La France aux prises avec les nouvelles théories germaniques de l’inconscient : Yves Le Lay, critique méconnu de la réception de Freud et Jung dans l’entre-deux-guerres

Résumés

En dépit du rôle fondamental qu’il joua dans l’introduction et la diffusion de la pensée de Freud et de Jung en France, Yves Le Lay est jusqu’à très récemment demeuré un parfait inconnu. Auteur de la première version française d’un essai de Sigmund Freud, puis fidèle traducteur de C. G. Jung, cet enseignant breton aux multiples facettes aurait retenir dû depuis longtemps l’attention des historiens de la psychanalyse. Il n’en fut pourtant rien ou presque. Cette étude, qui entend contribuer à lui donner toute la place qui lui revient dans cette histoire, vient montrer qu’Yves Le Lay compta aussi dans l’entre-deux-guerres parmi les critiques les plus éclairés de la réception française de leur œuvre.

In spite of the role he played in introducing and disseminating S. Freud’s and C. G. Jung’s thought in France, Yves Le Lay has remained largely unknown. The first translator of an essay by Freud, then the faithful translator of C. G. Jung, this multi-faceted teacher from Brittany has been sorely neglected by the historians of psychoanalysis. The following essay aims at restoring Le Lay’s rightful place in psychoanalysis by showing that he was one of the most perceptive critics of the French reception of both psychoanalysts in the 1920s and 1930s.

Plan

Texte

Introduction

C’est un fait désormais bien connu. La France, que certains qualifient aujourd’hui, avec l’Argentine, de pays le plus freudien au monde, compta longtemps parmi les nations européennes les moins réceptives à la psychanalyse. Sigmund Freud, lui-même, fut d’ailleurs en son temps le premier à le constater. Ne cachant plus sa déception, l’ancien élève Jean-Martin Charcot n’hésitait plus, à la veille de la Première Guerre mondiale, à qualifier la patrie des Lumières de pays le plus « réfractaire » à ses théories (Freud 1914 : 144). À en croire le témoignage du psychologue suisse Édouard Claparède, le neurologue autrichien s’était pourtant figuré « que l’esprit latin, si souple, serait plus apte à saisir les finesses de la vie mentale et les sous-entendus du subconscient, et lui accorderait […] l’attention que ses compatriotes lui refusaient de la façon la moins courtoise » (Claparède 1920 : 849). On assista cependant après-guerre à un formidable retournement de situation. Tandis que la France d’avant 1914 avait majoritairement désapprouvé la psychanalyse, « non pas tant parce qu’elle la récusait que parce qu’elle estimait ne pas en avoir besoin » (Ohayon 2006 : 60), le Paris des « années folles » se passionna, lui, pour les théories freudiennes, l’inconscient et l’analyse des rêves. N’en demeurant pas moins sceptique, Freud écrivait en 1925 :

Des objections d’une incroyable naïveté se font jour, telles celle-ci : la délicatesse française est choquée du pédantisme et de la lourdeur de la nomenclature psychanalytique […]. Une autre assertion a l’air d’être plus sérieuse ; elle n’a pas semblé indigne de lui-même à un professeur de psychologie de la Sorbonne : le Génie latin ne supporte absolument pas le mode de penser de la psychanalyse. […]. En entendant ceci, on doit naturellement croire que le Génie teutonique a serré sur son cœur la psychanalyse, dès sa naissance, comme son enfant chérie. (Freud 1925a : 77)

De ses années d’études jusqu’aux premiers temps de son alliance avec Vienne, Carl Gustav Jung, qui pratiqua lui aussi à ses débuts l’hypnose, se montra particulièrement sensible aux recherches de l’école psychopathologique française (Shamdasani 1996). Ses premières publications portent en effet la marque de l’influence notable, si ce n’est décisive, des travaux d’Alfred Binet, de Théodore Flournoy, de Pierre Janet dont il suivit les leçons au Collège de France. Mais dès lors qu’il se positionna comme l’un des plus fervents défenseurs des théories freudiennes, Jung fut au regret de constater l’imperméabilité des savants français qu’il avait naguère admirés. S’affirmant, après sa rupture avec Freud, comme le chef de file d’un courant rival de la psychanalyse, son approche théorique ne rencontra dans l’Hexagone qu’un écho relativement faible. Réticences qu’il interprétait ainsi :

La suspicion rationaliste constitue, bien sûr, une grande dévalorisation du rôle des archétypes. On est encore dans l’esprit du « rien que » qui enlève sa valeur à l’archétype. [...] C’est quelque chose de très spécial dont il faut tenir compte quand on analyse des Français. Il est très difficile de parvenir à ce qu’ils prennent cela suffisamment au sérieux. Leur rationalisme les bloque en tout point. (Jung 1925 : 282-283)

Dès les années vingt, l’attitude circonspecte ou franchement hostile avec laquelle une grande partie de la communauté scientifique française accueillit ces méthodes d’investigation de l’inconscient ne manqua pas d’interroger les premiers sympathisants ou protagonistes du mouvement psychanalytique francophone, alors naissant. Les Suisses, Raymond de Saussure (1920) et Édouard Claparède (1920), ne souffrant pas des mêmes préjugés nationaux que leurs homologues français, comptèrent parmi les premiers à s’interroger publiquement sur les raisons de ce rejet. Suivis en cela par René Laforgue, Édouard Pichon (1923), et Angelo Hesnard (1924), qui contribuèrent ensuite à la fondation de la Société Psychanalytique de Paris (S.P.P.). Effet à la fois d’une diffusion plus tardive de ses écrits en langue française et de l’absence de structuration de ses élèves, la réception de la psychologie analytique de C. G. Jung ne suscita guère, à la même époque, d’enquête comparable. Et il faut en effet attendre le milieu des années trente et un certain Yves Le Lay pour qu’une réflexion analogue ne s’engage sur cette question.

En dépit du rôle majeur qu’il joua dans l’introduction de ces nouvelles théories, Yves Le Lay (1888-1965) demeure absent des mémoires. Auteur, à la fois, de la première version française d’un essai de Sigmund Freud, fidèle collaborateur de C. G. Jung, mais aussi traducteur d’Otto Rank, sans doute aurait-il mérité de figurer en bonne place dans les études consacrées à l’histoire du freudisme en France. Mais force est de constater qu’il n’en fut, jusqu’à présent, rien, ou presque (Serina 2013). On ne trouve en effet dans les nombreux ouvrages d’Élisabeth Roudinesco pas une seule ligne qui lui soit consacrée. Mireille Cifali qui s’est intéressée à l’histoire de la première traduction de Freud en français, n’a manifestement pas réussi à identifier son traducteur, signalant simplement qu’il se distingua ensuite en traduisant les écrits de Jung (Cifali 1991). Plus récemment, Jacques Sédat qui a republié la lettre qu’il adressa au Disque Vert en 1924, fit, lui aussi, l’économie d’une présentation de son auteur. Vraisemblablement victime de son attrait pour la psychologie jungienne, Yves Le Lay a été négligé par les historiens du freudisme, quand il n’a pas été purement et simplement omis. Mal leur en a pris. Loin d’avoir été le partisan aveugle d’une quelconque chapelle théorique, se cache derrière ce nom bien connu des lecteurs francophones de C. G. Jung une personnalité complexe, que l’on ne saurait apprécier à l’aune d’une quelconque orthodoxie.

En plus de compter parmi les traducteurs les plus prolixes et éclectiques en matière de psychanalyse, Yves Le Lay fut également critique scientifique, enseignant, militant politique, défenseur ardent de la laïcité, et responsable syndicaliste de premier plan. Auteur de nombreuses recensions critiques pour le compte de la revue Scientia, il a également signé deux articles consacrés à la réception française de ces deux figures majeures des sciences du psychisme du 20e siècle que sont Sigmund Freud et Carl Gustav Jung. Le premier, entièrement, dédié à l’accueil réservé au freudisme, est une contribution au numéro spécial que la revue franco-belge Le Disque Vert consacra en 1924 à Freud et à la psychanalyse (Le Lay 1924). Le second intitulé « La psychologie de l’inconscient et l’esprit français », rédigé une dizaine d’années plus tard à l’occasion d’un volume édité pour le soixantième anniversaire de Jung (Le Lay 1935), peut être considéré comme la toute première analyse historique de la réception française de la psychologie analytique. Parce qu’ils rendent compte des principales critiques opposées en France à Freud et à Jung durant le premier tiers du siècle, et qu’ils condensent également bon nombre de représentations françaises attachées à ces théories d’exploration de l’inconscient, ces deux textes méritent, pour qui veut comprendre les modalités de la réception de leur œuvre dans les pays de langue française, une attention toute particulière. Le second, parce que plus ample et plus tardif, constituant de fait l’aboutissement de ses réflexions en la matière, sera ainsi au cœur de la présente étude qui entend contribuer à donner à cette figure avant-gardiste de la première moitié du 20e siècle toute la place qui lui revient dans cette histoire.

1. Éléments de biographie

Né en mars 1888 à Avranches, Yves Le Lay grandit en Bretagne où il connaît une enfance et un début d’adolescence heureux. Bouleversé par la disparition brutale de son père, survenue peu après son quinzième anniversaire, le jeune homme voua dès lors le plus clair de son temps à l’étude. S’orientant vers la philosophie, il intégra en 1905 la classe d’un certain Georges Palante (1862-1925), admirateur de Friedrich Nietzsche et de son individualisme aristocratique, qui officiait au lycée de Saint-Brieuc (Le Lay 1925).

Son baccalauréat en poche, il eut l’année suivante l’opportunité de rejoindre l’Allemagne pour y réaliser ses études supérieures. Il compta alors parmi ces nombreux étudiants ou savants qui, en partant étudier outre-Rhin, participèrent à ce puissant mouvement d’attirance des Français pour la pensée allemande, que Claude Digeon, dans une étude restée classique, appela la « crise française de la pensée allemande » (1959). Inscrit à la faculté de philosophie de l’université de Leipzig, il suivit notamment l’enseignement du célèbre psychologue Wilhelm Wundt (1832-1920). Mais lorsque la Première Guerre mondiale éclata, l’étudiant breton fut arrêté, puis envoyé dans un camp de détention aux côtés de nombreux autres expatriés français. Ce n’est qu’après dix-huit mois de captivité au camp de Holzminden, qu’il fut autorisé, en vertu d’accords internationaux passés entre les belligérants et la Suisse, à rejoindre la confédération helvétique en tant qu’« interné civil ».

Bénéficiant de la possibilité offerte aux plus qualifiés de reprendre leurs études, Le Lay fut admis à la fois à la faculté des lettres de l’Université de Genève, au laboratoire de psychologie d’Édouard Claparède (1873-1940), ainsi que dans les rangs de l’Institut privé des sciences de l’éducation Jean-Jacques Rousseau. Tandis qu’à la même époque, la France demeurait en grande partie hermétique à la psychanalyse, la cité de Calvin faisait alors, au sein de l’Europe francophone, figure d’exception à ce « mouvement général d’ostracisme ou d’indifférence » (Claparède 1920 : 850). C’est donc dans un contexte favorable à l’étude de cette nouvelle école psychologique que ce jeune ressortissant français découvrit Freud et Jung. Suivant les consignes de son directeur de laboratoire, il entreprit la traduction des cinq leçons que le neurologue viennois avait présentées à la Clarke University (Freud 1909). Éditée chez Sonor à Genève puis chez Payot à Paris en 1921, celle-ci fut reconnue comme la toute première publication d’un essai de Sigmund Freud dans la langue de Voltaire.

De retour dans les Côtes-du-Nord après son rapatriement intervenu en juillet 1918, Yves Le Lay ne tarda pas à embrasser une carrière dans l’Education nationale. Parallèlement, il s’engagea dans la vie politique et syndicale locale, s’affirmant tout au long de la décennie suivante comme un ardent défenseur de la laïcité et des idéaux socialistes dans un département encore solidement acquis au catholicisme (Prigent 2008). Soupçonné de propagande communiste auprès de ses élèves, il fut en 1933 au cœur d’une polémique alimentée par la presse conservatrice bretonne. Suivant son épouse nommée directrice d’une école primaire supérieure dans le Loir-et-Cher, il s’éloigna ensuite de sa région natale pour s’installer à Blois, où tout en demeurant un militant politique actif, il s’investit dans le syndicalisme enseignant (Le Floch 1989).

Son intérêt pour la psychologie et la psychanalyse ne s’est pour autant jamais tari. D’abord simple maillon au sein de la petite équipe mise en place à Zurich, chargée de la traduction française des écrits de C. G. Jung, Yves Le Lay sut, malgré la distance géographique, s’imposer comme une pièce maîtresse du dispositif. Il introduisit, préfaça et traduisit de façon très fidèle six ouvrages du psychiatre zurichois publiés entre 1931 et 1939 chez Stock et Aubier-Montaigne à Paris. Tâche qu’il poursuivit après-guerre, sous la direction de Roland Cahen, et ce jusqu’à sa mort, survenue en février 1965 alors qu’il se consacrait à la traduction de plusieurs essais du « maître de Zurich ».

2. Une interprétation à l’aune de la psychologie des peuples

Invité à deux reprises, comme nous l’avons déjà mentionné, à exposer ses vues sur l’accueil réservé aux théories freudienne et jungienne de l’inconscient, Yves Le Lay choisit, pour se faire, d’adopter un point de vue hérité de ses années d’études auprès de Wilhelm Wundt : celui de la psychologie des peuples. Lorsque Le Lay compta parmi ses étudiants, le psychologue allemand orientait en effet de plus en plus ses travaux

vers la « Völkerpsychologie », domaine qu’il considéra à la fin de sa vie

comme « la tâche ultime de la psychologie » en tant qu’étude des relations entre culture et psychisme (Wundt 1921 cité par Espagne 1998). Cherchant à caractériser, dans Die Nationen und ihre

Philosophie

,

les nations européennes en fonction de leurs styles philosophiques, Wundt associait notamment l’âme anglaise à l’empirisme et l’utilitarisme, et l’esprit des Français au rationalisme cartésien (Wundt 1915).

Cette prise en compte des spécificités de l’esprit national pour rendre compte de l’accueil réservé à la psychanalyse en France n’avait en soi rien d’innovant. L’étude de la psychologie des peuples était en Europe alors une chose courante, connaissant même un succès notoire, tant dans les facultés de lettres que dans celles de médecine (Vermès 2008). Les docteurs Hesnard et Laforgue avaient déjà avancé l’idée selon laquelle cette hostilité française à la psychanalyse tenait à « des malentendus apparus en vertu de raisons psychologiques profondes tirées de la constitution même de notre esprit national » (1925 : 18). L’originalité de son point de vue tient plutôt à ce que, contrairement à la grande majorité des autres commentateurs de son temps, celui-ci se montre partout exempt de chauvinisme. En effet, tandis que les champions de la « psychanalyse française » affirmaient vouloir « accueillir avec loyauté et soumettre à la critique de l’esprit latin de mesure, les vues profondes, incertaines, mais géniales du Professeur Sigm. Freud » (Hesnard, Laforgue 1925 : 26), Le Lay se gardait, lui, de toute apologie de ce prétendu « génie national ». Il n’a d’ailleurs pas non plus la hardiesse ou l’extravagance d’un Edmond Jaloux (1878-1949) qui supposait que « chez les races latines, – les Français en particulier, – les manifestations inconscientes sont infiniment plus faibles et dans un certain sens, plus rares que dans les groupes germaniques, anglo-saxons, slaves et scandinaves. » Et que, partant, « si les médecins français ont refusé si longtemps d’adhérer aux idées de Freud, c’est que, à la lettre, ils n’ont pas pu toujours les vérifier » (Jaloux 1924 : 30). Non. L’entreprise de notre critique s’est voulue bien plus modeste. D’ailleurs, avant même de développer plus avant sa thèse, il admettait lui-même en 1935 qu’une telle tentative comportait à l’évidence quelques limites : « Parler de l’esprit d’une nation est une entreprise hasardeuse, écrit-il ».

L’esprit d’une nation ne se définit pas aisément. On risque à vouloir s’y attacher de schématiser à l’extrême, de simplifier ce qui est complexe. En outre l’esprit d’un pays n’est pas une grandeur constante ; il varie avec les époques ; il est, comme la psychologie de l’individu, sujet à des fluctuations (Le Lay 1935 : 204).

Mobilisant néanmoins différents auteurs reconnus en la matière – Gustave Lanson (1857-1934), Alfred Fouillée (1838-1912) et sa Psychologie du peuple français (1898) ainsi que son « maître » Georges Palante (1862-1925) –, Yves Le Lay chercha à retenir « quelques traits généraux constatés par les meilleurs observateurs dans la masse du peuple aussi bien que chez les plus grands représentants de la science, de la littérature, de l’art ». De sa synthèse ressortent trois points : les Français se caractériseraient par « un besoin de clarté dans les idées », « une prudence excessive », et un « misonéisme », corrigé cependant par « la rapidité d’adaptation sous la poussée d’événements impérieux, l’improvisation fulgurante » (Le Lay 1935 : 206). Mais c’est en fait principalement à l’aune de leur rapport à la sexualité que Le Lay tenta d’élucider les modalités de la réception française du freudisme.

3. Les deux attitudes françaises face au « pansexualisme » freudien

S’il ne se démarque guère en affirmant que l’ « ignorance » du public français à l’égard de la psychanalyse tient à la place prépondérante qu’elle accorde à la sexualité, Yves Le Lay fait cependant preuve de davantage de subtilité que nombre de ses prédécesseurs. « La première attitude anti-freudienne est en effet une réaction essentiellement morale », explique-t-il, « un geste spontané de réprobation où apparaissent certaines des caractéristiques de notre esprit. » (1924 : 68). S’opposant à l’opinion d’un Philippe Chaslin (1857-1923), qui estimait que la psychanalyse n’a de sens que dans les pays anglo-saxons où la sexualité est sévèrement censurée et refoulée par le code moral (Chaslin 1923 : 655), Le Lay affirme que, contrairement à l’idée selon laquelle les Français seraient doués « d’une particulière alacrité sexuelle », admettant « volontiers une liberté de gestes que ne connaissent pas les autres pays », une majorité d’entre eux aurait en réalité tendance à condamner la sexualité. En effet, la petite bourgeoisie dominante, dans la sévérité qui la caractérise, « en refoule les manifestations, même les plus bénignes », et « met un soin minutieux à éviter ce qui pourrait la faire naître. » (Le Lay 1935 : 207)

Ce rejet tient d’après lui au fait que la France searaient avant tout un pays catholique. En effet, même ceux « qui semblent s’être le plus libérés du dogme ont conservé la marque indélébile de l’éducation qu’ils reçurent. Or, depuis qu’il existe, le catholicisme est l’ennemi de la sexualité » (Le Lay 1924 : 67). Le défenseur de la laïcité républicaine se joint alors au critique scientifique pour écrire :

Il la combat partout où elle apparaît, parce qu’il voit en elle l’obstacle le plus puissant à l’idéal de pureté qu’il s’est tracé. Pour le catholique, une sorte de honte est attachée à tout ce qui touche la reproduction. Elle est « le péché » par excellence, même quand elle effleure amplement la pensée. Rien d’étonnant donc qu’il se soit dressé contre la psychanalyse qui met la sexualité au premier rang, qui veut tout expliquer par elle, qui, par une analyse d’une implacable pénétration, sait retrouver sous les apparences les plus éloignées d’elle, semble-t-il, les traces indéniables de l’instinct réprouvé. (Le Lay 1924 : 67)

Cette attitude trouverait selon lui son incarnation chez le psychologue universitaire Charles Blondel (1876-1939), auteur d’un exposé critique du freudisme (1925), où « s’étalent tous les préjugés du moralisme bourgeois en même temps qu’on y sent l’esprit petitement catholique de l’auteur » (Le Lay 1935 : 204).

Si Pichon et Laforgue dénonçaient déjà en 1923 l’« attitude ironique » à laquelle les défenseurs de la psychanalyse eurent à affronter – depuis Pierre Janet notamment et sa diatribe anti-freudienne prononcée au Congrès international de médecine à Londres (Janet 1913) –, Le Lay préfère, lui, invoquer l’« esprit gaulois », cette « attitude de moquerie, de gauloiserie égrillarde toujours prête à se gausser des choses sexuelles » (1924 : 67), jadis théorisée par l’historien et essayiste Hippolyte Taine (1828-1893). Création de l’esprit cocardier de la fin du siècle précédent, l’affirmation de cet « esprit gaulois », dont le philologue Joseph Bédier (1864-1938) donna l’une des définitions les plus expressives, avait accompagné l’affirmation progressive d’un prétendu tempérament national :

Sans arrière-plan, sans profondeur ; il manque de métaphysique ; il ne s’embarrasse guère de poésie ni de couleur ; il n’est ni l’esprit de finesse, ni l’atticisme. Il est la malice, le bon sens joyeux, l’ironie un peu grosse, précise pourtant, et juste. Il ne cherche pas les éléments du comique dans la fantastique exagération des choses, dans le grotesque, mais dans la vision railleuse, légèrement outrée, du réel. Il ne va pas sans vulgarité ; il est terre à terre et sans portée […] Satyrique ? Non, mais frondeur, égrillard et non voluptueux, friand et non gourmand. Il est à la limite inférieure de nos qualités nationales, à la limite supérieure de nos défauts. Mais il manque à cette définition le trait essentiel, sans lequel on peut dire que l’esprit gaulois ne serait pas : le goût de la gaillardise, voire de la paillardise. (Bédier 1893 : 317)

Or, d’après Le Lay, c’est justement avec ce type d’attitude que l’on accueillit l’arrivée de la psychanalyse en France :

Tout ce qui touche quelque peu à l’instinct sexuel devient l’occasion de gaudriole ; rien ne peut échapper à cette mentalité qui nous fait à l’étranger une si misérable réputation, rien, même pas les études les plus sérieuses. Dès que la sexualité apparaît, il semble que rien ne puisse plus être très sérieux (1924 : 67).

Il s’y réfère à nouveau en 1935 : l’esprit gaulois, qu’il oppose à la morale bourgeoise, cet « esprit de raillerie, de plaisanterie continuelle, de moquerie qui ne sait rien respecter parce qu’il ne prend rien au sérieux » explique pourquoi la sexualité est toujours « l’occasion de plaisanterie de mauvais goût, de propos égrillards qui vont de la fine allusion à l’étalage cynique de la bestialité » (Le Lay 1935 : 208).

Il n’en demeure pas moins qu’à l’instar de ses contemporains, Le Lay appréhenda, lui aussi, la théorie freudienne au prisme de cette fameuse doctrine du « pansexualisme » – selon laquelle tout acte s’explique par une motivation sexuelle inconsciente –, que Freud a pourtant toujours récusée, répétant à l’envi que sa théorie était avant tout fondée sur le conflit. On lit en effet sous la plume du critique et traducteur breton :

Malgré toute la sympathie que l’on éprouve pour la psychanalyse, on ne peut toujours accepter la découverte voulue à tout prix d’une tendance sexuelle là où elle n’existe que dans la mentalité de l’analyste […]. Mais ce sont là des abus auxquels il est facile de remédier et qui ne justifient en rien la réprobation qui frappe le freudisme. Il s’est trouvé, fort heureusement, des hommes pour comprendre la valeur des travaux du psychologue viennois. […] S’ils savent faire dans l’œuvre de Freud la part de la théorie et celle de la méthode, ils verront quel instrument merveilleux ils ont entre les mains. (Le Lay 1924 : 68)

Cette position, réaffirmée en 1935, peut surprendre à l’aune de la lettre que Freud adressa à Édouard Claparède après que ce dernier eut affirmé que « l’instinct sexuel est le mobile fondamental de toutes les manifestations de l’activité psychique » ; lettre que Le Lay eut vraisemblablement à traduire pour figurer dans une postface à la réédition de sa traduction des « cinq leçons » sur la psychanalyse. Freud y formule en effet l’avertissement suivant :

C’est Jung et non pas moi qui conçoit la libido comme le mobile de toutes les manifestations psychiques et qui conteste ensuite la nature sexuelle de la libido. Votre affirmation ne s’appuie par conséquent ni sur mes dires ni sur ceux de Jung, mais sur un mélange des deux. À moi, vous empruntez la nature sexuelle de la libido, à Jung sa signification universelle, et c’est ainsi que naît le pansexualisme qui n’existe que dans l’imagination re-créatrice des critiques mais qui ne se trouve ni chez moi, ni chez Jung. (Freud 1920 : 69-70)

Cette conception consistant à distinguer la « doctrine » de la « méthode » était, elle également, courante. Angelo Hesnard affirmait en effet, dès 1924, que « sous sa forme outrancière et naïve », Freud confondait « faits et Théorie, Doctrine et Méthode » (Hesnard 1924 : 18). Cette distinction connut aussi une certaine fortune puisqu’elle constitua, une dizaine d’années plus tard, le point de départ de la première thèse de philosophie consacrée en France à la psychanalyse, dans laquelle Roland Dalbiez (1893-1976) reprocha à Freud de mettre sur le même plan les faits, la théorie scientifique et les constructions métaphysiques (Dalbiez 1936).

4. Mode parisienne et emballement éditorial

Cette phase de rejet qui caractérisa le début du siècle prit néanmoins fin au début des années vingt suivant la publication des premières traductions d’ouvrages de Freud, et notamment celle qu’Yves Le Lay publia d’abord dans une revue suisse en 1920, avant de paraître sous forme d’opuscule en 1921. Soudainement, la psychanalyse – on parlait plus volontiers de « freudisme » – suscita un « engouement violent », à propos duquel notre critique écrit en 1924 :

le snobisme parisien, toujours à l’affût d’une nouveauté qui pût satisfaire ses goûts, s’empara de la psychanalyse pour en faire un divertissement de salon. Rien n’était plus dangereux pour elle. Cet engouement momentané de gens qui ignoraient tout de la science en question, déformait la psychanalyse, et vulgarisant d’elle ce qui en elle pouvait chatouiller une sensualité maladive, créait contre elle un mouvement de réaction fort préjudiciable à son avenir. (Le Lay, 1924 : 67)

Il dit encore en 1935 à propos de cette « mode » qui envahit les salons parisiens au cours de l’hiver 1921-1922 :

On ne parla plus que le langage freudien. Les romanciers se hâtèrent d’utiliser les données psychanalytiques et de renouveler ainsi le roman psychologique à son déclin. Partout on parla de refoulement, de complexe d’Œdipe, de sublimation […]. Le snobisme, les conversations de salon, le plaisir douteux que des gens qui n’étaient ni psychologues ni médecins prenaient à l’étalage des tares et des débordements sexuels, tout cela était plutôt néfaste à la science psychique nouvelle. (Le Lay 1935 : 202-203)

Cette vogue eut alors pour conséquence immédiate d’accélérer la mise sur le marché de nouvelles traductions. Mais l’« emballement fut tel », explique-t-il, « que l’on ne s’inquiéta ni de l’exactitude, ni de la qualité des traductions » (Le Lay 1935 : 202). Critique visant sans doute Samuel Jankélévitch (1869-1951) auquel il reprocha en particulier de ne pas avoir pris en compte ses propres choix terminologiques (Le Lay 1925 : 295). Le Lay n’hésita pas à rendre son confrère d’origine russe responsable d’une certaine répulsion éprouvée pour la psychanalyse :

Les traducteurs des plus importants ouvrages de Freud, qui n’étaient pas des français, ont maladroitement conservé la rude et brutale sécheresse de l’original. Si Freud avait été revêtu par ses traducteurs français d’une forme plus élégante et plus discrète, il est fort probable qu’il eût rencontré un accueil plus favorable. Ce trait vaut d’être relevé parce qu’il caractérise très bien le français et que les savants furent eux-mêmes très sensibles à la façon dont leur fut présentée la psychologie nouvelle. (Le Lay 1935 : 209)

Là encore, l’idée selon laquelle la mauvaise qualité des traductions contribua à freiner la diffusion de la psychanalyse était déjà plus ou moins éculée. En effet, Laforgue et Pichon avaient, dès 1923, considéré que l’une des principales erreurs des traducteurs avait justement consisté à « ne pas apporter assez de soin au choix des mots français », ajoutant :

La culture française comporte, dans l’ordre intellectuel, une précision qui va souvent jusqu’à la subtilité. Or, dans bien des cas, les psychanalystes suisses ou slaves qui ont transposé en langue français les écrits de l’école de Vienne et de celle de Zurich se sont contentés d’à-peu-près, ou bien ont brutalement introduit en français le terme employé en allemand, sans prendre garde que ce terme pouvait, dans notre langue, prêter à la critique, voire au ridicule. (Laforgue, Pichon 1923 : 534)

Cependant, cet engouement qui avait saisi les milieux les plus huppés de la capitale se révéla en fait n’être qu’un « feu de paille », qu’une mode passagère. Mode à laquelle, soulignons-le, Yves Le Lay contribua bien malgré lui. N’avait-il pas en effet plutôt imaginé subvertir la morale bourgeoise et catholique de son temps en traduisant le fondateur d’une théorie considérée par beaucoup comme l’une des plus pernicieuses, pour ne pas dire franchement licencieuses, de ce début de siècle ? Bien qu’il n’adhérât paradoxalement jamais au courant freudo-marxiste, sans doute faut-il considérer ses efforts en faveur de la psychanalyse comme un engagement progressiste en parfaite cohérence avec ses idéaux politiques. L’œuvre de Freud, avait-il affirmé dans une recension de 1923, « inaugure bien une ère de franchise psychologique qui est en même temps une ère de libération » (Le Lay 1923).

5. Une psychanalyse déformée

Une troisième phase de cette réception s’ouvrit en 1926 avec la création de la Société Psychanalytique de Paris (S.P.P.) et le commencement de « recherches originales ». Toutefois, ajoute Le Lay, « même ceux qui font profession de soutenir Freud ne résistent pas au besoin de le transformer, de l’adapter à notre façon de pensée. De sorte que les théories du maître de Vienne n’apparaissent que modifiées, pour ne pas dire déformées » (Le Lay 1935 : 203). Notre critique se singularise davantage de ses prédécesseurs. Car si la psychanalyse fut en effet acceptée, voire saluée, à compter des années vingt, par toute une frange de la jeune garde psychiatrique française, ce fut au prix d’une « adaptation », d’une acclimatation à ce prétendu esprit de clarté française.

Le point de vue d’un Henri Claude (1869-1945), chef de la clinique des maladies mentales à Sainte-Anne, qui considérait que certains procédés psychanalytiques, faute d’avoir été adaptés à « l’exploration de la mentalité française », ne pouvaient être acceptés dans le cadre d’une « clinique latine » (Claude, 1924 : VII), continua en effet d’avoir cours au sein même de la S.P.P. cet « enfant quelque peu “prématuré”» dixit son premier président (Laforgue 1929). Tout en se réclamant de Freud, celle-ci était alors traversée par deux grands courants : d’une part, les tenants d’une psychanalyse orthodoxe, soucieuse de conduire ses travaux sous le patronage intellectuel et théorique de Freud ; d’autre part, les défenseurs d’une psychanalyse française. Cette minorité, « très active » selon René Laforgue – opposée à l’Association internationale et à l’analyse profane ‒ avait, dès la fondation du groupe de L’Évolution psychiatrique, cherché à s’affranchir du « terrain trop délibérément dogmatique et doctrinaire sur lequel avait glissé la Psychanalyse allemande », et à ne retenir « les faits si intéressants que Freud a mis en lumière » qu’en vue de « les soumettre à un contrôle strictement scientifique ». (Hesnard, Laforgue 1925 : 9). Freud ne manqua pas d’ailleurs pas d’ironiser à ce propos, écrivant à Laforgue en 1929 : « J’ai bel et bien l’impression que vous avez fait au génie français cette grande concession de simplifier la complication réelle des faits au profit de la clarté. L’esprit latin a ici les défauts de ses vertus » (Freud 1929 : 263).

Sans doute faut-il mettre en rapport la prise de distance de Le Lay avec les efforts d’adaptation de la première génération de psychanalystes français avec sa propre pratique de traducteur, empreinte, elle, d’un souci véritable pour la littéralité. Vraisemblablement sensibilisé à cette tradition traductologique allemande consistant à faire preuve de fidélité ou de loyauté (« die Treue ») envers le sens authentique du texte original au cours de ses années passées à Leipzig, Yves Le Lay peut aisément être classé, pour reprendre le terme consacré par Jean-René Ladmiral, parmi les « sourciers », c’est-à-dire attaché au respect du texte source et donc à rendre de la façon la plus littérale qui soit la pensée de l’auteur. Plutôt qu’une lecture orthodoxe au sens strict du terme, le traducteur aurait ainsi sans doute souhaité que ses compatriotes s’attachent à une interprétation plus respectueuse, plus loyale de cette œuvre qu’il s’était évertué à rendre fidèlement.

6. Une confusion persistante

Abordant plus spécifiquement l’accueil réservé à Jung, Le Lay constatait en 1935 que ses travaux n’avaient pas encore retenu l’attention qu’elle mériterait : « Jung n’est guère connu en France » affirme-t-il et son « nom n’est presque jamais prononcé ». (Le Lay 1935 : 212). Une telle affirmation mérite en fait d’être nuancée. Avant la Première Guerre mondiale, l’analyste zurichois avait été considéré comme l’un des plus sérieux représentants de la « cause » freudienne. La démarche scientifique et expérimentale de ses travaux contribua à la fois à forger sa crédibilité personnelle, mais aussi celle de l’ensemble du mouvement psychanalytique. Sa psychologie analytique ne rencontra ensuite cependant – il est vrai – que relativement peu d’écho. Le Lay observe néanmoins que cette « période d’indifférence semble toucher à sa fin », et que ces écrits « commencent à paraître en traduction française et les éditeurs montrent pour sa psychologie un intérêt assez vif ». Trois éditeurs – Payot, Stock et Aubier – Montaigne – ont depuis 1928 entamé l’édition française de ses ouvrages. Néanmoins, « la critique se tait encore » et laisse, d’après lui, encore planer sur sa pensée « un silence presque complet ». Il ajoute que les « rares comptes rendus qui le signalent font de lui un “philosophe” à la pensée abstruse, pour ne pas dire incompréhensible. » Ce qui n’est une nouvelle fois pas tout à fait juste, la publication de chacune de ses traductions ayant été suivie par un nombre non négligeable de recensions, parfois très positives.

Mais le critique remarque surtout que la plupart de ses compatriotes ne font « encore aucune différence entre les diverses tendances du mouvement analytique », et s’étonne en particulier « que la différence pourtant si nette entre Freud et Jung n’ait pas encore été enregistrée » (Le Lay 1935 : 214). On ne saurait ici le contredire. Si l’on excepte, en effet, Théodore Flournoy qui, dès le printemps 1913, pressentit l’inéluctabilité de la scission entre Vienne et Zurich (Flournoy 1913b : 202-203), les témoignages d’une prise en compte, claire et nette, de la rupture entre Vienne et Zurich furent, dans l’Europe francophone de l’entre-deux-guerres, encore relativement rares. Tendance à laquelle même le mouvement freudien français n’échappa guère. Rendant compte en 1936, dans la Revue française de psychanalyse, de la thèse de Roland Dalbiez, Édouard Pichon (1890-1940), membre fondateur de la S.P.P., et pilier de cette psychanalyse francisée, témoigna de façon éloquente de cet amalgame :

le freudisme strict exige qu’on réserve le nom de symbolisation à la signifiance d’une image par une image. Appeler symbolisme la dramatisation, qui va d’un signifié abstrait à un signe concret, c’est tomber dans l’hérésie de Zurich, celle de Silberer, de Jung et de Maeder. À ce compte, il y aurait, au moins à Paris, bien peu de psychanalystes qui ne fussent pas entachés de junguisme.

Avant d’ajouter : « Quand j’apprends que M. Jung a reçu l’anathème de M. Freud pour avoir confondu libido et potentiel affectif […], je sens combien, en ce point encore, beaucoup de psychanalystes français [sont] suspects de junguisme ! » (Pichon 1936 : 564). Freud et sa garde rapprochée étaient encore bien loin, dans cette France de l’entre-deux-guerres, d’avoir imposé leur orthodoxie. Particulièrement au sein de cette frange adepte d’une psychanalyse « adaptée » à l’esprit latin. Et ce alors même que plusieurs textes où le « père » de la psychanalyse affirme et justifie son opposition aux théories jungiennes – par des moyens parfois discutables d’ailleurs – étaient à la portée de tout lecteur français. Parmi eux, l’incontournable Introduction à la psychanalyse, publiée en 1921, dans laquelle Freud affirme sans ambiguïté son refus d’une « libido asexuelle » (Freud 1916 : 442), ou encore la fameuse « Contribution à l’histoire du mouvement psychanalytique » (1914) ainsi que Ma vie et la psychanalyse (1925), respectivement accessibles au lectorat français depuis 1927 et 1928. Ce n’est en réalité qu’après la Seconde Guerre mondiale, en particulier sous l’effet du « retour à Freud » opéré en 1953 par Jacques Lacan – lui-même élève de Pichon – que l’éclectisme psychanalytique cessa véritablement d’être de bon ton.

7. La psychologie de l’inconscient est-elle compatible avec l’« esprit français » ?

Ne reste plus qu’à démêler la question, non moins fondamentale pour Le Lay et ses contemporains, d’une supposée incompatibilité entre ces théories d’exploration de l’inconscient venues d’outre-Rhin et ce prétendu besoin de clarté de l’esprit français. Besoin qui, de toute évidence, ne saurait être considéré autrement que comme un mythe (Swiggers 1987).

D’un côté, le Français serait, explique Le Lay, « avant tout, un rationaliste. Épris de clarté, d’harmonie, d’ordre, d’équilibre, il aime ce qui satisfait sa raison, l’enchaînement logique, net, précis, qui ne laisse aucune place à l’imprévu. » Davantage, il serait « le descendant de Descartes », la logique rationnelle étant la seule apte à le satisfaire. « Ce qui choque sa raison lui est inadmissible », ajoute-t-il, « parce qu’il ne conçoit pas que les faits puissent être régis par d’autres lois que celles qui satisfont cette raison. » De l’autre côté, la psychanalyse, elle, « se soucie peu de logique rationnelle », étudiant d’autres liens entre les faits que ceux de la raison. « Nos tendances, par exemple, obéissent à des lois originales ; leur logique, c’est la logique affective, qui agit dans le domaine obscur de l’inconscient, avec ses lois propres que nous ignorons et que Freud eut le mérite de découvrir et d’exploiter. » (Le Lay 1924 : 68)

Cet antagonisme mental expliquerait encore mieux l’accueil réservé à Jung. Plus encore que son aîné viennois, le psychiatre zurichois souffrirait en effet de cette prétendue obscurité qui caractériserait si bien l’esprit germanique. Il y aurait en effet une « certaine incompatibilité entre la pensée de Jung et nos tendances intellectuelles », tenant en particulier à une « différence de race ». Le Lay oppose ainsi Jung le « germain », ses méthodes de travail, son vocabulaire original, et son goût pour l’irrationnel, à cette France prétendument éprise de clarté (Le Lay 1935 : 214). Jung, dont l’intérêt pour les questions de psychologie nationale ne s’est jamais démenti (Pietikaïnen 1998), ne l’aurait d’ailleurs sans doute pas contredit. « Dire quelque chose de paradoxal » serait en effet « une faute grossière » pour les Français, expliqua-t-il lors d’une conférence à Londres, avant de souligner l’importance particulière que ces derniers accordent à « la clarté de l’esprit latin » (Jung 1935 : 70). L’analyste zurichois savait en outre, et de longue date, qu’on le tenait pour être un auteur difficile à traduire. Son inspirateur et ami, Théodore Flournoy, avait, dès 1913, souhaité que ses Wandlungen und Symbole der Libido ne fassent non pas l’objet d’une traduction mais d’une adaptation. L’ouvrage n’étant, d’après lui, « pas partout exempt d’une certaine nébulosité germanique », avait-il écrit à l’occasion d’une recension ; « les idées de M. Jung jaillissent touffues, exubérantes, savoureuses, mais elles auraient parfois besoin d’un peu de tassement et de clarification pour pouvoir être facilement rendues en français » (Flournoy 1913a : 197). Critique à laquelle Jung fut, semble-t-il, durablement sensible, puisqu’il expliqua vingt ans plus tard à l’un de ses correspondants que le psychologue genevois lui avait autrefois reproché sa « mentalité fort teutonique » (Jung 1933).

Sans jamais démentir de telles divergences, Le Lay, lui, pensait néanmoins qu’il était possible de les surmonter. Certains aspects de la psychologie jungienne seraient ainsi « de nature à s’adapter à la mentalité française » et susceptibles de toucher aussi bien les « libres penseurs » que les « catholiques intelligents » : en premier lieu l’absence de « pansexualisme », preuve d’après lui d’une « modération » et d’un « respect à la fois de l’homme et des faits » auxquels il voulut rendre hommage ; ainsi que de possibles affinités avec quelques grandes figures de la vie intellectuelle française, en particulier l’« élan vital » du philosophe Henri Bergson, et la « conscience collective » du sociologue Émile Durkheim. De façon peut-être plus curieuse, il eut enfin l’idée d’établir une comparaison entre l’analyse psychologique telle que Jung la pratique et la confession religieuse. Sans doute une façon de ne pas trop rebuter les croyants, tout du moins ces « catholiques intelligents » auxquels il avait précédemment fait référence. Parallèle n’ayant, comme il reconnut lui-même, qu’une portée limitée : l’analyse jungienne, indépendante de toute Église, conduit en effet à la « différenciation individuelle » tandis que la confession cherche à ramener « l’âme dans la collectivité des croyants dont sa faute l’avait exclue » (Le Lay 1935 : 220).

D’ailleurs, que l’on ne se méprenne pas à son propos. Cet engagement à l’égard d’un auteur qui, il le soulignera dans ses introductions ou préfaces, affirme une « fonction religieuse » de la psyché, n’a rien de paradoxal de la part d’un homme connu par ailleurs pour son zèle en faveur de la laïcité. L’un de ses derniers textes fut l’occasion d’une mise au point sur cette question. Mettant au défi le lecteur de trouver trace « d’une intention de subordonner sa psychologie à une confession, quelle qu’elle soit », Yves Le Lay affirmait que « la psychologie de Jung conduit tout aussi bien à l’athéisme, si l’on entend athéisme au sens de négation des affirmations faites sur l’existence d’un dieu transcendant qui regarderait son œuvre, le monde, comme un artisan considère l’objet sorti de ses mains » (Le Lay 1955 : 60). Son activisme en faveur de la loi de 1905 ne s’opposait donc nullement à un profond intérêt pour le fait religieux, du moins à son étude d’un point philosophique et psychologique.

Conclusion

Qu’on relise ce qu’écrivit en 1928, dans une note de bas de page, Marie Bonaparte (1882-1962) à propos de la réception française du freudisme, et l’on y retrouvera en substance tout ce que disait déjà Yves Le Lay dès 1924. Celle-ci mérite d’être citée dans sa totalité, ou presque :

Le Français possède [...], dans son caractère national, quelques traits qui lui rendent cette compréhension plus difficile. D’abord, son amour de la clarté logique, héritier de l’idéal classique de notre XVIIe siècle, et instauré chez nous par la grande « poussée de refoulement » qui jugula notre magnifique et large Renaissance.

Ensuite, son culte du goût, datant du même temps. Les processus archaïques, particuliers à l’inconscient, et que met au jour la psychanalyse, heurtant de front, du point de vue du « bon sens », la raison logique, et du point de vue du « bon goût », la délicatesse, révoltent aisément l’esprit français, qui oublie alors que les phénomènes de la nature ne sont pas toujours de « bon goût », ce qui « ne les empêche pas d’exister », comme disait notre Charcot, et que ce fut au nom du « bon sens » que l’humanité, d’une part, crut si longtemps à la rotation du soleil autour de la terre, d’autre part que tant d’hommes cultivés refusèrent, du temps de Pasteur et même depuis, de « croire aux microbes », qu’ils ne voyaient pas. Les déplaisants mais réels complexes enfouis au fond de notre psychisme étant encore plus malaisés à observer que des microbes, qu’on peut étaler sur une lame de microscope, quoi de surprenant à ce que le « simple bon sens » ne suffise pas d’emblée à les voir ?

La façon, fréquente chez le Français, d’envisager la sexualité, lui est un autre obstacle à la compréhension de l’inconscient. Chez nous, le sexuel se confond aisément avec le grivois ; ce sont là matières dont il ne convient de parler qu’avec légèreté, par sous-entendus suffisants pour s’entendre entre gens d’esprit ; de cette attitude devant le sexuel est donc issue notre littérature des théâtres boulevardiers, qui divertit tant les étrangers, mais ne nous vaut pas toujours chez eux un très haut renom. Cette dévalorisation du sexuel est d’ailleurs l’un des moyens dont se sert le « refoulement social » pour nier la gravité réelle et souvent terrible du problème sexuel, au sens le plus large, dans chaque vie humaine. (Bonaparte, in Freud 1925a : 77 N.d.T. 1)

Bien que nombre d’arguments avancés méritent d’être pris en compte, on ne saurait bien sûr considérer de telles analyses comme exhaustives. Sans doute Le Lay manqua-t-il du recul nécessaire à cet effet. On peut en particulier s’étonner du peu de place accordé à la question de la germanophobie. Les attaques antisémites dont Freud fut la cible, dès les années vingt, ne sont de surcroît jamais évoquées. Il aurait en revanche été sans doute prématuré d’évoquer les accusations d’antisémitisme qui peu de temps auparavant commençaient à viser Jung. Le contexte de publication ne s’y prêtait en outre nullement.

On peut surtout regretter qu’Yves Le Lay ne se soit pas davantage attaché à comprendre pourquoi Freud, après il est vrai une période d’indifférence puis de franche hostilité, reçut finalement un accueil bien plus favorable que son ancien ami et partisan. Sans prétendre vouloir clore, ici, un tel débat, nous souhaiterions simplement avancer, à la suite de Paul Roazen, l’hypothèse selon laquelle c’est faute d’avoir développé toute une panoplie de principes thérapeutiques aussi rigides que ceux proposés par Freud, que Jung compta moins de disciples. « En conséquence, écrivait l’historien, les cercles jungiens portent une certaine marque d’indiscipline, et la rigidité de Freud fut payante pour le succès de son mouvement. » (Roazen 1986 : 211). Jung, contrairement à son aîné viennois, ne s’est en effet jamais attaché à systématiser sa théorie, ce qui a pu rebuter plus d’un lecteur. De même que son approche et ses analyses de domaines aussi sensibles que les religions, sur le « numineux », ou sur les sciences dites occultes. En outre sans doute faut-il également prendre en compte le fait que le psychiatre zurichois n’a jamais bénéficié, en France, d’un soutien équivalent à celui que la princesse Bonaparte put apporter, dès les années 1920, à son rival viennois.

Signalons pour conclure qu’en cherchant à expliquer les difficultés de réception de C. G. Jung à l’aune de cette supposée clarté française, Yves Le Lay influença sans nul doute les choix opérés par son principal successeur en matière de traduction. En effet, Roland Cahen (1914-1998), citant à plusieurs reprises « La psychologie de l’inconscient et l’esprit français » dans sa préface à L’Homme à la découverte de son âme (1944), s’employa lui aussi à élucider les raisons de « l’ignorance dont [l’œuvre de Jung] est entourée en France » (Cahen 1944 : VI). Mais surtout, soucieux d’acclimater la pensée de son « protecteur » à cette mentalité française prétendument éprise de clarté, Cahen privilégiera le mode de l’adaptation plutôt que la traduction stricto sensu, et ce, vraisemblablement, dans l’espoir de s’adresser au plus grand nombre de lecteurs, et ainsi supplanter un freudisme de plus en plus hégémonique.

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Référence électronique

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Auteur

Florent Serina

Doctorant, IUHMSP, Université de Lausanne / Faculté des Lettres, CH-1015 Lausanne – florent.serina [at] gmail.com

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