Le New Labour et la dévolution (1994-1999) : la multiplication des garde-fous pour assurer la victoire d’un troisième projet de loi

  • New Labour and Devolution (1994-1999): The Multiplication of Safeguards to Ensure the Victory of a Third Bill

Résumés

Cet article analyse la ligne de conduite suivie par le New Labour à l’égard de la dévolution entre 1994 et 1999 afin de montrer comment il a influencé le processus de mise en place des institutions décentralisées en Écosse et au pays de Galles. Effectivement, au cours de cette période, la direction travailliste britannique a véritablement pris l’initiative en matière de dévolution, cherchant à éviter autant que possible les divisions inter et intrapartisanes et à neutraliser l’opposition des parlementaires anglais afin de ne pas répéter les erreurs commises en 1979 et d’assurer la victoire d’un troisième projet de loi. La création du Parlement écossais et de l’Assemblée galloise en 1999 s’est ainsi inscrite dans le cadre d’une stratégie politique bien définie, répondant avant tout à des calculs politiques et laissant peu de liberté aux branches travaillistes écossaise et galloise.

This article tries to examine the attitude of New Labour towards devolution from1994 to 1999. More precisely, it is aimed at highlighting how New Labour influenced the creation of devolved institutions in Scotland and Wales. Indeed, the British Labour leadership quickly seized the initiative on this issue, trying to reduce inter- and intra-party tensions and to neutralize the opposition of English MPs so as not to repeat the mistakes of 1979 and to ensure the success of a third bill. The setting-up of the Scottish Parliament and the Welsh Assembly was thus part of a precise political strategy, which did not give much leeway to the Scottish and Welsh Labour parties.

Plan

Texte

Introduction

Lorsque Tony Blair devint le nouveau dirigeant du Parti travailliste en 1994, à la suite du décès brutal de John Smith, il hérita d’une question épineuse, à laquelle les Travaillistes avaient attaché beaucoup d’importance depuis les années 1960, la dévolution. À partir de 1966, les travaillistes avaient adopté une ligne de conduite de plus en plus favorable à son égard, prenant progressivement conscience de la montée en puissance des partis nationalistes écossais et gallois. Toutefois, leurs premières tentatives visant à mettre en place des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles n’avaient pas abouti, les gouvernements travaillistes de Harold Wilson, puis de James Callaghan étant confrontés à une trop forte opposition, notamment de la part des anti-dévolutionnistes travaillistes. Le Parti travailliste était alors très divisé sur cette question, et les parlementaires représentant les régions situées au nord de l’Angleterre étaient particulièrement virulents, craignant que la dévolution ne fasse profiter l’Écosse et le pays de Galles d’un traitement de faveur, d’aides régionales plus élevées, comparé à leurs régions.

Ainsi, les deux premiers projets de loi des travaillistes avaient été rejetés au cours des années 1970, qu’il s’agisse du Scotland and Wales Bill présenté aux Communes en 1976 ou des Scotland Bill et Wales Bill de 1978, qui furent retirés à la suite de l’échec des référendums de 1979. Il faut dire qu’à cette occasion, le gouvernement Callaghan avait été contraint d’accepter des amendements qui lui avaient été néfastes, un des amendements indiquant notamment que les projets de loi ne pourraient être considérés comme définitivement adoptés que s’ils étaient approuvés par au moins 40% des électeurs inscrits lors d’un référendum préliminaire. Par ailleurs, les projets de loi s’étaient avérés assez complexes et confus, notamment sur le partage des responsabilités. Enfin, les campagnes référendaires, organisées dans un contexte politique peu favorable au gouvernement, avaient été marquées par une très grande confusion et par de très nombreuses divisions au sein du Parti travailliste comme du Parti conservateur (Berbéri 2006 : 74-75).

En fait, il fallut attendre la fin des années 1990 pour qu’un gouvernement travailliste propose un nouveau projet de loi en matière de dévolution. Entre-temps, le Parti travailliste tout entier était devenu beaucoup plus favorable à l’idée de dévolution dans le but de conserver le soutien des sympathisants travaillistes en Écosse et au pays de Galles en dépit des défaites électorales successives, et de mettre un terme à la domination des gouvernements conservateurs dans ces deux pays. Au début des années 1990, sous la direction de John Smith, farouche défenseur de la dévolution, le Parti travailliste avait adopté une politique clairement pro-dévolutionniste : le parti semblait désormais prêt à soutenir la mise en place d’un Parlement doté de pouvoirs législatifs en Écosse et au pays de Galles pour les raisons déjà mentionnées, mais aussi pour moderniser l’État britannique et remettre en cause la trop grande centralisation du pouvoir qui s’était opérée depuis 1979 sous les gouvernements conservateurs (Stuart 2005 : 293).

Comment Tony Blair procéda-t-il entre 1994 et 1999 pour faire passer un nouveau projet de loi sur la dévolution et parvenir à mettre en place un Parlement écossais et une Assemblée galloise – sans répéter l’échec des deux précédents projets de loi ? Cet article cherchera à répondre à cette question en analysant la ligne de conduite suivie par le New Labour1 au cours de cette période, et en montrant comment la direction travailliste britannique a influencé le processus de mise en place des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles.

1. La mise en place de garde-fous (1994-1997)

1.1. Tony Blair : un dirigeant prudent en matière de dévolution

Le décès brutal de John Smith en mai 1994 ne remit pas en question l’orientation prise par le parti. Tony Blair, le nouveau dirigeant, poursuivit dans la même direction que John Smith, souhaitant mener à bien les projets de son prédécesseur (the unfinished business) : il compléta le processus de transformation du parti, visant à le rendre de nouveau éligible, et conserva la même politique pro-dévolutionniste. Ainsi, il réaffirma rapidement les engagements pris par John Smith. Tout d’abord, il inclut la dévolution dans un programme de réformes constitutionnelles visant à moderniser et à démocratiser l’État britannique. Parmi ces mesures figuraient la réforme de la Chambre des Lords, l’adoption de la Convention européenne des droits de l’homme, l’introduction d’une législation sur la liberté de l’information (Freedom of Information Act), mais aussi la tenue d’un référendum portant sur le rétablissement d’un pouvoir central autonome à Londres (New Labour 1997a : 11). Comme Tony Blair l’indiqua clairement le 21 juillet 1994 lors de son élection à la tête du Parti travailliste, il souhaitait mettre un terme aux politiques trop centralisatrices des gouvernements britanniques : « On the constitution, … we reject the desire of Governments to centralise,… we will not run the quango state of the Tories with different managers, we will get rid of it and return power to local people over local services » (Blair 1994).

Dès le 15 juillet 1994, lors d’un discours à Cardiff, Blair réitéra également la promesse faite par le parti d’introduire des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles au cours de la première législature d’un gouvernement travailliste (Stuart 2005 : 404). Contrairement à John Smith, il ne souhaitait toutefois pas offrir le même type de dévolution à l’Écosse et au pays de Galles (Commission on the Powers and Electoral Arrangements of the National Assembly for Wales 2002).

Enfin, Tony Blair continua à soutenir les propositions émanant de la Convention constitutionnelle écossaise (Scottish Constitutional Convention), organisation transpartisane créée au début des années 1980 pour réfléchir aux modalités de mise en place d’un Parlement écossais, ainsi que celles de la Commission galloise (Constitutional Policy Commission), mise en place par la branche galloise du Parti travailliste en 19942.

Néanmoins, si Blair souhaitait poursuivre l’action de son prédécesseur, il faisait preuve de moins d’enthousiasme que John Smith, comme l’a indiqué son biographe John Rentoul : « Blair was personally unenthusiastic about devolution, and might have preferred some kind of Grand Committee system, by which Scottish MPs at Westminster would have formed themselves into a subsidiary assembly for Scottish business » (Rentoul 2001 : 287). Certes, Tony Blair est d’origine écossaise, mais il a fait sa carrière en Angleterre et est l’élu d’une circonscription du nord de l’Angleterre (Sedgefield), ce qui signifie qu’il a un point de vue plus anglicisé et plus détaché sur ces questions, et qu’il est peut-être ainsi plus à même de comprendre les réticences anglaises suscitées par la mise en place de telles politiques (Leydier 1998 : 194). En tant que dirigeant, Blair allait donc se montrer relativement prudent à l’égard de la question de la dévolution, essayant de limiter les divisions parmi les rangs travaillistes et d’assurer la crédibilité de son parti, afin d’aboutir si possible à la victoire d’un éventuel projet de loi (Kellas 1997 : 43).

Dans ce but, il n’allait pas se contenter de faire siennes les propositions de la Convention constitutionnelle écossaise et de la Commission galloise, mais il allait véritablement prendre l’initiative en matière de dévolution, en cherchant à influencer le processus de prise de décision, en Écosse comme au pays de Galles. Dès la fin de l’année 1995, le Parti travailliste créa ainsi une commission chargée de réfléchir à la mise en place d’un projet de loi sur la dévolution en cas de victoire du Parti travailliste aux prochaines élections législatives. Dirigée par Derry Irvine (Shadow Lord Chancellor), cette commission incluait, par exemple, Donald Dewar (alors Chief Whip), Ann Taylor (Shadow Leader of the House), Jack Straw (Shadow Home Secretary) ou George Robertson (Shadow Secretary of State for Scotland) (Stuart 2005 : 404). Par ailleurs, le parti chercha à élargir ses perspectives sur cette question en faisant plancher divers groupes de réflexion tels que le Constitution Unit ou l’Institute for Public Policy Research, sur la dévolution (Leydier 1998 : 194).

1.2. Des pouvoirs restreints pour l’Assemblée galloise

Ce fut au pays de Galles que la direction du Parti travailliste britannique réussit à imposer le plus rapidement ses volontés. Dans un premier temps, les réflexions à l’égard de la dévolution continuèrent à se passer exclusivement au sein du Parti travailliste gallois. En témoignèrent les tentatives faites par Ron Davies, le Secrétaire d’État au pays de Galles dans le Cabinet fantôme (Shadow Secretary of State for Wales), pour promouvoir un Parlement ou Senedd à la fin de l’année 1994. Cette idée qui avait été lancée par les Libéraux-Démocrates dut toutefois être abandonnée dans la mesure où cet organisme aurait disposé de pouvoirs législatifs et fiscaux importants, pouvoirs inadmissibles pour certains députés gallois et pour la direction travailliste britannique (Osmond 1995 : 29-30).

A partir de 1995, le Parti travailliste britannique commença à intervenir dans le processus de prise de décision relatif à la dévolution, stimulé par deux facteurs principaux. D’une part, il désirait réagir à un certain nombre de critiques émises par les Conservateurs, John Major ayant insisté, à diverses reprises, sur le danger présenté par la politique travailliste en matière de dévolution. En janvier 1995, Major était même allé jusqu’à déclarer que les propositions des Travaillistes à propos de l’Écosse et du pays de Galles figuraient parmi les plus dangereuses qui n’aient jamais été soumises à la nation britannique. D’autre part, le Parti travailliste souhaitait profiter du fait que la Commission (Constitutional Policy Commission), mise en place par la branche galloise du Parti travailliste, n’avait pas encore fait part de ses propositions. Le rapport, intitulé Shaping the Vision, qu’elle publia en 1995 fut donc très prudent, reflétant le point de vue de la direction (Osmond 1995 : 31-33). Il recommandait simplement la mise en place d’une Assemblée galloise élue au scrutin majoritaire, assumant les fonctions du ministère des Affaires galloises (Welsh Office) et des quangos3, mais restant financée par Westminster. La direction travailliste avait refusé d’attribuer des pouvoirs législatifs à l’Assemblée pour diverses raisons. Premièrement, elle craignait qu’une telle concession ne la contraigne à accorder par la suite des pouvoirs fiscaux. Deuxièmement, elle estimait que de tels pouvoirs seraient injustifiés puisque les Gallois soutenaient un gouvernement dévolu avec nettement moins de ferveur que les Écossais. Troisièmement, elle redoutait que l’attribution de pouvoirs trop étendus ne soit mal accueillie et ne nuise à l’unité du parti. Quatrièmement, le pays de Galles n’ayant pas de système juridique (et éducatif) propre, il ne pouvait pas bénéficier du même traitement que l’Écosse (Driver / Martell 1999 : 138).

Shaping The Vision fut accepté par le Congrès du parti et approuvé par Tony Blair, qui décida de faire de ce rapport la base de la législation qui serait introduite au cours de la première année de législature d’un gouvernement travailliste. Au mois de juin 1996, Ron Davies annonça plusieurs mesures complémentaires : une partie des membres de l’Assemblée galloise serait élue selon un système de représentation proportionnelle, et un référendum serait organisé. Concernant ce référendum, il avait été décidé qu’il ne comporterait qu’une seule question, que la règle de la majorité simple prévaudrait de façon à ne pas répéter les erreurs de 1979, et qu’il serait organisé une semaine après le référendum écossais afin d’encourager les Gallois, moins enthousiastes que les Écossais, à suivre l’exemple de leurs voisins et à voter en faveur d’un gouvernement dévolu (Pilkington 2000 : 70, 122).

Cette nouvelle ligne de conduite n’était pas soutenue par tous les membres de la branche galloise. Les pouvoirs restreints de l’Assemblée galloise provoquèrent ainsi un certain nombre de tensions : en 1995, le groupe de pression Welsh Labour Action, se détacha au sein même du parti, réclamant une approche plus radicale, à savoir une Assemblée aux pouvoirs plus étendus (dotée de pouvoirs législatifs et fiscaux), un système de vote équitable, la parité hommes-femmes et la représentation de la future Assemblée dans les institutions européennes (Abalain 2000 : 201-202).

1.3. Un référendum pré-législatif en Écosse

En Écosse, l’initiative en matière de dévolution passa un peu plus tard entre les mains du Parti travailliste britannique, soit à partir de juin 1996 (Kellas, 1997 : 43). Dans un premier temps, Tony Blair continua à soutenir les propositions faites par la Convention constitutionnelle écossaise, et plus précisément celles figurant dans son deuxième rapport intitulé Scotland’s Parliament, Scotland’s Right. Ce rapport, publié le 30 novembre 1995, apportait peu de changements au premier document de 1990, si ce n’est sur deux points principaux. D’une part, le Parlement compterait désormais 129 membres, dont 73 élus au scrutin majoritaire et 56 élus à la proportionnelle selon le système de membre additionnel. D’autre part, concernant la gestion des ressources, le Parlement n’aurait plus la possibilité d’augmenter ses ressources qu’en faisant varier le taux de base de l’impôt sur le revenu voté à Westminster dans une marge de 3% – un certain recul s’était donc opéré. Les nouvelles précisions apportées à la politique travailliste provoquèrent de vives critiques de la part des Conservateurs, et notamment de Michael Forsyth, le nouveau secrétaire d’État à l’Écosse. Tentant de faire apparaître le Parti travailliste comme le parti de « l’impôt » (‘tax and spend’ party), qui ne pouvait accéder au pouvoir sans taxer toujours plus les citoyens britanniques, les Conservateurs concentrèrent leurs attaques sur les pouvoirs fiscaux, qualifiés de « tartan tax ».

Ces critiques allaient, une nouvelle fois, encourager la direction travailliste britannique à prendre l’initiative en matière de dévolution, et ce d’autant plus qu’elle ne souhaitait pas perdre du terrain face aux Conservateurs, compte tenu de l’approche des élections législatives. Dans la mesure où elle ne pouvait plus intervenir dans les travaux de la Convention constitutionnelle écossaise, cette dernière ayant achevé sa mission, elle décida de prendre de nouvelles mesures dans ce domaine. Le 27 juin 1996, George Robertson, le secrétaire d’État à l’Écosse au sein du Cabinet fantôme (Shadow Scottish Secretary), annonça un certain nombre de changements. Premièrement, un référendum serait organisé. Ce référendum comporterait deux questions séparées : l’une porterait sur la création d’un Parlement écossais, l’autre sur les pouvoirs fiscaux dont il disposerait. Deuxièmement, le référendum aurait lieu avant que la législation ne soit votée par le Parlement. Troisièmement, la règle de la majorité simple (et non celle des 40%) s’appliquerait lors de ce référendum.

La promesse d’organiser un référendum résultait des travaux de la commission présidée par Derry Irvine ainsi que des groupes de réflexion déjà mentionnés. L’idée d’un référendum présentait plusieurs avantages pour les Travaillistes. Tout d’abord, elle leur permettait de répondre aux attaques des Conservateurs et d’éviter toute nouvelle critique, en insistant sur le fait que toute décision relative à la mise en place d’un gouvernement dévolu en Écosse et au pays de Galles serait prise par les Britanniques eux-mêmes. Qui plus est, un référendum pré-législatif faciliterait le passage du projet de loi au Parlement, le soutien populaire ne pouvant que limiter l’opposition des parlementaires travaillistes, notamment des parlementaires anglais, – à la Chambre des Communes et à la Chambre des Lords – et éviter ainsi les longs débats de la fin des années 1970. Enfin, elle donnerait une véritable légitimité à la nouvelle législation et assurerait que l’existence des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles ne soit pas menacée par l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement conservateur (Leydier 1998 : 196). 

Cette nouvelle politique, qu’il s’agisse du principe du référendum ou d’une question séparée sur la « tartan tax », suscita de très nombreuses critiques de la part des dévolutionnistes écossais, beaucoup craignant une victoire du « non » (ou du « oui / non » qui aurait entravé l’action du Parlement) lors d’un référendum, et soupçonnant donc Tony Blair de vouloir abandonner le projet de dévolution. Les partenaires des Travaillistes ainsi que les militants et responsables du Parti travailliste écossais exprimèrent d’autant plus leur désaccord que ce changement de politique avait été opéré de façon unilatérale. En signe de protestation, Harry Ewing, un des co-présidents de la Convention et ancien député travailliste, démissionna, de même que John McAllion, porte-parole travailliste pour les affaires constitutionnelles écossaises. Pour calmer les dissensions internes, l’exécutif travailliste écossais proposa, le 31 août, qu’un deuxième référendum, portant sur les pouvoirs fiscaux, soit organisé après le vote du projet de loi, mais cette demande fut rejetée par la direction travailliste britannique. Ces tensions nuisirent gravement à la crédibilité du Parti travailliste écossais dans la mesure où il ne semblait plus avoir qu’un poids très limité dans le processus de prise de décision en matière de dévolution (Kellas 1997 : 43-44).

2. Le troisième projet de loi : la concrétisation des engagements (1997-1999)

2.1. Les élections législatives de 1997 : un manifeste pro-dévolutionniste mais prudent

Lors des élections législatives de mai 1997, les deux principaux partis britanniques firent campagne sur des programmes opposés en matière de dévolution. Le manifeste électoral des Travaillistes, pro-dévolutionniste mais prudent, affichait clairement leur volonté de mettre un terme aux politiques centralisatrices des gouvernements :

We will meet the demand for decentralisation of power to Scotland and Wales, once established in referendums. Subsidiarity is as sound a principle in Britain as it is in Europe. Our proposal is for devolution not federation. A sovereign Westminster Parliament will devolve power to Scotland and Wales. The Union will be strengthened and the threat of separatism removed. (New Labour 1997b : 33).

Plus précisément, le manifeste reprenait les différentes idées de la Convention constitutionnelle écossaise et de la Commission galloise, ainsi que celles annoncées par la direction travailliste en 1996. Ainsi, il indiquait très clairement qu’un gouvernement travailliste mettrait en place des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles si les Écossais et les Gallois le décidaient lors des référendums qui seraient organisés dans le courant de l’automne 1997. En cas de victoire, ces référendums seraient suivis du passage des projets de lois au Parlement, au cours de la première année de la législature (New Labour 1997b : 33-34).

De leur côté, les Conservateurs réaffirmaient leur opposition à l’idée de dévolution. S’ils avaient fait quelques retouches à leurs projets pour l’Écosse et le pays de Galles, ils étaient toujours hostiles à la mise en place de gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles, ayant simplement proposé d’élargir les pouvoirs de la grande commission écossaise (Scottish Grand Committee) et de la grande commission galloise (Welsh Grand Committee) de Westminster4.

Après dix-huit années passées dans l’opposition, les Travaillistes remportèrent les élections, avec 44,3% des voix et 418 sièges sur 641 en Grande-Bretagne, un véritable raz-de-marée. Ils restaient toujours le parti dominant en Écosse (45,6% des voix et 56 sièges sur 72) et au pays de Galles (54,7% des suffrages et 34 sièges sur 40). Les Conservateurs subissaient, eux, une cuisante défaite avec seulement 31,5% des suffrages et 165 sièges en Grande-Bretagne. Qui plus est, ils perdaient pour la première fois tous leurs sièges en Écosse (contre 11 sièges en 1992) et au pays de Galles (contre 6 sièges en 1992).

2.2. Livres blancs et référendums : un gouvernement s’efforçant toujours de tirer les leçons de 1979

Profitant de son triomphe électoral, le gouvernement travailliste agit avec une grande célérité. Dès juillet 1997, il publia deux livres blancs (Scotland’s Parliament et A Voice for Wales), donnant les grandes lignes de la législation projetée, et annonçant la date du 11 septembre pour le référendum écossais et celle du 18 septembre pour le référendum gallois.

Contrairement à 1979, le contexte était beaucoup plus favorable au gouvernement travailliste. Effectivement, le gouvernement Blair ne se situait pas en fin de mandat et n’était ni fragilisé, ni essoufflé puisqu’il venait d’être élu avec une très forte majorité. Le contexte politique était donc plus propice même si les campagnes référendaires furent, dans un premier temps, marquées par des scandales politiques dans la région de Glasgow, par le suicide d’un député travailliste (Gordon MacMaster, Paisley South), puis par la mort tragique de la princesse de Galles (le 31 août) qui interrompit les campagnes pendant près d’une semaine (Harvie 1998 : 245-246).

Par ailleurs, la direction travailliste britannique fit de son mieux pour ne pas répéter les erreurs de 1979. Premièrement, les livres blancs étaient plus clairs et plus ambitieux (Civardi 2002 : 110). Parmi les principales différences, nous pouvons noter que les Travaillistes proposaient maintenant à l’Écosse la création d’un Parlement (et non plus d’une Assemblée) qui disposerait de pouvoirs fiscaux, ainsi que celle d’un exécutif dirigé par un First Minister (plutôt que par un First Secretary). En ce qui concernait le mode de scrutin adopté pour l’élection des membres du Parlement / de l’Assemblée, il s’agissait désormais d’un scrutin mixte, ce qui réduisait les craintes d’une domination des travaillistes. Enfin, si les secrétaires d’État étaient conservés, leur rôle avait été profondément modifié et limité comparé à ce que prévoyait le projet de loi de 1978.

Deuxièmement, les Travaillistes avaient choisi, cette fois-ci, de ne pas détailler les pouvoirs dévolus (devolved matters) de manière explicite, comme cela avait été le cas en 1978. Les livres blancs se contentaient donc d’énumérer les domaines qui resteraient du ressort de Westminster5 (reserved matters) de façon à faire apparaître le partage des responsabilités de manière plus claire et à limiter les ambiguïtés. Notons néanmoins que les Travaillistes ne parvinrent pas à éliminer toute source de tensions, et des conflits de compétences entre le Parlement / l’Assemblée étaient toujours possibles (Civardi 2002 : 144).

Troisièmement, les référendums précédaient le vote des projets de loi aux Communes, ce qui évitait la mise en évidence de divisions inter- et intra-partites trop importantes, comme nous l’avons déjà noté.

Quatrièmement, les campagnes référendaires furent plus courtes, moins confuses, et plus efficaces que celles de 1979, le camp du « oui, étant beaucoup plus uni. D’une part, le scrutin mixte avait convaincu les Libéraux-Démocrates et les nationalistes de participer à la campagne unitaire pour le « oui ». D’autre part, les partis pro-dévolutionnistes étaient déterminés à ne pas répéter les erreurs de 1979 en faisant apparaître un trop grand nombre de divisions internes.

Ainsi, en Écosse, la campagne pour le « oui, oui » (Yes-yes campaign) réunissait au sein de l’organisation transpartisane Scotland Forward les Libéraux-Démocrates, le SNP (Scottish National Party) et tous les Travaillistes (mis à part Tam Dalyell), dont les divisions s’étaient atténuées sur la question de la dévolution depuis 1992. Elle était soutenue par la majorité de la presse, mais aussi par des personnalités représentatives de la société écossaise, du monde des affaires et de la culture. Dans le camp opposé, l’organisation pour le « non, non » Think Twice apparaissait assez faible en comparaison : non seulement cette dernière était dominée par les Conservateurs, peu actifs et quelque peu démotivés en raison de la défaite cuisante de mai 1997, mais elle disposait aussi de ressources financières limitées (Devine 1999 : 617).

Au pays de Galles, l’organisation Yes for Wales regroupait la plupart des Travaillistes gallois, menée par Ron Davies, les Libéraux-Démocrates, le Plaid Cymru ainsi que des universitaires face à Just Say No, organisation moins importante et regroupant les Conservateurs et quelques dissidents travaillistes. Même si le camp du « oui » bénéficiait du soutien de la majorité des partis et des médias, il fut quelque peu affaibli par les divisions existant au sein de la branche galloise du Parti travailliste (Pilkington 2002 : 124).

Cette fois-ci, les Écossais et les Gallois soutinrent les propositions du gouvernement lors des référendums. En Écosse, la victoire fut spectaculaire : presque 74,3% des votants soutinrent le retour du Parlement écossais, inexistant depuis 1707, et 63,5% acceptèrent de lui confier des pouvoirs fiscaux. Les Gallois se montrèrent beaucoup plus timides puisque 50,3% des votants seulement se déclarèrent favorables à une Assemblée galloise alors que 49,7% s’y opposèrent.

2.3. La mise en place de gouvernements dévolus marquée par l’intervention de la direction travailliste britannique

Comme promis par le gouvernement travailliste, les référendums furent rapidement suivis du passage des projets de lois au Parlement britannique. Le Scotland Bill et le Government of Wales Bill étaient très proches des livres blancs de juillet 1997 et reposaient plus ou moins sur les mêmes principes que celui de 1975, mis à part les différences que nous avons déjà mises en évidence. Ils connurent un passage assez facile au Parlement britannique et subirent peu de changements en raison de trois facteurs principaux : le gouvernement disposait d’une majorité écrasante à la Chambre des Communes ; la Chambre des Communes et celle des Lords étaient obligées de faire passer ces lois, les résultats des référendums ayant montré l’approbation des peuples écossais et gallois ; une convention parlementaire (Salisbury Convention) spécifiait que les pairs ne pouvaient rejeter une mesure, qui avait été proposée dans le manifeste du parti et approuvée par la population (Bogdanor 2001 : 202). Le Government of Wales Bill fut présenté au Parlement le 26 novembre 1997 et reçut l’assentiment royal le 31 juillet 1998. Le Scotland Bill fut présenté au Parlement le 18 décembre 1997 et il reçut l’assentiment royal en novembre 1998.

Les premières élections au Parlement écossais et à l’Assemblée galloise furent organisées le même jour, le 6 mai 1999, dans un contexte peu propice au gouvernement travailliste. Tout d’abord, il s’agissait d’élections intermédiaires, qui avaient lieu à mi-mandat, élections qui sont généralement peu favorables au gouvernement en place. En outre, la direction travailliste britannique avait exercé, depuis 1998, un certain nombre de pressions qui ne pouvaient qu’agacer les électeurs : non seulement elle était intervenue dans le déroulement des campagnes, mais elle avait également imposé ses préférences lors de la désignation des candidats en 1998 (Leruez 2000 : 286-287). En témoignait le cas du pays de Galles : à la suite de la démission de Ron Davies des postes de dirigeant de la branche travailliste galloise et de Secrétaire d’État au pays de Galles en 1998, la direction travailliste britannique avait fait pression pour que Alun Michael, un ami de Tony Blair, devienne son successeur, et ce contre la volonté des membres de l’Assemblée galloise et de la branche travailliste galloise (Pilkington 2002 : 133-134).

Malgré ces handicaps, les Travaillistes réalisèrent de bons scores. En Écosse, les élections virent la victoire des Travaillistes même s’ils ne réussirent pas à obtenir la majorité absolue compte tenu du scrutin mixte qui avait été adopté (ils ne recueillirent que 56 sièges sur les 65 requis). Comme ils s’y attendaient, ils formèrent donc une coalition avec les Libéraux-Démocrates. Le SNP devenait le principal parti de l’opposition avec 35 sièges, suivi par les Conservateurs qui avaient obtenu 18 sièges. Le Parlement écossais se réunit pour la première fois le 12 mai 1999. Dans les jours qui suivirent, Donald Dewar fut investi First Minister ; un exécutif composé de onze ministres et de onze ministres adjoints (deputy ministers) fut formé ; et un pacte de coalition Partnership for Scotland fut signé par les dirigeants travailliste (Donald Dewar) et libéral-démocrate (Jim Wallace), ces derniers s’engageant à gouverner de concert pendant les quatre années de la première législature.

Au pays de Galles, le Parti travailliste remporta également un très grand nombre de voix lors de ces élections (36,6% des voix et 28 sièges sur 60) mais une fois de plus, en raison du mode de scrutin, il n’obtint pas la majorité absolue à l’Assemblée, ce à quoi il ne s’attendait pas. Il fut donc contraint de former une administration minoritaire dépendant des libéraux-démocrates afin de pouvoir diriger les affaires du pays Contrairement à ce qui s’était passé en Écosse, les Travaillistes avaient refusé de former une coalition avec les Libéraux-Démocrates, étant nettement moins bien disposés à leur égard que la branche travailliste écossaise. Notons que le Plaid Cymru opéra une percée lors de ces élections puisqu’il devint le second parti politique du pays de Galles en recueillant 17 sièges. Réunie pour la première fois le 12 mai 1999, l’Assemblée galloise élut son First Secretary Alun Michael (député de Cardiff South et Penarth).

3. Conclusion

Par conséquent, il apparaît que la direction du New Labour a fortement influencé le processus de mise en place des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles depuis 1994, cherchant à éviter autant que possible les divisions inter- et intra-partites et à neutraliser l’opposition des parlementaires anglais afin de ne pas répéter les erreurs commises en 1979. À partir de 1995-1996, la direction travailliste britannique prit ainsi véritablement l’initiative en matière de dévolution, multipliant les mesures visant à garantir le succès d’un troisième projet de loi. Non seulement elle imposa l’organisation d’un référendum pré-législatif – au cours duquel la règle de la majorité simple prévaudrait – en Écosse et au pays de Galles, mais elle décida également que l’Assemblée galloise disposerait de pouvoirs peu étendus et que le référendum gallois serait organisé une semaine après le référendum écossais. L’idée d’organiser des référendums pré-législatifs allait être particulièrement déterminante puisqu’elle limita grandement les dissensions inter- et intra-partites et obligea la Chambre des Communes et celle des Lords à faire passer les lois proposées par les Travaillistes, lorsque ces dernières furent validées par les peuples écossais et gallois.

Une fois élu à la tête de la Grande-Bretagne en mai 1997, le gouvernement travailliste de Tony Blair continua à faire preuve de la même prudence et de la même attitude conciliatrice : il proposa des livres blancs plus clairs et moins ambigus que ceux de 1979, et fit en sorte que les campagnes référendaires soient plus efficaces et nettement moins confuses, en acceptant notamment un mode de scrutin mixte pour l’élection des membres du Parlement / de l’Assemblée. Ces efforts, ou concessions, contribuèrent pour beaucoup à la victoire des travaillistes lors des référendums même si le gouvernement Blair bénéficiait alors d’une très grande popularité. Malgré ces succès, la direction travailliste persista par la suite à faire sentir son influence dans le contexte des premières élections au Parlement écossais et à l’Assemblée galloise, en imposant ses préférences lors de la désignation des candidats en 1998, et en intervenant dans le déroulement des campagnes.

La mise en place des gouvernements dévolus en Écosse et au pays de Galles s’est donc clairement inscrite dans le cadre d’une stratégie politique bien définie, répondant avant tout à des calculs politiques et laissant peu de liberté aux branches travaillistes écossaise et galloise. Comme James Mitchell l’a indiqué, la politique prudente adoptée par les Travaillistes et le soutien du peuple écossais ont expliqué pour beaucoup la naissance du Parlement écossais en mai 1999 – ce même constat peut être appliqué au pays de Galles – :

One of the enduring myths of Scottish politics has been the exaggerated significance attached to the role of the Constitutional Convention in the emergence of the Scottish Parliament… Scottish devolution owed much more to the work of the Labour government elected in 1997 than to the Convention. Ministers sorted out the fine detail of actually establishing the Scottish Parliament, addressing trickier matters left un-addressed by the Convention. In addition, devolution owed a great deal to public pressures which culminated in the overwhelming support recorded in the second referendum held in September 1997. (Mitchell 2003 : 172)

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Notes

1 Depuis 1994, et plus précisément depuis l’élection de Tony Blair à la tête du parti, New Labour (au lieu de Labour Party) a été de plus en plus employé pour faire référence au Parti travailliste britannique de façon à mettre en évidence le processus de modernisation dont le parti a fait l’objet depuis 1983. Retour au texte

2 La branche galloise, qui refusait de s’impliquer dans des groupes de pression extérieurs au Parti travailliste, avait créé la Constitutional Policy Commission en 1994 pour réfléchir aux modalités de mise en place d’une Assemblée galloise. Retour au texte

3 Il s’agit d’organismes publics et semi-publics (quangos ou quasi autonomous non-governmental organizations). Depuis 1979, leur nombre s’était multiplié en Écosse. Retour au texte

4 Ces commissions étaient chargées de débattre des questions concernant l’Écosse ou le pays de Galles. Retour au texte

5 Parmi ceux-ci figuraient des sujets concernant le Royaume-Uni tout entier, tels les affaires constitutionnelles, la défense, la politique étrangère, la sûreté nationale, la protection des frontières, la protection sociale, le droit du travail, la politique macroéconomique, monétaire et fiscale ou l’énergie. Dans tous les autres domaines, les domaines dévolus (devolved matters), le Parlement pourrait voter ses propres lois. Retour au texte

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Référence électronique

Carine Berbéri, « Le New Labour et la dévolution (1994-1999) : la multiplication des garde-fous pour assurer la victoire d’un troisième projet de loi », Textes et contextes [En ligne], 1 | 2008, publié le 01 janvier 2008 et consulté le 19 avril 2024. Droits d'auteur : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/textesetcontextes/index.php?id=111

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Carine Berbéri

Université de Montpellier I, UFR de Sciences économiques, Site Richter, Avenue de la Mer, 34054 Montpellier

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