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« Geste dans geste, comme un gant »1: Mains tendues à la préhistoire chez Jean-Loup Trassard et Miquel Barceló

Chloé Morille
p. 31-46

Résumés

Cet article propose de s’intéresser à deux créateurs qui replacent la main ‒ à l’initiative de nombreux gestes depuis les débuts de l’humanité ‒ au cœur de leurs réflexions et pratiques artistiques. L’écrivain Jean-Loup Trassard se met en quête de gestes techniques hérités du Néolithique sur le point d’être définitivement oubliés tandis que le plasticien Miquel Barceló réhabilite la présence matérielle de la main dans l’art contemporain, en s’inspirant librement des tracés digitaux de l’art paléolithique. Tous deux font l’hypothèse de la permanence ou de la reviviscence de certains très vieux gestes primordiaux dont ils tentent de réactiver les traces. Dans la mesure où les gestes préhistoriques qu’ils empruntent ont de quoi questionner notre présente humanité, il s’agit de réfléchir avec eux aux implications de la réhabilitation du manuel dans la création contemporaine à l’heure où la « régression manuelle » s’accompagne de l’ultime « libération » de l’homme par la technologie numérique.

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Texte intégral

  • 1 Jean-Loup Trassard, Dormance (60).

1« La main est action : elle prend, elle crée, et parfois on dirait qu’elle pense », écrit Henri Focillon dans « Éloge de la main » (102). La main est une caractéristique anatomique spécifiquement humaine. Cet organe, qui est notre premier outil, régule nos capacités et se situe très précisément à la jonction du manuel et de l’intellectuel qu’on dissocie trop souvent. Elle a participé à nous faire humains depuis la Préhistoire. Le plasticien Miquel Barceló et l’écrivain Jean-Loup Trassard s’intéressent tous deux à cette éminente époque de la main. Le premier a fait du Paléolithique supérieur et de son remarquable art sur les parois des grottes ornées un objet de prédilection quand le second se reconnaît davantage dans le Néolithique. Dans son roman Dormance (2000), Jean-Loup Trassard se situe plus précisément au moment de l’invention de deux pratiques primordiales de la culture humaine : la domestication des plantes et celle des animaux. Nous serons clairement ici du côté du faire, lorsque les gestes font entrer le corps en relation avec la matière, que l’impulsion inventive de l’artiste obéisse, semble-t-il, à une dynamique spontanée ou que son tour de main expert provienne comme chez l’artisan d’une habitude contractée par l’exercice répété. On s’intéressera notamment à ces mouvements qu’on accomplit directement avec les mains comme palper, caresser, modeler, ou muni d’outils pour tailler, racler, polir, etc. Nous verrons avec ces deux créateurs comment un simple geste de la main a priori innocent tel que peindre au doigt, semer des graines, toucher un arbre, peut devenir bouleversant, sitôt qu’il donne à éprouver un paradoxe : ce geste, que j’expérimente hic et nunc, peut-être pour la première fois, a sûrement déjà eu lieu pour d’autres hommes. Nous analyserons ainsi des expériences du geste retrouvé, lorsque l’acte actuel se double d’une profondeur ancestrale, qu’il s’agisse d’un geste artisanal ou artistique.

Penser avec les mains chez Jean-Loup Trassard 

2L’écrivain français contemporain Jean-Loup Trassard, qui a coutume d’évoquer dans une prose sensuelle et poétique aussi bien les charmes du bocage que la fin de l’agriculture traditionnelle, déploie dans Dormance un roman où les cinq sens sont convoqués avec force et où le « toucher » notamment a une place primordiale. Le passé y devient palpable et apparaît en quelque sorte au bout des doigts. L’ouvrage est ainsi jalonné d’objets très anciens qui refont surface lors de labourages successifs, faisant rejaillir avec eux leurs histoires oubliées : un « briquet terni » (Trassard, Dormance 54), une « pointe cassée » (185), des haches en silex (112, 119). Le narrateur, très proche de l’auteur, se remémore par exemple le moment où ses voisins ont trouvé des haches de silex polies :

J’ai demandé si je pouvais voir. Je voulais aussi toucher […]. Je soupesais le matériau, passais le pouce sur son poli. Merveilleux ! (112, je souligne)

J’étais seul avec des objets qu’ils [les hommes du néolithique] ont touchés et je les touchais à mon tour, haches pesantes, lisses mais ébréchées, ayant de longtemps perdu leur manche. (260, je souligne)

3Avec ces haches, le passé devient tangible. Un chiasme sensitif particulier entre en jeu, différent de l’expérience phénoménologique du touchant-touché chez Merleau-Ponty : ici, l’auteur, en touchant des vestiges d’un autre temps, est touché par la permanence de l’humanité dont ils témoignent. La hache de pierre polie permet un transport métonymique ‒ transport émotionnel et voyage imaginaire qui fait remonter le temps. Toucher un objet d’un autre âge fait entrer en contact avec l’humanité préhistorique, dont la présence effective restera cependant impossible. Le désir de comprendre s’accompagne donc d’une certaine mélancolie, manifeste dans un fantasme constant du roman : celui de poser la main là où les lointains préhistoriques ont mis la leur :

C’est une envie de mettre le doigt sur les entailles qu’ils ont voulues, sur la trace même de leur pensée. (119)

  • 2 On peut ainsi penser à l’hommage connaisseur et à la distance respectueuse de Raymond Depardon dan (...)

4À la charnière des XXème et XXIème siècles, des penseurs et des artistes ont eu l’impression qu’une ère se clôturait2. Puisque la « civilisation rurale […] vient de basculer dans le passé », comme le dit Trassard (Bouloumié 573), il poursuit son singulier projet d’écrivain qui consiste à témoigner d’outils et de gestes techniques sur le point de disparaître ou qui finissent de sombrer dans l’oubli. Dans un entretien, l’auteur explique non sans humour qu’il est « devenu une sorte d’ethnologue amateur de la Mayenne, un peu comme les ethnologues se précipitaient sur les populations en voie de disparition et qui allaient perdre leur civilisation » (Segal et Cartier 4). Cela non pour « conserver une vie rurale qui est terminée […] mais [pour] en garder le souvenir. […] [ce qui est] un enrichissement pour l’esprit et […] une formidable matière poétique » (Bouloumié 573). L’entreprise littéraire de Trassard revient donc à témoigner depuis son propre corps de gestes et d’outils qui ont été inventés un jour, puis ont été perpétués par des générations de mains affairées et s’effacent à présent des mémoires. Trassard a la conviction que la voie empirique permet un accès à ce qu’on a depuis longtemps oublié, qu’il y aurait une sorte de mémoire du corps ouvrant une possible fenêtre sur la connaissance de l’immémorial. Puisque l’homme a été paysan du Néolithique jusqu’à il y a environ un demi-siècle, des pans de l’expérience (sensible et intellectuelle) de l’homme ou de la femme du néolithique pourraient encore être sauvés selon lui. Tenter de restituer cette remémoration corporelle, telle est l’enquête empirique romancée dans Dormance.

5Pour ce faire, l’auteur adopte une démarche par analogie. Entre le narrateur et son personnage, il y a « un lieu. Le même, qui fait lien » (Dormance 60). C’est la fréquentation quotidienne d’un même endroit qui permet une reconstitution sensible : « Depuis ma naissance j’entends ce qu’ils entendent, le vent à travers les mêmes arbres, le ruisseau sur son lit creusé » (254). Trassard autobiographe se rappelle donc son expérience passée pour composer l’histoire d’un homme préhistorique :

Les tremblantes images que je formais de lui se sont mises à coïncider avec la sensation de mon propre corps quand autrefois j’arpentais, vivement et presque chaque jour, le même territoire. (142)

Jeune homme qui marchait dans la nuit […] combien j’étais proche alors de ses gestes – et parfois encore, geste dans geste, comme un gant. (60, je souligne)

6La nature offre parfois l’impression d’une suspension du temps : « Je me penche sur le ruisseau : douce conversation liquide, frottement des ailes de libellules, rien n’a changé » (242). Devenue au fil des siècles paysage puis environnement, au gré des gestes humains de conversion du regard et d’aménagement du territoire, la nature a pourtant changé, Trassard le sait bien, qui est né à l’ère de l’anthropocène et questionne souvent dans son œuvre la notion de terroir. Elle offre néanmoins encore un cadre d’expérimentation commune : « Sur les écorces ma main rejoint la sienne, ma main est la sienne, par le biais d’une sensation forcément identique au contact du râpeux, des entailles, ou du lisse tendu, de l’uni, qui distinguent les espèces » (30, je souligne). Dans la reviviscence corporelle de ce geste humain, toujours déjà vieux et toujours à recommencer, existe la certitude d’une communauté sensible avec l’Homme de jadis. Le narrateur relate « [d]es scènes qui apparaissent sans qu[’il] ai[t] voulu les inventer, qui s’impriment derrière [s]es yeux, sous les cheveux, qu’[il] carde avec la main gauche, peut-être parce que – oser[a] [-t-il] le formuler ? – elles ont été vécues telles autrefois » (135). L’imagination s’entremêlant au souvenir personnel offre une singulière caution d’authenticité et donne lieu à des pans romanesques qui s’élaborent comme on travaille une fibre. L’art d’écrire lui-même rejoint ici le geste technique du cardage, qui démêle le lin ou la laine pour rendre le fil plus net et souple au tissage. Comme le précise l’auteur : « Ce n’est que sur les questions techniques, […], dans quelques gestes même dont j’ai hérité, que je puis sinon les rejoindre, du moins fréquenter leur esprit » (128, je souligne). Cette approche par la similitude, sachant qu’il n’y aura pas de coïncidence parfaite, est prudente. En effet, si l’expérience consistant à toucher le tronc d’un arbre semble presque inchangée depuis la Préhistoire, l’accès à des vestiges révèle une expérience transformée. Devant les haches, l’auteur rêve à l’humanité contenue dans l’objet bien plus qu’il ne cherche à revivre fidèlement le geste néolithique. L’intérêt de l’évocation tient justement dans le battement entre ce qui perdure et ce qui a changé. Dans le poli de la hache émoussée, le narrateur sent le poids des siècles bien plus qu’il ne s’interroge sur l’équilibre de l’outil comme put le faire le premier artisan, ni sur la qualité du tranchant, pertinente pour un homme à l'ouvrage, même si l’auteur a soin de réinscrire chacun des épisodes du roman dans un corps vécu.

7En outre, même l’impulsion de l’écriture est ici désignée comme un processus manuel : « C’est sous forme d’images que certains instants se recomposent dans ma pensée, je devrais plutôt dire entre mes mains » (222, je souligne). Dormance ferait de fait un bon manuel de survie pour un improbable Robinson Crusoé du XXIème siècle, puisqu’on y apprend très concrètement à tailler un bol dans une loupe de bois (145), à poser un collet, à tresser, vanner, construire une maison en torchis ou tanner une peau (165, 210). Et lorsque l’auteur n’a pas appris ces techniques par passation orale, il adopte une démarche expérimentale. Il s’essaie de la sorte à la céramique et à la « cuisson semi-enterrée » (268). Même si l’expérience se solde par un échec, car le savoir-faire manuel ne s’improvise pas, Trassard a recours dans ces épisodes à la méthode scientifique de l’archéologie expérimentale qui a pour but de comprendre le mode de pensée de peuples disparus en reconstituant ce qu’André Leroi-Gourhan nommait les « chaînes opératoires » (1964 164), c’est-à-dire la suite de gestes techniques efficaces, propres à une société, visant à façonner la matière selon un projet préconçu, et dont le savoir-faire se transmet au fil des générations. De même, les livres de Trassard gardent la mémoire des gestes qui ont longtemps régi le monde rural. « Mains dans la terre, la suie, la cendre, la paille », l’auteur a l’impression que « leur peau et la [s]ienne presque se touchent » (Dormance 127-8). Sa tentative de fabriquer des pots se clôt ainsi :

J’ai regardé sortir de rives fluviales ou lacustres des écuelles à deux petites queues, des tasses avec une seule, et je sais que sur certains vases profonds les empreintes de doigts féminins sont visibles. Le découvreur a dû poser l’index sur cette marque tiède […]. Je voudrais bien, oui, sortir de terre l’un de ces premiers pots […]. Dans le ventre, une fois secouée la terre qui l’emplit, j’essaierais de faire entrer ma main, deux doigts, de toucher là ou nul n’a touché après eux […]. Je reste avec l’argile de Souaou [son personnage], la même exactement, sur le pourtour des ongles. (270, je souligne)

8Une nouvelle fois, la sensation physique de modeler la terre, éveille ce désir éperdu d’un contact, d’un toucher, comme si Trassard cherchait à donner la main à cette vieille humanité sœur. Mais les modalisations du discours (emploi du verbe « devoir », usage du conditionnel) révèlent le fantasme de retrouvailles dont a conscience l’auteur. Une série de médiations s’interpose entre le narrateur et la personne hypothétiquement féminine qui a modelé le pot. Trassard imagine l’objet passer de main en main, de celle du créateur à celle du découvreur à la sienne en fin de chaîne. Mais si la densité d’expérience humaine ici ramassée dans l’empreinte digitale appelle le narrateur à une rêverie de communication, tout a changé entre l’époque du Néolithique où l’objet fut façonné et celle où il est retrouvé. L’intention s’est perdue et la matérialité même du vestige resté longtemps sous terre est changée. Le geste initial ne peut lui non plus être retrouvé, ni les époques réunies, d’où la clausule tristement solitaire du passage.

9L’une des subtilités de Dormance, par rapport à d’autres romans préhistoriques, repose sur le fait que l’on s’y tient toujours à la lisière de la découverte, sur le seuil, au moment où le héros s’essaie à la domestication, où l’héroïne sème pour la première fois et où tous deux posent ainsi les premiers jalons de la révolution néolithique. Même au tout premier moment, l’invention ne surgit pas de nulle part, les personnages du roman avaient déjà fait en amont de fines remarques sur le monde animal et végétal. On retrouve pour les deux épisodes une initiative de la part des personnages, une impulsion créatrice personnelle, mais aussi la convocation de précédents d’une mémoire culturelle et contextuelle sans laquelle ne peut naître l’innovation. Trassard ne commet pas l’erreur fréquente chez les romanciers préhistoriques de faire réinventer tout un monde aux personnages en quelques pages. Il ménage au contraire la part de l’oubli. Rien n’apparaît ici du jour au lendemain. Nulle révolution brutale dans le roman. Plutôt un mouvement patient. L’écrivain réinstaure la découverte dans sa temporalité : 

Gaur impose son odeur aux aurochs : pas de nom pour une telle démarche qui est encore curiosité, désir de connaître la vie des bêtes, observation pour entrer un peu […] dans leur façon de sentir et d’agir. (245)

10Le lecteur perçoit dans cette « curiosité », les prémisses d’une domestication qui ne sera jamais pleinement établie dans le roman. Nous en sommes au premier jet : donner du foin qui porte l’odeur de l’homme à des animaux sauvages. Mais l’auteur insiste : « Ce que je décris là, Gaur le fait plusieurs fois et avec plusieurs veaux » (230). L’accoutumance vient peu à peu. Le geste fondateur se répète plusieurs fois. Précisons comme l’explique Michel Guérin, qu’au versant physique du geste s’ajoute un versant métaphysique (Guérin 1995 76). Ces gestes premiers de la culture le manifestent clairement : « L’idée de semer des graines ou de nourrir les aurochs […] introduit un futur dans le présent » (Dormance 240), dans l’exacte lignée du paléoanthropologue André Leroi-Gourhan dont Trassard a été l’élève au Musée de l’Homme. Ce double geste néolithique acculture l’espace et le temps puisque « Le fait humain par excellence est peut-être moins la création de l’outil que la domestication du temps et de l’espace, c’est-à-dire la création d’un temps et d’un espace humain » (Leroi-Gourhan 1965 139). Muh, l’héroïne de Dormance, sait d’ailleurs que « depuis le germe qui écarte la terre jusqu’à la graine close sur son secret […], les plantes, paupières fermées la nuit, se déploient non dans l’air mais dans le temps » (212). On retrouve de même cette complémentarité de la main et de l’esprit et cette alliance du physique et du métaphysique chez le peintre contemporain Miquel Barceló.

Miquel Barceló ou la trace heureuse de la main retrouvée

11Les hommes du paléolithique supérieur disposaient déjà d’une vaste panoplie de gestes artistiques. Ainsi qu’en attestent les divers sites archéologiques, certains gestes, comme l’estompe ou l’ombrage au doigt, le tampon, le crachis dans l’art pariétal, la gravure, la sculpture, la parure ou l’art mobilier, étaient partagés par différents groupes, à travers l’espace mais aussi le temps. Norbert Aujoulat répertorie tout particulièrement parmi ces « ‘pratiques du corps’ » propres aux sociétés paléolithiques » les techniques de réserve, d’exploitation du support (paroi participante) et de superposition (Aujoulat 261). Outre l’existence de ces gestes communs de convention, plus ou moins étendus dans l’espace et le temps, on peut parfois noter le coup de main personnel, plus ou moins habile, de tel ou tel « artiste ». Nous ne considèrerons ici qu’un seul de ces gestes, pas le plus connu, mais l’un des plus élémentaires : peindre au doigt. Contrairement à ce qu’on pourrait penser de prime abord, la peinture est rarement appliquée sur les mains pour en enduire ensuite les parois : les mains positives existent certes, mais en nombre moins important que leurs homologues négatives. De même, on ne connaît guère à ce jour qu’un exemple où les doigts enduits de peinture ont directement effectué des tracés colorés : il s’agit de la grotte de Baume-Latrone (Gard) qui révèle des dessins exécutés d’un geste simultané avec plusieurs doigts préalablement chargés de colorants. Cette technique « polydigitale » reste exceptionnelle. Le geste très spontané et peu sophistiqué le plus courant consiste au contraire à laisser en surface des traces de doigts sur un support malléable. Ces sillons que les préhistoriens qualifient aujourd’hui de « tracés digitaux » ont d’abord été surnommés en raison de leur forme « macaronis ». Les gravures rudimentaires exécutées avec cette technique au plafond de la grotte du Pech-Merle (Lot) sont célèbres. On en retrouve ailleurs. Le « Cheval gravé » au doigt de la grotte Chauvet est un exemple abouti de ces « tracés digitaux » (Figure 1).

Figure 1 : « Cheval gravé ». Salle Hillaire, Grotte Chauvet (Ardèche, France).

Figure 1 : « Cheval gravé ». Salle Hillaire, Grotte Chauvet (Ardèche, France).

Cliché J.-M. Geneste. Centre National de Préhistoire – Ministère de la Culture et de la Communication.

12Lors de son exécution, ce cheval a été figuré en traçant simplement son effigie, au doigt sur la paroi de la grotte dans l’argile meuble. La fine couche argileuse s’est recouverte de calcite au fil des millénaires. Ce procédé graphique ôte donc initialement de la manière au lieu d’en ajouter. Avec un seul doigt, « l’artiste » a tracé à vive allure des contours aisément reconnaissables sur la surface glissante. Une ligne forme sur le flanc de l’animal des méandres qui l’animent et qui ont été réalisés cette fois avec deux ou trois doigts rapprochés. Enfin, sous le ventre de l’animal, des séries de traits parallèles ont pu être réalisés avec plusieurs doigts écartés en un seul et même geste ou bien à l’aide d’un seul mouvement du doigt répété.

13Ce type de gravure, spontané dans sa réalisation et efficace du point de vue de la représentation a beaucoup marqué le peintre Miquel Barceló. L’artiste internationalement renommé, également sculpteur, céramiste, graveur, adepte des techniques hybrides et des gigantesques travaux architecturaux (cathédrale de Palma de Majorque ; coupole de la salle XX du Palais des Nations Unies de Genève), entretient un rapport étroit à la préhistoire. Il a notamment été conseiller artistique sur le chantier de la Caverne du Pont d’Arc, chargé de superviser la réplique des peintures pariétales de la Grotte Chauvet. Lors de sa visite de la grotte originale, une image l’a particulièrement marqué : il s’agit d’un dessin gravé au doigt dans l’argile ocre et meuble, qui laisse transparaître l’image d’un hibou ressortant en blanc sur un pendant rocheux de la paroi (Figure 2). Barceló a témoigné de son admiration devant l’extrême rapidité d’exécution et la sûreté du geste maîtrisé qui ont présidé à l’élaboration de cette image qui, en quelques glissés experts du doigt, suggère un animal complet, avec ses deux ailes repliées, son bec et ses aigrettes bien visibles.

Figure 2 : « Hibou ». Salle Hillaire, Grotte Chauvet (Ardèche, France).

Figure 2 : « Hibou ». Salle Hillaire, Grotte Chauvet (Ardèche, France).

Cliché : N. Aujoulat. Centre National de Préhistoire – Ministère de la Culture et de la Communication.

14De cette observation de la gravure pariétale, l’artiste contemporain a tiré un procédé pour la performance Paso doble donnée au 60ème Festival d’Avignon en 2006. Dans cette performance sans parole de quarante minutes pour deux performers (depuis réitérée), Barceló se confrontait avec son comparse Josef Nadj à une paroi composée de deux couches d’argiles fraîches, une épaisse couche rouge, recouverte d’une pellicule blanche. En traçant au doigt sur la surface blanche, ils laissaient apparaître des dessins rouges, selon une juxtaposition inverse de la technique paléolithique. Barceló explique ainsi que son mur d’argile garde non seulement la trace de chaque geste mais encore l’amplifie :

Chaque geste laisse une marque énorme sur l’argile. L’argile, c’est un peu comme un révélateur et un amplificateur à la fois. Surtout sur ces parois très épaisses : si tu appuies avec le doigt, derrière, tu fais une bosse comme une pomme, mais si tu donnes un coup de poing, derrière tu fais une bosse grosse comme une pastèque, c’est donc un amplificateur. En même temps, si par devant tu fais une caresse, tu laisses une trace, si tu griffes, tu laisses une trace aussi. C’est comme une peau extrêmement sensible qui garde la mémoire de tout. (Péju et al. 173-74)

  • 3 Le titre de l’œuvre : Le Grand Verre de Terre. Vidre de Meravelles est un jeu de mots qui renvoie (...)

15Pour l’exposition Sol y Sombra (2016), Barceló a réalisé à la BnF Le Grand Verre de Terre. Vidre de Meravelles3, une fresque éphémère de dessins tracés au doigt sur une fine couche d’argile fraîche appliquée sur les cent quatre-vingt-dix mètres de verre de la galerie Julien Cain, selon une technique qu’il appelle « argile sgraffiée sur verre ». Un formidable bestiaire, qui doit autant aux peintures pariétales qu’aux planches naturalistes gravées de l’Encyclopédie, s’y déploie.

  • 4 Barceló le savait-il ou pensait-il créer un néologisme ? Toujours est-il qu’on trouve dans le dict (...)

16Héritier de l’action painting et plasticien matiériste, Barceló recherche avant tout l’expressivité du trait. Avec Le Grand Verre de Terre, il invente un geste artistique qu’il appelle sgraffier4, tout en réinventant la sûreté du geste extrêmement rapide qu’il a repéré dans la gravure du hibou de Chauvet, geste semblable dans son impulsion, dit-il, au dessin fait au doigt sur une vitre embuée :

J’ai toujours aimé enlever, gratter. Avec la verrière, il suffit de gratter la couche supérieure de l’argile. Ce qui me plaît là-dedans, c’est que c’est plus rapide qu’un crayon. C’est comme quand tu dessines avec les doigts sur la buée, c’est super rapide, comme un laser. J’aime bien cette vitesse. Paso doble c’est un peu pareil. C’est une chose qui est plus rapide que le dessin. […] On a toujours cette idée de vouloir dessiner avec quelque chose qui est encore plus rapide, n’est-ce pas ? (Bernadac et al. 138)

17Barceló recourt dans cette œuvre à des gestes variés qui consistent tous à retrancher la glaise opaque de façon négative pour laisser transparaître la lumière. Ces gestes nombreux, tous rapides, vont du plus figuratif au plus abstrait. On reconnaît dans Le Grand Verre de Terre des coups de pinceau ou de spatule, des applications élémentaires de mains (à la fois négatives et positives donc), des marques punctiformes du bout des doigts, des griffures d’ongles ou encore des lignes continues et embrouillées, parentes des tracés digitaux pariétaux aussi bien que des peintures de Cy Twombly. Pourquoi cet artiste contemporain réemploie-t-il ainsi la main ? Sa réponse est claire : il existe une érotique du geste. Miquel Barceló témoigne de la sorte du plaisir très physique qui préside à la création artistique. Le contact avec l’argile, douce comme une peau mais qui peut aussi se craqueler comme dans la gigantesque terracotta qu’il a réalisée pour la Cathédrale de Palma de Majorque, est une expérience sensuelle, que pouvaient déjà éprouver les hommes et femmes du paléolithique :

C’est une envie assez physique de gratter quand la peinture est fraîche, et ça vient de la gravure. Et l’argile aussi suscite ce désir. Quand l’argile est fraîche, tu peux gratter avec les doigts ; quand l’argile est sèche, tu grattes avec n’importe quoi, tu grattes sur la surface. C’est très plaisant. Je le fais toujours sur les tableaux, sgraffier… […] C’est la pulsion initiale, comme graver sur un mur ou sur le tronc d’un arbre, ou comme scarifier les corps. […] Cette analogie argile/chair est évidente. […] [C’]est un plaisir physique. Graver, c’est une espèce de pulsion, la même qu’à l’origine de la peinture, une pulsion très érotique. (Bernadac 23-25)

18Le plaisir de la dépense corporelle, que l’enfant connaît aussi bien que l’artiste, nous renseigne sur une part essentielle de l’homme. Barceló déclare encore :

Aujourd’hui, on vit dans cette époque où le plaisir est tabou […], le geste humain est nié, considéré comme une faiblesse, et où le plaisir est lui aussi écarté. J’ai le sentiment que mon travail, c’est tout le contraire. Le plaisir et même la souffrance sont des principes fondamentaux de mon travail […]. J’aime le plaisir et le geste parce que je crois que ce sont des notions fondamentales maintenant. (Bernadac 24)

19Gratouiller, malaxer la pâte malléable, triturer la matière, tous ces gestes laissent libre cours à la part du jeu humain que la psychanalyse connaît bien. Évidemment Miquel Barceló pense aussi avec ses mains et Jean-Loup Trassard éprouve à son tour un plaisir évident. Dans la pratique artistique comme dans la pratique artisanale, il est possible de ressentir un plaisir de l’exercice manuel lorsque les facultés de l’homme sont mobilisées dans le jeu conjoint de la main et de l’esprit, à l’exemple de la gravure qui incarne presque pour Barceló « un encéphalogramme, un registre du geste » (Bernadac 25).

Rematérialiser

20Le plasticien et l’écrivain témoignent tous deux d’une émotion de la rencontre : « D’autres ont fait ce geste ! » Telle est leur simple et bouleversante constatation. Le geste banal, intimement vécu, qu’il soit irréfléchi ou devenu transparent à force de répétition, prend une valeur universelle. L’artiste ou l’écrivain ont soudain l’impression de n’être pas seuls à habiter leurs gestes. En effet, le geste humain porte plus loin que l’individu qui le porte. Et il existe une émotion dans cette extension. Le geste, qu’on croyait commencement est vécu comme prolongement. Michel Guérin a bien montré cette « ambiguïté inchoative-fréquentative du geste, ancien et neuf […], composé de mémoire et de projet […] qui traduit moins qu’il n’amorce, interprète moins qu’il ne prolonge » (Guérin 1995 16, 74). Ce pouvoir de reviviscence, Trassard lui donne un nom métaphorique, emprunté au monde agricole, qui lui sert aussi à baptiser son roman, Dormance : « La dormance d’une graine [nous informe la quatrième de couverture] est le pouvoir qu’elle tient, sous l’apparence du sommeil, de germer si les conditions deviennent favorables à telle transformation ». De même chez Trassard :

Dans la terre leurs outils se déplacent lentement, un jour ils paraissent en surface, relevés par le fer qui tinte, dévoilés par une pluie qui lave. L’usure de ma vie, le labour croisé de ma mémoire, tout pareil laissent lentement remonter les images, et celles-ci attestent des faits. (Dormance 261)

21La préhistoire était de fait en sommeil et on ne l’a retrouvée de façon intempestive qu’au XIXème siècle, après des millénaires de dormance. Cette métaphore de la dormance court tout au long du roman. Il existe de même une dormance du geste humain qui peut être réveillé. Toucher l’écorce rugueuse d’un arbre, hier, aujourd’hui ou il y a trente mille ans, doit être un geste partagé puisque, en tant que membres de l’espèce sapiens, nous sommes équipés du même appareil sensori-moteur que nos ancêtres d’il y a plusieurs milliers d’années. Il y a enfin une dormance de l’outil, dormance fonctionnelle si personne ne sait le manier que Trassard explore par exemple dans Inventaire des outils à main dans une ferme (1981). Mais l’on pourrait parler enfin d’une dormance artistique de l’outil que le « détournement » ressuscite. Barceló considère de la sorte que « les peintres ont hérité de tous les outils que plus personne n’utilise » :

Le XIXème siècle était le siècle manuel par excellence, où tout se faisait à la main, et puis à la fin du XXème siècle, on est passé à cette époque digitale avec une espèce de mépris pour les choses faites à la main. (Bernadac 123)

22Manié conformément à l’usage qu’on lui destinait, l’outil assure la permanence du geste artisanal. Détourné, il suscite de nouveaux gestes artistiques inédits. Dans les deux cas, l’homme qui façonne la matière se façonne lui-même, perpétuant son actualisation d’Homo faber.

23L’artiste et l’écrivain revalorisent chacun à leur manière cette constituante d’Homo faber en tout Homo sapiens. Dans Le geste et la parole, André Leroi-Gourhan, soucieux de la matérialité de l’homme, a retracé l’évolution comme une série de libérations successives. La station debout, assurant la bipédie de l’homme, a libéré sa main pendant la marche, main désormais disponible pour les gestes techniques, ce qui a corrélativement libéré la bouche pour la parole. De même, la technique s’est extériorisée de la main vers l’outil, puis de l’outil vers la machine tandis que la mémoire humaine s’extériorisait, par exemple dans le livre. La révolution numérique marque aujourd’hui l’étape la plus récente de cette externalisation de la mémoire humaine. Si bien qu’en 1965 déjà, Leroi-Gourhan diagnostique que « l’évolution a attaqué un nouveau palier, celui de l’extériorisation du cerveau » (1965 58). Il note alors avec pertinence :

« Ne rien savoir faire de ses dix doigts » n’est pas très inquiétant à l’échelle de l’espèce car il s’écoulera bien des millénaires avant que régresse un si vieux dispositif neuro-moteur, mais sur le plan individuel, il en est tout autrement ; ne pas avoir à penser avec ses dix doigts équivaut à manquer d’une partie de sa pensée normalement, phylogénétiquement humaine. Il existe donc, à l’échelle des individus sinon à celle de l’espèce, dès à présent, un problème de régression de la main. (62, je souligne)

24Penseur de la technique, Leroi-Gourhan est très net : cette « régression manuelle » est bien une nouvelle « libération » mais elle « rend nécessaire une prise de conscience de ce qu’est réellement l’Homo sapiens, né au temps des steppes pour la chasse au cheval sauvage et progressivement adapté à la locomotion assise en atmosphère de pétrole brûlé » (258). Se pose donc la question du devenir de l’espèce. Aux yeux de Leroi-Gourhan, l’automatisation de nos programmes est « d’importance comparable à l’apparition du chopper [premier outil en pierre] ou à celle de l’agriculture » (53). Or, poursuit-il, « l’humanité change un peu d’espèce chaque fois qu’elle change à la fois d’outils et d’institutions » (50), ce qui signifie qu’en poursuivant dans cette voie, il faut abandonner le qualificatif sapiens, « changer d’étiquette spécifique et trouver un autre mot latin à accoler au générique ‘homo’ » (267). Mais, écrit-il encore en 1965, « On peut enfin imaginer l’homme d’un avenir proche déterminé par une prise de conscience, dans la volonté de demeurer ‘sapiens’. […] à moins de considérer que la carrière de l’homme est terminée, quelque chose de [cet ordre] sera inévitablement tentée dans le siècle à venir parce que l’espèce est encore trop liée à ses fondements pour ne pas chercher spontanément l’équilibre qui l’a portée à devenir humaine » (268). La réhabilitation du geste manuel chez certains créateurs contemporains nous paraît aller dans ce sens. À l’heure de l’ultime « libération » de l’homme par la technologie numérique, la rematérialisation à laquelle se livrent Miquel Barceló et Jean-Loup Trassard tient à leur conviction que l’Homo sapiens est consubstantiellement Homo faber. Comme l’écrivait Henri Bergson :

Si nous pouvions nous dépouiller de tout orgueil, si, pour définir notre espèce, nous nous en tenions strictement à ce que l’histoire et la préhistoire nous présentent comme la caractéristique constante de l’homme et de l’intelligence, nous ne dirions peut-être pas Homo sapiens, mais Homo faber. En définitive, l’intelligence, envisagée dans ce qui en paraît être la démarche originelle, est la faculté de fabriquer des objets artificiels, en particulier des outils à faire des outils et d’en varier indéfiniment la fabrication. (Bergson 138-40)

25Conscient de la « dimension performative de nos comportements […], [que] tout geste que je fais contribue à me faire en retour […], [que] [t]ous les mouvements que j’accomplis contribuent à me façonner (fingere : tout à la fois « composer » et « feindre »), que je le sache, le veuille, le montre ou non », chacun résiste dans sa pratique artistique à ce qu’Yves Citton nomme « la machinisation des gestes » (Citton 35, 58). Alors que le critique s’inquiète de « ce que nos gestes actuels semblent avoir perdu en substance ce qu’ils peuvent avoir gagné en puissance » (58), voire que « l’informatisation risque d’atrophier nos gestes mentaux » (69), ces créateurs valorisent la puissance expressive de gestes incarnés qu’aucun programme n’a « écrit par avance » (265) pour nous, et qui pourtant nous font retrouver de vieux gestes d’hommes qui donnent à sentir et penser la continuité humaine dans la banalité de phénomènes quotidiens de préhension et de percussion.

Conclusion

26Barceló comme Trassard sont émus par la permanence de certains gestes d’hommes. Il faut néanmoins souligner que les gestes les plus simples du contact avec la matière donnent à (re)vivre des sensations passées avec plus de certitudes que ne peuvent le faire des gestes techniques qui se sont subtilement modifiés au fil des générations. Barceló en prend son parti, et réinvente de nouveaux processus artistiques à partir de son observation de l’art pariétal. Le projet trassardien quant à lui, se sait glisser vers un fantasme de retrouvailles qui ne peut être qu’imparfait. Il est alors moins question de se mettre dans la peau de l’homme préhistorique pour communier dans la réalisation technique d’un geste retrouvé, que de mener l’enquête et la rêverie sur notre humanité prolongée, en dépit de ce qui s’est perdu dans la nuit des temps.

27Assurément, nous n’avons plus les mêmes pratiques manuelles que les hommes de la Préhistoire. Nous aurions pourtant tort de dire que nous ne savons plus rien faire de nos dix doigts. Nous avons appris de nouveaux gestes : taper, parfois à toute allure sur un clavier d’ordinateur – après l’avoir fait pour certains sur une machine à écrire –, cliquer (droit et gauche) sur une souris d’ordinateur, faire glisser le doigt sur l’écran tactile d’un smartphone ou d’une tablette ou encore pincer / écarter la surface d’un écran pour zoomer ou dézoomer.

28Pourquoi la question du geste nous préoccupe-t-elle aujourd’hui ? Parce que nous sommes nous-mêmes sur un seuil technologique majeur, à un moment crucial de l’évolution humaine. Si les neurosciences évaluent déjà les changements induits par l’habitude de ces gestes sur notre plasticité cérébrale, on ignore ce que la révolution numérique fait à notre humanité. Ainsi, la trace de certains très vieux gestes reste pour nous émouvante, comme ces étranges signes symboliques que les préhistoriens appellent « mains négatives » et qui ornent les parois des grottes du monde entier. Ces mains pariétales soufflées, aux doigts écartés, portent une intention dont le sens s’est perdu. Elles ont pour nous l’allure d’un curieux geste de salut. Peut-être devine-t-on encore dans ces mains ouvertes quelque chose de notre humanité en creux : un plaisir primordial pris par ceux qui les ont réalisées et qu’on retrouve parfois en posant la main sur un tronc d’arbre ou en laissant librement courir notre doigt sur le capot poussiéreux d’une voiture.

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Bibliographie

Ouvrages cités

AUJOULAT, Norbert. Lascaux : Le geste, l’espace et le temps. Paris : Seuil (« Arts rupestres »), 2004.

BERGSON, Henri. L’Évolution créatrice. 1907. Paris : PUF (« Quadrige »), 1996.

BERNADAC, Marie-Laure, MANGUEL, Alberto, PHILIPPOT, Émilia et Miquel BARCELÓ. Sol y sombra : Miquel Barceló. [Exposition, Paris, Bibliothèque nationale de France, site François Mitterand, galerie 1, 22 mars-28 août 2016 ; Paris, Musée national Picasso, 22 mars-31 juillet 2016]. Arles : Actes Sud ; Paris, Bibliothèque nationale de France / Musée national Picasso, 2016.

BOULOUMIÉ, Arlette (dir.). L’Écriture du bocage : Sur les chemins de Jean-Loup Trassard. Angers : Presses de l’Université d’Angers, 2000.

CITTON, Yves. Gestes d’humanité. Anthropologie sauvage de nos expériences esthétiques. Paris : Armand Colin (« Le temps des idées »), 2012.

FOCILLON, Henri. « Éloge de la main ». Vie des formes. 1943. Paris : PUF (« Quadrige »), 2013.

GUÉRIN, Michel. Philosophie du geste. Arles : Actes Sud (« Le Génie du philosophe »), 1995.

GUÉRIN, Michel (dir.). Le Geste entre émergence et apparence. Éthologie, éthique, esthétique. Marseille : Presses Universitaires de Provence (« Arts »), 2014.

LEROI-GOURHAN, André. Le Geste et la parole. T. 1, Technique et langage. Paris : Albin Michel (« Sciences d’aujourd’hui »), 1964.

LEROI-GOURHAN, André. Le Geste et la parole. T. 2, La Mémoire et les rythmes. Paris : Albin Michel (« Sciences d’aujourd’hui »), 1965.

PÉJU, Pierre, MÉZIL, Éric, TORRES, Agustí et Miquel BARCELÓ. Portrait de Miquel Barceló en artiste pariétal. Paris : Gallimard et Collection Lambert en Avignon, 2008.

SEGAL, Anne et Gérard CARTIER. « Entretien avec Jean-Loup Trassard ». Secousse 3 (mars 2011). Éditions Obsidiane. URL : http://www.revue-secousse.fr/Secousse-03/Sks03-Sommaire.html (page consultée le 5 mars 2018).

TRASSARD, Jean-Loup. Dormance. Paris : Gallimard (« Blanche »), 2000.

TRASSARD, Jean-Loup. Inventaire des outils à main dans une ferme. Paris : Le temps qu’il fait, 1981.

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Notes

1 Jean-Loup Trassard, Dormance (60).

2 On peut ainsi penser à l’hommage connaisseur et à la distance respectueuse de Raymond Depardon dans la série photographique La Ferme du Garet (1984) ou à son triptyque de films documentaires Profils paysans : L’Approche (2001), Le Quotidien (2005), La Vie moderne (2008). En Grande-Bretagne, John Berger, avec sa trilogie Into Their Labours (1991): Pig Earth (1979), Once in Europa (1987), Lilac and Flag (1990) fait le même constat.

3 Le titre de l’œuvre : Le Grand Verre de Terre. Vidre de Meravelles est un jeu de mots qui renvoie avec humour autant au Grand Verre de Duchamp qu’au Llibre de Meravelles de Ramon Llull ou au travail du lombric, également nommé « ver de terre ».

4 Barceló le savait-il ou pensait-il créer un néologisme ? Toujours est-il qu’on trouve dans le dictionnaire Littré une acception du verbe sgraffier, défini comme un emprunt à l’italien sgraffiare (« égratigner ») pour un emploi de métier, qualifiant un geste artisanal d’orfèvrerie.

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : « Cheval gravé ». Salle Hillaire, Grotte Chauvet (Ardèche, France).
Crédits Cliché J.-M. Geneste. Centre National de Préhistoire – Ministère de la Culture et de la Communication.
URL http://journals.openedition.org/interfaces/docannexe/image/484/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 206k
Titre Figure 2 : « Hibou ». Salle Hillaire, Grotte Chauvet (Ardèche, France).
Crédits Cliché : N. Aujoulat. Centre National de Préhistoire – Ministère de la Culture et de la Communication.
URL http://journals.openedition.org/interfaces/docannexe/image/484/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 211k
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Pour citer cet article

Référence papier

Chloé Morille, « « Geste dans geste, comme un gant »: Mains tendues à la préhistoire chez Jean-Loup Trassard et Miquel Barceló »Interfaces, 39 | 2018, 31-46.

Référence électronique

Chloé Morille, « « Geste dans geste, comme un gant »: Mains tendues à la préhistoire chez Jean-Loup Trassard et Miquel Barceló »Interfaces [En ligne], 39 | 2018, mis en ligne le 01 juillet 2018, consulté le 28 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/interfaces/484 ; DOI : https://doi.org/10.4000/interfaces.484

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Auteur

Chloé Morille

Université Bordeaux Montaigne – TELEM
Chloé Morille est ancienne élève de l’ENS de Lyon et agrégée de Lettres modernes. Elle consacre ses recherches de littérature comparée aux interactions entre littérature et arts. Parallèlement à des travaux sur les rapports entre littérature et photographie, elle mène actuellement une thèse à l’université Bordeaux Montaigne sur les résonances de la préhistoire dans la littérature et les arts-plastiques de l’entre-deux-guerres à nos jours.

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Droits d’auteur

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