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La revue électronique des Écoles doctorales LISIT de l’UB et LETS de l’UFC met en ligne un nouveau numéro qui s’offre comme un espace partagé de recherches dans plusieurs disciplines des sciences humaines, sociales et littéraires sur le thème de L’Individuel. On s’attendait à ce qu’un tel thème stimule particulièrement les réflexions des doctorants et jeunes docteurs inscrits dans les domaines de recherche aussi variés que la philosophie ou philosophie de l’histoire, les littératures françaises et étrangères, la psychologie, ce qui fut le cas. Ce thème a suscité également la curiosité de jeunes chercheurs dans des domaines d’études moins attendus, comme la musicologie, ce qui nous autorise à parler de ce point de vue d’une authentique réflexion pluridisciplinaire, innovante et inédite.

Les articles présentent tous dans leurs introductions une courageuse tentative de théorisation de la notion d’individu, mise en perspective avec les notions synonymes ou antagonistes de collectif, de groupe, de singulier, de personne. Puis ils s’offrent comme les laboratoires où s’expérimente cette notion ainsi mise en balance. Deux doctorants en philosophie, Esteban Riffaud et Christopher Lapierre, s’appuyant notamment sur les ouvrages de Sartre et de Bergson, cherchent à articuler l’un et le multiple, s’interrogent pour savoir dans quelles conditions l’individu pourrait faire l’Histoire et trouvent des réponses dans l’étude de la praxis ou dans celle de la dialectique du continu et du discontinu. De telles interrogations permettent de comprendre, comme l’a fait Daniel Arnaud, la spécificité de certains régimes politiques nés de cette Histoire et de conclure que la République française, idéologiquement asservie à ses débuts à la notion de patrie et de collectivité, aurait fini par permettre un très moderne individualisme. Deux articles dans les domaines de la littérature et des arts croisent leurs réflexions pour expérimenter les prestiges et les impasses de l’individualisme dans des littératures et cinématographies étrangères. Youssef Abouali et Marceline Evrard interrogent les romans de Yasmina Khadra et les films de Milos Forman pour relever les difficultés qu’il y a à concilier l’individualisme, l’inquiétude de sujets qui réclament leur droit à la singularité avec la nécessaire intégration dans un groupe, la non moins nécessaire conformité aux rites d’une collectivité. La musicologue Pauline Adenot et la psychologue Elisabeth Ansen-Zeder, toute deux déjà docteurs, organisent une réflexion similaire, s’appuyant sur des cas particuliers, pathologiques ou sociaux, pour mesurer l’ampleur de ces difficultés qui modèlent littéralement notre société. Une réponse est peut-être apportée quand la notion d’individu parvient à être mise en balance par la notion de personne, admettant que la dignité de l’être humain soit supérieure à la quête effrénée de la liberté individuelle.

Aperçue dans ses rapports souvent conflictuels avec le monde, avec l’Histoire ou avec la société, la notion d’individu, ici étudiée par des jeunes chercheurs de domaines d’études différents, semble avoir fait surgir les problèmes qui charpentent notre modernité, assise sur la mythologie de la réussite individuelle.

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Référence électronique

France Marchal-Ninosque, « Éditorial n° 7 », Sciences humaines combinées [En ligne], 7 | 2011, . URL : http://preo.u-bourgogne.fr/shc/index.php?id=207

Auteur

France Marchal-Ninosque

Professeur de Littérature, Centre Jacques Petit - EA 3187 - UFC