Yves Fremion, Histoire de la révolution écologiste, Paris, Hoëbeke, 2007, 400 p.

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Écologie politique, Écologie

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Yves Frémion, un des chefs de file de la vague militante de la science-fiction française durant les années 70, est aussi un écologiste convaincu, membre des Verts depuis qu'il a franchi le pas en 1987, sous l'impulsion de Bernard Blanc, autre figure majeure de cette période du genre littéraire. Député européen dans la première moitié des années 90, et conseiller régional depuis 2004, il livre avec cet ouvrage une étude à la fois exhaustive et personnelle sur l'écologie politique en France et la révolution lente qu'elle a impulsé, avec quelques éclairages internationaux. Sa définition de l'écologie politique a le mérite d'être synthétique : « ce qui articule la défense de la nature et de l'environnement, la solidarité sociale, le combat démocratique pour une citoyenneté pleine et entière, et enfin l'équité entre pays du Nord et du Sud » (p.13). Pourtant, il tient à un positionnement de cette écologie politique au-delà de la gauche et de la droite, ce qui l'amène à être très critique (jusqu'à l'excès polémique, parfois) vis-à-vis de l'extrême gauche (dont il exclut un peu facilement les libertaires, une des essences de l'écologie, en condamnant en outre toute violence révolutionnaire) et du « vieux » mouvement ouvrier, refusant par exemple d'accuser le capitalisme dans les responsabilités du désastre écologique, mais l'ensemble de la société industrielle. Ce qui explique des développements substantiels visant, par exemple, à défendre le vote oui sur le projet de constitution européenne en 2005… On appréciera davantage la critique des médias, souvent sans indulgence vis-à-vis des Verts, ou les réticences de la droite comme de la gauche à l'égard des revendications écologistes. A cet égard, les avancées concrètes obtenues par les Verts, toutes listées ici, sont indéniables, même si elles demeurent inférieures aux espérances.

Débutant son tableau dans les années 60, il le fait précéder d'une galerie de figures ayant marqué plus ou moins fortement le mouvement écologique, avec une certaine tendance à l'accumulation gratuite ; on retiendra néanmoins les noms d'Elisée Reclus, Jacques Duboin, Félix Guattari ou René Dumont. La période qui court de 1968 à 1974 est marquée, selon lui, par l'insertion des préoccupations écologiques dans les média (avec l'écho en particulier du Club de Rome), la création des premiers groupes (Survivre et vivre, Les Amis de la Terre vite pris en charge par Brice Lalonde), avec une figure majeure, celle de Pierre Fournier, fondateur de La gueule ouverte . La candidature de René Dumont à la présidentielle de 1974 ouvre une période où le mouvement écologiste se cherche. Si un Mouvement écologique (ME) est créé dès la fin de l'année, présidé par Antoine Waechter, et si les Amis de la Terre se transcendent fin 1977 en Réseau des Amis de la Terre (RAT), la tension entre construction d'un parti nationalement centralisé et la préférence donnée à un réseau plus capillaire est une des constantes de l'histoire des écologistes. Reflet de cette instabilité, le ME change d'ailleurs de nom en 1978, devenant la Coordination interrégionale des mouvements écologistes (CIME), puis le Mouvement d'écologie politique l'année suivante, tandis que le RAT se transforme en Confédération écologiste en 1982... Jusqu'à l'unification au sein des Verts en janvier 1984. Lalonde en reste toutefois à l'écart, et Frémion se montre d'ailleurs particulièrement critique à son égard : pragmatique opportuniste, ayant des tendances autoritaires, il est surtout accusé d'avoir été volontairement instrumentalisé par Mitterrand, en particulier par la création de Génération écologie en 1990. Chez les Verts, 1986 voit l'accession de Waechter à la direction sur une ligne refusant l'ancrage à gauche, ligne que Voynet abandonnera à partir de 1994 pour s'inscrire pleinement à gauche, au risque d'édulcorer un programme qui rebute les socialistes. C'est de cette période d'intégration au sein de la majorité plurielle que date, selon Frémion, une certaine bureaucratisation du parti . Mais globalement, Frémion porte sur les écologistes eux-mêmes un jugement nuancé, ainsi du ministère Voynet.

Un livre riche, aux informations foisonnantes (résultats aux élections, actions et désastres écologiques), mais d'où l'esprit de synthèse souffre parfois d'être un peu noyé, créant une certaine confusion ; tableaux ou organigrammes récapitulatifs en fin de volume auraient été bienvenus. La bibliographie est par contre particulièrement précieuse.

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Jean-Guillaume Lanuque, « Yves Fremion, Histoire de la révolution écologiste, Paris, Hoëbeke, 2007, 400 p. », Dissidences [En ligne], Juin 2012, Nos archives du mois : l'altermondialisme, publié le 27 mai 2012 et consulté le 20 avril 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=662

Auteur

Jean-Guillaume Lanuque

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