà, dans la région, et peut s'ouvrir à d'autres cités. Enfin, des liens plus lointains, intimement liés aux intérêts économiques des élites, se laissent entrevoir parfois.
En Lusitanie, le cas le plus connu et le mieux documenté d'alliances familiales créant des relations entre deux civitates est celui des Rutilii, qui établissent des liens familiaux avec les importants Gellii. Ce sont deux familles d’immigrants italiques installés à Olisipo, qui occupent des postes de responsabilité dans l'administration de la cité. En parallèle, elles ont aussi des intérêts commerciaux liés au trafic maritime du port d'Olisipo. À la fin du Ier s., l'une des branches de la famille des Gellii -peut-être des affranchis- s'installe à Balsa, sans doute pour élargir et diversifier ses intérêts commerciaux. Dans cette aventure, ils sont accompagnés par les Rutilii, associés et parents (Fig. 7). Ainsi, les liens établis entre les deux cités, fondées sur le commerce maritime de longue distance, se doublent de liens sociaux et familiaux. Ces Rutilii et Gellii sont donc des personnages importants d'Olisipo et de Balsa où, à chaque fois, ils se sont liés à l'autre famille par des liens d'abord économiques, puis familiaux. Après avoir fait souche, toutes deux ont assuré leur position par des alliances avec des familles puissantes comme celle des Manlii, l'une des plus importantes gentes de la cité portuaire de Balsa, mais dont la citoyenneté est plus récente. C'est donc véritablement la multiplication de ces liens qui crée, d'une famille à l'autre, des réseaux provinciaux, question qu'il me semble tout à fait pertinente d'approfondir.
IV/ Les apports de la thèse. Nouvelles pistes de travail
Les apports des dossiers étudiés sont nombreux, et ils ont ponctué les différents temps et moments de la synthèse. Tout d'abord, le poids du statut juridique, au cœur de ces problématiques, est confirmé. Il détermine la nature et l'intensité des liens que la civitas développe avec les autres cités. Néanmoins, ce critère s'avère insuffisant et ne préjuge en rien de son importance effective : d'autres facteurs sont en jeu, comme son rôle dans le culte impérial, le dynamisme, l'évergétisme et le développement des réseaux sociaux des élites locales, etc... Les données économiques illustrent tout à fait cette remarque. Mon étude a été l'occasion de me rendre compte à quel point elles prévalent et prennent le pas sur les aspects juridiques et politiques. Ce sont elles qui mettent en initient les flux de marchandises et actionnent les rouages de la mobilité humaine et de la polarisation. Par ailleurs, toute la cartographie développée dans mon travail rend évident le caractère fondamental des voies de communications, les routes tout autant que les fleuves : elles sont au cœur des relations. Vecteurs de ces échanges notamment commerciaux, ce sont aussi les axes structurants et organisateurs de l'espace, voies qui relient les pôles les uns aux autres. En ce sens, la Vía de la Plata, axe principal nord/sud encore existant et fondamental, vertèbre à proprement parler toute la province, nerf actif de la Lusitanie. Par ailleurs, l'étude démontre aussi que l'intérêt porté à ces structures en dit beaucoup sur l'importance des cités qu'elles relient. Leur hiérarchisation n'est que le reflet de la hiérarchie des relations, visible d'ailleurs au nombre de voies qui desservent chaque communauté.
C'est dans la conclusion que je suis revenue sur les critères des relations en jeu pour élaborer une sorte de typologie de civitates en fonction des relations qu'elles entretiennent entre elles, typologie qui prolonge bien évidemment le prisme géographique envisagé tout au long de l'analyse. Trois points doivent être mis en avant. De toute évidence, Augusta Emerita, capitale de province, fruit de la volonté impériale, apparaît à la tête des cités : ses relations avec les autres, y compris celles de même statut administratif, elles davantage effacées, sont avant tout verticales et hiérarchisées, tandis que d'autres communautés plus modestes entrent dans sa sphère d'influence. Par ailleurs, cette étude a également été l'occasion de percevoir des relations privilégiées entre certaines cités, qui fonctionnent comme binômes. C'est sans doute l'un des aspects à retenir de cette étude qu'il serait bénéfique d'approfondir dans des travaux futurs. Jouissant à la fois des bénéfices économiques et de la desserte d'importantes voies de communications, les relations entre les cités mettent en avant le rôle prépondérant joué depuis longtemps par les ports de toute la province. Ces "cités maritimes" sont autant de pôles, dont Olisipo (Lisbonne) est la fière représentante. Port de la façade atlantique, c'est une véritable interface qui devient progressivement la seule cité capable de rivaliser avec la capitale de province et qui préfigure de son rôle de capitale du Portugal à venir. Enfin, j'ai également insisté sur le fait qu'un manque de relations n'est pas dénué de sens : ce "vide" apparent doit également être interprété historiquement. Soit parce que la relation n'a pas laissé de traces, soit parce que cette absence a une raison d'être : les deux cas sont intéressant et nous donnent également des clés de lecture. Dans le cas de la Lusitanie, plus que des zones périphériques ou intérieures, les données montrent surtout une ouverture vers le reste de la péninsule. La limite provinciale est donc loin d'être hermétique : il est évident que la Lusitanie est une province ouverte et tournée vers toutes les autres de l'Empire et a pour elle l'avantage d'être tout aussi méditerranéenne qu'atlantique.
Par conséquent, l'aire d'influence de chaque cité, que j'ai tenté d'évaluer, est proportionnelle à sa capacité de polarisation. C'est la notion de rayonnement qui est ici en jeu. En effet, l'importance de ces pôles se mesure dans leurs relations avec les autres : par leur capacité d'attraction, notamment d'activités économiques ou de population, tout autant que par leur influence et leur capacité de rayonnement, notamment culturel et artistique, sur les espaces qui les entourent. De ce fait, elle varie beaucoup d'une cité à l'autre, indépendamment de son statut juridique. Ces aires d'influence, nées des relations entre cités, dessinent donc un tableau particulier du poids des cités dans la hiérarchie lusitanienne.