Patricia Latour, Le 36 des femmes, suivi de Bordier Roger, Le peuple de 36, Paris, Le Temps des cerises, 2006, 230 p.

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Féminisme, Historiographie

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Ce recueil est composé de deux textes de nature différente. Dans un premier temps, Patricia Latour présente la période du Front populaire sous l’angle des femmes. Le bilan de cette période apparaît assez mitigé de ce point de vue. Si effectivement trois femmes siègent dans le gouvernement Blum, comme secrétaire d’Etat d’ailleurs et non comme ministres, pour autant, le droit de vote n’est pas accordée aux femmes. Il faudra en effet, comme chacun le sait, attendre la Libération pour que ce soit le cas. Ce n’est pourtant pas faute d’initiatives parlementaires en ce sens. Depuis le début des années 20, pas moins de cinq votes au Parlement ont, à une large majorité, proposé le vote féminin. Mais à chaque fois, le Sénat, dominé par les radicaux, alliés parlementaires dans le cadre du Rassemblement populaire, a rejeté cette proposition. Les radicaux craignaient en effet que les femmes soient influencées par l’Eglise et votent donc clairement à droite. De mauvaises langues argumentent d’ailleurs que si les femmes avaient eu le droit de vote, le Front populaire n’aurait jamais gagné les élections. Pourtant, la période est marquée par le combat suffragiste, particulièrement virulent à certains égards. Mais comme le reconnaît l’auteure, « les socialistes comme les communistes qui tiennent à ne pas se couper des radicaux ont soigneusement évité le sujet qui fâche en ne l’inscrivant pas dans le programme du Front populaire » (p. 60). Bien que les femmes n’obtiennent pas ce droit, cela ne les a pas empêché de participer aux mouvements de grèves, ainsi qu’il est rappelé.

En un peu plus de soixante dix pages, Patricia Latour dresse donc un état de la question, loin de toute hagiographie et d’autosatisfaction. Son récit est ponctué de portraits de certaines de ces femmes qui ont été actives sur le terrain social et politique avant et au moment du Front populaire. Si l’on y retrouve celles qui ont siégé dans le gouvernement Blum, y figurent également des militantes syndicales, à l’instar de Martha Desrumeaux, la seule femme à avoir participé aux accords Matignon, mais aussi Simone Weil qui a droit à un émouvant portrait. Une série d’environ soixante-dix esquisses biographiques de femmes, dans une optique pluraliste (syndicalistes chrétiennes de la CFTC, militantes socialistes, communistes ou trotskystes, suffragettes, anarchistes), complète ces portraits. Ce bel effort de présentation aurait mérité quelques explications, car aucune indication n’est fournie sur la manière dont cette liste a été élaborée. On regrettera tout autant le fait que pratiquement aucune citation ne soit référencée, et que ce qui aurait pu constituer une synthèse de référence ne soit pas accompagnée d’éléments bibliographiques. La remarque vaut également pour les très nombreuses photographies qui illustrent le texte, et dont les sources, une fois encore, ne sont pas mentionnées.

Il revient dans un second temps à Roger Bordier, écrivain, auteur d’un J’étais enfant en 1936, chez le même éditeur, d’évoquer dans un second texte de nature littéraire le peuple du Front populaire. Très vivante et agréablement écrite, cette partie relève d’une chronique romanesque qui tranche avec la contribution de Patricia Latour.

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Georges Ubbiali, « Patricia Latour, Le 36 des femmes, suivi de Bordier Roger, Le peuple de 36, Paris, Le Temps des cerises, 2006, 230 p. », Dissidences [En ligne], Front populaire, publié le 06 décembre 2012 et consulté le 28 mars 2024. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/dissidences/index.php?id=528

Auteur

Georges Ubbiali

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