Les manuels diplomatiques, vecteurs de spécialisation de l’anglais de la diplomatie (1603-1917)

Résumés

Cet article porte sur une étude socio-historique diachronique du domaine de la diplomatie anglophone et propose une analyse du genre du « manuel diplomatique » entre 1603 et 1917. En nous appuyant sur un corpus de neuf ouvrages, nous aborderons la manière dont l’activité diplomatique s’est spécialisée au cours de l’histoire, en lien avec un contexte international changeant où la notion d’État prend de plus en plus d’importance dans la pensée politique occidentale. Nous verrons également comment le domaine diplomatique s’est structuré autour d’un lexique et d’un ensemble de genres spécialisés, qui se sont généralisés et complexifiés autour de conventions thématiques, phraséologiques et structurelles particulières.

This paper presents a socio-historical diachronic study of the domain of anglophone diplomacy and proposes an analysis of the “diplomatic manual” genre between 1603 and 1917. Relying on a corpus of nine publications, we discuss how diplomatic activity became more specialised over time, reflecting an evolving international context in which the notion of the state was taking on an ever greater importance in Western political thought. We also highlight how the diplomatic domain became structured around specific lexis and specialised genres that spread and gained in complexity, based on specific thematic, phraseological, and structural norms.

Plan

Texte

Introduction

On constate l’émergence de glossaires liés à des pratiques spécialisées dans des domaines tels que la médecine ou les mathématiques dès le XVIIe siècle, et dans les domaines scientifiques et techniques à partir du XVIIIe siècle (Cowie 2009 Vol. II : 49, dans Charpy 2011 : § 37). Le domaine de la diplomatie ne connaît pas de processus similaire de « dictionnarisation » à cette époque, qui consiste en la publication de glossaires ou de dictionnaires qui révèlent l’existence d’une langue de spécialité en assurant un « pontage » entre le spécialisé et le non spécialisé (Van der Yeught 2012 : 17-18).

Les premiers dictionnaires qui répertorient un lexique diplomatique spécifique apparaissent dans la seconde moitié du XIXe siècle en langue française (de Cussy 1846 ; Calvo 1885), et en langue anglaise à partir du XXe siècle (Gamboa 1966).

La spécialisation comparativement plus tardive du lexique de la diplomatie nous oblige alors à consulter d’autres sources que les dictionnaires tels que les genres textuels anciens, afin de repérer une éventuelle évolution diachronique des spécificités langagières propres au domaine. Dans cette étude nous retenons la définition du genre mise en avant par John Swales (1990 : 58) comme un ensemble de productions discursives partageant une même finalité qui en détermine la structure, le contenu et le style. L’étude des genres spécialisés et du développement de pratiques et de connaissances propres au domaine de la diplomatie peut être liée à un positionnement épistémologique multifactoriel dans la définition de la diachronie. En effet, nous étendons la notion de diachronie au-delà de son acception linguistique première en opposition à la synchronie (Saussure 1995 : 140) pour inclure une dimension civilisationnelle et socio-historique. Comme l’ont montré Séverine Wozniak (2015 : §2) et David Banks (2012 : §58), l’analyse des genres spécialisés, mise en rapport avec des évolutions contextuelles et culturelles propres à un domaine donné, constitue une approche socio-historique de la diachronie pertinente en langues de spécialité.

À partir du XVe et jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, une littérature abondante portant sur la figure du diplomate et l’art de négocier a fleuri en Europe (Andretta et al. 2015). La « trattatistica » diplomatique, ou l’ensemble des traités écrits à propos de la diplomatie (Waquet 2015 : 29), ne comporte pas moins de 152 titres1 entre 1436 et 1700 (Keens-Soper 2004 : 4). Elle tend à s’épuiser au milieu du XVIIIe siècle, mais se renouvelle sous forme de guides divers aux XIXe et XXe siècles. Parmi cette classe hétérogène de textes qui porte sur le diplomate, il existe un ensemble plus restreint que nous appelons ‘manuels diplomatiques’, qui se donne pour objectif de décrire la spécificité du champ d’action diplomatique dans un but didactique (Fedele 2014 : 10) afin de constituer un vade-mecum pratique destiné aux négociateurs.

Le manuel diplomatique à usage professionnel décrit les pratiques diplomatiques en vigueur à un moment donné de l’histoire du domaine, et fournit un répertoire de connaissances professionnelles communes (protocolaires et juridiques, ou liées à la négociation et à la représentation), qui sont au service d’une même finalité : permettre à des entités politiques d'atteindre les objectifs de leur politique extérieure par des moyens pacifiques (Berridge 2010 : 1 ; Van der Yeught 2016 : § 13). Il constitue ainsi un « vecteur de spécialisation » du domaine en ce qu’il assure la transmission (et donc la préservation) d’un savoir spécifique au sein de la communauté spécialisée. Le manuel s’intéresse également au lexique, en insérant ponctuellement des définitions d’items lexicaux diplomatiques et en fournissant des conseils stylistiques pour la rédaction de documents propres au domaine.

L’empan chronologique que nous avons retenu pour notre étude (1603-1917) nous situe dans le cadre d’une diachronie longue et se justifie par la stabilité du genre du manuel, qui ne change pas au cours de la période étudiée dans les objectifs qu’il se fixe : légitimer le statut du diplomate, instruire de futurs négociateurs et rendre compte d’un processus de cristallisation de normes comportementales et de pratiques diplomatiques (Andretta et al. 2015 : 8). Nous avons choisi un corpus de neuf manuels diplomatiques afin de proposer une étude qualitative de l’évolution diachronique du genre. Nos recherches portant sur le domaine de la diplomatie anglophone, nous n’avons retenu que des ouvrages traduits ou écrits en anglais du XVIIe (Hotman 1603 ; Thynne 1652 ; Howell 1664), XVIIIe (de Wicquefort 1716 [1686] ; de Callières 1716 ; Bonnot de Mably 1758), XIXe (Elliot 1834) et XXe siècles (Foster 1906 ; Satow 1917). Pour effectuer notre étude, nous avons d’abord parcouru des ouvrages sur l’histoire de la diplomatie et du droit international, avant de procéder à une lecture cursive détaillée de notre corpus. Nous avons identifié certaines caractéristiques qui nous paraissaient typiques du genre (thématiques communes, traits stylistiques, finalité). Nous avons également fait un relevé manuel de tous les passages pouvant illustrer des évolutions diachroniques dans les pratiques et les connaissances diplomatiques, et avons noté chaque référence dans le corpus à un type de texte ou à un terme diplomatique.

Nous proposons une étude en trois temps : tout d’abord nous livrons une description générale du genre du manuel diplomatique ; ensuite, nous abordons la structuration diachronique du domaine de la diplomatie reflétée dans les manuels à travers l’évolution de ses pratiques et de ses connaissances ; enfin, nous consacrons la dernière partie de notre étude à décrire la spécialisation du domaine par la cristallisation de genres et d’un lexique diplomatique spécifique développée dans les textes de notre corpus.

1. Caractérisation générale du manuel diplomatique : un genre spécialisé ?

La littérature qui prend comme thématique la figure du diplomate entre le XVe et XXe siècle relève d’un discours européen sur la pratique diplomatique. Rédigée en plusieurs langues nationales différentes, elle a connu une large diffusion à travers toute l’Europe, avec des rééditions des titres les plus appréciés et des traductions d’une langue à une autre (Andretta et al. 2015 : 7). La « trattatistica » diplomatique (Waquet 2015 : 29) s’articule autour d’un certain nombre de problématiques communes (qualités requises par le « parfait ambassadeur » (Kugeler 2006), fonctionnement d’une mission diplomatique, statut juridique du diplomate), et forme peu à peu une littérature canonique sur la pratique diplomatique. Au-delà d’un contenu homogène, les manuels diplomatiques de notre corpus présentent une harmonie de registre et de tonalité qui se manifeste à travers l’emploi des mêmes métaphores d’un ouvrage à un autre (Kugeler 2006 : 41). L’ambassadeur est, par exemple, fréquemment décrit comme les « yeux, oreilles et mains » de son prince (Howell 1664 : 182).

En dépit de cette régularité métaphorique et des préoccupations thématiques récurrentes discutées dans la littérature diplomatique, les textes sur la figure du diplomate constituent un ensemble très hétérogène dont le statut de genre spécialisé peut être interrogé. D’après Dante Fedele (2014 : 10-11), les manuels sur le diplomate correspondent à un genre littéraire dont l’exemple le plus ancien serait l’Ambaxiatorum Brevilogus de Bernard de Rosier (1435-1436)2. L’appellation « traités sur l’ambassadeur » (Waquet 2015 : 9) renverrait dans une deuxième acception beaucoup plus large à un ensemble de discours plus diffus et hétérogène dont le seul principe unificateur serait la référence à la figure et à l’activité de l’ambassadeur3. Tous les ouvrages de notre corpus appartiennent à un ensemble de textes que nous appelons « manuels diplomatiques » plutôt que « traités », car l’un des objectifs des auteurs est de proposer un vade-mecum pratique destiné soit à l’homme de cour amené à exercer des fonctions diplomatiques soit, à partir de la fin du XIXe siècle (Black 2010), au diplomate professionnel. Fedele (2014 : 10) rappelle que dans la plupart des cas, les auteurs des manuels ont eux-mêmes rempli des fonctions diplomatiques. C’est le cas pour sept des neuf auteurs de notre corpus. Les manuels diplomatiques répondent ainsi à une finalité professionnelle, didactique (Kugeler 2006 : 35), et non purement informative, qui permet de resserrer les thématiques abordées autour d’un seul et même objectif : former de futurs diplomates qui pourront s’appuyer sur un savoir accumulé mis au service de l’art de la diplomatie.

Tout en affichant une volonté de servir de guides aux futurs diplomates ou ambassadeurs à travers une description fidèle de la réalité de la fonction diplomatique, les auteurs de notre corpus (et des manuels diplomatiques de manière générale) appartiennent aussi à la Respublica literaria européenne (Fumaroli 2001 : 12). Ces « diplomates érudits » (Kugeler 2006 : 42) ont certes pu travailler au sein d’une ambassade lors de missions diplomatiques ponctuelles, mais pour la plupart d’entre eux la diplomatie n’occupe qu’une partie de leur vie qu’ils consacrent à des activités administratives, politiques et littéraires. Peut-on arguer dès lors que le manuel constitue un genre écrit par et pour de vrais spécialistes ? La notion de diplomatie professionnelle paraît anachronique pour la majeure partie de la période que nous étudions (Black 2010), puisqu’il n’est pas possible de parler d’individus faisant carrière dans la diplomatie, au sein d’une structure institutionnelle organisée et rémunératrice (le ministère des affaires étrangères) avant le XIXe siècle. En revanche, la diplomatie existe comme pratique spécialisée avec ses connaissances et ses codes langagiers propres avant d’exister comme profession.

Dans la mesure où ce genre ne participe pas directement à la finalité principale du domaine, nous ne pouvons pas dire qu’il constitue un genre spécialisé (Van der Yeught 2016). Néanmoins, force est de constater que le manuel appartient à un groupe de genres diplomatiques spécifiques rédigés par des diplomates professionnels, ou en voie de professionnalisation, qui portent sur la formation du diplomate et œuvrent à compiler des expériences professionnelles sous la forme plus accessible d’une liste de règles et de principes généraux. Peuvent être placés dans cette catégorie générique les manuels, les mémoires de diplomates et les guides de procédure et de protocole diplomatique. L’intérêt de ces textes va au-delà de leur fonction didactique immédiate ; ils représentent également un témoignage socio-historique de l’évolution du domaine au cours des quatre derniers siècles. Ils constituent ainsi une ressource pour étudier la structuration diachronique du domaine en servant d’illustration au développement d’une activité de plus en plus spécialisée.

2. Structuration diachronique du domaine de la diplomatie à travers l’évolution de ses pratiques et connaissances

2.1. Développement d’un savoir diplomatique relatif aux relations entre États

Nous allons à présent retracer l’évolution de la pratique diplomatique occidentale entre 1603 et 1917. Il ne s’agit pas de présenter une étude diachronique exhaustive de la généralisation progressive des fonctions diplomatiques à travers l’Europe, mais plutôt de repérer les principales évolutions qui favorisent l’émergence de nouveaux savoirs utiles pour décrire et conceptualiser le rôle du diplomate. Nous verrons que la transformation des pratiques et des connaissances diplomatiques s’inscrit dans un perfectionnement plus général de la pensée occidentale quant à la manière de conduire les relations entre entités politiques, et plus tard entre États.

À l’époque où le juriste et diplomate français Jean Hotman rédige son ouvrage (1603), une étape importante dans la généralisation de la pratique diplomatique avait déjà été franchie. En Italie, à partir des années 1450, et dans toute l’Europe à partir du début du XVIe siècle, une diplomatie « résidente » s’est développée grâce à la création d’ambassades permanentes (ou de « résidences »), où des diplomates s’installent pendant plusieurs années et exercent leurs fonctions auprès d’une cour étrangère (Mattingly 1964 : 10). Le caractère permanent des ambassades favorise l’apparition d’un groupe d’individus qui travaillent exclusivement au service des relations extérieures de leur souverain. Au cours du XVIIe siècle, période qui met l’accent sur la spécificité des fonctions de l’ambassadeur, ces développements permettent d’élaborer une définition relativement consensuelle de ces fonctions.

Cette définition, telle qu’elle apparaît dans l’ouvrage de Howell (1664) ou de Hotman (1603) par exemple, insiste sur le caractère public de la fonction d’ambassadeur, celui qui « sous la seureté de la foy publique [est employé] pour negocier avec les Princes ou Républiques estrangeres les affaires de leurs Maistres & y representer avec dignité leurs personnes & leur grandeur pendant la legation ».4 L’ambassadeur est ainsi défini, non pas comme un agent qui œuvre pour la paix de la Respublica christiana du Moyen Âge (Mattingly 1964 : 18), mais désormais comme « un véritable officier au service de son État » (Fedele 2014 : 824). Dans notre corpus, cette réflexion sur le rôle du diplomate comme agent au service de son souverain est développée le plus précisément par Hotman, qui énumère les connaissances spécifiques nécessaires à l’exercice de ce rôle. L’ambassadeur doit se constituer des connaissances diverses et variées sur le pays d’accueil qu’il transmettra ensuite à son souverain afin de le guider dans ses choix :

il fera bien d’apprendre quelle est la forme de gouvernement du païs où il est ; les limites, grandeur & estenduë ; les meurs du peuple ; […] le revenu ordinaire & extraordinaire ; le thresor & moyens contens ; les alliances offensives & defensives avec les autres Princes & Estats voisins ou esloignez, quel traffic, commerce, abondance & fertilité : & si c’est un Prince, cognoistre son humeur & inclination5.

Le processus de collecte de renseignements utiles sur le pays où est installée l’ambassade telle qu’évoquée chez Hotman, participe au développement d’un nouveau savoir en partie généré par les diplomates : l’information. Fedele explique que « c’est sur ce savoir que prennent appui les nouveaux critères d’analyse politique (nature et intérêts des princes, ainsi que puissance des États) » (2014 : 827). Le savoir diplomatique est influencé par un contexte international de plus en plus marqué par l’affirmation d’entités politiques proto-étatiques concurrentes, en même temps qu’il contribue à façonner cette conjoncture par la mise au point de connaissances nouvelles liées à l’analyse politique et diplomatique telles que celles décrites par Hotman.

Au début du XVIIIe siècle, pour faire face à de nouvelles exigences en matière de gestion et de transmission de l’information – cette dernière doit être analysée et synthétisée de manière concise et intelligente pour que celui qui la reçoit puisse prendre les décisions politiques adéquates – Abraham de Wicquefort (1716 : 52) conseille au diplomate de s’atteler à l’étude de l’histoire en priorité par la consultation de mémoires, d’instructions diplomatiques6, de négociations et de traités. La lecture de documents diplomatiques sert avant tout à repérer les bonnes pratiques et formulations linguistiques qui seront utiles au diplomate dans son activité. Cette étude de documents prônée par de Wicquefort pourrait aussi s’expliquer par la publication à cette époque de bon nombre de biographies, histoires et recueils de correspondance diplomatique qui permettent de bâtir une réflexion collective sur la fonction de diplomate ancrée dans la pratique.

Les théoriciens de la pratique diplomatique qui succèdent à de Wicquefort, en commençant par François de Callières en 1716, œuvreront à la transformation de cet ensemble de savoirs expérientiels en une « science de la négociation » (Kugeler 2006 : 54). De Callières s’intéresse, non pas à la figure de l’ambassadeur comme ses prédécesseurs, mais à celle du négociateur. Cette perception nouvelle représente un changement important dans la façon de définir le diplomate. La création d’ambassades permanentes au début du XVIe siècle (Black 2010 : 29) ne répondait pas au besoin de disposer de négociateurs sur place, puisque les négociations faisaient le plus souvent l’objet d’« ambassades extraordinaires », ou de missions diplomatiques ponctuelles.

La raison principale justifiant la création d’une diplomatie résidente résulte du besoin de recueillir des informations précises sur les monarchies étrangères en s’appuyant sur des rapports détaillés rédigés par des agents diplomatiques sur place (ibid.). La négociation revêt une importance nouvelle avec l’avènement du Cardinal de Richelieu en France ; ministre d’État sous Louis XIII, il reconstitue le département des affaires étrangères en 1626 (Fedele 2014 : 484) et préconise dans son Testament politique de « négocier sans cesse » (Richelieu 1689 : 271) avec les autres souverains en ayant recours à la diplomatie pour veiller au maintien des intérêts de la France.

Dans le prolongement des réflexions antérieures sur les structures étatiques naissantes présentes dans les manuels, de Callières défend l’idée qu’il existerait une forme organisationnelle systémique des entités politiques européennes, prises dans des relations d’influence réciproques :

Il ne suffit pas qu’il l’instruise [son prince] exactement de tout ce qui vient à sa connoissance des affaires publiques, il faut qu’il en informe encore les Negociateurs que le même Prince employe dans les autres pays […]. Cette connoissance lui est très nécessaire à cause des liaisons & des dépendances qu’il y a entre les intérêts des differens Etats dont l’Europe est composée, & que le succès de ses negociations dépend souvent de ce qui arrive dans les autres pays, & des resolutions qu’on y prend7.

Toutefois, si certaines connaissances nécessaires à l’exercice de la fonction diplomatique (connaissances protocolaires, géographiques, politiques, linguistiques, culturelles, etc.) peuvent être énumérées sous forme d’un savoir constitué qui tend vers la systématisation, une « science de la négociation » qui proposerait des principes généraux valables pour toute négociation en toute circonstance émerge plus difficilement (Kugeler 2006 : 54-55). La seule règle qui semble faire consensus est celle de la nécessité de préserver à tout prix l’intérêt de la puissance en question, qui témoigne de la conscience nouvelle de l’existence d’États indépendants, comme le confirme Gabriel Bonnot de Mably (1757 : 19) : « toutes les négociations d’une puissance doivent être entreprises & conduites relativement à son intérêt fondamental ».8 Néanmoins, l’effort de théorisation de la pratique diplomatique entamé par le manuel de de Callières repose déjà sur deux principes centraux repris par les théories en relations internationales du XXe siècle (Jackson et Sørensen 2010) : la reconnaissance d’une pluralité d’États concurrents et la problématisation de la notion d’intérêt (Fedele 2014 : 652-3).

À partir du milieu du XVIIIe siècle, le genre des manuels diplomatiques connaît un certain déclin. Les discours critiques des philosophes des Lumières contre les rois et leurs représentants diplomatiques se multiplient. Paradoxalement, une nouvelle conception de la diplomatie est née du contexte révolutionnaire (Belissa 2015 : 542-3). Le terme de « diplomatie », qui entre pour la première fois dans le Dictionnaire de l’Académie Française en 1798 (ibid.), commence à être de plus en plus employé de préférence à « négociation », et signifie désormais « la science des rapports, des intérêts de puissance à puissance » (ibid.). Les recueils de documents diplomatiques publiés dans les décennies qui suivent la Révolution française (de Martens 1822 ; Elliot 1834) reproduisent des traités internationaux ainsi que des documents de travail professionnels classés de manière analytique, et « forment désormais la base, sinon d’une science, du moins d’une discipline constituée et d’un savoir organisé selon l’idée centrale de la positivité du droit public » (Belissa 2015 : 557-8). En l’absence de doctrine ou de lois valables en toute circonstance, la formalisation de la pratique diplomatique s’appuie sur l’histoire des faits et sur les archives afin de dégager des principes toujours orientés vers une mise en pratique efficace, comme le souligne Jonathan Elliot :

Il est alors probable que le succès des Négociateurs, à notre époque, puisse s’expliquer non seulement par des opinions plus avisées en matière de politique nationale, et par une part d’apprentissage et de sagesse, mais aussi par le fait de pouvoir S’EXERCER plus librement et de s’entraîner de manière continue à l’Écriture Diplomatique9.

Le XIXe siècle voit la publication de plusieurs manuels diplomatiques français dont le plus célèbre est sans doute celui du Baron Charles de Martens (1822). Il faudra attendre le début du XXe siècle et la publication du manuel de John Foster (1906) aux États-Unis et celui d’Ernest Satow10 (1917) en Grande-Bretagne pour que soient publiés des ouvrages anglophones de portée comparable. L’ouvrage de Satow (1917) notamment représente la somme de plusieurs siècles de développement de normes en matière de représentation diplomatique qui peuvent être considérées comme des principes universellement acceptés. Ainsi, la classification des agents diplomatiques et les processus d’accréditation et de rappel des diplomates tels que Satow les décrit valent depuis le Congrès de Vienne de 1815 jusqu’à ce jour. L’apport des ouvrages de Foster (1906) et de Satow (1917) ne réside pas dans la description de nouvelles fonctions ou pratiques diplomatiques, qui demeurent plus ou moins les mêmes que celles présentées par de Wicquefort en 1716 (voire par Hotman en 1603). Leur intérêt vient du dépassement du discours prescriptif sur le « parfait ambassadeur » qui prédomine depuis le XVIIe siècle. Ce qui préoccupe ces deux auteurs est de décrire le fonctionnement réel d’un métier qui a acquis le statut de profession, et qui est désormais réglementé par un appareil étatique institutionnalisé et par les préceptes du droit public international.

2.2. Structuration du domaine de la diplomatie par le droit : du droit des gens au droit international

Les manuels diplomatiques présentent une forte composante juridique héritée de la littérature diplomatique latine du XIIIe siècle (Fedele 2014 : 14). Elle transparaît dans l’importance thématique donnée à la discussion des droits, devoirs et prérogatives des diplomates. Il s’agit maintenant d’étudier plus en détail le processus diachronique de structuration du domaine de la diplomatie par le développement parallèle du droit international, en nous intéressant à la manière dont les manuels diplomatiques distinguent les coutumes, les normes et les usages diplomatiques de principes proprement juridiques. L’hypothèse qui sous-tend notre réflexion ici est que l’une des spécificités de la diplomatie en tant que domaine spécialisé réside dans sa proximité au domaine connexe du droit, ainsi que dans son enracinement au sein d’un ensemble d’usages qui échappent à la codification juridique tout en étant essentiels pour atteindre la finalité plus générale du domaine.

Dans un ouvrage de référence sur la diplomatie à l’époque de la Renaissance, Garrett Mattingly parle d’un « droit international de la diplomatie » hérité du Moyen Âge, qu’il définit comme : « les règles qui déterminent la reconnaissance et le statut des mandants diplomatiques, le comportement et les immunités des agents diplomatiques, et la négociation, la validité et l’observation d’accords diplomatiques ».11 (1964 : 18) Cet ensemble de règles échappait cependant à toute forme systématique de codification à l’époque que Mattingly décrit, et reposait sur des coutumes anciennes généralement acceptées partout en Europe. Les principes majeurs du droit des gens (qui deviendra ensuite le droit des nations avant de recevoir l’appellation de droit international), intéressent à la fois les juristes et les érudits-diplomates qui rédigent des manuels et sont les suivants : ius legationis (le droit d’envoyer des diplomates ou le droit d’ambassade), la reconnaissance du statut diplomatique des agents par la puissance extérieure, et le statut juridique de ces derniers à travers notamment la question des immunités diplomatiques.

Au XVIIe siècle, un principe général veut que seuls les souverains bénéficient du ius legationis et peuvent envoyer des diplomates pour les représenter auprès de cours extérieures. Le principe du ius legationis fait parfois l’objet de discussions dans les manuels autour de cas polémiques où le droit d’ambassade n’était pas manifeste. Ceci tend à montrer que ce principe n’était pas appliqué de la même manière partout : il s’agissait d’une norme communément admise plutôt que d’une loi universelle figée dans un accord international.

Il en va de même pour le principe de la reconnaissance des diplomates. Par le biais de nombreuses anecdotes racontées par les auteurs des manuels, notamment par ceux du XVIIe et XVIIIe siècles tels que Howell (1664) et de Wicquefort (1716), nous comprenons qu’une règle générale existait selon laquelle aucune reconnaissance d’un agent envoyé à une cour extérieure ne pouvait être accordée sans documentation valable montrée par l’agent. Le diplomate devait présenter ses lettres de créance lors d’une cérémonie formelle en plusieurs étapes bien définies (Satow 1917 : 204) afin d’attester que son souverain s’engageait « à être de bonne foi [et] à considérer comme étant ratifié, acceptable et valable à perpétuité tout ce qui sera traité ou fait par [ses] ambassadeurs » (Howell 1664 : 203).

La question des immunités diplomatiques est ancienne et débattue bien avant la publication de L’Ambassadeur de Hotman en 1603. Dès la seconde moitié du XVIe siècle la réflexion au sujet des immunités de l’ambassadeur dans la littérature diplomatique contribue à la définition de son statut juridique émergent. Il est à noter qu’au fur et à mesure de la publication des manuels diplomatiques à travers les siècles, les immunités sont d’abord présentées comme étant souhaitables plutôt que juridiquement contraignantes (Hotman 1603 ; Thynne 1652 : 82-83 ; Howell 1664 : 187). La notion d’immunité prend plusieurs formes : le bâtiment de l’ambassade serait par exemple inviolable, « un azile & retraitte à ses gens & domestiques contre toutes injures et violences ».12 La nature prescriptive du manuel sert ici à exhorter les dirigeants et ceux qui les servent à respecter les règles des échanges internationaux de manière plus systématique. Cet objectif est largement atteint au milieu du XIXe siècle d’après Elliot, qui affirme « qu’un principe est désormais reconnu par toutes les puissances de l’Europe, qu’une fois que la cour est informée de la mission du ministre public, de quelque rang qu’il soit, celui-ci bénéficie d’une inviolabilité entière à partir du moment où il arrive dans le territoire de l’État auquel il est accrédité jusqu’au moment où il le quitte ».13

Les principes du ius legationis, de reconnaissance réciproque des agents diplomatiques et d’immunité diplomatique sont néanmoins des éléments structurants du domaine avant d’être formalisés par les textes juridiques, dans le sens où ils permettent aux échanges diplomatiques d’avoir lieu. En effet, la diplomatie en tant que processus de dialogue pacifique entre des entités politiques souveraines et indépendantes est difficile à concevoir sans ces principes de fonctionnement de base.

Bien que de nombreux principes semblent accéder au statut de lois universellement reconnues, la diplomatie telle qu’elle est pratiquée jusqu’au début du XXe siècle repose encore largement sur des usages et des coutumes anciens et tacitement admis entre pays. Pour combler une absence d’accord écrit sur les règles à respecter, les diplomates européens s’appuient sur un règlement protocolaire transmis notamment par le biais des manuels qui le décrivent. Comme l’indique Jean Serres (2016 : 19) dans son ouvrage de référence sur le protocole diplomatique, le protocole répond à une exigence de clarté et d’ordre dans la manière de conduire les relations entre diplomates en respectant la souveraineté de leurs pays mandants. Il est perçu par les diplomates comme un code porteur de sens sans lequel il ne saurait y avoir d’échange, puisque chaque diplomate défendrait corps et âme la supériorité de son souverain sur les autres. Pour de Wicquefort par exemple, « [l]’Ambassadeur est obligé de s’accommoder aux regles qui ont esté éstablies pour cela, & n’y peut manquer sans déconcerter l’harmonie, sans laquelle il n’y peut point avoir de conversation entre les Ministres Publics ».14 Le protocole diplomatique est étroitement lié au cérémonial de cour, notamment en ce qui concerne les audiences de réception et de départ des ambassadeurs. La sociologue Meredith Kingston fait remarquer que :

[l]a dimension solennelle que revêtent le début et la fin d’une mission diplomatique révèlent l’importance accordée à l’entrée en accréditation diplomatique, comme si à partir de ce moment, l’ambassadeur se trouvait dans un milieu fermé où les actes, les vêtements, les gestes, les formes de sociabilité revêtaient une spécificité qui permet d’en faire le support institutionnalisé de l’échange diplomatique courtois et pacifique (Kingston 1996 : 310).

De par sa nature symbolique et codifiée, le protocole permet d’envoyer des messages non-verbaux qui consolident ou contestent les relations entre souverains et fait donc intégralement partie de la pratique diplomatique. Le diplomate doit par conséquent maîtriser le langage protocolaire, ainsi que différentes langues étrangères, un lexique et des genres spécifiques.

3. Évolution des genres et du lexique spécialisé propres au domaine de la diplomatie (1603-1917)

3.1. Les genres diplomatiques

Par le biais de son activité de représentant, de négociateur et de producteur et gestionnaire de l’information politique, le diplomate accomplit de multiples tâches qui mobilisent différentes connaissances. La maîtrise de genres spécialisés propres à son domaine, et, dans une moindre mesure, d’un lexique spécialisé, forme le socle sur lequel se fonde son action. Nous utilisons le terme de « genre » pour caractériser les ensembles textuels dont il est question dans les manuels étudiés. En effet, une définition consensuelle semble, selon nous, exister pour chaque document diplomatique étudié ici, avec une fonction précise et des conventions formelles et thématiques récurrentes (Swales 1990 : 58). Les genres qui sont le plus couramment cités dans les manuels se répartissent en quatre groupes. Un premier groupe comprend les genres produits par le souverain ou le gouvernement mandant à destination d’un autre souverain, d’un gouvernement, ou du diplomate lui-même : ce sont les instructions, les lettres de créance et les pleins-pouvoirs. Une deuxième catégorie regroupe les communications entre le diplomate et le gouvernement du pays où il est en poste (note, memorandum). Un troisième ensemble comporte les documents envoyés par le diplomate à son propre gouvernement (rapport, dépêche). Enfin interviennent les documents juridiques internationaux issus de négociations tels que les traités. Nous allons examiner ces quatre classes tour à tour afin de voir en quoi elles illustrent une spécialisation de la pratique diplomatique et son évolution au fil des siècles.

3.1.1. Instructions, lettres de créance, pleins-pouvoirs

Ces trois genres sont liés au processus de reconnaissance du statut diplomatique de l’agent et à l’exercice effectif de ses fonctions. Les instructions diplomatiques peuvent remplir plusieurs fonctions différentes : « Aide-mémoire avec une réserve d’arguments à utiliser […], copie mot à mot des discours à proférer, ou bien, à l’opposé, ordres ‘pour avis’ qui laissent toute latitude d’appréciation à des représentants d’un statut social exceptionnellement élevé » (Péquignot 2015 : 99). Les instructions apparaissent très tôt dans l’histoire de la diplomatie15 (Mattingly 1964 : 35-6), et préexistent donc à la diplomatie résidente de la fin du XVe siècle. Si le contenu des instructions peut être très divers selon la nature des affaires à traiter (Elliot 1834 : 386 Vol II), l’existence d’exemples d’instructions préservées dans les chancelleries européennes suggère peut-être une certaine régularité dans la forme et la phraséologie de ce type de texte.

Les lettres de créance et les pleins-pouvoirs sont plus formulaïques que les instructions en raison probablement de leur caractère public et solennel : ils sont écrits pour être lus par le souverain ou gouvernement extérieur dans le cadre d’une cérémonie formelle de remise par le diplomate. Ces deux documents étaient encore plus indispensables au diplomate que ses instructions, car sans eux la reconnaissance du statut diplomatique de l’envoyé n’était tout simplement pas envisageable : « Les lettres de creance [sic] sont necessaires [sic] à l’Ambassadeur ; tant parce qu’elles lui donnent le caractère, & le font connoistre au Prince à qui on l’envoye ; que parce que sans elles il n’est pas capable de négocier ».16

Les pleins-pouvoirs sont donnés par le souverain au diplomate pour que celui-ci puisse signer un traité ou un accord international sans que son souverain soit présent. Les manuels diplomatiques de notre corpus comportent très souvent des exemples de lettres de créance et de pleins-pouvoirs, sans doute pour que les diplomates qui les lisaient pussent s’imprégner de cette phraséologie singulière qui témoigne des formes de politesse inhérentes à la vie de cour en Europe, et des relations politiques au sein d’une société internationale composée de souverains « frères et sœurs » (Satow 1917 : 100, Vol I). Les lettres de créance et les pleins-pouvoirs sont également, comme les instructions, des genres anciens : la forme des lettres de créance par exemple est fixée avant 1400 (Mattingly 1964 : 33-4).

3.1.2. Note, memorandum

Les différentes formes de communication officielle entre le diplomate et le souverain ou le gouvernement auprès duquel il est accrédité font l’objet d’un traitement moins systématique dans les manuels. Satow (1917 : 68, Vol I) en retient trois : la « note », la « note verbale » et le « memorandum17 ». La note sert pour des communications de routine, pour laisser une trace d’un accord verbal, ou dans le cas où un échange oral entre gouvernements se révèle impossible (s’il y a un désaccord important par exemple) (ibid. : 125-6). La note verbale est écrite à la troisième personne et, à la différence de la note générale, n’est pas signée. Elle peut être employée pour servir de trace écrite après une conversation ou pour soumettre une question ou une proposition par écrit au ministère des affaires étrangères (ibidem. : 74-75 ; Foster 1906 : 246).

Satow (1917 : 83-4) énumère les différentes sections d’une note qui comporte : (1) l’appel ou l’inscription (le titre de la personne à qui elle s’adresse) ; (2) le traitement (son deuxième titre – Sainteté, Majesté, etc.) ; (3) la courtoisie (une formule de politesse) ; (4) la souscription (la signature de celui qui écrit) ; (5) la date ; (6) la réclame (le nom et la désignation officielle du destinataire) ; (7) la suscription (l’adresse du destinataire). La connaissance de cette structure est à mettre en rapport avec les règles du genre épistolaire au sens large, et plus particulièrement avec celles des lettres de chancellerie – rédigées dans les ministères des affaires étrangères européennes et dans leurs antennes diplomatiques à travers le monde. Enfin, le mémorandum est similaire à la note verbale : document non-signé, il résume une conversation ou l’état d’une affaire, ou sert à justifier une décision qui a été prise (Foster 1906 : 246). Le mémorandum peut aussi faire office de document de travail dans des négociations ou pour la rédaction de dépêches (de Wicquefort 1716 : 96).

3.1.3. Rapport, dépêche

Contrairement aux genres plus anciens précédemment évoqués, les rapports et dépêches apparaissent avec la mise en place d’une diplomatie résidente européenne sous l’impulsion des chancelleries italiennes. Selon Mattingly (1964 : 97) il existe, en 1500, des conventions génériques fixes dans les cités-États italiennes pour les dépêches. Toute dépêche contient une formule de salutation, un résumé de la correspondance officielle récente entre la chancellerie italienne et le diplomate, le corps de la dépêche avec éventuellement des copies d’autres documents utiles, le lieu et la date d’envoi, et une formule de clôture.

Les diplomates résidents pouvaient aussi être amenés à rédiger des rapports ; les deux genres obéissent à la même exigence de transmettre des informations sur le pays où le diplomate est en poste, mais le rapport s’intéresse à un seul sujet de manière plus analytique, alors que la dépêche se limite à un résumé des faits. Les auteurs de notre corpus semblent néanmoins utiliser les deux termes de rapport (« report(e) ») et de dépêche (« dispatch/despatch ») sans préciser la différence entre les deux.

Davantage que les instructions, lettres de créance ou notes diplomatiques, les dépêches, et surtout les rapports, témoignent à partir du XVe siècle d’un renouvellement de l’écriture diplomatique qui reflète des exigences inédites en matière de collecte et de transmission des informations par le diplomate résident : il doit désormais fournir une synthèse complète de toutes les informations utiles sur le pays d’accueil. Le développement du rapport diplomatique participe aussi à l’émergence du nouveau savoir de l’information à partir du milieu du XVIe siècle. Pour Fedele (2014 : 622-23), ce nouveau type d’écriture repose sur une conception autre du monde, fondée sur une « analytique de la puissance » tributaire de la pensée politique de façon plus générale. Sous l’impulsion des rapports diplomatiques émerge une nouvelle écriture politique qui s’intéresse, non pas à l’histoire ou au droit, mais à des problématiques liées à l’espace, à la géographie et à l’analyse politique. Dans ce discours élaboré en partie par les diplomates, les États cherchent à se pourvoir d’une appréhension synthétique du monde par le biais d’une description exhaustive des différents éléments qui fondent la puissance de chaque pays (forces militaires, type d’agriculture, nature des frontières, etc.).

3.1.4. Traité

Le dernier genre dont il est souvent question dans les manuels diplomatiques est celui du traité. Le traité semble être le document conclu entre des souverains ou des gouvernements le plus couramment décrit dans la littérature sur la figure du diplomate. Au fil des siècles, une classification de plus en plus précise des traités selon le contenu dont il est question émerge, comme le remarque de Callières :

Il y a plusieurs sortes de Traitez entre les Princes et les Etats souverains, les principaux sont ceux de la paix, de treve, ou de suspension d’armes, d’échange, de cession ou de restitution de places et de pays contestez ou conquis, de reglemens, de limites, & de dépendances, de ligues tant offensives que deffensives, de garantie, d’alliance par mariage, de commerce, &c18.

Au début du XXe siècle, le traité n’est qu’une manière parmi d’autres pour des États de conclure des accords. Satow (1917 : 173, Vol II) en dénombre quinze : traité, convention, articles additionnels, acte final, déclaration, accord, arrangement, protocol, procès-verbal, échange de notes, réversale, compromis d’arbitrage, modus vivendi, ratification et adhésion. Le choix de tel ou tel type de document dépend des usages en vigueur et parfois du contenu de l’accord : les questions les plus importantes seront réglées dans des traités ou des conventions par exemple (ibid.). Les traités adoptent peu à peu une structure figée en quatre parties : le préambule, les articles (des plus généraux aux plus spécifiques, avec un article portant sur les modalités de ratification), les signatures, et la date et le lieu où le traité a été signé (ibidem. : 175).

3.2. Le lexique diplomatique

Nous avons relevé manuellement 97 items lexicaux dans notre corpus qui semblent spécifiques au domaine de la diplomatie. Pour cette étude nous nous sommes concentrée sur la diachronie socio-historique du domaine de la diplomatie dans son ensemble et sur un genre spécifique (le manuel). Les analyses linguistiques que nous proposons ici valent donc comme une première exploration des spécificités lexicales du domaine de la diplomatie. De plus, les items lexicaux que nous avons relevés n’apparaissent que parfois dans un seul manuel ; nous ne pouvons donc pas affirmer qu’il s’agisse de termes attestés et régulièrement employés par la communauté diplomatique anglophone. Face à ces limites, nous avons plutôt cherché à repérer les indicateurs possibles d’une évolution lexicale afin de les mettre en rapport avec des développements culturels dans les connaissances et pratiques propres au domaine.

En termes de réseaux notionnels associés aux lexèmes que nous avons relevés, nous pouvons en dénombrer quatre : (1) l’organisation structurelle et hiérarchique des représentants diplomatiques (agent, attaché, counsellor, ambassador) ; (2) des pratiques relevant de la diplomatie bilatérale (agréation, credentials, exterritoriality) ; (3) des pratiques relevant de la diplomatie multilatérale (conférence, adhésion, alternat), et enfin (4) les genres textuels et la production écrite (concordat, article, recommandation, note).

Prenons tour à tour ces quatre catégories afin d’essayer de dégager quelques tendances concernant leur évolution au cours de la période. Sur un total de trente-et-un lexèmes relevés dans les trois ouvrages du XVIIe siècle du corpus, plus d’un tiers réfèrent à la hiérarchie des rangs diplomatiques ; ce qui atteste le fait qu’à cette époque les structures organisationnelles ainsi que des concepts fondamentaux (ius legationis, franchise, powers, immunity) permettant une diplomatie continue sont établis. La constitution du corps diplomatique international témoigne du système organisationnel hiérarchique de la société de cour ; elle connaîtra quelques modifications au cours des siècles suivants mais restera globalement inchangée.

Un relevé diachronique des unités lexicales permet de repérer une évolution plus importante dans la pratique diplomatique au cours des quatre derniers siècles : la consolidation et complexification de la pratique diplomatique multilatérale. Au XVIIe siècle, le lexique propre à la diplomatie multilatérale se limite à quelques termes généraux (alliance, offices, médiation, ratifier). Un siècle plus tard, nous observons que des structures organisationnelles plus précises (conférence, congress, deputation) ont été mises en place pour permettre la résolution de différends à l’échelle internationale. Ce vocabulaire spécialisé en rapport avec les négociations internationales se complexifie au XXe siècle pour inclure des lexèmes, d’origine latine notamment, qui indiquent la portée des éléments négociés et fixés sous forme de traités (ad referendum, ad deliberandum, casus belli, ne varietur, non appellando, modus vivendi, statu quo, sine qua non, etc.) (Satow 1917), ainsi que des processus spécifiques dans le cadre de négociations diplomatiques internationales (adhésion, dénonciation, exchange of notes, rapporteur).

La période 1603-1917 témoigne également d’une complexification des genres textuels propres au domaine. Au XVIIe siècle nous en dénombrons quatre : agreement, capitulation, letters, treaty, auxquels nous pouvons en ajouter deux au XVIIIe siècle (déclaration, memorial). Dans le manuel d’Elliot (1834), nous trouvons des références qui portent sur trois autres genres : act, convention et note. Enfin, les genres cités dans les manuels du XXe siècle sont les suivants : concordat, cartel, démarche, preliminaries of peace, protocol, lettres réversales et ultimatum. Ce relevé simple ne nous permet pas de dater de manière précise l’émergence de ces différents genres, mais il apporte des indications sur les genres perçus par les auteurs comme étant les plus emblématiques de la profession et donc comme importants à maîtriser par le diplomate.

De même, la manière dont la langue diplomatique est perçue par les auteurs des manuels pourrait fournir quelques indications sur sa spécialisation au fil du temps, en mettant en lumière notamment le développement de structures et de pratiques de négociation multilatérales de plus en plus pointues. Les manuels adoptent, de manière générale, une approche prescriptive qui enjoint aux futurs diplomates d’écrire en soignant la concision, la précision et la clarté. Pour Hotman (1603), les « advises » de l’ambassadeur doivent respecter les critères suivants :

Elles seront dõc graves, bresves, serrees, contenãs beaucoup en peu de paroles, couchees en termes plustost communs que recherchez : meslees par fois de pointes & traits sententieux, rarement toutefois, & pour estre plus intelligibles, il seroit bon d’articuler chacun affaire à part19.

Ces conseils pourraient toutefois valoir pour l’écriture administrative ou politique au sens large, et non seulement pour le domaine diplomatique. En revanche, quant à la question de la rédaction de traités, on discerne plus facilement une spécialisation de la langue diplomatique, qui est liée sans doute à la performativité de ces textes qui sont amenés à être exécutés et à instaurer des mesures particulières. La citation suivante tirée du manuel de de Wicquefort résume ces exigences en ces termes :

[l’ambassadeur] ne doit point permettre, que les paroles formelles, qu’il importe au Prince son Maistre de faire exprimer, soyent comprises ou estouffées sous des expressions générales ; parce que cette négligence donne aux Princes, qui se tiennent toujours plustost à la glose qu’au texte, l’avantage d’en faire une explication plus conforme à leur interest, qu’à l’intention du Maistre de l’Ambassadeur. Il ne doit point souffrir non plus, qu’une clause ou condition importante & essentielle, on fasse un article séparé ou secret ; s’il n’y est bien dit expressément, que cet article aura la mesme force, que s’il avoit été inséré mot à mot au traitte20.

Le diplomate devra veiller à éliminer toute formule ou terme qui pourrait prêter à confusion lors de la rédaction de traités pour que le texte final soit le plus limpide possible, évitant toute ambiguïté qui laisserait possibles des interprétations divergentes dans la mise en application.

Le fait que les genres textuels diplomatiques servent certaines finalités spécifiques pourrait induire un recours à une phraséologie particulière. La lettre de créance, par exemple, sert de garantie à ce que tout ce que le diplomate négocie avec un autre souverain bénéficie de l’accord tacite de son « principal » ou souverain propre. Cette fonction suppose une phraséologie particulière et formulaïque dans ce type de lettre qui puisse tenir compte de toutes les éventualités dans les négociations, comme le suggère Hotman :

Il fera pareillement cognoistre sa prudence, si ayant receu commandement de partir, il prend instruction bien signée de tout ce qu’il aura à dire & negocier pour n’estre desadvoüé des choses qu’il aura dictes, traittees & cõcluës21.

Un argument supplémentaire qui tendrait à démontrer l’existence d’une phraséologie figée en diplomatie est l’ensemble étoffé d’exemples de documents diplomatiques authentiques inclus dans les manuels (de Wicquefort 1716 ; Elliot 1834 ; Satow 1917). L’ouvrage de Satow (1917) contient un appareil intertextuel très important de documents diplomatiques rédigés en anglais, français, espagnol, italien et allemand. L’auteur ne commente pas ces extraits ; pour la section portant sur les traités par exemple, nous comprenons que le diplomate est censé s’en imprégner, en reproduire le style, la phraséologie et la structure dans ses propres écrits par imitation. Cependant, le fait d’inclure de tels modèles textuels dans ces manuels d’instruction semble indiquer une tendance à la cristallisation de certaines formules, et surtout, d’une structure spécifique.

Il existe très peu de références faites à une terminologie dite « diplomatique » dans les manuels. En revanche, les noms de genres diplomatiques sont parfois perçus comme des termes (Foster 1906 : 75-6). Les quelques commentaires méta-linguistiques qui font référence à un langage diplomatique tendent à démontrer que dans le domaine de la diplomatie, jusqu’au XXe siècle, la diachronie linguistique concerne des genres, plutôt que des termes, qui se sont généralisés et complexifiés autour de conventions thématiques, phraséologiques et structurelles particulières. Pour reprendre le cas des lettres de créance, il est facile d’identifier un certain nombre de « moves » rhétoriques (Swales 1990). Elliot (1834 : 374-5 Vol II), par exemple, en distingue quatre : une introduction générale qui pose l’objectif de la mission, le nom et le rang de l’agent diplomatique et un appel au souverain à « ajouter foi » à tout ce qu’il lui dira, quelques indications plus précises sur les affaires sous la responsabilité de l’agent, et enfin une conclusion qui insiste sur les relations amicales entre les deux pays. Il semblerait donc qu’au cours de la période étudiée, il existe au sein des manuels une conscience plus aiguë des contraintes génériques plutôt que lexicales, conscience qui reflète le processus de dictionnarisation plus tardif de la langue diplomatique au début du XXe siècle.

Conclusion

Nous avons essayé dans cet article de proposer une analyse des points d’intersection entre le développement socio-historique des pratiques et connaissances des diplomates occidentaux depuis le début du XVIIe siècle, et un contexte politique marqué de plus en plus par l’ascendance d’États indépendants qui négocient dans le cadre d’un système international régi par des structures et des processus multilatéraux toujours plus techniques. Le manuel diplomatique, genre ancien, polyglotte et prolifique, illustre l’importance de la prise en compte du contexte culturel dans l’analyse de genres spécialisés. Discours prescriptif qui recense les qualités du « parfait ambassadeur », le manuel est tributaire de l’influence de la culture curiale en Europe et appartient à l’ensemble textuel plus vaste de la littérature sur l’homme de cour (Castiglione 1987 [1528] ; Gracian 2010 [1684]). Le poids de cette culture est sensible sur le plan linguistique par le biais des références au genre épistolaire des lettres de chancellerie, les formules de courtoisie omniprésentes dans les documents diplomatiques, et le caractère cérémonieux de rituels tels que la remise des lettres de créance.

L’intérêt du manuel pour la caractérisation du domaine spécialisé de la diplomatie réside cependant davantage dans son explicitation des principes fondateurs de l’activité diplomatique, qui ne sont pas aisément perceptibles de l’extérieur. Il permet de différencier les principes du droit international (immunité, réciprocité, reconnaissance) des us et coutumes non formalisés dans des textes ou accords (rituels de socialisation diplomatiques, protocole), qui, sans être des connaissances ou pratiques techniques, concourent néanmoins à réaliser la finalité du domaine et s’appuient sur un langage spécifique qui, de ce fait, peut être considéré comme spécialisé (Van der Yeught 2012 : 16).

Sur le plan diachronique, il peut être utile de différencier le développement plus précoce d’un ensemble de genres textuels spécifiques (lettres de créance, lettres d’instruction, dépêches) de l’évolution sans doute moins perceptible d’un lexique diplomatique. Les manuels ne construisent pas un « pont » entre le spécialisé et le non-spécialisé de la même manière que les gloses des termes spécialisés en langue générale dans les glossaires spécialisés (ibid. : 17). Néanmoins, les manuels ne sont pas réservés à un public de spécialistes, la faible spécialisation de la profession en ce qui concerne ses membres jusqu’au XIXe siècle explique cette ouverture. L’idée de vouloir servir de guide pratique implique également une logique de vulgarisation des pratiques idiosyncratiques de la profession qui les met en exergue et amorce une transition du spécialisé au non-spécialisé. Il serait alors intéressant d’examiner plus en détail la diachronie lexicale grâce à une étude des dictionnaires de la diplomatie, en s’appuyant sur ces premières analyses linguistiques.

Bibliographie

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Notes

1 Le chiffre cité par Keens-Soper est tiré de Grabar, Vladimir, E. De Legatis et Legationibus Tractatus Varii, Dorpat, 1905, et Grabar, Vladimir, E. Catalogus (De legatorum jure tractatuum) completus ab anno MDCXXV usque ad annum MDCC, Iur’ev, 1918. Retour au texte

2 Bernard de Rosier (1400-1475), écrivain et prélat français, avait une expérience de missions diplomatiques au service du Comte Jean IV d’Armagnac. Retour au texte

3 Il s’agit surtout d’écrits juridiques qui s’intéressent aux aspects réglementaires de la fonction diplomatique, et qui ne sont pas forcément destinés à être lus par des diplomates afin d’améliorer ou de mieux comprendre leur pratique. Retour au texte

4 La citation est tirée de l’édition française : Sieur de Vill. H. [J. Hotman], L’Ambassadeur, [s. l.], [s. n.], 1603. Nous avons gardé l’orthographe du texte original. Retour au texte

5 Ibid. : 62. Retour au texte

6 Pour la définition du genre d’instructions diplomatiques, voir 3.1.1. Retour au texte

7 La citation française est tirée de l’édition hollandaise originale : Callières, François de, De la manière de négocier avec les souverains : de l’utilité des négociations, du choix des ambassadeurs et des envoyez, et des qualitez necessaires pour réussir dans ces emplois, Amsterdam : pour la Compagnie, 1716, p. 305. Retour au texte

8 La citation française est tirée de l’édition hollandaise originale : Bonnot de Mably, Gabriel, Des principes des négociations pour servir dintroduction au droit public de l'Europe fondé sur les traités, La Haye : [s.n.], 1757, p. 22-23. Retour au texte

9 “Hence, it is probable, that the success of Negotiators, in the present age, may have arisen, not only from sounder views of national policy, and a due share of learning and sagacity, but from a more free PRACTICE [sic] and constant exercise in a course of Diplomatic Writing.” (Elliott 1834 : xviii, Vol I) Retour au texte

10 Le manuel de Satow laissera une empreinte durable sur le genre ; il est aujourd’hui encore considéré comme le guide de référence en la matière pour les diplomates britanniques. Il a été réédité à quatre reprises en 1923, 1931, 1957 et 1979. Retour au texte

11 “the rules regulating the recognition and status of diplomatic principles, the behavior and immunities of diplomatic agents, and the negotiations, validity and observance of diplomatic agreements” Retour au texte

12 Sieur de Vill. H. [J. Hotman], L’Ambassadeur, [s. l.], [s. n.], 1603, p. 102. Retour au texte

13 “It is recognised as a principle now by all the powers of Europe, that the court being once apprised of his mission the public minister, of whatever rank he may be, is entitled to perfect inviolability from the moment he touches the territory of the state to which he is accredited, to that in which he quits it.” (Elliot 1834 : 403, Vol II) Retour au texte

14 La citation en français est tirée de l’édition de 1690 : Wicquefort, Abraham de, L'Ambassadeur et ses fonctions, Cologne : P. Marteau, 1690, p. 296. Retour au texte

15 Il existe par exemple au moins trente-deux instructions éditées des rois et des princes de France pour la période 1258-1420 (Péquignot 2015 : 98). Retour au texte

16 La citation en français est tirée de l’édition de 1690 : Wicquefort, Abraham de, L'Ambassadeur et ses fonctions, Cologne : P. Marteau, 1690, p. 169. Retour au texte

17 Aussi appelé « mémoire » ou « pro-memoria » (Satow 1917 : 68, Vol I). Retour au texte

18 La citation en français est tirée de l’édition hollandaise de 1716 : Callières, François de, De la manière de négocier avec les souverains : de l'utilité des négociations, du choix des ambassadeurs et des envoyez, et des qualitez necessaires pour réussir dans ces emplois, Amsterdam : pour la Compagnie, 1716, p. 185. Retour au texte

19 Sieur de Vill. H. [J. Hotman], L’Ambassadeur, [s. l.], [s. n.], 1603, p. 71. Retour au texte

20 Wicquefort, Abraham de, L'Ambassadeur et ses fonctions, Cologne : P. Marteau, 1690, p. 164. Retour au texte

21 Sieur de Vill. H. [J. Hotman], L’Ambassadeur, [s. l.], [s. n.], 1603, p. 24. Retour au texte

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Référence électronique

Jessica STARK, « Les manuels diplomatiques, vecteurs de spécialisation de l’anglais de la diplomatie (1603-1917) », Textes et contextes [En ligne], 13-2 | 2018, publié le 20 décembre 2019 et consulté le 28 mars 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/textesetcontextes/index.php?id=2230

Auteur

Jessica STARK

Doctorante agrégée d’anglais, Aix-Marseille Univ., LERMA, EA 353, Aix-en-Provence, France, ESPRI (English for Specific Purposes Research Initiative), École normale supérieure Paris-Saclay, 61 Avenue du Président Wilson, 94230 Cachan,

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